CHAPITRE 13
« Non, Antoine. »
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Je savais pertinemment qu'en prenant cette décision, je me serais certainement attirée les foudres d'Antoine et que j'aurais eu droit à une panoplie de discours venant de sa part pour tenter de me raisonner. Par conséquent, sachant que celui-ci est censé franchir le seuil de ma porte dans quelques instants, je commence réellement à redouter sa réaction. Comment allais-je bien pouvoir le lui annoncer sans non plus être trop directe et crue. Je suppose que la vérité sortira quand il le faudra, et j'essayerais de gérer la situation comme je le pourrais. La sonnette me sort de mes pensées et je prends une grande inspiration avant de m'élancer vers la porte que j'ouvre sans plus attendre.
— Salut, m'accorde-t-il.
— Salut, tu peux entrer.
— Tu vas bien ? Me demande-t-il inclinant légèrement sa tête sur le côté.
— Oui, ça peut aller. Et toi ?
— Un peu nostalgique. Ça fait bizarre, tout est passé tellement vite.
— Oui, c'est vrai. C'est les vacances pour toi, j'espère que tu en profiteras au maximum.
— J'y compte bien, je reprends le 4 août. J'ai pas mal de temps pour me reposer, m'avoue-t-il, un sourire accroché aux lèvres.
Un sourire qui n'aura certainement plus lieu d'être dans quelques instants.
— Ouais, c'est plutôt cool.
— Quelque chose ne va pas ? me demande-t-il fronçant les sourcils.
— Non, je m'efforce de sourire, tout va bien. Tu veux t'asseoir ?
— Oui, on peut s'asseoir, je ne comptais pas réellement rester debout, rigole-t-il. Alors, c'est pour bientôt le départ en Espagne. Il va faire super chaud en plus, tu vas adorer.
— Justement. Il faudrait que je te dise quelque chose.
Je n'ai pas eu à traîner très longtemps. Vaux mieux en finir le plus vite possible, je me sentirais moins frustrée.
— Par rapport à quoi. Rassure-toi, je m'arrangerais pour te faire visiter les quatre coins de San-Sebastián.
— Non.
— Non ? Pourquoi non ? Oh, tu veux te concentrer à deux milles pourcents sur le club. Bon, on trouvera certainement un petit créneau dans ton temps libre, j'en suis sûr.
— Non, Antoine. Je ne pars plus en Espagne, j'ai refusé.
— Très drôle Diane, tu ne pensais quand même pas que j'allais te croire. Non, plus sérieusement, il y a un restaurant que j'apprécie énormé...
— Ce n'est pas une blague, je l'interromps.
J'ai eu l'impression d'avouer un crime compte tenu du regard sombre qu'il me lance actuellement.
— S'il te plaît, ne t'énerve pas, ce n'est pas si grave, le rassuré-je.
— Ce n'est pas si grave ? Il change radicalement le ton de sa voix qui devient beaucoup plus sec et rude.
— C'est moi qui décide, c'est toi-même qui me l'as dit.
— Oui, effectivement. C'est toi qui décide, malheureusement, il baisse son regard.
— Je te promets, j'ai essayé. J'avais vraiment envie.
— Plus maintenant si je comprends bien.
— Désolée, je ne peux vraiment rien y faire.
— Tu as pris la mauvaise décision.
— Comment peux-tu en être certain ? Si je l'ai prise, c'est que pour moi, c'est celle qui me convient le mieux.
— Mais alors, pourquoi m'avoir dit que c'était officiel ?
— Ça l'était encore, jusqu'à ce que je change d'avis.
— Et puis-je savoir qu'est-ce qui a bien pu te faire changer d'avis ?
— Tu n'as vraiment pas besoin de le savoir, je te rassure, soupiré-je
— Bien sûr que j'ai besoin de savoir.
Je me tais.
— Tu sais ce qui me peine encore plus, il marque une brève pause, c'est que je pensais que tu étais sincère quand tu me disais que tu ne prendrais aucune décision sans m'en parler.
— Même si je te l'avais dit, tu n'aurais pu rien faire.
— Tu avais juste peur que j'arrive à te convaincre de continuer.
