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S H E Y L A ~ شيلاء

Alors comme ça, Nasser est proche de Lamar ? Hum, je dois avouer que ce n'est pas du tout à mon goût. Cette fille, je ne l'aime pas, je n'aime pas son caractère, sa manie de croire que tout le monde est sous ses ordres. Elle profite du fait qu'elle travaille directement avec Nasser pour se rapprocher de lui au maximum, elle pense sûrement que je ne les ai pas vus en train de se taquiner tout à l'heure, alors que j'observais bien la scène d'un endroit où personne ne pouvait me voir, et j'ai donc aussi assisté à la dispute qui a opposé les françaises à notre cher duo nouvellement créé, autant dire que c'était gênant des deux côtés.
Oui, j'ai la haine contre tout le monde, je suis jalouse, et j'assume totalement.
J'ai horreur qu'on fasse comme si je n'existais pas, et la prochaine fois, je saisirai la première occasion pour me faire remarquer, il faut bien que les gens sachent que je sers à quelque chose dans cette entreprise, il faut que je fasse entendre ma voix.

J'ai aussi remarqué qu'Arwa était présente, elle était avec les deux autres folles et deux gars que je ne connaissais pas. Elle était restée assise avec eux quand ses copines sont parties s'embrouiller, elle faisait comme s'ils n'étaient pas là, pauvre chérie qui baisse le regard devant les hommes...mais qui ose quand même regarder Nasser. Elle l'aime, ça se voit, sinon pourquoi serait-elle toujours dans les parages quand il est là ? Je suis quasi sûre qu'elle a quelque chose en tête, mais ce qu'elle ne sait pas, c'est que çe ne va pas durer longtemps...Déjà, je doute fortement sur le fait qu'il se passe quelque chose entre lui et Lamar et honnêtement, je crains que mes objectifs le concernant tombent à l'eau.

Il faut que je tire les points positifs de ce contexte: certes, je déteste Lamar mais elle est proche de Nasser, je pourrais l'utiliser pour arriver à lui, et puis, il est évident qu'elle est en guerre avec les françaises, mes rivales originelles, donc pourquoi pas faire une alliance ? Une alliance qui ne profitera qu'à moi, certes, mais au moins j'aurai ce que je veux.

J'ai pu voir qui éprouvait quoi vis à vis de Nasser, et je sais à présent comment me comporter avec telle ou telle personne. Je dois aussi préciser que je préfère agir dans l'ombre, ça me sera plus bénéfique.

Après avoir été témoin de ce divertissement de haute qualité que fut l'embrouille entre le duo et les françaises, je décidai de passer chez moi en vitesse récupérer quelques affaires dont j'aurais besoin. Je me dirigeai donc vers l'ascenseur, lorsque je vis deux filles à proximité, l'une assise par terre et l'autre agenouillée près d'elle, et c'est en m'approchant que je reconnus qu'il s'agissait d'Alanoud et Arwa.
Alanoud pleurait, encore une fois, décidement, on n'en aura jamais fini avec elle, toujours en train de verser des larmes pour X ou Y raison, et Arwa aussi semblait être au bord des larmes. J'ai une soudaine envie de lancer une pique, mais je vais m'en abstenir, je ne vais pas leur en rajouter, ces pauvres choux qui pleurent.

Mais de toute façon, elles ne m'ont même pas vue, si elles m'avaient vu, la folle furieuse qu'est Alanoud aurait déjà essayé de s'en prendre à moi physiquement, cette grande sauvage. Elle est vraiment bête de m'avoir crue pendant toutes ces années alors que le fait que Nasser me fait de l'œil est évident, il a fallu que j'embrouille sa copine pour qu'elle s'en rende compte, quelle naïveté...

Je descendis au rez-de-chaussée et traversai le hall. C'est drôle, toutes ces folles qui veulent me concurrencer alors que c'est moi qui dois rassembler toute l'attention sur ma personne...qu'elles sachent qu'elles n'iront pas loin, en tous cas.
Je regardai autour de moi tout en marchant, lorsque, stupéfaite, je vis Arwa sortir du bureau de la secrétaire. Tiens tiens, n'était-elle pas aussi en haut il y a quelques minutes ? C'est une belle occasion pour aller lui dire deux petits mots.
J'allai dans sa direction d'un pas sûr, la tête haute. La déception, la tristesse se voyait sur son visage, hum...allons voir quel est le problème.

-Moi: Salam...oh, qu'est ce qui t'arrive, t'es triste ? C'est qui encore, c'est Nasser ? Parce qu'il reste avec Lamar ?

