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POINT DE VUE OMNISCIENT

La porte s'ouvrit, laissant apparaître Nasser. Du haut de ses 1m85, le regard perçant, le Saoudien s'attendait à rencontrer n'importe quelle femme inconnue, mais quel fut son étonnement lorsqu'il vit qu'il avait l'impression de connaître la femme qui était derrière la porte.

-Nasser, faisant signe de la main: Nasser Turki Al Harbi, enchanté.
Je vous en prie, entrez...

Elle répondit par un geste délicat de la main et le suivit à l'intérieur du bureau.
Les deux s'assirent à leurs places respectives, l'entretien pouvait donc commencer.

Une heure plus tard...

La rencontre toucha à sa fin.
Nasser se souvenait d'elle, à présent. Il l'avait rencontrée une première fois il y a plus d'une semaine en arrière, mais des choses beaucoup plus importantes que ça lui firent oublier ce détail.
Il avait remarqué sa nervosité tout au long de l'entretien, bien qu'elle soit subtile, comme la première fois où il l'avait vue. En effet, le jeune homme avait un talent pour capter des choses difficilement remarquables, et le stress d'Arwa ne lui échappa pas.
L'entretien s'était très bien passé. Le profil de la jeune femme correspondait parfaitement aux attentes de Nasser concernant le poste de community manager, et cela méritait bien sûr une réponse favorable. Elle était sérieuse et pleine de bonne volonté, que chercher de plus ?

Pendant ce temps, Arwa se sentait à la fois oppressée et sereine. Sereine parce qu'elle était confiante quant à l'entretien qu'elle avait sérieusement préparé, mais aussi oppressée à cause de cette inhabituelle interaction. Arwa est le genre de fille qui reste dans son coin, réservée, on pourrait même dire timide, introvertie, d'autant plus qu'elle n'est initialement pas très loquace.
En marchant vers sa voiture, elle se remémora la première fois qu'elle l'avait vu. Oui, elle aussi s'est souvenue de l'avoir déjà vu auparavant.
Grand, musclé, le teint vaguement bronzé, des yeux d'un marron foncé presque noir, des cheveux légèrement bouclés rasés en dégradé, une moustache bien soignée avec un petit trait de barbe sous la lèvre inférieure et un bouc. Le regard profond, l'expression impassible. Il l'intimidait, pas dans le sens du physique, certes, mais dans le sens où il dégageait une aura charismatique puissante qui impressionnait beaucoup.
Hormis cela, elle était pressée de recevoir la réponse qui lui permettrait de savoir si elle était prise ou non, mais il lui faudrait attendre une à deux semaines. Heureusement, ce n'était pas la patience qui lui manquait.

Du côté de Nasser...

-Nyhad, en s'asseyant: Alors, ça s'est bien passé ?

-Nasser, passe sa main sur son menton: Ouais franchement, j'vais pas te mentir c'était parfait même,elle a tout ce qu'on recherche, rien à dire. Et toi alors ?

-Nyhad: Pareil sah, le raclo est sérieux, il a géré, mais faut qu'il reste concentré aussi le frérot. Attends, je t'explique...

Elle se retourna et observa attentivement si personne ne passait dans le couloir, puis se remit dans la direction de son collègue.

-Nasser: Tu peux fermer la porte si tu veux. Je t'écoute, dis-moi tout Nyhad.

Elle se pencha un peu sur le bureau de manière à ce que personne ne puisse l'entendre.

-Nyhad, chuchote: J'te jure Nasser, fallait voir comment il était intimidé ! Comment ses yeux brillaient...t'as peur, mais la vérité, c'est pas très important.

Nyhad, c'est sa collègue, certes. Mais au fil du temps, il a appris à la considérer comme une très bonne amie. Ils ne se cachaient rien, et les problèmes de l'un étaient ceux de l'autre.

-Nasser, en riant: Ça veut tout dire ça ! Tu lui as tapé dans l'œil, c'est sûr. Mais qu'il ose juste forcer, et il verra qui j'suis. On touche pas à mes collègues.

Cette dernière phrase était sortie toute seule. Nasser est quelqu'un de nature très protectrice. Si quelque chose ne va pas, il sera là pour remettre les pendules à l'heure.

-Nyhad, ricane: Tranquille mon sang, tranquille... Te casse pas la tête, même s'il est pris ici, il fera rien. Ça s'trouve c'est même pas ce à quoi on pense.

