٦

A L A N O U D ~ العنود

Croyez surtout pas que j'suis sagement rentrée chez moi après avoir reçu la réponse que je ne voulais pas entendre.

Oui, je l'ai suivi jusqu'à chez lui, sans pression.

C'est pas possible, j'peux pas me laisser humilier une fois de plus comme ça. J'ai voulu cet homme, je n'ai pas cessé de le vouloir, je le veux et je le voudrai jusqu'à ce que je l'aie ou que j'sois parmi les morts.

Nasser Turki Al Harbi, l'homme que je l'aimais...j'ai essayé maintes et maintes fois de le confronter, de le croiser...toutes mes tentatives se soldaient par un échec.
Mais j'avais appris récemment qu'il avait lancé sa marque en coopération avec ses potes mais aussi avec des expatriées françaises. Je me suis renseignée sur chacune d'entre elles en détail, c'est toujours utile quand on veut s'infiltrer de savoir qui est qui avant de passer à l'action.
Je me suis donc dit que ça serait une bonne idée d'essayer de postuler, peut-être que j'vais enfin pouvoir le revoir...Eh bah non.
Mais je ne vais pas lâcher l'affaire. Absolument pas.

-Moi: Nasser, faut qu'on parle...Sérieusement.

Il venait à peine de sortir de sa voiture. En m'entendant, il se retourna pour chercher la provenance de ma voix, et franchement faut voir comment il m'a regardée...Un regard noir, j'étais tellement intimidée que j'ai baissé les yeux, mais il fallait bien que je lui parle face à face.
Je levai les yeux vers lui et avançai dans sa direction.

-Nasser: Toi tu vas jamais comprendre...

-Moi: Mais Nasser c'est toi qui comprend pas là, dis-moi juste ce que j'ai fait de mal ! Qu'est ce que j'ai fait, qu'est ce j'ai fait pour mériter ça ?!

Il s'arrêta un moment, je l'avais énervé. Mais c'est de sa faute aussi...

-Moi: Nasser...

Il ferma violemment la portière et se mit en face de moi. Purée, toujours aussi grand et impressionnant...mais il avait vraiment l'air de vouloir ma peau, pour le coup.

-Nasser: Alanoud, j'vais pas te le dire deux fois, mets-toi bien en tête que notre histoire est finie, passée datée terminée. Entre nous deux y'aura plus jamais moyen, j'te conseille donc de rentrer chez toi et de pas te fatiguer pour rien.

Il me fixa intensément de ses yeux sombres et s'en alla en direction de la porte, mais avant de l'ouvrir, il se retourna et s'adressa de nouveau à moi.

-Nasser: Vis ta vie, oublie-moi, vraiment, j'ai pas besoin de quelqu'un comme toi dans ma vie. Tu m'as déjà causé assez de dégâts.

Cette phrase fut pour moi comme un coup de poignard glacé en plein cœur.

-Moi: Nasser, tu peux pas me faire ça, tu peux pas.

Les larmes commencèrent à couler sur mon visage. L'entendre me dire ça me fit horriblement mal, le fait de me dire qu'il me déteste alors que je l'aime du plus profond de mon être me tue...
Je commençai à pleurer et m'approchai de lui dans l'espoir qu'il daigne enfin m'écouter, bien qu'il ne soit visiblement pas réceptif.

-Moi: Nasser, s'il te plaît...Tu sais pas à quel point j'suis perdue sans toi...

Il me regarda, regarda ensuite le sol et resta silencieux. Ses yeux lançaient des étincelles, et je pouvais y lire malheureusement du dégoût, de la déception...

-Nasser: Ah tu pleures là ?

Bah oui, ça s'voit pas ? Il veut vraiment me rendre folle c'est pas possible, déjà que je veux qu'on parle sérieusement et qu'il coopère pas...j'essaie de le cerner mais j'en ai mal au crâne carrément. Il ne veut visiblement pas comprendre que si j'ai fait tout ce chemin et qu'au lieu de rentrer chez moi je l'ai suivi jusque chez lui, c'est parce que je tiens réellement à lui...
J'veux arranger les choses, j'veux me rattraper. Personne ne mérite de voir ses efforts être rejetés comme ça. Surtout pas moi.

Je levai les yeux vers lui. Ses yeux impénétrables étant toujours posés sur moi, je luttai pour soutenir son regard, mais au moment où je le regardai droit dans les yeux, je fondis en larmes.

Regardez dans quel état il m'a mise...

