53. ACHILLE (partie 1)

Silhouette, Aquilo.

LE DERNIER GESTE DE DÉSESPOIR était esquissé: le désir de continuer à vivre, balancé par la houle furieuse d'une nation indifférente, avilissante, le souhait de chercher refuge au-delà des limites d'un pays où règnent cruauté et désolation.

Achille était rongé jusqu'aux os par le mal de cette société, par leurs perversions, leurs mensonges, leurs silences qui, particulièrement, en représentaient ses bases solides. Il n'était plus question de lutte, de rébellion, simplement de survie pour le jeune garçon, qui ne se figurait pas retourner dans les souterrains. Une terreur sourde le possédait depuis qu'il avait pénétré le bâtiment, elle le tourmentait insidieusement alors qu'il tentait de la faire taire, de se conforter dans l'idée qu'il venait de faire un pas en avant.

En effet, aussi vaine que puisse paraître la situation, le travailleur était parvenu à se faufiler hors de sa prison dans un couloir tout d'abord vide. Puis, avec effroi, il avait vu paraître une jeune femme portant une tenue formelle dans les tons bleus, accordée à ses cheveux. Cette dernière avait levé des yeux surpris sur le garçon, avait dévisagé son apparence, les traits de son visage, et avait détourné les yeux. Comme s'il n'était qu'un énième pion exerçant dans la mécanique de la Tour Verte, la jeune femme avait repris sa marche et l'avait contourné, sans donner l'alerte.

Un sentiment de soulagement immense avait envahi Achille. Il venait de frôler le pire — bien qu'il n'aurait su dire ce qui était pire que tout ce qu'il avait d'ors et déjà traversé.

Achille n'avait pas perdu plus de temps, encore étourdi par la panique qui l'avait figé sur place, pris de tremblements. Il s'était avec prudence avancé dans le couloir, examinant les portes, pour deviner ce sur quoi elles donnaient. Enfin, juste avant que n'entrent à leur tour d'autres individus dans le couloir, Achille avait repéré une porte, non différente dans sa constitution, mais pourtant il avait senti qu'il pouvait l'ouvrir sans risquer de se faire attraper.

Posant le doigt coupé de l'homme sur le détecteur digital, il se fit la réflexion que, certainement, ce dispositif gardait en mémoire les empreintes digitales tout en les associant à son propriétaire, ce qui signifiait qu'il aurait tôt fait d'être retrouvé s'il continuait à l'utiliser. Malgré tout, le doigt était la clé qui lui permettait d'accéder aux endroits importants, c'était un passe-partout dont il ne pouvait se séparer.

Dans la pièce, plus petite que celle où il se trouvait détenu, se trouvait contenue une réserve de tenues de travail, de papeterie, de produits sanitaires. Cela devait être un cellier, ou une sorte de débarras, et était l'endroit parfait où il pouvait se dissimuler.

Sa première idée fut de se cacher parmi les produits, en dessous d'une étagère, la tête dans les vêtements. Cependant, il ne pouvait rester indéfiniment dans ce lieu, d'autant plus que sa disparition serait bientôt constatée, des gardes lancés à sa recherche et la surveillance accrue.

Achille ferma les yeux un instant, inspira une bouffée d'air gorgée de poussière, se sentant envahi par une détresse vorace qui lui soufflait qu'il avait été bien trop naïf de croire que ce plan pouvait aboutir, qu'il n'allait que se brûler les ailes davantage encore qu'elles ne l'étaient. Que, cette fois, le soleil l'avalerait tout entier, ne recrachant que ses cendres.

Comment allait-il procéder pour sortir de ce bâtiment dont il ne connaissait ni le nombre d'étages ni l'emplacement des sorties? Comment, surtout, retrouver Hade, dont il n'était même pas sûr qu'il se trouvait dans cette tour avec lui? Achille, son pouls s'accélérant, des larmes se formant aux coins de ses yeux, un serpent rampant dans sa poitrine, se plaqua soudainement face contre le mur adjacent à la porte. L'envie de venir cogner son crâne contre la paroi le prit et il lutta pour ne pas y répondre — hors de question de se faire repérer à cause d'un débordement émotionnel.

