Apéro !
— Naël !!! sangloté-je.
Plusieurs personnes l'accompagnent, je dirais qu'ils sont quatre ou cinq. Mes agresseurs regardent avec stupeur Naël et les autres se ruer vers eux.
Sans aucune sommation, ils se font taper dessus, ce n'est pas une bagarre. Un massacre serait le bon terme pour décrire ce que je vois. Mes assaillants sont à terre, Naël se déchaine sur l'un des leurs avant de se rendre à mes côtés. Je pleure toutes les larmes de mon corps dans ses bras. La peur, la colère, la tristesse, la honte, tout se déverse dans le flot qui coule de mes yeux.
— J'ai cru... m'étouffé-je en pleurant.
— Ça va aller... Ils te feront aucun mal...
— T'étais où...
— J'ai prévenu les gars par message, je partais les retrouver, j'ai fini par entendre tes cris en revenant, je suis désolé... Je pensais pas qu'ils étaient si proches... Putain ton cou...
— C'est qu'une égratinure...
Je ne sais plus quoi dire, les mots ne sortent plus. Naël me relève, ses amis me saluent, je les sonde de haut en bas, l'air de bienveillance qu'ils dégagent me rassure.
— Le blond a la queue de cheval, c'est Maxence, j'ten ai parlé tout à l'heure et le dopé des muscles, c'est Tanguy.
— Salut.
— Enchanté.
— Merci de m'avoir aidé... dis-je timidement, m'accrochant toujours à Naël.
Pourquoi ne me présente-t-il pas les deux autres ? C'est bizarre, ils me font vaguement un signe de tête avant de s'éclipser en douce. Naël les remarque, son indifférence m'intrigue, sans doute que je me pose trop de questions...
— Bon, vous voulez venir chez moi ? propose le prénommé Tanguy, se dirigeant en dehors de la rue.
— Chez lui ?... chuchoté-je à Naël.
— Il habite dans un appart pas loin, c'est pour ça que je l'ai appelé. répond Naël, enthousiaste.
— Mais... commencé-je à rétorquer.
— Tu pourras te changer et te laver, j'ai quelques affaires de mon ex. ajoute Tanguy.
— On pourra boire un coup j'espère, se lamente Maxence, faut que je décompresse après avoir vu ces fils de pute.
— Ouais t'inquiète, j'ai ce qu'il faut pour l'aprem et la soirée.
Dans quoi je me fais embarquer là ?
— Lee, t'es avec moi et eux ce sont mes potes, t'en fais pas. me rassure Naël, voyant mon air craintif.
— Je les connais même pas... contredis-je, le regard accusateur.
— Tu préfères ça ou rester enfermée à vie ?
— Naël, m'énerve pas maintenant s'il te plait...
— C'est pas pour t'énerver ! se défend-il, paniqué.
— En vrai, j'la comprends Naël. dis Tanguy, le ton calme. Si elle veut rentrer chez vous ça me dérange pas, c'est juste dommage.
— Bon d'accord j'en suis Naël, t'as raison je m'en fais trop.
— Yes ! s'exclame-t-il dans un élan de joie.
Lee t'es trop conne putain.
Je ne sais pas ce que ça va donner mais au moins je pourrai me doucher et me changer. Naël sera là, je ne devrais pas craindre grand-chose malgré ce qui est arrivé. Plus de peur que de mal...
Pour une fois...
En tout cas ses amis ont l'air cool. Tanguy, un peu plus vieux et posé, son attitude et sa longue barbe bien taillée noire me font penser que c'est lui l'ainé, surtout que pas beaucoup de jeunes taperaient des gens en chemise... Je commence à comprendre le style vestimentaire des garçons, mais les joggings... Heureusement que Naël et ses amis ne portent pas ça, c'est tellement moche !
On marche en direction de la gare, son appart n'est pas loin de celle-ci. Toujours collée à Naël, je constate le bas de ma robe en lambeaux, ils l'ont achetée pour moi...
