Chapitre 3 | 1

Musique proposée : A Storm Is Coming - Tommee Profitt ft Liv Ash. (En média).



― Tu vas m'écouter attentivement, Gueule d'Ange. Quand je parle, tu la fermes, jusqu'à ce que je te donne l'autorisation d'émettre un son. C'est clair ? me demande Ian d'un ton posé, malgré la vitesse à laquelle il avance.

Je hoche la tête en tentant tant bien que mal de suivre la cadence effrénée de mon nouveau supérieur. Nous longeons les longs couloirs du bâtiment qui, au premier abord, s'apparente à n'importe quel building administratif. Peter et le garçon à capuche qui trottinent presque derrière nous, peinent à suivre, alors que Gale, lui, marche nonchalamment, quelques mètres plus loin. Je ne sais pas s'il sait ce qu'il se passe, mais c'est le seul qui semble totalement détendu à l'idée de perdre la trace de Ian.

Le blond m'entraîne dans l'ascenseur à la hâte et les portes de la cabine se referment derrière nous, coupant l'herbe sous le pied à Peter et son acolyte qui se voient obligés de prendre les escaliers, suivis de loin par Gale. Désormais en face-à-face avec Ian, je peux observer une lueur sinistre allumer son regard, pendant qu'il appuie sur un bouton rouge. Un bruit sourd me fait sursauter, tandis que notre descente se stoppe brusquement.

― J'avais besoin d'un peu d'intimité, tu ne m'en veux pas, j'espère, annonce Ian, un sourire narquois peint sur les lèvres.

Je secoue la tête imperceptiblement, presque sans m'en rendre compte, alors que je sens une angoisse consumer ma cage thoracique. Je me sens pris au piège, emprisonné. Je n'ai aucun moyen de sortir, aucun moyen de fuir, aucun moyen de lui échapper. Si jamais il s'en prend à moi, je ne suis même pas sûr d'être capable de me défendre tellement la peur me tétanise. Il fait un pas vers moi et je recule par instinct. Tant et si bien que je heurte doucement la paroi de ma cage en ferraille.

― Pourquoi tu te méfies, comme ça ? Je ne vais pas te tuer maintenant, enfin. Tu m'es bien trop utile, ricane-t-il avant de renchérir. Alors, t'a-t-on bien traité, pour ta première arrivée ?

Je déglutis en portant automatiquement ma main à mon bras. En une fraction de seconde, je me retrouve dans l'Audi, une douleur lancinante traversant mes muscles et la sensation insupportable d'étouffer un peu plus à chaque instant.

― Je... je me racle la gorge en clignant plusieurs fois des yeux pour me ressaisir et sortir de cette voiture. J'imagine que ça aurait pu être pire, je finis par dire, après de longues secondes d'hésitation.

Le blond fronce les sourcils avant de fixer le bras, que je n'ai toujours pas lâché, avec insistance. Bloqué contre le miroir de l'ascenseur, je ne peux plus fuir lorsque je le vois s'approcher de moi. Sûr de lui, il attrape mon poignet sans me demander mon avis et remonte la manche de ma chemise brutalement, ce qui m'arrache une grimace de douleur.

― Est-ce qu'ils t'ont frappé ? demande-t-il, visiblement contrarié.

― Non, non. Pas du tout, je réponds, sur la défensive, alors que Ian m'observe avec perplexité.

Je ne peux pas me permettre de parler de la façon dont j'ai été traité aujourd'hui. Même si j'aimerais pouvoir gagner la confiance de Ian, je doute que me mettre Peter à dos soit une bonne stratégie si je veux rester en vie.

― Je... j'avale péniblement la boule d'angoisse qui sévit dans ma gorge en me maudissant de ne pas être capable de formuler une phrase complète sans bégayer. C'est de ma faute, je l'ai provoqué. Je l'ai frappé au visage, alors il s'est défendu. Rien d'autre, annoncé-je d'une seule traite.

Le visage de mon interlocuteur s'éclaircit et un éclat de rire bruyant explose dans le petit espace oppressant dans lequel nous sommes confinés depuis bien trop longtemps à mon goût.