Une autre envie la talonnait, celle solidement enracinée en lui de la brûlante eau de vie, qui pouvait apaiser son angoisse et la brouiller. Rester longtemps vulnérable face à la brutalité de la vie, sans filtre, sans ce désinhibeur d'anxiété et de crainte, lui paraissait une épreuve effrayante.

À la place, il ramena sa main droite vers sa bouche et mordit la peau pâle. Se faire du mal pour se faire du bien, telle était la solution pour parer à l'âpreté de l'existence, aussi dément que cela puisse être. Des picotements de douleur se manifestèrent à l'endroit où ses dents se refermaient sur l'enveloppe de sa main et un tiraillement envahit alors le membre entier, jusqu'à son coude. Achille relâcha sa prise, submergé par une affliction qui éprouvait son moral et son esprit. La douleur dans sa main persista plusieurs secondes encore, tout comme la marque de ses dents dans la chair, sillages violacés.

Il devait réfléchir avec raison, c'était vital. Autrement, il perdrait le contrôle de son être et se noierait dans la mer de ses émotions et de son manque. Le jeune homme battait des bras, combattait sa peur, sa colère, son désespoir et sa dépendance d'un bloc, avec persistance, puisqu'il avait plus que jamais besoin de faire appel à son intelligence refoulée. Tout cela était assez nouveau pour lui, alors qu'il n'avait connu depuis plus d'une année que sentiments et sensations entravées par une inhibition dûe à son traumatisme profond et à l'alcool.

À présent, Achille devait refaire corps de nouveau avec ses capacités de réflexion, de raisonnement, lui qui avait été le plus observateur et réfléchi des quatre garçons de la forêt. Parlant peu, il avait eu plus de temps pour penser et avait compensé son manque de paroles par un surplus de pensées.

Achille, néanmoins, lorsqu'il fut arraché de son foyer, de ses parents, s'était trouvé confronté à une société inconnue, brutale, sévère qui l'avait peu à peu enfermé dans un presque mutisme, autant oral qu'intellectuel et spirituel. Depuis qu'il avait pénétré dans les souterrains, en particulier, l'adolescent n'avait guère eu la possibilité de penser, ni même de rêver; il ne lui était permis que la stricte condition animale.

Le garçon aux cheveux de jai, se sentant se calmer, hormis pour son état général instable, embrassa la pièce du regard. À l'heure qu'il était, sa fuite devait déjà être constatée, il ne pouvait sortir de cette salle tel qu'il était. Autant il pouvait se vêtir différemment et tromper ceux qui étaient à sa recherche, autant ses cheveux constituaient des traîtres à sa cause. Achille, passant une main sur son visage en sueur, envisagea quelques secondes les quelques couvre-chefs empilés sur une étagère au-dessus du portant à vêtements: des chapeaux, des casquettes qui ne pourraient couvrir entièrement sa chevelure noire.

L'adolescent commençait à se croire sans issue, se sentant tiré à l'intérieur de lui-même par une nouvelle crise, quand il remarqua des objets cylindriques, ressemblant à des tubes coupés en portions de vingt centimètres. Achille s'avança dans la pièce, jusqu'à atteindre ces objets singuliers, sur une étagère du mur à droite de la porte.

— Une bombe de coloration..., lut Achille avec perplexité.

Le terme lui évoquait les couleurs, mais il ne savait ce qu'il venait de trouver. Achille le tourna entre ses mains, le froid de l'objet rafraîchit ses mains, tandis qu'il jetait un œil sur les diverses inscriptions à l'arrière de la bombe de coloration.

