Fissure familiale...

Cris, pleurs, insultes, violences, colère, déception, tristesse, honte. Les ingrédients parfaits, la recette satanique.

En apprenant ce qu'Aiden a fait Jeanne s'est effondrée sur moi, a demandé pardon, encore et encore. Après avoir juré le champ lexical du mot "Connard" durant cinq minutes, George s'absente, revient cinq minutes plus tard en trainant le cuisinier de ce plat infâme. 

Un cuisinier défiguré, la lèvre enflée, un mélange de couleurs sur son œil gonflé, des bleus sur la joue.

— C'est pour ça que tu es rentré vite ? Sale petite merde ! peste George, le regard noir. 

Sarah caresse le cou de Jeanne, elle la rassure, je tente aussi de la calmer. Aiden baisse les yeux, ne répond pas, il ne pensait pas qu'on raconterait tout. 

Tu te seras raté sur toute la ligne.

— Et pourquoi ta tête est comme ça ? T'as un autre truc à dire ?

— Non ça c'est moi. avoue Naël, la tête droite. Quand j'ai appris ce qu'il a fait j'ai pété un plomb.

— Pourquoi t'as fait ça Aiden ?! rugit son père.

Jeanne regarde son fils, la honte se lit sur son visage, sa haine aussi. George reprend de plus belle.

— Une femme c'est un joyaux, si nous sommes des créatures immondes, elles sont la plus belle création. Elles méritent qu'on soit là pour elles, pas qu'on les humilie, qu'on les souille. Sans elles, on est rien ! Tu comprends ça ?! Sans soleil, il n'y a pas d'ombres, sans femmes, il n'y a pas d'hommes, alors comment tu as pu te croire supérieur ? Comment as-tu eu l'arrogance d'être meilleur et d'avoir fait ça ? J'ai honte d'avoir fait une chose comme toi, un homme qui ne respecte pas une femme n'est pas mieux qu'un chevalier trahissant son roi.

Je ne savais pas que George était si poétique, je vois de qui Naël tient...

— Je... Je voulais sortir avec elle. balbutie-t-il, le visage assombri.

— En me droguant ? C'est comme ça que tu fais avec toutes les filles ?

— C'était pas mon but d'aller si loin putain... Tu m'as...

Mon cerveau entre en ébullition, après avoir cuisiné une rupture familiale, il devient musicien pour jouer de la flûte, une nouvelle fois. Je vais surement pas me laisser faire.

— T'es sortie avec Luna pour que je baisse ma garde ! Tu m'as fait croire que tu regrettais tes actes !  T'es un mensonge à part entière !

La tension continue de monter, Naël tremble de colère, un mot de plus et c'est le drame. 

— Je suis désolée, Jeanne, George... Je vous apporte que des soucis...

— Non ma puce... répond celui que je considère comme un père de substitution. Rien n'est ta faute.

Il regarde Aiden d'un œil accusateur.

— Va dans ta chambre, crois-moi tu vas plus rien avoir pendant des mois ! ordonne George, la voix menaçante.

Sans aucun mot, ni défense, il va dans sa chambre, sa nouvelle prison. On s'assoit autour de la table, il est temps d'annoncer notre décision.

— J'ai proposé à Eileen de venir à mon appart avec moi, elle avait peur de revenir à cause d'Aiden. On en a parlé hier.

Le visage de Jeanne se décompose une nouvelle fois. Mon cœur aussi.

— Et tu as répondu quoi ? tente-t-elle, un infime espoir dans les yeux.

— J'ai dit oui... Je me sentirais trop mal à l'aise en vivant avec lui, même si vous l'enfermez pendant la nuit...

— Mais... dit George avant de se taire, faute d'arguments.

— Je viendrai vous voir souvent... Je vous le promets...

— Pourquoi chez Naël ?  questionne George, dans l'incompréhension. Tu peux pas aller chez Sarah ?

On se regarde de nouveau avec Naël, avant de sourire bêtement.

— Vous... Vous sortez ensemble ? demande Sarah, le sourire aux lèvres.

— Euh... disons Naël et moi, en chœur. Oui ?

Troisième croisement d'yeux, on se met d'accord.

— Oui, depuis hier.

Sarah me saute dessus, au moins une bonne nouvelle doit-elle penser. Jeanne et George n'ont pas l'air réticents, ils devaient s'en douter.

— Entre frère et sœur adoptif ? se moque George, fier de lui.

J'avais jamais pensé à ça ! 

— Arrête enfin... dit Jeanne, indignée. Ils ne se connaissent pas depuis qu'ils sont petits et ils ont pas le même sang...

L'ambiance s'est enfin détendue, nous avons leur accord, mon stress peut enfin redescendre...

**

Je marche avec Sarah, avoir un petit moment d'apaisement entre nous, je dis jamais non. Elle est d'excellente humeur, sans doute car je suis enfin avec Naël.

— Vous l'avez fait ? dit-elle, sans aucune gêne.

Pourquoi tout le monde pose cette question ? C'est bizarre !

— Allez Eileen dis ! Je veux tout savoir, le contexte, l'heure, la seconde, comment c'était ?

C'est bien parce que c'est toi...

— C'était inédit.

— Comment ça ?

— Bah en fait, j'ai couché avec Naël quand j'étais défoncée, juste après le truc avec Aiden...

Sarah émet une exclamation en mettant la main devant sa bouche.

