CHAPITRE 30
« C'est à moi de faire un choix. »
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Deux jours que je suis rentrée et l'Espagne me manque probablement plus que je ne l'aurais pensé. J'ai tout de même du mal à le dire haut et fort compte tenu des événements qui se sont produits là-bas seulement, j'ai bien précisé que je devais les balancer aux oubliettes donc ça ne devrait plus me poser de soucis. Je suis plutôt ravie d'avoir un entraînement de prévue aujourd'hui. Penser à autres choses en me défoulant sur le terrain ne pourrait me faire que du bien à l'heure d'aujourd'hui. D'autant plus que je compte bel et bien m'entretenir avec Philippe afin de lui faire part non seulement de mes ressentis par rapport au test de la Real Sociedad mais, également au sujet d'une potentiel décision dont j'aimerais discuter avec lui. Il est définitivement le mieux placé pour me conseiller, c'est avant tout son métier. Je m'attendais à tout moment à ce que Marine bondisse d'absolument nulle part afin de me sauter dans les bras toutefois, cette dernière toujours en vacances, je ne la reverrais pas avant quelques jours. Cela m'attriste légèrement mais, dans tous les cas, je suis tout aussi comblée de retrouver les autres filles qui ont pu assister à la séance de ce jour et je ne manque pas de leur décerner un bonjour chaleureux.
— Bon, les filles, Philippe frappe dans ses mains, aujourd'hui séance plutôt tranquille.
— Vous dites ça à chaque fois, ricane Tatiana.
— Oui, effectivement. Mais cette fois-ci, je le pense vraiment, il précise d'un large sourire.
Il nous indique brièvement le programme de cette séance relativement matinale je dois avouer, qui est en vérité, plutôt légère. Il faut souvent se méfier du coach. Il a la récurrente habitude de nous répéter le fait que celle du jour serait posée alors qu'au final, on en sort plus épuisée que prévu. En toute franchise, c'est un miracle que cette réplique possède un véritable sens pour une fois. Nous nous lançons toutes en trottinant en entamant notre échauffement. Comme à notre habitude, on se met à discuter en pleine course ce qui n'est recommandé vu que cela a tendance a nous épuiser plus facilement mais après tout, on s'en carre royalement. Je suis bizarrement surprise qu'aucune d'entre elles n'aient abordé le sujet de mon voyage en Espagne. Je me trouve bien culottée de dire cela puisque je n'avais nullement pris la peine de leur en parler. Seulement, je m'étais dit que le coach allait certainement s'en charger durant mon absence. Il semblerait bien que non. Dans tous les cas, c'est peut-être mieux de cette façon. Je n'aurais pas à évoquer cette lamentable défaite. Le coup de sifflet retentit nous indiquant notre retour aux côtés de Philippe. Très rapidement, on s'empare chacune d'un ballon commençant à s'entraîner à notre rythme respectif.
— Diane, il faudrait que je te parle, m'interpelle Philippe alors que je suis sur le point d'entamer mon jonglage.
— Justement, ça tombe bien. Je voulais également m'entretenir avec vous.
— Oh, et à quel sujet ? Il me demande.
— Est-ce que l'on pourrait juste s'éloigner un peu ? Je me permets de lui proposer ne voulant pas que la conversation soit entendue par mes coéquipières.
— Bien sûr, nous nous exécutons de quelque pas vers l'arrière. Dis-moi tout.
— Je suppose que vous vouliez me parler de la Real Sociedad sauf que, j'aimerais d'abord vous exprimer mon ressenti.
— Pas de problème, je t'en prie.
— Pour être honnête avec vous, quand j'ai appris que je n'avais pas été retenu pour cause de mon mental qu'Igor ne jugeait peut-être pas assez fort par rapport à mon jeu, je m'y attendais un peu, j'explique en premier temps.
— Oui, effectivement, je me suis retrouvé étonner quand il m'a fait part du débriefing. J'étais pourtant sûr que tu allais réussir. N'y a-t-il pas quelque chose qui te tracasse ?
— À vrai dire, je marque une pause le temps de prendre une grande inspiration, oui. Quelque chose me tracasse et j'aimerais peut-être en discuter avec vous.
— Je t'écoute, il semble très attentif.
— Je ne vais pas vous le cacher, cela fait maintenant quelques mois que je perds petit à petit espoir en une potentielle carrière de football. J'ai beau me dire que j'ai de bonnes techniques et que j'ai toutes mes chances, une partie de moi me décourage profondément.
— Est-ce un simple découragement ou as-tu des éventuels problèmes personnels ?