Coloration... teinture... pour redorer la couleur de vos cheveux ternis... rapide et efficace, afin de faciliter votre quotidien... précautions d'utilisation...

Achille cessa de lire à partir de là, ayant compris que cet objet utilisé pour teindre les cheveux était ce qu'il lui fallait, tombé entre ses mains comme un miracle. L'adolescent reprit une inspiration, se rendant compte qu'il retenait son souffle, et sourit. Tout n'était pas encore perdu, il n'était pas perdu, et Hade non plus.

La bombe de coloration permettait de sublimer la couleur des cheveux bleus, de leur rendre leur éclat des débuts. Achille ne savait pas si elle était assez puissante pour recouvrir ses cheveux et dissimuler leur couleur noire, mais il devait tenter le coup. Il posa les yeux sur le manuel d'utilisation du produit, qu'il lut en diagonale. Avec un pincement au cœur à la perspective de teinter ses cheveux en bleu, le garçon s'affaira avec minutie et habilité à répandre le contenu sur ses cheveux.

Les mesures d'utilisation signifiaient que l'effet était rapide et efficace, qu'il s'appliquait sur cheveux secs et ne requiérait pas de lavage de la chevelure après la pose du produit. Les particules se posaient sur chaque parcelle du cheveu, pénétraient le cuir chevelu et, en une dizaine de minutes, les cheveux arboraient de nouveau leur teinte bleue éclatante. Achille ne put s'empêcher de retenir un murmure d'étonnement face à cette invention stupéfiante, qui promettait un résultat si aisément obtenu et en un court laps de temps.

Cependant, ne possédant ni montre ni aucun moyen de compter le nombre de minutes qui défilaient, Achille se sentit pris d'une crainte: et si il l'avait mal appliqué? Et si il ne laissait pas s'écouler assez de temps et que ses cheveux étaient restés partiellement noirs? Soudain de nouveau inquiet, après une courte pause, le jeune homme tourna la tête autour de lui, scrutant les autres fournitures qui remplissaient la pièce: vêtements, chaussures, ceintures, etc.

Son regard fut attiré par une porte que dissimulait un peu une étagère. Visiblement, cette pièce était reliée à une, voire plusieurs autres salles, pour constituer un savant réseau. Achille s'avança jusqu'à la porte, qui s'ouvrait sans détection digitale, pivotant sur des gonds. Prudent, le jeune homme, aux cheveux devenant peu à peu bleus, abaissa la poignée poussiéreuse et tira la porte vers lui. Achille pencha la tête dans cette nouvelle pièce et découvrit une suite de toilettes, de lavabos, de miroirs, de douches, disposées par secteurs dans cette immense salle et séparées par des cloisons.

Sur chaque mur de cette salle découpée en hexagone se trouvaient d'autres portes, ce qui ne pouvait signifier qu'une chose: cette salle d'eau n'était pas exclusive au débarras dans lequel il s'était caché, et était plutôt reliée à d'autres salles.

Le jeune homme, l'adrénaline se répendant délicieusement dans ses veines, se hâta à l'intérieur de la pièce. À la vue des toilettes, comme dans un déclic, une envie pressante le posséda aussitôt, et il dut renoncer à vérifier l'état de ses cheveux dans un miroir en premier lieu. Une fois qu'il eut soulagé sa vessie et lavé ses mains, Achille se rapprocha d'un des miroirs, avec appréhension. Il ne se souvenait pas la dernière fois qu'il se fut regardé dans un miroir, mais cela lui semblait de toute manière un lointain souvenir.

La peine et l'horreur émergèrent en lui quand il se trouva en face de son reflet, qu'il jugeait repoussant. Ses cheveux rêvetaient presque dans leur entièreté leur nouveau manteau bleu, ce qui lui donnait l'impression d'être confronté à un étranger. Néanmoins, ses yeux noirs restaient les mêmes, ceux qu'ils se remémoraient toujours dans sa tête, c'est-à-dire vides et inconstants, tantôt farouches, tantôt éteints.