— Tu regrettes pas au moins ? s'inquiète-t-elle.

— Non j'étais consciente mais... Je contrôlais pas vraiment ce que je ressentais, la drogue m'a poussé à faire ce qui me faisait peur.

— Je vois...

— Ça m'a fait bizarre... Quand on l'a fait, j'ai pas eu l'image de Julian alors qu'il m'a hanté pratiquement toutes les nuits pendant deux mois et demi.

— Heureusement ! Un traumatisme, ça doit se surmonter, si t'y arrives pas, tu finis par te ronger et mourir à petit feu.

— Je le surmonte du coup ?

— Tu es dans un milieu totalement différent maintenant, tu fais la part des choses. Même si tu es mal à l'aise de revenir chez nous à cause d'Aiden, tu repousses pas Naël pour autant. Pareil pour George.

— Je crois que j'ai compris où tu veux en venir. T'es vraiment la meilleure Sarah.

— Allez viens là ma biche.

Qu'est-ce que c'est bon de m'abriter dans ses bras, j'aime tellement me coller à elle, son odeur, sa douceur, la grande sœur idéale, la destination de rêve. La lueur de soleil dans une journée de pluie. Elle est mon phare dans cet océan de malheur. Sans ma boussole, je me retrouverais dans le froid glacial de l'Antarctique, seule, comme avant. Elle navigue dans mon cœur, me permet de trouver la bonne voie. 

Merci d'être mon ange gardienne.

— Tu trouves pas que je suis une pute Sarah ?

Elle me libère soudainement de son étreinte, je l'ai vexée ?

— Pourquoi tu dis ça ? 

Elle a plus l'air étonné que vexé.

— Bah je me dis... Il y a trois mois je me faisais encore violer tous les jours... Le fait qu'hier j'ai couché avec Naël, c'est bizarre non ?

Sarah s'esclaffe.

— Mais Eileen, généralement on ne couche pas qu'avec une personne ! Puis si tu t'es sentie prête c'est comme ça et tu l'aimes ! Pourquoi tu serais une pute ?

— Ah je croyais...

— Tu te poses trop de questions, après je te comprends, j'ai vécu ça aussi. Mais j'ai baisé plus d'un mec et pourtant j'ai été bien dégoutée au début, comme toi.

— Oui t'as raison. J'avais peur que Naël me voit comme une fille facile. Et que moi aussi je me mette à penser ça.

— T'es tout sauf une fille facile ma chérie.

**

Cette conversation avec Sarah m'a fait beaucoup de bien. J'ai pu réfléchir à ce que j'ai fait, prendre du recul, mon cœur est apaisé. Le bus n'est pas trop bondé, je finis peu à peu par m'endormir sur les épaules de Naël.

— Lee !

— Quoi...

— On est arrivé ! s'écrie Naël, pressé.

Je sursaute, me lève en sursaut, avant de sortir du bus avec deux gros sacs à la main, Naël en prend un pour me soulager.

Beaux-Arts, quartier de Montpellier est toujours aussi animé, en plein milieu d'après midi, les bars sont bondés. Heureusement, il est trop tard pour le marché, on aurait dû se faufiler, ça nous aurait fait perdre du temps.

Cet endroit a une ambiance très chaleureuse, l'air agréable. Les arbres et la taille des immeubles nous protègent des rayons du Soleil. Les gens en profitent pour faire de petites balades à vélo, sans gêner les piétons.

Non loin d'un bar, La bâtisse où habite Naël. On prend les escaliers, quatre étages, le poids du sac se fait vite ressentir. Une belle porte en bois contemporain nous fait face, l'entrée de notre appartement. Elle donne lieu à un grand espace, au moins cinquante mètres carrés. Plus que correct pour un futur étudiant. 

Le caractère industriel de notre lieu de vie me charme toujours autant, les fenêtres donnent directement sur les bars et les commerces d'en bas. Je me dirige en direction des escaliers en bois, le mur en briques. Magnifique et différent du reste de l'appartement, en béton blanc.

À l'étage, se trouve notre chambre, un lit deux places, un grand placard où je vais pouvoir mettre tous mes habits, deux portes qui mènent aux toilettes et dans la salle de bain. Le Paradis.

— Tout est à toi maintenant... chuchote Naël, embrassant mon cou tandis que je ferme mes yeux.

— On peut prendre un chat ?

Il n'a pas l'air partant pour cette idée, il dépose mon sac sur le lit.

— Même si je me fais de l'argent sale, j'ai la flemme de dépenser pour un chat. 

Je fais mine de bouder en le fixant du regard. Il soupire.

— Tu veux vraiment un chat ?

— Non, c'était pour voir si tu céderais, t'es trop mignon. me moqué-je, joyeuse.

En trente minutes, mes affaires ont été parfaitement rangées. Je remplie soixante dix pourcents, du placard à fringues, il est trop minimaliste alors qu'il est plus riche que moi.

— Naël ? T'es où ?

Pas un bruit, qu'est-ce qu'il fait ? Je le rappelle encore une fois, aucune réponse. Je descends, il n'est pas dans la cuisine, même derrière le bar il n'y a rien. Je remonte, sa silhouette en caleçon est allongée sur le lit. Mon cœur a faillit partir, maintenant il fond.

— Je suis là ma jolie.

Ma vie, à partir de maintenant, va connaître des instants torrides...

Comment pourrais-je faire des cauchemars en ayant mon rêve à mes côtés ?


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