Elle leva les yeux vers moi d'un air surpris, elle est choquée que je sois au courant de ce qu'elle cache à tout le monde, mais on ne peut rien cacher à Sheyla Al Bakri, j'ai l'œil sur tout ce qui se passe dans cette jolie boîte.
J'ai horreur de la façon dont elle se montre prude et calme, j'aimerais dire que c'est de la comédie.

-Moi: Ma belle, sois pas choquée, c'est flagrant...(en enroulant une mèche autour de mon doigt) Alors, ça fait mal, hein !

-Arwa, calmement: Sheyla, je n'ai pas le temps d'entrer dans une polémique avec toi, qu'Allah te pardonne, vraiment.

Elle m'énerve, elle m'énerve à toujours réagir de cette façon, il faut que je trouve quelque chose qui va la faire s'effondrer sur place. Oui, pensez ce que vous voulez, mais je déteste cette fille et je trouve qu'elle en fait beaucoup trop juste parce qu'elle est proche des soi-disant privilégiés, le troupeau de Nour et Nyhad en est l'exemple parfait.

-Moi, malicieusement: Mais je te demande juste ! (en haussant un sourcil) Et même, de toute manière, il n'y a pas que toi qui passe par ce (fais un geste signifiant "guillemets" avec mes mains) moment difficile, arrête de faire genre.

-Arwa, dans l'incompréhension: Mais de quoi tu parles ?

-Moi, froidement: Réveille toi, Arwa Al Rajehi, reviens à la réalité, en fait. T'as des concurrentes bien meilleures que toi, et tu penses que Nasser va daigner t'accorder une minute d'attention ? Je suis quasiment sûre qu'il se passe quelque chose entre lui et Lamar, ça saute aux yeux, sinon, pourquoi toute cette proximité ? Y'a des bruits de couloirs qui confirment exactement ce que je viens de te dire.

Je peux voir son visage se décomposer et commencer à prendre un teint blafard, quelle satisfaction...

-Moi: Je sais que tu te fais des films juste parce qu'il a dû te lancer un regard une fois ou deux, mais arrête de rêver, il ne t'a jamais aimée comme tu te l'imagines dans ta petite tête, et ça ne sera jamais le cas. Lamar a pris la place que la majorité des filles souhaitaient avoir.

Je m'en allai aussitôt sans attendre de réponse de sa part. J'avais plutôt bien réussi à la démoraliser, j'en suis fière. Parfois, il faut remanier les faits et faire un jeu d'actrice pour arriver à ses fins, chose que j'ai faite sans aucune difficulté.
Je sais qu'elle ressent quelque chose pour Nasser, il n'est pas exclu qu'il ait aussi ressenti quelque chose pour elle par le passé...c'est pour ça que j'ai insisté sur Lamar et les autres concurrentes, dont moi, car il faut impérativement qu'elle se dise qu'il n'a jamais rien eu pour elle pour que j'aie le terrain libre pour la suite.
Je dirais que j'éprouve plus d'animosité envers elle qu'envers Alanoud. Alanoud, c'est du passé lointain pour Nasser et c'est quasi impossible qu'ils se retrouvent, alors qu'Arwa, je sais qu'elle représente un grand danger. Je n'ose même pas imaginer la tête qu'Alanoud fera quand elle apprendra que sa chère amie "toute gentille, toute niya" aime en réalité le même homme qu'elle !

Bref, quoi qu'il en soit, aucune d'elles ne sortira gagnante, je suis sûre, ou plutôt, je l'espère vraiment.

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A L A N O U D ~ العنود

Après de nombreux efforts pour m'arrêter de pleurer, je repris enfin mes esprits. Je sens que je ne me suis pas assez défoulée pendant la bagarre avec Lamar à cause de la femme de ménage qui est entrée à l'improviste. Bon, elle n'a pas fait de remarques ou quoi que ce soit d'autre, mais cela nous a rappelé que n'importe qui pouvait entrer à n'importe quel moment, et si nous étions prises sur le fait accompli...nous serions tout simplement foutues.

Vous vous demandez sûrement pourquoi je pleure ? Mettez vous à ma place: imaginez qu'une personne que vous détestez soit au dessus de vous et puisse avoir un contrôle sur votre contrat, et donc par conséquent faire en sorte que vous soyez viré, quelle serait votre réaction ? J'insiste sur le fait que c'est une personne que je déteste, que je hais, carrément. En aucun cas cette humiliation n'aura lieu, je vous le dis.