― Et bien, j'avais sous-estimé ton cran, Gueule d'Ange. Tu m'impressionnes ! s'exclame-t-il, hilare, alors que je le dévisage. Bon, passons aux choses sérieuses : on va descendre à la Réserve pour que les équipes te voient et je vais te coller un coéquipier. Les trucs importants te seront expliqués à ce moment-là. Mais en gros, ce que tu dois comprendre, c'est que tu vas partir en mission avec ton nouveau meilleur copain. Et si jamais une mission foire à cause de toi, si jamais tu joues aux abonnés absents ou si jamais t'essaies de te croire plus intelligent que moi, sache que ce n'est pas à toi que je m'en prendrais.

Le visage de Ian est si proche du mien que je peux ressentir la menace qui dégouline de ses lèvres souffler sur ma peau tremblante. Ma respiration s'arrête quand une image de Savannah entre les mains de ce criminel m'apparaît, me donnant envie de lui cracher à la figure tout le dégoût que j'éprouve à son encontre.

― Si tu es un gentil garçon bien obéissant, tout se passera bien entre toi et moi. Tu pourras même gagner un peu d'argent si tes services sont à la hauteur de mes attentes. Mais, à la seconde où tu tentes quelque chose de stupide, c'est ta frangine qui trinque. Est-ce que je me fais bien comprendre ? ajoute-t-il d'un air à la fois infantilisant et agressif.

Ma tête tourne, mes mains sont moites, des dizaines de sueurs froides parcourent mon corps sans pitié et mes membres sont secoués de spasmes que je ne suis plus en mesure de gérer. Si je fais un seul pas de travers ou que je trébuche, c'est ma sœur qui tombe. Chacun de mes gestes peut l'aider à entamer une nouvelle vie... ou la condamner à mort. Je pensais être l'antidote qui la sauverait, mais je suis peut-être devenu le poison le plus dangereux qui pourrait envahir ses veines.

― Je ne ferais jamais rien qui pourrait la mettre en danger... murmuré-je sans être sûr d'être entendu.

― Bien. Je vois qu'on se comprend, répond-il en sortant enfin de mon espace vital.

Il appuie de nouveau sur le bouton rouge et nous reprenons notre route vers un destin incertain, dans un silence rassurant.

***

Ressemblant plus à un gigantesque hangar désaffecté, l'immensité du sous-sol de l'immeuble dans lequel j'ai l'impression de perdre pieds me donne le vertige.

― En piste, Gueule d'Ange ! me lance Gale en m'incitant à monter sur la petite estrade qui fait face à une centaine de visages curieux.

Ian m'y attend déjà, planté devant une foule silencieuse et certainement pendue à ses lèvres.

― Chers collègues, chers camarades. Comme vous le savez déjà tous, deux de nos équipes ont été interpellées. Cinq de nos hommes nous ont été arrachés. Il nous faut donc du sang frais. De nouvelles têtes, de nouveau cerveaux. C'est pour cette raison que je viens vous présenter notre nouvel apprenti...

Il se tourne vers moi, tend la main dans ma direction et arbore un rictus moqueur lorsque mes yeux s'écarquillent. Mes prunelles font des allers-retours frénétiques entre ses doigts et la multitude de personnes qui me dévisage. Je ne sais plus où me mettre, je ne sais plus ce que je dois faire, je ne sais plus à quoi je peux m'accrocher et Ian jubile.

― Bah alors, viens là. Ne sois pas timide, Gueule d'Ange, ajoute-t-il, goguenard.

Je fais quelques pas vers lui, peu confiant. Son discours résonne toujours à côté de moi, quand mes iris finissent par se concentrer sur les environs. Lorsque mon regard s'abat sur les figures qui se dessinent en contrebas, l'univers tout entier cesse de fonctionner. Les mots de Ian ne virevoltent plus jusqu'à mes tympans, la peur ne pulse plus dans mes veines, l'atmosphère si étrange ne pèse plus sur mes épaules et un silence brumeux recouvre soudain toutes les particules d'air qui flottent autour du monde.

Je n'écoute plus rien, je ne fais plus rien, je me contente de scruter les dizaines d'expressions différentes qui parsèment chacune des têtes tournées vers l'estrade. Il y a des hommes, des femmes, des jeunes de mon âge, mais il y a aussi et surtout des adolescents, des enfants. Comment des êtres si innocents ont-ils bien pu se retrouver dans un tel enfer ? Je n'arrive pas à comprendre de quelle façon la pureté de l'enfance peut se mêler aussi simplement à la violence des criminels présents ici.