— T'inquiète, je t'en achèterai une nouvelle. affirme Naël d'un clin d'œil
— C'est pas ça... Tu me prends pour qui idiot. dis-je en lui tapotant la tête.
— Je sais, c'est de ma faute si elle est déchirée, avoue-t-il le regard fuyant, j'aurais pas dû te laisser partir seule...
— Laisse tomber, mais c'étaient qui eux ? Dis-le moi franchement...
— C'est...
— Ce sont des bouffons de notre lycée. affirme Maxence, voyant que Naël hésite.
— Et pourquoi ils ont voulu faire ça ? ajouté-je, sceptique.
— Parce que j'ai défoncé un de ces blaireaux qui a touché l'une de mes potes. rajoute Naël, le ton désinvolte.
L'une de ses potes...
— Ok...
J'ai du mal à y croire, peut être qu'il me ment, j'arrive pas à savoir, ça m'énerve, c'est pas lui qui a failli se faire toucher par ces gros porcs...
Au bout de quelques minutes plus détendues on arrive devant un immeuble neuf. Tanguy sort une sorte de badge, s'en sert pour ouvrir le portail puis pour la porte, on entre à l'intérieur. La propreté du bâtiment m'étonne. Faut dire que le seul immeuble dans lequel j'ai vécu n'était pas un exemple d'hygiène. Au bout du couloir se trouve un truc que j'ai vu que dans les films, un ascenseur.
On rentre dans celui-ci, les garçons sont bruyants dans leurs conversations. Naël continue de m'observer, je sens son regard sur moi, je l'évite. Je me sens sale et épuisée, j'ai pas envie d'une autre dispute avec lui. L'ascenseur monte, je ressens une sensation bizarre. Je suis la seule à devoir me tenir à la barre en métal, j'ai un peu honte, personne n'a rien vu c'est le principal.
On arrive au 15ᵉ et dernier étage, Tanguy ouvre la première porte après l'ascenseur. Tout est bien rangé, on pourrait croire que c'est un maniaque. J'aime beaucoup la peinture des murs, mi-rouge, mi-blanc, c'est magnifique. Ses décorations m'émerveillent tout autant, il nous fait signe de nous poser sur les canapés.
— Tu veux te changer j'imagine ? me demande gentiment Tanguy.
— Oui merci, c'est sympa. je ne montre pas mon appréhension.
C'est un ami... Pas un ennemi...
—T'inquiète Tanguy, je vais lui montrer. affirme Naël, ayant compris mon ressenti.
— Comme tu veux. répond-il, le regard curieux.
Il m'emmène dans la salle de bain. On se retrouve tous les deux en tête à tête, je continue de faire mine de l'ignorer.
— Eileen... dis Naël, préoccupé. Tu vas pas rester comme ça toute la soirée quand même...
— Comment ça "comme ça" ? m'indigné-je.
— Je vois bien que t'es énervée, j'suis pas con.
— Mais non je suis pas énervée, j'ai besoin de temps.
— Ok... Si tu as besoin je suis là, tu le sais j'espère.
— Bien sûr que je le sais.
Tu me mens... Tu veux pas me dire ce que tu fais et pourquoi j'ai faillit subir le pire...
Tanguy ramène les habits de son ex, je les prends et m'enferme dans la salle de bain. Il faut maintenant choisir ce que je vais mettre pour la fin de l'après midi et de la soirée.
— C'est quoi ça... murmuré-je, l'air dépité.
Quel genre de filles côtoient les gars, c'est à la limite de l'indécence... Il n'y a que des décolletés, j'espère qu'ils ne seront pas trop prononcés...
Je rentre dans la douche, j'allume l'eau, un sentiment de libération m'envahit.
Alors que l'eau coule, je déverse tout ce que je n'ai pas pu montrer devant Naël et les autres. Je me pose mille et une questions, je doute tellement. Je veux lui faire confiance, je veux me dire qu'il contrôle la situation, qu'il ne va rien m'arriver, mais...
Ce serait te mentir Lee...
Après ce moment de faiblesse de ma part, je sors, me sèche avant de regarder méticuleusement quelle tenue pourrait m'aller.