— Si je ne t'avais pas laissé rentrer dans ma voiture, il est clair que j'aurais probablement laissé tomber depuis un petit moment déjà, murmuré-je
— En quoi le fait que je sois rentré dans ta voiture ait retardé ta décision ?
— Tu l'as dit toi-même, tu es plutôt convaincant. Et puis, tu ne m'as jamais lâché les baskets depuis avec ça.
— Si tu veux que je te laisse tranquille, tu n'as qu'à me le dire et je m'en vais. J'essaye juste de t'aider Diane.
Ce serait la dernière chose que je souhaiterais. Je refuse de le laisser partir, surtout avec autant de rancune envers moi.
— Je sais très bien que tu veux m'aider, mais regarde-moi. Ne t'efforce pas à espérer qu'un jour tout ira mieux, lui dis-je, essayant de calmer l'atmosphère.
— Tu m'as pourtant dit que c'était ton rêve. J'ai réalisé le mien, c'est à ton tour de réaliser le tien.
— Il semblerait que ce ne soit pas tous les rêves qui soient réalisables.
— Qu'est-ce que tu racontes, c'est toi qui te mets des bâtons dans les roues.
Me mettre des bâtons dans les roues. Et bien si c'est cette image que je dégage, je suppose que ce doit être le cas. C'est comme ça, qu'il le veuille ou non.
— Tu ne pourrais pas juste accepter ma décision au lieu de vouloir me faire la morale. Ça ne changera absolument rien dans ta vie, tu as déjà pour toi. Alors si tu pouvais arrêter de voir de l'espoir là où il n'y en a pas, ce serait sympa, lui avoué-je sur un ton sec.
— Tu en es capable, pour la énième fois.
— Comment sais-tu si j'en suis réellement capable ou pas. Il n'y a que moi qui peux en être certaine.
Je ne saurais décrire ce que je ressens en ce moment même. Je sais très bien qu'Antoine doit être extrêmement déçu, mais je ne peux absolument rien y faire et je ne cesserais de le répéter s'il le faut. J'ai comme eu un tilt dans ma tête après cette défaite. Autant d'espoir, autant d'énergies positives pour finalement n'en retrouver que poussières. Cela m'a rappelé à quel point du jour au lendemain, tout peut basculer. Et sans forcément s'y attendre, on peut passer de tout à rien. Il ne me reste plus qu'à assumer mon choix et la raison pour laquelle celui-ci a dû être fait.
— Si tu ne t'en sens pas capable, dis-moi au moins pourquoi. N'y avait-il pas des choses dont il fallait que tu me parles. Je suis sûr qu'on peut trouver un arrangement, il continue d'insister.
— C'est bon Antoine, ne te prends pas la tête, tout est déjà arrangé, souris-je tristement.
— Non, tu ne comprends pas Diane, je pense que...
— C'est toi qui n'arrive pas à comprendre, lui coupé-je la parole.
— Ecoute-moi, si tu as besoin d'aide et de soutien, je serais là. Je vis à San-Sebastián, je pourrais te venir en aide dès qu'il le faudra, mais par pitié ne refuse pas cette offre.
— Pourquoi t'obstines-tu tant pour tout ça. Tu as vu une fille pleurée dans sa voiture, tu ne l'as connais absolument pas et tu insistes à vouloir prendre une décision à sa place, alors que tu n'as aucune idée du pourquoi ou même du comment.
— Je ne te connais pas, tu as raison. Tu ne sais pas à quel point je meurs d'envie de savoir qui tu es réellement, mais à chaque fois que j'essaye d'en savoir plus, tu deviens pâle et j'ai l'impression de parler à un mur.
Je le rejoins sur ce point. Ce n'est guère de ma faute, je n'ai pas l'habitude de parler de moi, par peur de trop en dévoiler. Cependant, ce n'est pas une raison pour avoir envie de contrôler ma propre vie.
— Si tu as juste pitié de moi, ne t'inquiète pas. Je me porterais très bien, je te le promets.
— Combien de fois vais-je devoir te dire que je n'ai pas pitié de toi.
