Les cicatrices du passé...
J'arrive à l'appartement vers quatorze heure, Naël m'accueille me fait signe de venir l'enlacer, comment pourrais-je ne pas tomber dans les bras d'Apollon ?
Apollon ? J'ai pourtant l'impression d'être dans ceux de Morphée... J'y suis si bien...
— Désolé pour ce matin.
— C'est du passé mon amour. je l'embrasse langoureusement, une mâtinée sans lui, c'est trop.
Après nous être retrouvé chaleureusement, la salle de bain devient ma nouvelle amante, le miroir mon nouvel ennemi, les cicatrices qu'il reflète, mes vieilles amies.
Je les regarde avec dégoût, les autres ont beau trouvé ça beau, mon esprit ne les acceptera jamais. Une silhouette apparaît à travers le miroir, elle m'enlace.
— Tu regardes encore tes cicatrices ?
Il embrasse mon cou, les souvenirs disparaissent, le passé aussi.
Juste lui, mon présent, mon futur.
— Oui...
— Pourquoi pas faire un tatouage par-dessus ? Tu pourras les cacher et rendre ça magnifique. Je te les paye, peu importe le prix qu'il faut mettre. Si ça te rend heureuse.
Je n'y avais jamais pensé, mes cicatrices les plus voyantes sont sur les épaules, le bras et le dos, elles me rappellent Julian, Mr Thomas, "l'Orphelinat". Mes souvenirs les plus sombres.
Les abîmes de mon esprit.
Mon Enfer psychologique.
Si je me fais des tatouages, je penserai à ce qu'ils représentent, je me dirais que si je les ai, c'est grâce à Naël. Oui... C'est une excellente idée.
— On peut y aller quand ? J'ai déjà mes idées.
Il paraît étonné.
— On peut y aller maintenant, je connais un tatoueur incroyable, mais t'es sûre ? Tu veux faire quoi.
— Sur les cicatrices au milieu de mon dos, une grande fleur de lotus, ça symbolise la renaissance, l'éloquence et la féminité.
— Ça te correspond bien. Et sur les autres ?
— Des motifs dentelles, elles iraient de mes épaules jusqu'à mes bras.
— En plus ton teint de peau métisse rendra les tatouages merveilleux.
— C'est une femme chez qui on va ?
Il peste de manière vulgaire.
— J'suis pas con Eileen. Bon aller, pour une fois je vais prendre la voiture, on prend toujours le bus alors que maintenant, j'ai le permis.
— Tant que tu ne nous écrases pas contre un mur.
— Bonjour l'optimisme.
C'est vrai qu'il a dix-huit ans maintenant, lui et Sarah n'ont absolument pas tenu à le fêter, eux qui aiment faire des soirées pourtant...
Je ne lui ai même pas encore fait de cadeau...
**
On se retrouve dans le salon que Naël m'a conseillé. Il est sobre, le sol en parquet stratifié se marie parfaitement à la couleur blanche des murs. Des tableaux contenant des tatouages ornent les murs, on se croirait dans une galerie d'art.
Les canapés en cuir gris nous invitent à nous asseoir, j'aperçois la tatoueuse avec une cliente sur son bureau. Environ trente minutes plus tard, la dame part, il ne reste que nous dans le salon.
La voix de la jeune demoiselle nous appelle.
— Bonjour jeunes gens que puis-je faire pour vous ?
On s'approche de sa table de travail, elle semble reconnaître Naël.
— Oh tu es le fils de Jeanne ! Comment va-t-elle ? Ça fait longtemps que je ne l'ai pas vue !
— Bonjour Céline. Elle va bien merci, il faudrait que tu passes chez eux dire bonjour. répond-il en souriant.
— Je l'appellerai de toute manière !
La prénommée Céline est fine, ses cheveux blonds plongent jusqu'à son bassin, son visage rayonnant éblouit tel le soleil. Ses bras sont recouverts d'arabesque illustrations.
Une personne magnifique en apparence
— Je voudrais me faire tatouer sur le dos, les épaules et le bras.
— As-tu une idée des motifs ?
— Oui, sur mon dos je voudrais une grande fleur de lotus et je voudrais des dentelles de mes épaules jusqu'à mes mains.
— Des idées intéressantes, j'aime beaucoup. Tu as un croquis ?
Je me sens fondre. On a pas du tout prit en compte le croquis.
— Euh... Non...
Naël sourit, mon air stressé l'amuse.
— D'accord, c'est pas grave, on va directement passer aux mesures ! D'accord ?
— Oui... Désolé du dérangement...
— Mais non voyons. sourit Céline, compatissante. Tu viens ?
On se dirige dans l'arrière-boutique, encore des tableaux de tatouages, une télé accrochée au mur et une table, sans doute là où je devrai m'asseoir.
— Allez ma belle on enlève son haut !
Je m'exécute, la gêne prenant peu à peu de la place dans la pièce. Mon pull et mon T-shirt sont par terre, il ne reste que mon soutien-gorge.
Mon passé est à la vue d'une inconnue, je sens son regard se poser sur moi.
— D'accord... Je comprends pourquoi tu veux te faire tatouer ici. Tes bras sont pareils je suppose ?
— Oui...
Elle observe mes plaies sans être étonnée de celles-ci, ça n'a pas l'air de la déranger plus que ça. Ensuite, elle prend les mesures de mes bras et de mon dos. On s'est mises d'accord sur l'emplacement exact de mes tatouages.
On retourne dans l'avant du salon, là où Naël nous attend, assit sur le canapé. Céline brise le silence.