C'est le moment ou jamais d'évacuer tout ce que j'ai actuellement sur le cœur. C'est bien la toute première fois que j'ai autant de facilité d'ailleurs à l'ouvrir de la sorte et je me trouve relativement stupéfaite de ma personne. Mon coach ne pourra que m'aider et loin lui sera l'envie de me juger sur quoi que ce soit.
— J'ai perdu mon frère en Novembre dernier, je lâche, le visage mélancolique. C'était une personne qui comptait énormément pour moi puisque, c'est grâce à lui que j'ai commencé le football, c'est grâce à lui si j'en suis arrivée jusqu'ici à l'heure d'aujourd'hui, je continue sur ma lancée. Le perdre a été un choc monumental et j'ai l'impression que sans lui, le football ne signifie plus rien pour moi.
— Allons-nous asseoir Diane, il pose sa main sur mon dos alors que nous nous dirigeons vers les bancs de touches où nous trouvons place.
— Du coup, ça fait depuis quelques mois maintenant que l'envie d'arrêter me ronge de l'intérieur. J'ai tenté ma chance en Espagne et j'ai échoué. Imaginez alors deux petites secondes mon état actuel.
Mon état actuel qui, je ne cesserais de répéter, m'empêche d'avancer et d'avoir confiance en moi. À force de vivre de la sorte, cela en devient extrêmement pesant.
— Je comprends tout à fait, il hoche la tête d'un mouvement déterminé. Ecoute-moi attentivement, Diane. La seule et unique raison pour laquelle tu n'as pas réussi le test c'est parce qu'en y allant, tu avais déjà toutes ces idées négatives en tête.
Sur le coup, je suis en désaccord avec ces propos puisque selon moi, j'ai fait véritablement de mon mieux.
— J'ai tout donné, je vous assure coach, j'insiste fortement.
— Tu as l'impression d'avoir tout donner puisque, c'est ce dont tu espères. Mais, ce n'est probablement pas ce qui s'est réellement produit. Tu te dis avoir tout donné dans l'unique but d'en convaincre ton esprit, tu saisis où je veux en venir ?
J'acquiesce d'un mouvement de tête, accompagnée d'un triste rictus en coin de lèvres comprenant finalement qu'il a probablement plus raison que je ne le pensais il y a quelques instants.
— Tu es capable de beaucoup de choses, d'autant plus que tu es l'une des meilleures attaquantes de notre équipe. Tu doutes de toi en pensant qu'il n'y a aucune autre personne que ton frère qui puisse t'aider à gravir les échelons, il enchaîne son discours de plus belle.
— C'est difficile Philippe, c'est difficile, je dis en un soupir.
— Bien sûr que c'est difficile et ça le sera toujours. C'est à toi, il me pointe du doigt, de faire de ton mieux pour gérer cette difficulté et ne pas te mettre des bâtons dans les roues à cause de cette dernière. Tu veux un conseil ? J'acquiesce instinctivement avant qu'il ne poursuive. À chacune des fois où tu seras en contact avec le ballon, que ce soit en entraînement, en match ou en test, imagine la plus belle image que tu aies de ton frère dans ton esprit. Tu as peut-être tendance à penser qu'à des choses négatives, comment tu t'en sortiras ? Est-ce que tu y arriveras ? Alors que, la seule chose que tu dois faire, c'est de songer le plus fort que possible à la raison pour laquelle tu en aies jusqu'ici.
Je reste muette durant une fraction de seconde prenant le temps d'analyser sa réplique.
— Vous avez complètement raison, j'admets d'un ton attristé.
— En vérité, je ne t'ai pas forcément appelé pour discuter de la Real Sociedad mais, d'une autre chose en particulier.
— Qu'est-ce donc ? Je l'interroge, curieuse de savoir.
— En apprenant la nouvelle de la part d'Igor, je me suis retrouvé surpris comme je te l'ai dit. Je n'ai pas forcément compris sur le coup qu'est-ce qui avait bien pu se passer là-bas.
— D'accord, j'adopte une tonalité de voix qui lui indique de poursuivre.
— Et puis, il arrivera forcément un moment où tu n'auras tout simplement plus ta place dans notre club et que les portes en professionnel devront donc s'ouvrir à toi.
— Où voulez-vous en venir ? Je suis un peu confuse.
— J'ai refusé de te laisser de la sorte avec une défaite à porter sur les épaules. C'est donc pour cela que j'ai réussi à contacter l'Atletico Bilbao féminine qui a d'ailleurs, énormément apprécié ton profil de joueuse, il me regarde en esquissant à petit feu un léger sourire satisfait, ils veulent te faire passer un test.
