Une nouvelle amie
La tension monte entre Camille et Moi, ça me fait rire. Elle est jalouse, sans me connaître, sans savoir à quel point j'ai pu souffrir avant d'arriver là, ça m'énerve tellement, on dirait Aiden au début. Je n'ai qu'une envie c'est de la trucider, en faisant ça elle pourra entrevoir une infime partie de ce que j'ai vécu.
— Tu viens d'arriver et tu fais déjà la belle devant les gars et tu me regardes de haut ? crache la garce dans toute sa débilité.
— Et toi, tu essayes de me provoquer parce que celui qui te plaît me regarde et s'en fiche de toi ? Je te le laisse si tu veux ! rétorqué-je d'une voix plus forte que je voulais.
— C'est pas parce que tu t'es fait violer que tu peux parler, je suis sûre que t'as aimé ça, sale pute.
Aiden se retourne, Luna aussi, tandis que moi je commence à m'avancer vers elle, avec l'intention de l'assassiner.
Comme si tu pouvais comprendre...
Tu n'as rien vécu...
Tu n'as jamais souffert...
Rien ne s'est éveillé en toi...
Aiden qui semble avoir compris la situation, se rue sur moi et m'écarte de Camille qui lâche des jurons à tout va. Luna s'approche, elle va sans doute m'engueuler... Je la trouvais gentille, c'est dommage...
— Désolé Eileen... dit-elle, avant de s'avancer vers Camille.
Un bruit résonnant tellement que même Nathan qui était à l'intérieur est revenu pour voir ce qui se passe. Aiden me lâche tant il est surpris, moi-même, je ne dis rien, je m'attendais à tout sauf à ça.
— T'es allée trop loin Camille, tu t'es entendue ?! T'es qui pour dire ça ?! T'as vécu quoi ?!
Elle est aussi furieuse que moi, alors que ces propos m'étaient destinés, ils sont inhumains... Comment peut-on dire ça à une personne qui a subit ça ? Elle ne sait même pas si je me suis vraiment faite violer, bien que malheureusement... Luna m'a rendu un grand service en mettant une claque à cette garce, pourtant je ne peux pas m'empêcher de me sentir mal, ce ne sont que des mots... Pourquoi ça m'atteint autant ? Pourquoi j'ai encore envie de pleurer ?
Je pars à l'intérieur de la maison, je ne sais pas si on me suit, d'ailleurs, je m'en fiche... Je m'assois sur le canapé, les larmes coulent doucement, je ne suis pas triste, ce sont les souvenirs qui sont douloureux, comment j'aurais pu aimer ça...
Comment elle a pu me dire que j'aimais ça, elle croit que j'étais payée ? Que j'avais le choix ?
— Eileen ça va ? demande la voix de Luna, inquiète.
— Oui... C'est juste que...
— Laisse tomber, Nathan lui a dit de partir, elle est en train de prendre ses affaires, Seb l'accompagne, il reviendra peut-être tout à l'heure.
— Je gâche toujours tout... sangloté-je dans un élan de culpabilité.
— Non, c'est Camille qui a tout gâché pas toi, ok ?
— Mais moi c'est la première fois que je vous...
— Chut, chut, chut, pas d'excuses, tu arrêtes de pleurer et tu viens t'amuser tout de suite.
— Bon Eileen, arrête de chialer et viens te baigner avec moi ! s'exclame Aiden, surexcité.
— Je ne sais pas nager, je peux pas. dis-je en soupirant, bien que je me sente mieux.
— C'est pas grave, on va t'apprendre, au début de la piscine on a pied. Nathan va chercher une frite !
"Une frite" ? En quoi ça va m'aider ? Alors que Luna m'emmène dans la salle de bain pour qu'on se change, je râle. Je n'ai absolument pas envie d'essayer de nager, ça me fait trop peur. Je me suis jamais approchée d'un point d'eau de ma vie, je ne vois pas pourquoi maintenant il le faudrait. On est toutes les deux dans la salle de bain. Luna, complètement nue, choisit quel maillot de bain elle va prendre comme si de rien était. Je la regarde, l'air gêné, tandis qu'elle finit de se changer, moi j'ai trop peur c'est juste pas possible, au même moment je reçois un maillot de bain dans la figure.
— Mets ça, c'est un joli deux pièces, il t'ira à ravir ! s'écrie Luna, enthousiaste.
— Mais c'est quoi ça, c'est comme si je disais "regardez mon corps !". rétorqué-je en faisant une imitation des personnes qui font vraiment ça.
Luna se met alors à rire, ce qui me gêne encore plus.
— Allez Eileen, déshabille-toi, tu vas pas rater ton adolescence parce que tu as peur quand même ?
— Mais...
— Eileen ! Allez !
Je finis par m'exécuter à contrecœur, l'idée ne me plaît absolument pas. Pourtant, elle a raison, si à chaque fois qu'un truc me fait peur, je reste bloquée, je ne vais jamais avancer, je ne peux pas être comme je suis toute ma vie... Je finis donc par me mettre nue, c'est terriblement gênant... Quant à Luna, elle ne peut pas s'empêcher d'être insouciante et donc de m'observer.
