Chapitre 19 | 1
Musique proposée : The War We Made - Red. (En média).
« Il n'a jamais tué personne, tu es bien sûr de ça ? »
Les paroles du vieil agent résonnent autour de moi. Elles me reviennent en écho, encore et encore, comme si j'étais enfermé dans une boîte et que les sons ne cessaient de rebondir sur ses parois pour me revenir en pleine figure.
Une fois...
Deux fois...
Trois fois...
La voix ne s'arrête pas. Elle pourrait me rendre fou à repasser en boucle. Désormais, j'ai même l'impression qu'elle se rapproche et c'est de moins en moins supportable. Je ne veux pas qu'elle s'immisce en moi, je ne veux pas me laisser tromper par ses mensonges. Jamais ils ne m'auront, jamais je ne les écouterai, je m'en fais la promesse.
— Je n'y crois pas. C'est faux. Je sais que c'est faux ! répété-je dans l'espoir de réussir à les faire taire.
Chaque mot s'embrouille dans mon esprit, mais je lutte de toutes mes forces pour réussir à garder les idées claires. West n'est pas un tueur. West n'a assassiné personne. West est quelqu'un de bien. J'en suis persuadé. Ouvrant les yeux, je réitère toutes ces certitudes pour rester focaliser sur ce que je sais et non ce que j'entends : il n'a ordonné aucune exécution et il n'en a pas mené non plus. C'est impossible.
La boîte s'ouvre d'un seul coup et les sonorités qui me vrillaient les tympans s'estompent. Un éclat vif envahit ensuite la cage minuscule, m'empêchant de discerner correctement cet endroit étrange. Malgré l'environnement inconnu qui m'entoure, je ne ressens aucun stress, aucune angoisse, pas la moindre gêne. Mes sentiments semblent avoir totalement disparu, ne laissant de moi qu'une coquille vide qui fixe une lumière blanche. Ébloui par cette clarté soudaine qui ne fait que s'accentuer, je ne distingue plus rien. Tout devient flou, tout se déforme et, au même moment, une douleur intense éclate dans ma poitrine. Un énorme poids m'oppresse. J'étoufferais presque. Les lignes droites se mettent à onduler, les couleurs éclatantes s'affadissent et d'immenses nuages brumeux prolifèrent dans les parages. Plus que confus, j'ai la sensation de m'accrocher à quelque chose de solide sans qu'aucun de mes membres ne fonctionne vraiment.
— À genoux ! ordonne un aboiement difforme.
Submergé par toutes mes émotions qui refont surface en à peine quelques secondes, je sursaute violemment. La terreur qui sommeillait dans ma cage thoracique m'attrape à la gorge, me poussant à scruter les alentours à la recherche d'un danger quelconque. Alors que j'avance avec prudence, un affreux crissement m'incite à baisser les yeux vers le sol. Incrédule, je remarque que je piétine ce qui ressemble à une fine couche de plastique froissé. Fronçant les sourcils, je l'observe de longues minutes, étonné de ne sentir aucun contact entre mes pieds nus et le sol recouvert.
Interpelé par un léger bruissement, je relève la tête d'un geste précipité et aperçois un groupe de silhouettes à quelques mètres sur ma trajectoire. Je m'approche avec méfiance, puis tombe nez à nez avec des hommes. Ils sont tous les trois alignés devant une personne agenouillée, elle-même face à un quatrième qui la montre du doigt. Plus je les dévisage, plus leur physionomie me paraît irréelle. Je les vois, ils sont là, à quelques centimètres de moi, pourtant leur apparence reste brouillonne, imprécise, quasiment effacée. Un changement brusque d'atmosphère m'interrompt dans ma contemplation détaillée et je constate qu'un gris orageux chasse la lueur aveuglante qui nous inondait, rendant les couleurs et les environs plus nets. Le plastique est en fait une bâche. Une bâche blanche. Mon souffle devient rauque, mon rythme cardiaque s'accélère et la panique m'asphyxie de nouveau.
Comme pour aviver la tempête qui sévit à l'intérieur de ma cage thoracique, un ricanement cruel retentit non loin de mon corps tremblant. Je jette un coup d'œil craintif à la source de cette horrible mélodie et déglutis en observant le visage de l'homme changer. Ses traits bougent, gonflent, se mélangent... Ses cheveux m'apparaissent soudain blond platine, une épaisse marque blanche vient barrer le milieu de sa gorge et les deux prunelles qui fixent la personne agenouillée s'assombrissent.