— Ce n'est pas possible, je réponds littéralement stupéfaite de la vitesse à laquelle j'en ai dégoté un nouveau. Comment ? Je viens à peine de revenir.
— Je te l'ai déjà répété plusieurs fois, tu as de très bonnes capacités et tu mérites ta place en professionnelle. Il t'avait d'ores et déjà repéré mais, n'osait pas forcément faire le pas pour le moment.
— Je n'arrive pas à le croire, je pose ma main sur mon front.
— Alors, je te propose quelque chose. Tu y vas et tu appliques tout ce que je t'ai dit.
— Imagine la plus belle image que tu aies de ton frère dans ton esprit, je termine sa phrase.
— Cette fois-ci, tu donnes véritablement tout ce que tu peux et tu iras loin, je te le promets.
— Vous le pensez vraiment ? Je me permets de le questionner.
— Oui, vraiment. Par contre, il agite son index, si vraiment tu ne ressens vraiment plus l'envie malgré ça de continuer, j'accepterai ta décision. Ton avenir est entre tes mains, c'est à toi de faire un choix.
— C'est à moi de faire un choix, je le sais bien, je contemple l'horizon.
Sur le chemin du retour, j'ai énormément cogité sur l'annonce de mon entraîneur. C'est tout de même incroyable, je viens à peine de revenir de Saint-Sébastien que je reçois une nouvelle proposition qui me donnera l'opportunité de remettre les pieds en Espagne. Sur le coup, j'ai réagi plutôt impassiblement puisque je n'arrivais absolument pas à réaliser ce qu'il venait de m'apprendre. C'est en poursuivant l'entraînement que l'information est finalement parvenue jusqu'à mon esprit. Une place à l'Atletico Bilbao, cela aurait été un rêve éveillé si celle-ci pouvait m'être destinée. De plus, j'ai été considérablement comblée du discours que Philippe m'a tenu. J'ai beaucoup apprécié le soutien qu'il m'a apporté et ce d'ailleurs, depuis mes débuts dans son club. Je ne m'en rends pas forcément compte mais, je pense que quitter ce dernier me déchirerait vraiment le cœur. Après m'être donc garée à ma place habituelle, je rejoins l'entrée de mon immeuble dont je tape rapidement le code avant que la porte ne s'ouvre.
— On ne bouge plus, j'entends une voix derrière moi qui m'est familière.
Je m'immobilise et me retourne par la suite, intriguée et légèrement craintive de qui cela peut bien être.
— Mais, qu'est-ce que ? Je bafouille. Antoine, comment est-ce possible que tu sois là ?
— J'ai peur de dire des bêtises mais, je crois que c'est quelque chose qui vole dans les airs, il fait mine de réfléchir, un avion si je ne m'abuse.
— Ne te paye pas ma tête, je le tape le sourire aux lèvres avant de le prendre dans mes bras. Qu'est-ce que tu fais ici, tu ne m'as même pas prévenue que tu venais, je lui dis avant de rentrer tous les deux dans le bâtiment.
— Je devais absolument te voir, on s'engage dans les escaliers jusqu'à l'étage de mon appartement. Ce n'est pas la première fois que je débarque à l'improviste d'ailleurs, il échappe un léger rire.
— Oui mais, vu ta tête, on dirait que tu n'es pas juste venu pour m'enlacer et m'embrasser jusqu'à ne plus pouvoir respirer, je le rejoins dans son rire en ouvrant promptement la porte.
— Pour être franc et direct, je n'aurais pas dû faire ce que j'ai fait, il me dit avant de refermer cette dernière.
— Comment ça ? Je fronce des sourcils appréhendant sa réponse.
— Peut-être que j'arrive beaucoup trop tard et que tu as déjà pris ta décision mais, je me devais de te rejoindre dans tous les cas. Je t'ai laissé partir beaucoup trop facilement, je t'ai à peine retenu puisque je m'étais dit au fond de moi qu'il faut apprendre à comprendre une personne, ces choix et les accepter, m'explique-t-il sérieusement. Quand on se parlait au téléphone, j'abordais à peine le sujet et je n'osais même pas te dissuader de quoi que ce soit puisque je me suis dit que tu t'étais d'ores et déjà fait une raison.
— Antoine, je prononce son nom d'une voix à peine audible.
— Et puis, je me suis finalement rappelé de quelque chose qui m'a poussé à sauter dans un avion pour Paris, comme à son habitude, il enchaîne sans se préoccuper de mon interruption. Quand une personne compte pour soi, il ne faut jamais l'abandonner. Tu te souviens de cette phrase ? Il s'approche subtilement de moi, le regard plongé dans le mien.