Son visage conservait les stigmates des coups qu'il avait reçus dans les souterrains par le groupe de garçons: son œil droit était assez enflé, ses pommettes avaient viré en une couleur mêlant violet et jaune, son nez était violacé, également, par endroits, ses lèvres rougies, parsemées de croûtes de sang séché. Sa peau, enfin, était blâfarde et lui donnait une allure cadavérique. Le jeune homme ne paraissait pas en bonne santé, que ce soit physique ou mentale. Le temps où il n'avait d'autre problème que celui de pouvoir obtenir de profiter d'une heure ou deux seul dans la clairière lui semblait un simple mirage.

Achille reporta son attention avec un soupir sur ses cheveux. Il passa la main dans ses mèches devenues bleues, à regret. L'adolescent ne s'était jamais rendu compte d'à quel point il tenait à leur couleur corbeau, qui concourait à faire de lui qui il était. Sans ses cheveux noirs, Achille n'était plus totalement Achille.

Une porte pivota soudainement sur ses gonds, faisant sursauter le jeune garçon. Le souffle court, Achille, les mains crispées sur le bord du lavabo, posa ses yeux sur la silhouette d'un homme dans le miroir. Ce dernier, âgé peut-être d'une trentaine d'années, avait l'attitude à la fois fière et humble d'un homme qui était enchanté par la vie et la célébrait. L'aura de l'adulte lui parut tant en décalage avec le calvaire qu'il vivait qu'il ne l'entendit pas l'interpeler la première fois. Lorsque l'homme se fut presque avancé jusqu'à lui, le dévisageant avec pitié, Achille sortit de sa torpeur, paniqué.

— Est-ce que... est-ce que tout va bien? Tu as l'air fort amoché, mon vieux. T'as aidé à l'opération d'hier, c'est ça? J'en ai vu plusieurs en revenir avec des blessures, même des qui sont pas revenus, c'était vraiment affreux. Et dis-moi, tu n'as pas enfilé ta tenue de travail? Tu es habillé en civil..., remarqua-t-il en fronçant les sourcils.

Tout d'abord, l'adolescent ouvrit des yeux écarquillés, ne sachant comment réagir, la peur d'être découvert lui paralysant les cordes vocales. Enfin, Achille recouvrit assez de consistance pour aligner quelques mots:

— Eh bien, j-je... je- j'étais bien là-bas hier pour... pour les rebelles. Ouais. C'était abominable, tellement de blessés et de morts inutiles. Et moi, je... un gamin m'a passé à tabac. Il était drôlement fort.

Pour ponctuer ses paroles, Achille secoua la tête, en essayant de paraître dépité et endeuillé — ce qui était le cas, mais pas pour les mêmes raisons. L'homme posa une main sur l'épaule du jeune homme, qui tressailla sous le contact des doigts de l'homme, une angoisse lui remontant dans la gorge. Achille déglutit et serra les dents pour ne pas arracher la main de l'homme de son épaule.

— Je suis désolé pour toi, mon vieux. Tu m'as l'air d'être jeune et novice, alors je vais te donner un conseil, vu que je connais le métier maintenant: essaie de faire abstraction de tes sentiments quand tu fais face à un individu nuisible, ne pense pas, ne fais qu'obéir. T'en auras moins sur la conscience parce que tu auras à peine eu le temps de ressentir de la culpabilité. C'est véridique, mon gars, moins t'éprouves, plus tu progresses dans ce boulot. C'est pas un travail pour les sensibles, tu vois, confia son interlocuteur, en retirant sa main pour donner une tape sur le bras d'Achille. Enfin, je te souhaite de te remettre rapidement, mon vieux, et une grande carrière. T'as le potentiel, ça se lit dans tes yeux! À la prochaine... et change-toi, ou tu vas te faire tirer les oreilles.