— Lorsque tu viendras la prochaine fois, j'aimerais juste un mot de ton responsable légal ou alors qu'il vienne tout simplement.
— C'est Jeanne et George ses tuteurs, elle est dans le même cas que moi.
Elle parait surexcitée.
— Oh bah raison de plus pour faire des tatouages parfaits ! Crois-moi ma petite tu vas pas être déçue, je vais essayer de te réserver une place pour la semaine prochaine si tu te sens prête. Il m'en reste quelques-unes, j'ai pas de gros projets en ce moment.
— Avec plaisir.
On sort du salon, Naël me sonde de son regard doux.
— Alors ?
— Elle a l'air cool, j'ai hâte d'y retourner.
— Tu vois j'te l'avais dit.
Alors qu'on fait les courses tranquillement pour ce soir, j'envoie un message à Jeanne pour avoir son autorisation. Elle me répond directement, je le savais, qu'elle ne dirait pas non. Je le fais remarquer à Naël, aucune réaction, son regard sonde l'immensité du néant. Présent physiquement. Mort mentalement.
Puis son âme revient d'entre les morts, elle n'est plus prisonnière de ses sombres pensées. Il revit.
— Mon amour ? Ça va ? m'inquiété-je en le regardant avec appréhension.
— Désolé... Je réfléchissais. répond-il, le visage anxieux.
Sa nervosité est visible à des kilomètres, même lors de notre dispute il n'était pas comme ça. S'est-il passé quelque chose lorsque que je n'étais pas là ? La boule au ventre revient, comme un boomerang, sauf qu'il me fracasse le crâne.
— Il y a un truc que tu dois me dire ? Je serai prête à t'écouter.
Il soupire, il le fait beaucoup ces temps-ci, j'ai peur que mon homme dépérisse. Je lui ferai un massage une fois à la maison.
— Pierre est passé me voir ce matin.
Je déglutis, ça ne présage rien de bon.
— Il t'a dit quoi ?
— J'ai été promu, j'ai peur de ce que je vais devoir faire Eileen... Si je fais rien, Pierre s'en prendra à toi. C'est sûr.
— Peu importe ce que tu fais. Tant que tu restes Naël. Il faut que tu tiennes, on trouvera bien une issue.
— Ouais...
La vie continue de jouer avec nous, de nous flageller comme elle avait l'habitude de le faire par le passé. Une force divine est au-dessus de nous, nos vies sont entre ses mains.
Sois clémente... Je t'en supplie...
**
Alors qu'on rentre dans l'appartement avec Eileen, j'envoie directement un message sur le groupe Snapchat où se trouvent Tanguy, Fred et Maxence. Ils devraient arriver d'ici à vingt heures.
Heureusement que j'ai une cuistot à la maison, elle a l'air motivée à faire son poulet rôti, personnellement, j'ai faim d'autre chose.
J'attendrai qu'elle en ait envie, comme à chaque fois. Ne pas la brusquer, ne pas la forcer.
Ne pas être comme lui.
Je me vêtis d'une chemise blanche et d'un pantalon noir, il faut que je sois à l'égal de la fille mirifique qui habite sous mon toit.
Ne jamais la décevoir. Toujours la combler.
Se créer toute sortes de règles pour être sûr d'être parfait, pour être sûr de ne pas la faire fuir. Même si au fond de moi, je sais qu'elle ne partira jamais.
J'espère que ce n'est pas une putain de désillusion. J'ai déjà l'impression d'être dans un rêve, c'est si irréaliste d'être avec elle.
L'odeur du poulet navigue dans l'air, je redescends, prends mon paquet de clopes. S'empoisonner, pour se faire pardonner de ne faire que de la merde. S'intoxiquer pour se tuer lentement, dans la douleur.
Ma clope se consume alors que je regarde Eileen cuisiner. Ce visage concentré à faire une chose qui lui plaît. C'est une bouffée d'air frais, un antidote, la rédemption.
Putain de merde, c'est pas une meuf que j'ai.
C'est un putain de médicament à toute épreuve, elle soigne tous les maux. Une fois ma clope finit, je m'assois et allume la télé. Je continue une série que je regarde quand j'ai rien à faire.
Quelques instants plus tard une autre odeur que celle du plat me parvient au nez.
Un parfum sensuel. Le sien.
Cette odeur qui ferait bander n'importe quel homme, mêlée à ses mains qui se baladent sur ma chemise, qui la déboutonnent, je me retrouve déshabillé à mon insu et putain que ça m'excite !
Elle me masse les épaules, je me détends petit à petit. Cette fille n'est même plus un ange, c'est un médium, elle sait exactement ce qu'il faut faire, quand il faut le faire.
Si je suis l'allégorie de la beauté à ses yeux, aux miens elle est celle de la perfection. Puis vient la gâterie qui apaiserait tout homme sur Terre.
Après le calme, vient la sauvagerie. C'est elle qui a voulu, pas moi.
Je remplis la part du contrat.
Le contrat que j'ai conclu avec moi-même, il stipule que je dois toujours la faire passer avant moi, comme elle le fait à mon égard.
Ne surtout pas la laisser sombrer corps et âme à cause de ma personne. Une autre clause que je feindrais pas d'ignorer. Le droit ça me connaît. J'suis pas du bon côté pourtant.
Meurtres, complicités de meurtres, trafics de drogue, organisation criminelle, hébergement illégal et j'en passe.
Heureusement que je suis pas encore fiché. Sinon j'en aurais pour perpète.
On serait deux à mourir.
La sonnerie de l'appartement retentit.
La soirée va commencer.
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