Ian. Ça ne peut être que Ian.
— Bah alors, qu'est-ce que t'attends ? chantonne une autre voix.
Tendu à l'extrême, je scrute le brun se trouvant à la gauche de Ian, tandis qu'un regard noir me toise en retour. Son visage commence à se modeler comme l'a fait celui de mon patron avant lui et un rictus mauvais s'empare de ses lèvres sèches. Après quelques instants d'effroi, je reconnais péniblement l'air moqueur de Peter et mon angoisse finit par exploser. Que se passe-t-il ? Où suis-je et qu'est-ce que je fais ici ?
— Tu vas tirer, oui ou non ?
Un nouvel écho me nargue, mais, au contraire des deux premiers, celui-ci ne me paraît pas familier. Le fantôme le plus à droite reste anonyme, je ne discerne rien de lui, à part l'immense capuche qui le recouvre d'une obscurité glaçante. Sans me laisser le temps de le dévisager plus longtemps, un cliquetis métallique résonne et je me fige. Même après l'avoir entendu à de multiples reprises, ce son me procure toujours autant de sueurs froides, il martèle toujours autant mon imagination de scénarios cataclysmiques. Doutant de mes capacités à encaisser la situation qui m'attend, je me retourne dans un mouvement lent et indécis pour avoir le quatrième lascar en visuel. Sa figure n'a pas l'air de se métamorphoser et sa posture accusatrice demeure la même que tout à l'heure, au détail près que son doigt remue. Il enfle, se déforme, mais je ne le vois déjà plus. Je suis bien trop emporté par l'océan agité qui se déverse sur la jeune femme à genoux sur la bâche.
West.
Le temps que je m'extirpe de l'eau bleutée, la main de West a fini par arrêter sa distorsion pour disparaître derrière un gros calibre. Un rictus insolent apparaît alors au coin des lèvres du garçon que j'aime et un bruit sourd éclate avec violence. Reculant dans un sursaut instinctif, je m'éloigne du bout de métal qui laisse une trace brûlante de son passage dans l'atmosphère pour se loger au milieu du front de la fille. Les pupilles rivées dans les miennes, elle s'effondre de tout son long, terrassée par une puissante vague rouge et je me rue vers elle en découvrant la couleur noisette brillant dans ses rétines. Un bras sous ses épaules, l'autre sous ses cuisses, je soulève le corps sans vie qui tache mon tee-shirt et reconnais ma petite sœur.
Savannah...
Une intense douleur m'envahit, d'innombrable larmes dévastent mes joues et je me mets à hurler. Je n'ai pas pu la sauver.
— Wayne !
Totalement paniqué, j'ouvre les yeux en me redressant vivement. Les draps rouges collent à ma peau moite, mes cheveux se plaquent à mes pommettes noyées de perles salées et la chaleur étouffante qui déferle dans mes veines ne fait qu'humidifier davantage mon épiderme recouvert de sueur. Les images terrifiantes qui m'assaillaient ne me quittent toujours pas et je ne suis pas en mesure de trouver un moyen de les faire disparaître de mon esprit embué. Incapable de reprendre le contrôle sur mes poumons qui préfèrent rejeter l'oxygène que de l'accueillir à bras ouverts, j'ai de plus en plus de difficulté à respirer. Ma vue se brouille. Tout est de nouveau flou. Au point que j'en viens à me demander si je ne suis pas encore coincé dans cette boîte blanche impénétrable.
— Hey...
Des doigts glacés s'aventurent délicatement sur ma nuque enflammée, m'apaisant un instant. Un mouvement léger effleure le dessus de mes jambes et je me retrouve nez à nez avec deux saphirs brillant d'inquiétude.
— West ? Est-ce que... Est-ce que c'est toi, balbutié-je d'une voix enrouée par les sanglots.
Clignant plusieurs fois des yeux, je fais dévaler des dizaines de tristes gouttes d'eau le long de mon visage brûlant et me rends compte qu'il est assis à califourchon sur mes genoux. Son torse recouvert d'encre n'est qu'à quelques centimètres du mien et j'y dépose mécaniquement ma paume comme pour me laisser bercer par les battements réguliers de son cœur... ou être sûr qu'il est en train de battre. Comprenant ma crainte, il recouvre ma main de la sienne, avant de ralentir un peu le rythme de sa respiration déjà calme. Il prend une longue inspiration, expire bruyamment, puis répète l'expérience. Petit à petit, mon souffle se cale sur son allure et je me calme.