― Aller, va rejoindre les autres.

Peter m'arrache à mes pensées en me tirant par le bras. Une grimace de douleur m'échappe, alors que je descends les marches à la hâte. Je me retrouve complètement perdu au milieu de l'attroupement où même les gamins semblent plus à l'aise que moi. Certains profitent d'ailleurs de mon manque de réactivité pour me bousculer en riant.

J'ai la sensation d'être en plein cauchemar, comme si l'intégralité de ce que j'étais en train de vivre n'était qu'une énorme blague de mauvais goût. Rien de ce qui se déroule autour de moi ne me paraît réel. J'ai la désagréable impression d'être dans une dimension qui m'est totalement inconnue et qui n'est pas faite pour moi. Soudain, le rictus bruyant des adolescents s'effacent et une vague d'inquiétude parcourt la foule.

― Putain, Mike, regarde, c'est West Hutchins ! s'écrit un garçon derrière moi.

― Non, mais il est dans l'ombre là, on peut pas savoir qui c'est. Et puis, tu t'es cru au New Jersey ou quoi ? ricane son camarade en lui envoyant un coup de coude dans les côtes.

Je me tourne complètement vers les deux jeunes qui doivent avoir quinze ou seize ans en fronçant les sourcils. Pourquoi le petit roux parait-il si impressionné à l'idée que ce West Hutchins soit présent à New York ?

― Qui est West Hutchins ? j'ose demander en gardant tout de même mes distances.

Les deux adolescents se lancent un regard incrédule, avant que Mike ne replace sa casquette à l'envers pour s'approcher de moi. Nonchalant, il glisse ses deux mains dans les poches de son jogging trop grand en me montrant la plateforme de laquelle je viens de descendre du menton. Je lève le nez vers Ian qui n'a toujours pas fini de parler, sans comprendre.

― Inutile de faire durer le suspens, voici notre nouvel arrivant, souffle mon patron d'une voix lasse. Pas besoin de présentation, j'imagine, renchérit-il en serrant les dents.

Un jeune homme sort de l'ombre et le hangar tout entier s'agite. Les chuchotements fusent, les gens se toisent, l'angoisse s'infiltre sur tous les visages. J'entends des « c'est West Hutchins ! », « qu'est-ce qu'il fait là ? », « Hutchins ne devrait pas être au New Jersey ? » s'élever dans tous les sens et je déglutis. Qui que soit ce mec, c'est quelqu'un d'important, quelqu'un qui doit avoir du pouvoir.

― Le Prodige fera équipe avec notre nouvelle recrue.

La voix de Ian s'élève au-dessus des réactions frénétiques et tous les regards se tournent désormais vers moi, avant que les chuchotements ne s'accentuent. Je crois que des dizaines de personnes que je ne connais pas n'ont que mon nouveau surnom à la bouche, mais je ne fais plus attention à rien. Je suis littéralement emporté par l'océan qui dégouline de deux prunelles bleues rivées sur moi. 


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Hey, je suis désolé pour le retard, j'espère que cette partie aura valu le coup d'attendre. On commence tout doucement à entrer dans la partie intéressante de l'histoire, à mon sens et j'espère que ça vous intrigue et que vous avez toujours plus envie de découvrir la suite. 

Alors, les ancien.ne.s, la team West, l'excitation monte ? Ou alors vous avez peur du West 2.0 peut-être ? 

Et les nouvelleaux, ils vous inspire quoi ce West Hutchins, pour l'instant ? 

Vos réactions, à chaud, sur les différents types de personnes qui travaillent à Eleven Stars et sur la façon de Ian de diriger tout ça ? 

Pour finir, la musique, elle vous plait ? C'est la musique du trailer, elle me fait un peu penser à West, dans un certain sens... Et vous, elle vous inspire quoi ou qui ? 


Voilà, du coup, il va y avoir trois parties dans ce chapitre et pour la prochaine je vais tâcher de ne pas être en retard. Elle devrait être postée samedi sans faute ! 

Je vous souhaite une belle journée/soirée et vous dire à samedi !

Prenez soin de vous les potes. 

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