Il faut que j'aille attraper Nasser lui même, il faut qu'il mette un terme aux dérives de sa chère et tendre assistante qui se croit tout permis, ce cirque ne peut plus durer.
J'essuyai mes larmes, respirai un grand coup et montai directement au cinquième étage puis fonçai dans le couloir, déterminée. Il faut que ça cesse, je n'accepte pas qu'on me menace de me virer alors que professionnellement, je fournis un travail de qualité et que de l'autre côté je ne fais que me défendre ainsi que mon droit.

Bien que j'étais censée me rendre au bureau de Nasser, j'allai jusqu'au bout du couloir, lorsque j'entendis une porte s'ouvrir derrière moi. Je devinai directement de qui il s'agissait, et des frissons parcoururent mon dos.

-Nasser: Arwa !

Je me retournai pour lui faire face. Comment se fait-il qu'il m'ait confondue avec Arwa ? J'ai trouvé cela étrange au début, puis je me suis souvenue qu'on s'était habillées de la même couleur, c'est sûrement pour ça qu'il s'est trompé.
Il fut extrêmement surpris en voyant que ce n'était pas Arwa qui était sur les lieux, mais bien moi, Alanoud Al Shuaibi, son ex.
Je le regardai fixement, les sourcils froncés, attendant un quelconque signe ou parole de sa part.

-Nasser: Euh...Alanoud ?

-Moi, avance vers lui: Nasser, stop, arrête de te voiler la face ! Tu vois pas que ton assistante n'apporte que des problèmes ?

-Nasser: Eh, s'il te plaît, commence pas toi aussi.

-Moi: Bien sûr que si que je vais commencer, tu trouves ça normal que ce soit elle qui décide de virer les enfants des gens ? Qu'elle les menace ? Dis moi, tu trouves ça normal, alors que c'est elle qui devrait se manger un licenciement dans sa gueule de connasse à cause de son comportement de merde ?!

Je commençais à hausser le ton, si bien que Nyhad sortit du bureau pour venir voir ce qui se passait.

-Nyhad: Wesh, qu'est ce qui vous arrive les khey, oh !

-Nasser, en me regardant droit dans les yeux: Alanoud, j'suis pas ton pote, parle bien et baisse d'un ton. Respire, calme toi, reste tranquille, ensuite on en reparlera.

-Moi: J'accepte pas ça, Nasser, j'accepte pas que cette folle veuille me mettre à la porte alors qu'elle est juste assistante. Même toi qui avais pu me virer, tu ne l'as pas fait, et elle, ce n'est absolument personne pour le faire.

-Nyhad, s'incuste: Eh eh, comment ça ? (À Nasser) Nass, j'espère vraiment pour toi que c'est pas ce que j'ai compris...!

-Nasser: Mais déjà, est ce que c'est de ma faute qu'elle soit comme ça ? Non, alors j'vois pas pourquoi...

Je me redressai et pris mon air le plus sérieux.

-Moi: La moindre des choses, c'est que tu la fasses redescendre TOI, elle va t'écouter. Parce que si tu lui dis rien...(le regarde) Je lui ferai comprendre à MA manière.

Il semble désemparé. Il me fait rire, ce type, il ne sait pas ce qu'il veut. Au bout d'un moment, c'est lui le patron et c'est lui qui doit trancher, mais regardez ce que c'est, d'être trop gentil et ne pas vouloir vexer ou blesser les autres, il ne sait même plus quoi me dire.

-Nyhad, essaie de me rassurer: T'inquiètes, elle fera rien.

Elle regarda Nasser d'un air dur comme si elle attendait qu'il confirme ses dires. Il paraissait perdu, j'attendais qu'il me dise qu'il se chargerait d'elle, mais il n'a rien dit. Il regardait rapidement son téléphone de temps en temps, sans plus.

-Nyhad, chuchote à côté de moi: Va, t'inquiètes même pas, j'vais lui mettre un coup de pression, et tu vas rester.

Peu convaincue, je la regardai d'un air indécis. Je ne sais pas si ça marchera, et j'ai peur, honnêtement.
Elle me fit un clin d'œil puis un sourire encourageant, puis repartit attendre Nasser dans le bureau.

Quant à ce dernier, il ne disait pas un seul mot et semblait réfléchir intensément. Je me noyai un instant dans ses yeux noirs qui fixaient le sol, en me demandant à quoi il pouvait penser, quel était son avis à propos de cette histoire.
J'ai envie de lui parler, de lui demander pourquoi il est comme ça, je veux savoir ce qui se passe.

Mais lorsque je fus sur le point de parler, il passa une main dans ses cheveux d'un geste agacé puis se retourna pour rejoindre précipitamment l'ascenseur.

-Moi: Nasser !

Aucune réponse.

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