— Tout va bien, Wayne. T'es en sécurité et moi aussi. Je suis là, avec toi, c'était qu'un cauchemar.
Alors que le matelas remue, j'imagine une seconde que mes spasmes ont fait trembler la salle tout entière. Comme une boîte qu'on secouerait dans tous les sens. A cette pensée, mon cœur rate un battement. Peut-être que c'est un peu ça, un cauchemar : une boîte minuscule qu'on ne peut ouvrir que de l'extérieur et dans laquelle on étouffe à force de hurler à l'aide. Secouant la tête pour chasser le sentiment d'oppression qui tente de refaire surface, je remarque que West est debout devant le lit et qu'il me tourne le dos. Effrayé à l'idée qu'il ne s'en aille, j'attrape son poignet d'un geste vif. Un sourire bienveillant niché sur les lèvres, il se retourne et me tend sa main libre. Je glisse alors ma paume dans la sienne et sors du lit pour ensuite le suivre en silence. Un pas après l'autre, il m'entraîne vers une porte peinte en noir qui se trouve au fond de sa chambre et l'ouvre dans une lenteur abominable.
Remplie de vêtements pour enfant, une immense penderie nous fait face, mais West ne me laisse pas le temps d'analyser quoi que ce soit qu'il me tire déjà plus loin. Il s'arrête devant une allée de sweats à capuche et de tee-shirts suspendus à une longue barre en fer qui longe le mur sur la quasi-totalité de la pièce. Alors qu'il écarte les habits, une petite cloison carrée en bois beige à peine détectable apparaît. West la fait coulisser sur le côté, puis se met à quatre pattes pour pénétrer dans la pièce secrète. Un demi-sourire se dessine sur mes lèvres. Ce garçon ne sera-t-il donc jamais à court de surprises ?
— Viens, me propose-t-il, une fois à l'intérieur.
____________________
Hey, comment ça va tout le monde ?
J'espère que cette partie vous plaira un peu plus que la précédente... Surtout que ce chapitre, je l'aime bien, alors j'espère que vous aussi, vous l'aimerez bien. Quoi qu'il en soit, j'avance bien dans la réécriture, même si j'ai des tonnes de trucs à faire en même temps. D'ailleurs je voudrais vous remercier pour le bel accueil que vous avez fait à Hors du temps, deux chapitres sont postés et on a déjà atteint les 150 lectures, c'est incroyable, merci beaucoup. J'espère que cette bébé histoire sera à la hauteur parce qu'elle est vraiment importante pour moi, je l'aime vraiment beaucoup.
A part ça, je reprends la lecture et lis de plus en plus régulièrement, je viens d'ailleurs de donner mon avis sur un livre que j'ai terminé il y a quelques jours, sur mon Instagram. Je vais essayer de continuer sur cette lancée et de lire tout aussi régulièrement pour revenir en force sur Wattpad (enfin, je suis déjà sur quelques histoires, en vrai). Et vous alors, vous lisez quoi en ce moment ?
Sinon...
Que vous inspire ce cauchemar ? Vous pensez qu'il a une signification particulière ou vous n'êtes pas du genre à analyser des rêves ?
Et West, alors, qu'est-ce qu'il manigance ? Qu'imaginez-vous dans cette pièce secrète ? Comment l'imaginez-vous ?
Puis, la musique, on aime ? J'aime beaucoup ce groupe, personnellement, je l'ai découvert quand j'avais genre... 15 ans et depuis, je me rends compte que j'aime la plupart des chansons que je prends la peine d'écouter.
D'ailleurs, en parlant de chanson, qui a vu la dernière chanson de la playlist de N'aie Pas Peur ?... La chanson de la dernière lettre à Hannah...
Bref, bref, pour une fois, je suis pas en retard dans les réponses aux commentaires, aha. Donc j'espère de tout coeur que vous allez me redonner du boulot. :p
En attendant, prenez bien soin de vous, bon courage à toutes les personnes qui reprennent le travail ou les cours. Je vous envoie plein de force et plein de bonnes ondes.
N'oubliez pas que vous êtes aimé.e.s, que vous n'êtes pas seul.e.s et que je suis là si besoin.
À très vite !
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top