-Nasser, curieux: Il s'appelle comment ? Histoire de voir...

-Nyhad: Faisal Al Amri. Mais bon, après tout, c'est qu'un regard.  J'voulais simplement te raconter, tu connais, faut toujours dramatiser pour que ça soit croustillant.

Lorsque il entendit le mot "regard", le Saoudien eut comme un flashback dans sa tête. Il revoyait Arwa assise en face de lui, avec son regard à la fois fuyant et marquant. Ce n'est qu'après la fin de cette entrevue qu'il avait remarqué combien elle était nerveuse et stressée. C'est les aléas de la vie professionnelle, faudra s'y faire.
Sans mentir, il la trouvait assez mystérieuse. Même si elle ressemblait à la majorité des filles qu'il croisait tous les jours, elle semblait être venue d'un autre monde.

Nasser sombrait encore dans ses pensées lorsqu'il remarqua que Nyhad l'observait du coin de l'œil, mais au moment où il voulut lui demander la raison de sa surveillance, le téléphone de cette dernière sonna, affichant un appel d'Eyad.

-Nyhad: Désolée Nass, c'est Eyad qui m'appelle, on s'attrape après gros.

-Nasser: Vas-y carré championne.

Nyhad décrocha et sortit pour se rendre dans son bureau.
Dès l'instant où elle s'en est allée, Nasser vagabondait dans ses pensées. Il regarda son reflet à l'aide de la caméra frontale de son téléphone et constata qu'il avait les joues légèrement rosées.

-Oh sa mère...

C'est donc pour ça que Nyhad l'observait de façon suspecte ! Il avait enfin compris...ses pensées se lisaient sur son visage. Heureusement que sa collègue ne savait pas ce à quoi il pensait, sinon, elle l'aurait soûlé avec ça pour le restant de ses jours.
Il ne fallait pas qu'il sombre. C'était lui le gérant de cette boîte et il ne fallait pas qu'il se laisse corrompre par de telles futilités. Il était juste surpris de rencontrer une fille discrète, certes mignonne mais banale, mystérieuse et pas excentrique, tout simplement, lui qui tombait toujours sur des cas humains.
Il s'enfonça dans son fauteuil en passant en revue son programme de la soirée. Il ira à la salle, comme tous les jours, et pour le reste, il avisera plus tard.

Soudain, une voix le tira de sa rêverie, une voix très familière qu'il n'eut aucun mal à la reconnaître.

-Ouais, tu connais, de toute façon...nan mais laisse tomber, l'Algérien là, le nerveux ? Hahahaaa.. mais mdr lui il fait trop le vaillant, j'vais même pas parler du petit Yéménite là, ouais, celui qui s'appelle Eyad...vraiment j'sais pas à quoi ils servent ici.

Nasser se leva doucement afin de se diriger vers la porte et se tint discrètement à côté pour écouter le reste de la conversation, qui semblait être téléphonique.

-Bon après Nyhad là, la pote d'Eyad, je la termine pas parce que c'est une bonne pote à Nasser, mais elle fait trop le bonhomme...et sa copine Nour alors là, oulaaa...gênante.

En entendant ces propos, Nasser tendit encore plus attentivement l'oreille, la voix étant assez éloignée et semblait venir du bout du couloir.

-Après wallah j'me plains pas hein, j'suis bien placé, c'est juste les gens que j'aime pas. Font trop les fous. La seule personne à qui j'donne l'heure ici c'est Sheyla, et encore, c'est parce qu'elle est obsédée par moi...le reste, ils sont tous niqués.

Nasser attendit patiemment que l'appel se termine pour sortir du bureau.

-Taha, arrive du côté opposé: Wesh Nass ! Ça dit quoi mon frère ?

-Nasser: Sah ça dit rien hein, on est là frérot !

Les deux hommes discutèrent de tout et de rien. Bien qu'il ait entendu les propos de Taha, il fit mine de rien et ne les prit pas pour lui personnellement. C'était certes son équipe, mais on ne peut pas plaire à tout le monde et il comprenait son ami.

Il est à présent 15h30, et un café bien épicé serait une bonne idée.
Nasser se leva pour aller en direction de la machine à café lorsqu'il vit des clés qui ne lui appartenaient pas sur un des sièges qui faisaient face au bureau et il comprit tout de suite à qui elles appartenaient.

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