— T'es sacrément fine ! Mais waw... T'es bien bénie toi !
Je ne sais pas si je suis rouge, en tout cas, je sens bien mes joues chauffer, elle ne peut pas s'empêcher d'être perturbante ? Elle finit par remarquer ce que je redoutais plus que tout.
— Tes cicatrices, elles viennent de l'orphelinat ?...
— Pas que... dis-je en fuyant le regard de Luna.
— Le mec qui t'a traumatisée ? insiste-t-elle, l'air sérieux.
— On peut parler d'autres choses ?
Je sens comme une boule au ventre, entre Camille qui me dit des horreurs et Luna qui me fait revivre des souvenirs, c'est compliqué... J'étais venue pour me détendre, finalement c'est encore pire qu'avant.
— Tu devrais te livrer complètement Eileen, ça se voit que ça te ronge de l'intérieur...
— Non je vais bien. Je suis habituée...
—Tu n'assumes rien, tu restes cloitrée dans la carapace que tu t'es faite, sinon tu n'aurais pas autant peur des gars, tu ne serais pas aussi mal à chaque fois qu'on t'en parle.
Je sens le monstre en moi monter, il veut se déchaîner et crier, j'essaye du mieux que je peux de garder mon calme...
— Mais tu sais toi ce que ça fait ? De vivre toute ta putain de vie dans un endroit qui te torture ? Dans un endroit où tu n'es rien ? Un endroit où tu as perdu des êtres chers à cause de monstres qui ont l'apparence d'un humain ? Et pour la plupart, des hommes ?
Elle baisse les yeux, elle ne sait pas ce qu'est la souffrance. L'intelligence ne fait pas tout, pour comprendre ma vision des choses, il faut embrasser la mort, s'arroser de la souffrance, s'enivrer de la peine, vivre la peur et la douleur...
— Non... Je ne sais pas... Mais...
— Non Luna, coupé-je, le regard tranchant. Tu ne sais pas ce que ça fait, quand je suis enfin partie de l'orphelinat, j'ai cru m'envoler, je pensais que mon Enfer était fini, mais je me suis écrasée, j'ai atterri encore plus bas que je ne l'étais déjà, j'ai eu encore plus peur, déjà que le désespoir avait faillit m'avoir, là j'étais terminée, je n'étais plus moi, je ne sais même pas qui je suis actuellement...
— Les filles ! crie Nathan. Vous vous touchez ou quoi ?!
— On arrive ! répond Luna sans grande conviction.
— Désolé, je voulais pas paraître froide... Ni te démoraliser...
— Même si tu le voulais tu n'y arriverais pas ! C'est vrai que je n'ai rien vécu par rapport à toi, je suis sûre que si tu partageais ta souffrance avec moi, je pourrais pas tenir deux secondes, mais même, il ne faut pas que tu utilises ça comme excuse pour t'enfoncer encore plus...
— C'est plus compliqué...
— C'est toi qui compliques ça Eileen... Tout est dans ta tête, même si t'as peur, il faut faire la part des choses.
En deux mois, c'est compliqué de vraiment faire la part des choses, je viens tout juste de naître, la vie d'avant n'en était pas une, juste un cauchemar sans fin dont je me suis échappée par chance... Mais après tout... Je peux faire des efforts, en suivant Luna je me sentirais peut-être déjà mieux.
— Ok, je veux bien aller me baigner avec toi... Je dis pas que tu as raison, mais je vais essayer de profiter au moins pour ce soir.
— Yes ! hurle Luna, pleine de joie de vivre.
Tu vois Lylia, je crois que j'ai trouvé un nouveau rayon de soleil, peut être qu'elle et Sarah saurons me remonter complètement le moral. Je sais que je veux changer, c'est ça qui me faisait défaut si j'ai bien compris Luna...
— D'ailleurs Eileen ? Tes cicatrices même si tu les détestes, elles sont trop belles, ça te fait un style !
Il n'y a qu'elle pour être si optimiste, même si au fond, je sais qu'elles ne sont pas moches. J'ai bien guéri, c'est juste qu'en acceptant ces cicatrices, j'accepte en même temps de garder en moi tous ces horribles souvenirs, ça me fait trop mal...
Je me rappelle les témoignages que je regardais à la télé avant d'être l'une de ces victimes. Toutes disaient qu'il fallait accepter la chose, vivre avec même si c'est douloureux, ça ne disparaitra jamais, ce sera à jamais encré en nous. La vraie force c'est de ne pas vaciller, de lutter tous les jours, à la ligne d'arrivée, on en sort toujours renforcé, je crois avoir trouvé mon objectif.
L'acceptation.
Grâce à ça, je pourrai sans doute vaincre ma phobie...
Naël attends-moi... Je viendrai bientôt à toi...
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