Il m'avait blessée et j'ai laissé cette douleur en moi trop longtemps sans l'exprimer, c'est juste horrible.
J'pouvais pas garder ça en moi plus longtemps, j'dois extérioriser d'une manière ou d'une autre. 
J'vais vraiment devenir folle...

-Moi: Nasser...il n'y a que toi que j'veux, je prends Allah le Tout-Puissant à témoin que je ne veux que toi, j'suis peut-être fautive mais me laisse pas...

Je me remis à pleurer encore plus fort, et les pleurs me provoquèrent une douleur au niveau de ma poitrine, tellement la brûlure de la séparation m'avait terrassée.
Je ne parlais plus, je n'en avais pas la force. Je me contentai de sangloter, le visage dans les mains, lorsque je levai la tête et vis Nasser en train de me regarder.

J'peux vous jurer que j'ai vu un soupçon d'humanité dans son regard, rien à voir avec le regard de meurtrier qu'il m'avait lancé lorsque je venais d'arriver. Avait-il enfin pris conscience de la situation, et avait-il enfin compris que j'étais sincère ?
Ça, malheureusement, j'peux pas le savoir.
Il recula de la porte d'entrée et avança vers l'endroit où j'étais, à savoir à côté de sa voiture.
Il passa nerveusement la main sur son bouc avant de s'agenouiller à ma hauteur, moi qui étais presque effondrée sur le sol.

-Nasser: J'sais plus quoi te dire.

Je levai le regard et m'efforçai de le regarder dans les yeux malgré les larmes qui brouillaient ma vue.
Il porta sa main à son front d'un geste démoralisé et prit une grande respiration.

-Nasser: C'est moi qui te met dans cet état ?

Cette question...et quelle question...
Question qui eut pour seule réponse un torrent de larmes. Silencieux, cette fois. J'étais vidée de toute énergie, je n'avais plus aucune force.
Sur le coup, je trouvais qu'il était patient, bizarrement. Il aurait très bien pu rentrer chez lui et me laisser comme ça en train de pleurer, mais non. Hésitant et voyant que je ne répondais pas, il  tendit la main vers moi avec l'intention de me relever mais la retira au dernier moment.

-Moi: Je t'ai donné mon cœur et toi tu m'fais ça ?

J'espère vraiment qu'il se rend compte à quel point il m'a brisé le cœur.

-Nasser: Alanoud...J'pense que tu devrais prendre plus de temps pour toi-même. Histoire de réfléchir à...

-Moi: MAIS RÉFLÉCHIR À QUOI AU JUSTE ?!

C'était trop pour moi, il fallait que ça sorte. Je ne m'étais même pas rendue compte que je criais, et je ne voyais même pas que Nasser me regardait d'un air mêlant la surprise et le dégoût. Il essayait de dialoguer, j'le nie pas, mais c'est ma douleur qui a parlé à ce moment.

-Moi: Dis moi à quoi je devrais réfléchir ? J'veux juste me rattraper pour être meilleure, et pour que je sois à toi pour toujours !

Je n'en pouvais plus, j'étais à bout de forces mais il fallait que je dise tout jusqu'au bout. Mais Nasser commençait sérieusement à perdre patience, et ça se voyait sur son visage. Ses yeux noirs flamboyaient plus que jamais.
Il se releva soudainement et passa une main dans ses cheveux, visiblement dépassé.
Ahlala Nasser, si t'es juste dépassé par la situation, sache que pour ma part la situation m'a tuée à l'intérieur...

-Nasser : Arrête de faire comme si je t'avais fait penser qu'il y avait encore un espoir...il n'y en avait pas, il n'y en a pas et il n'y aura jamais d'espoir.

Nerveux comme à son habitude dans ce genre de situation, il commença à avancer vers la porte et se tourna une dernière fois vers moi en l'ouvrant.

-Nasser: Écoute, j'suis passé à autre chose depuis longtemps. J'pense qu'on n'a plus rien à se dire, bonne continuation.

Et il ferma la porte derrière lui.
Nasser venait de piétiner les dernières miettes de mon cœur.
J'ai appelé ma copine Sheyla pour qu'elle vienne me chercher, puis...

TROU NOIR.

Une dizaine de minutes plus tard...

-Sheyla: Nounou (mon surnom), tu m'entends ?

Je commençai à ouvrir les yeux et me rendis compte que j'étais dans la voiture de Sheyla. Quant à elle, elle m'observait, inquiète.