— La seule chose qui puisse t'obliger à m'aider, c'est la pitié.
— Je ne me sens pas obligé, j'ai réellement envie. On en a déjà parlé.
— Je n'ai plus besoin d'aide, je m'en sors très bien depuis et je n'ai plus besoin de personne.
Je ne m'étais même pas rendu compte de ce que j'ai osé sortir. « Je m'en sors très bien depuis » D'une part, c'est complètement faux. Ce jour m'a pourri la vie et je n'arriverais probablement jamais à m'en remettre. Mais le plus gros problème est qu'Antoine fera de tout son possible pour m'extirper la raison de tout mon chamboulement. Je n'en ai jamais parlé ouvertement à quelqu'un, à quel point cet événement m'avait réellement bouleversé. Il prétend vouloir m'aider certes et j'aimerais lui montrer ma reconnaissance, seulement je ne peux pas. Je veux lui montrer que tous ses efforts ne serviront strictement à rien, qu'il aura beau tout essayer, je n'aurais jamais le moral, la force et l'ambition de continuer. « Si tu as besoin d'aide et de soutien, je serais là. » J'ai déjà entendu cette phrase. Maintes promesses de ce genre, on m'en a déjà faite. Il m'en a déjà faite. Et pourtant, malgré toutes ces répliques, jetez un coup d'œil à ma situation. Ce n'étaient et ce ne sont que des paroles. On ne sait jamais ce qui pourrait potentiellement arriver le jour suivant.
— Depuis quoi ? Me questionne-t-il dans l'incompréhension.
— Comment ça depuis quoi ? J'évite, comme à mon habitude.
— Diane, ne joue pas à ça avec moi. Tu t'en sors bien depuis quoi ? Insiste-t-il.
— Depuis rien du tout, tu me mets sous pression et je me mets à dire n'importe quoi, je passe mes mains dans mes cheveux, essayant de paraître complètement submergé par la situation.
Il inspire et expire un très grand bol d'air qui relâche sa posture, qui jusque-là apparaissait littéralement figée. Un silence s'installe durant ce qui me semble une éternité, laissant uniquement pour bruit de fond, les voitures qui circulent en bas. Ce genre d'instants, je les redoute énormément. Le silence règne et les pensées en profitent pour rejoindre celui-ci sur le trône. Antoine a l'air de prendre ça très à cœur et le sentiment de culpabilité pèse de plus en plus sur mes épaules. En jetant un regard vers lui, il semble se calmer, c'est rassurant.
— Excuse-moi, finit-il par dire, me sortant complètement de mes songes.
— Tu n'as rien à te reprocher, je lui précise.
— Certainement. J'espérais juste que tu le dises en retour pour t'excuser également, son sourire réapparait.
— S'il te plaît, je ne vais pas m'excuser pour une décision.
— Je n'ai jamais mentionné la raison pour laquelle tu devrais t'excuser.
— Alors, puis-je savoir pourquoi devrais-je te demander pardon ?
— D'être toujours aussi belle, même quand tu mens.
Mince.
— Tu dis n'importe quoi, je me force à échapper un petit rire.
— Étrangement, je ne t'en veux pas. J'ai toujours autant envie de me marier avec toi.
Je m'empêche de rigoler en pinçant mes lèvres, le frappant à coup de coussin.
— Tu sais ce que tu pourrais faire pour que je puisse te pardonner ? Il adopte une expression malicieuse.
— Je serais curieuse de savoir qu'est-ce que tu oserais me sortir.
— Tu ne veux rien me dire sur toi, j'ai compris. Alors, la seule condition ait que tu acceptes d'en savoir plus sur moi.
J'acquiesce d'un hochement de tête. Bien sûr que j'aimerais le connaître davantage. Malgré le fait qu'il soit extrêmement insistant, je n'oublie point le fait qu'Antoine est une personne que j'apprécie tout particulièrement, le sourire toujours au rendez-vous quand il le faut. Néanmoins, je me demande bien ce qu'il pourrait m'annoncer.
— J'aimerais que tu acceptes de venir avec moi.
Je plisse le front.
— Là où tout a commencé pour moi, à Mâcon.
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