— C'est ce que l'on est censé faire quand on aime quelqu'un, je me rappelle du reste de sa réplique et la prononce en un murmure, en même temps que lui.
— Le fait est que je t'aime Diane et que jamais je ne pourrais te laisser te décourager de la sorte alors que tu as tant rêvé de ce monde du football, il s'empare de mon visage entre ses mains.
— Tu m'aimes ? Je lui pose cette fameuse question dont la réponse est évidente.
— Tu es légèrement en retard, il colle son front au mien le rire aux lèvres.
— C'est la première fois que tu me le dis véritablement, je chuchote alors que mon cœur ne cesse de battre la chamade.
— En attendant, tu n'es pas vraiment décidé à me le dire en retour, je me pose des questions, il plisse du front et déforme sa si belle bouche.
— Mais bien sûr que je t'aime, je m'esclaffe de sa figure amusante. C'est adorable d'être venu vraiment mais, il est trop tard Antoine. J'ai parlé à mon entraîneur aujourd'hui.
— Je le sentais mais, il soupire, ce n'est pas grave. Je respecte ta décision et je ne t'abandonnerais pour rien au monde. Je ferais absolument tout pour toi.
— Merci vraiment pour tout, je l'enlace appréciant sa précieuse odeur. J'aurais justement besoin de ton aide pour faire ma valise, j'esquisse un sourire malicieux.
— Ta valise ? Il se détache de moi, déconcerté.
— Et bien disons que, j'ai discuté avec mon coach et il se pourrait bien que Diane Trevis ait dégoté un test avec l'Atletico Bilbao, je lui annonce d'un air fier et vantard.
— C'est une blague que tu me fais là ? Il écarquille ses yeux. Tu viens de me dire qu'il était trop tard.
— Oui, parce que j'ai déjà accepté de repartir en Espagne.
— Mais ma parole, tu dis ça en souriant en plus. Diane, est-ce bien toi ? Il me pince les joues de multiples fois.
— Bien sûr que c'est moi, je souris de plus belle.
J'avoue également ne pas me reconnaître. Je n'ai nullement réfléchi pendant des siècles pour répondre à cette proposition. Étant d'ores et déjà sur ma lancée, je me suis dit que c'est le moment ou jamais de tenter une nouvelle fois ma chance. Cette fois-ci, je ferais véritablement tout pour mériter cette place, il me la faut et je me battrais pour. Je sais pertinemment que c'est ce dont Ryan aurait voulu que je fasse et j'ai envie qu'il puisse être fier de moi pour le coup. Je suis désormais déterminée plus que je ne l'ai jamais été, cela me change considérablement de mon état habituel toutefois, j'admets me sentir indubitablement mieux de cette manière.
— C'est pas tout mais, il m'embrasse sans que je ne m'y attende, j'ai une valise à préparer ! Il accoure de manière absolument ridicule en direction du couloir. Elle est où ?
— Dans ma chambre, je lui réponds complètement hilare de la situation.
— Quelle chambre ? Il m'interroge une nouvelle fois.
— Celle de droite.
Il ne perd de temps et cavale telle un animal en pleine savane jusqu'à cette dernière. Qu'est-ce qu'il est comique, ai-je déjà précisé qu'il est strictement impossible de s'ennuyer avec un tel personnage. Il est absolument unique. J'inspire un bon coup afin d'espérer mettre fin à ce fou-rire quand j'entends subitement un bruit étrange, suivi de maints cris tout aussi douteux et suspects venant de sa part.
— Je prends une pause, il réapparait dans la pièce, le visage froissé, en sautillant jusqu'au canapé.
— Qu'est-ce qu'il t'est arrivé, je me retiens de rire tant bien que mal.
— Je n'ai pas compris sur le moment, il se tord de douleur en serrant visiblement son petit orteil. Le meuble est sorti de nulle part.
Absolument unique.
— Bisou magique, il me fait la moue en soulevant son pied d'une position peu avantageuse.
— Hors de question que je t'embrasse l'orteil.
— Essaye ici, il m'indique sa bouche qu'il humidifie subtilement, ça pourrait fonctionner.
Je souris, secouant désespérément la tête avant de m'avancer jusqu'au canapé. Je m'incline légèrement vers l'avant afin d'atteindre ses lèvres qui se colle aux miennes délicatement. Je les libère à peine de son emprise que je sens une soudaine pression s'exercer sur le bas de mon dos qui m'attire avant que je ne tombe telle une misérable étoile de mer sur lui.
— Tu crois que c'est une position pour me faire un câlin ? Je rigole, bloquée par ses bras qui m'encerclent.
— Du moment que tu es près de moi, c'est le principal.
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