A nu

Mari et femme, Adam et Eve n'était qu'un. De la même chair, ils étaient fait pour être seulement deux, seulement unis, et nus ; sans honte ni pudeur, ils s'enlaçaient tendrement. Dans le jardin d'Éden, leur terre de naissance, la terre que Dieu leur avait confié. Ils mangeaient de fruits qu'ils se partageaient toujours, unis. Ils se posaient à l'ombre d'un feuillage, collé l'un à l'autre, unis. Il n'y avait rien de plus délicieux que cette vie là. Ne manquant de rien, ils vivaient au jour le jour, couraient, se baignaient, parlaient eux qui partageaient les mêmes jambes, les mêmes mains, la même parole. Dans un souffle, ils devenaient un, sa main dans la sienne, Adam se trouvait bien heureux d'avoir Eve. Parfois ils s'écartaient l'un de l'autre, comme pour mieux goûter à leur retrouvaille, pour mieux profiter de la chaleur après le froid, d'un sentiment de plénitude après l'isolement. Mais un jour qu'ils s'étaient séparés, le serpent avait approché Eve, laissée seule.

La tentation

Depuis ce jour, Eve était prise d'un doute. Dans la main d'Adam, elle restait sans passion, seule, elle demeurait en contemplation. Dans son esprit, il n'y avait que les paroles du Serpent, qui s'insinuait en elle ; elle relevait le pour et le contre, détruisant ses propres arguments, puis les composant de nouveau. Dans ce torrent de pensées, l'arbre subsistait. Elle le voyait, le touchait presque. Ce fruit vers lequel tout son esprit était tendu ! Plus elle y pensait, et plus sa pensée se faisait claire, elle devait cueillir le fruit de cet arbre. Mais malgré elle, sa foi en Dieu l'empêchait de s'y résoudre. Adam, qui observait sa compagne, fut très surpris de son mal-être silencieux, et comme la voir souffrir était se contempler soi-même, il résolut d'en découvrir la cause.

Lorsqu'il s'approcha, Eve fondit dans ses bras. Elle lui expliqua son dilemme, Adam l'écouta impassible. Lorsqu'elle finit son discours, elle ne sut quoi lire sur son visage. Enfin Adam lui dit "Je comprends" et Eve rassuré lui sourit.