L'homme, vêtu d'un costume bleu nuit et d'une chemise bleu clair, ajouta un clin d'œil à ses mots. Quelques secondes plus tard, il quitta la pièce en sifflotant. Achille le suivit du regard puis lâcha un râle, proche de la complainte, en s'enserrant lui-même, ses bras en travers de son torse, une main sur chaque épaule. Son visage était tordu en une grimace exprimant une douleur qui n'avait de cesse de le hanter à chaque minute.

Achille était tombé, et la montagne qu'il avait à gravir pour réapprendre à vivre malgré la souffrance, avec elle, lui semblait colossale, infinie. Il espérait de moins en moins réussir à l'escalader jusqu'en haut, ou même à commencer à le faire — pas de lumière assez vive dans sa vie pour s'opposer à l'obscurité, plus d'espoir pour contrebalancer son supplice. Comment gravir une montagne qui n'offrait pas de prises pour ce faire?

De longues minutes passèrent dans un silence à la fois oppressant et apaisant, dans lequel Achille respirait à grand peine, sa douleur étant si bruyante dans sa tête. Il tourna les yeux dans le miroir à sa droite, se scruta un instant, peu habitué à son reflet. Le sentiment d'affliction qui se dégageait de lui à cet instant le frappa; était-ce l'image qu'il renvoyait? Ou avait-il toujours été ainsi?

L'adolescent retira ses bras d'en travers de son corps et expira durant quelques secondes. Quoi que l'homme l'avait mis mal et avait fait rejaillir en lui des émotions pénibles, il avait au moins eu le mérite de le conforter dans son plan. La coloration avait fait son effet, seul son visage pouvait constituer une preuve de sa fausse identité: il pouvait créer le doute ou être reconnu.

S'étant arrosé le visage avec un peu d'eau, Achille revint sur ses pas, jusqu'à la pièce qu'il avait quittée, se dirigeant directement vers le portant à vêtements. Le garçon fit défiler entre ses doigts les divers habits, flatté par la caresse des tissus sur ses doigts. Une boule se formant dans sa gorge, il persévéra dans sa recherche et trouva finalement un costume dans les tons typiques du Milieu, qui paraissait être à sa taille — à quinze ans, il avait déjà atteint une taille équivalente à celle d'un adulte.

L'adolescent aux cheveux bleus commença à se déshabiller dans la salle, laissant glisser ses vêtements sur le sol froid sous ses pieds. Bien qu'il n'y ait personne pour le voir, Achille ne s'était jamais senti à l'aise lorsqu'il se mettait à nu dans un endroit collectif, toujours à l'affût du garçon qui irait lui voler ses vêtements ou le ridiculiser, comme dans son enfance au Centre pour Enfants Inadéquats.

En détournant les yeux pour ne pas regarder son corps assez frêle — à cause de son manque de nourriture —, Achille enfila les nouveaux vêtements, frais contre sa peau brûlante. D'un geste machinal, il ajusta les manches et les jambes du pantalon sur ses chevilles. Cinq minutes plus tard, il avait déniché une paire de chaussures à sa taille, qu'il chaussa à ses pieds nus, et avait coiffé du mieux qu'il pouvait ses cheveux à l'aide d'un peigne.

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J'ai une nouvelle fois beaucoup écrit, mais je n'avais pas le choix, alors on dira que c'est mon cadeau d'anniv pour vous (je sais c'est dans l'autre sens normalement, mais vous méritez que je vous remercie à chaque fois de me lire. cette histoire et vous, mes lecteurices , vous me maintenez à flot♡) (ps: c'était hier mon anniv).

La deuxième partie sera postée demain, car elle fait aussi 3000 mots et comme ça, vous aurez moins à attendre jusque dimanche!

Que pensez-vous qu'il va se passer? Achille va-t-il réussir à retrouver Hade? À ne pas se faire attraper? Va-t-il être aidé par Harry et Charles?

Bisou mes griffeurs♡

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