Je les prends une par une. Elles sont jolies mais ça me gênerait trop de porter ça devant des gens que je ne connais pas. Je ne suis même pas sûre que je m'habillerai comme ces filles devant Naël.
— Oh... murmuré-je, les yeux scintillants. Ça c'est beau mais...
— Eileen ? Tout va bien ? demande la voix de Naël.
— Oui ! J'arrive dans cinq minutes ! dis-je, la précipitation se trahissant dans ma voix.
— Bon... La robe...
J'ai enfin de quoi m'habiller, je me regarde dans le miroir, c'est vachement court et léger...
J'aime beaucoup les robes cache-cœur, léger, fin. Seul le décolleté trop plongeant me dérange. J'ai pas envie qu'on me juge alors que je ne m'habille pas comme ça d'habitude...
Je finis par sortir de la salle de bain. En traversant la chambre de Tanguy je me rends compte que la porte est entrouverte. Je m'approche lentement pour savoir de quoi ils parlent.
— J'vais les tuer ces connards. affirme Naël le ton glacial.
— T'inquiète mec, rassure Tanguy en posant sa main sur son épaule, on va vite s'occuper d'eux. Ça fait un moment qu'ils nous gênent, j'en parlerai à Tahir et à Pierre quand il reviendra.
C'est qui eux ?
— Non je veux m'en occuper moi-même, là c'est pas pareil.
— Pourquoi ? demande Maxence dont la voix trahit son anxiété.
— Parce qu'ils ont voulu toucher à Lee et ça ces fils de pute vont le payer.
— Mais... défend Maxence.
— Ferme la putain ! coupe Naël, furieux. Tu connais rien de Lee, elle a vécu que de la merde et par ma faute ça a failli recommencer.
— T'es chiant... répond son ami ayant abandonné le débat.
— D'ailleurs. dit Tanguy, le ton curieux. tu nous parles souvent de la fille mais tu nous as pas dit d'où elle vient.
— C'est compliqué... On va dire que je l'ai sauvée et que depuis elle habite chez moi.
— Oooooh ! Quel jaguar !! se marre Maxence en applaudissant.
J'allais rentrer quand...
— Eileen est pas comme toutes les autres, elle est honnête, très prudente, méfiante, elle a connu ce que peu d'entre nous ont connu.
— Et c'est quoi champion ? se moque Maxence alors que j'ai les larmes aux yeux.
— Tu t'es déjà fait torturer Max ? riposte Naël, la voix menaçante.
— Non. Pas que je sache.
— Alors parle pas sans savoir, t'as pas vu les cicatrices qu'elle a sur son dos, tu l'entends pas cauchemarder parce que des fils de pute l'ont détruite. Ça me rend fou. Elle est d'une gentillesse inégalable, elle est respectueuse, compatissante. Parce qu'elle sait ce que ça fait d'avoir mal, de souffrir... Donc la prochaine fois que tu déconnes sur elle, je te jure que je vais pas te rater.
Sans m'en rendre compte, je me suis mise à sangloter. Je pensais avoir tout vidé dans la douche, les mots de Naël à mon égard sont si touchants. Je ne m'étais jamais dit qu'il m'appréciait comme ça. Pour moi, je ne suis que le boulet de service, une conne qui ne sait rien faire, qui a toujours besoin des autres...
— Eileen ? dit Naël, ouvrant la porte de la chambre à Tanguy et ne manquant pas de me faire tomber.
— Désolé... sangloté-je. J'allais venir quand j'ai entendu ce que tu disais...
— Merde... Excuse, j'ai balancé des trucs sur toi sans demander...
— J'croyais que j'étais qu'un boulet moi...
— T'es pas bien, répond-il en se penchant pour m'enlacer. J'ai jamais pensé ça de toi et si ça arrive que j'aille crever.
Les bras de Naël, en un peu plus d'un mois ils ont déjà été là pour moi plus d'une fois...
J'espère que ce sera le cas pour l'éternité...
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top