-Moi: Oui...

-Sheyla: T'es sûre ? Tu t'es évanouie, tu le sais ça ? Et d'ailleurs, qu'est ce que t'es partie faire chez Nasser ? Je t'avais pourtant prévenue...

Quand Sheyla s'inquiète pour moi, elle est trop directe, c'est pour ça qu'elle me sermonne de la sorte.
Mais je n'avais vraiment pas la tête à lui répondre. La seule chose qui résonnait dans ma tête était la voix de Nasser prononçant cette phrase "J'suis passé à autre chose depuis longtemps". Qu'est ce que ça pouvait dire ? Insinuait-il qu'il aimait quelqu'un d'autre ?
Voilà le genre de questions qui m'empêchera de dormir pendant les deux prochaines semaines.

-Sheyla:  Désolée habibty (ma chérie), mon but c'est pas de te brusquer tu vois, c'est juste que t'es mon amie, donc je m'inquiète...et quand j'suis inquiète j'pèse pas mes mots.

J'avais le regard plongé dans le vide, mes yeux piquaient et j'avais horriblement mal à la tête. Je n'avais plus la force de parler ou de faire quoi que ce soit, et Sheyla l'avait remarqué.

-Sheyla: De toute façon t'inquiètes pas, arrête de le calculer et il reviendra vers toi. Et concernant le poste de modéliste sois tranquille, t'as aucune responsabilité. Tout ça c'est de la faute de la Tunisienne qui travaille avec lui, c'est elle qui t'a mise sur liste d'attente et c'est sûrement de sa faute que t'as pas été prise. Vraiment, son équipe de merde...

Ah, la Tunisienne...il me semble que c'est celle que j'ai vu juste tout à l'heure, celle qui était dans le bureau avec lui ? Information à revérifier.
Quelques minutes plus tard, on arriva devant chez moi.
En remarquant l'absence de la voiture de mon père, je déduis qu'il était sûrement invité avec ma mère chez des amis comme d'habitude. Tant mieux, ça m'arrange, les domestiques ne diront rien de fou en me voyant tandis que mes parents se seraient tout naturellement fait un sang d'encre.

-Sheyla: T'es sûre que t'as pas besoin d'aide pour rentrer ?

Je fis non de la tête et sortis de la voiture sans même dire au revoir. Je rentrai et courus vers ma chambre sous le regard abasourdi des domestiques qui ne comprenaient pas pourquoi j'étais dans cet état là.
Une fois arrivée dans ma chambre, je pleurai encore et encore toutes les larmes de mon corps, je laissai sourdre des sanglots qui venaient du plus profond de mon être. Je ne parvenais plus à m'arrêter, je ne pouvais pas exprimer mon mal-être par des mots, je le laissais donc couler avec mes larmes.

Une bonne heure était déjà passée lorsque l'écran de mon téléphone affichait un appel entrant d'un numéro que je ne connaissais pas.
Voulant savoir qui était à l'autre bout du fil, je décrochai quand même malgré le fait que j'étais presque morte d'épuisement.

-Moi: Allô, c'est qui ?

-?: Pas besoin de dire qui je suis, juste à ma voix tu me reconnais normalement.

Quelle fut ma surprise et surtout mon indignation lorsque je compris qui était mon interlocuteur !

-?: J'arrive bientôt à Jeddah. Avoue, je t'ai manqué depuis le temps...

-Moi: Mohammed, pitié, laisse-moi tranquille. T'es rien de plus qu'une erreur d'adolescence, lâche moi.
Tu vas pas me courir après toute ta vie, change d'objectif !

-Mohammed: Ah bon, tu penses ?

Un court moment de silence s'installa, moment pendant lequel je me demandais sérieusement si je n'allais pas péter les plombs.
Qu'est ce qu'il me veut lui encore ?!

-Mohammed: Regarde en bas de chez toi, tu comprendras.

Je me dirigeai vers la fenêtre, et là...
Mon téléphone tomba sous l'effet de la surprise.
C'était pas possible, non, non....

-Moi: Mais t'es fou ? Mohammed, sérieux,non, c'est pas vrai...

Il leva la tête et me regarda droit dans les yeux. Et oui, comme vous l'avez compris, il est venu devant chez moi.

-Mohammed: J'te suivrai jusqu'au bout du monde s'il le faut. C'est toi que j'veux et pas une autre.

Je raccrochai immédiatement et m'écroulai au sol, ma conscience m'abandonnant de nouveau.

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