Chapitre 8
J'hésite à entrer dans la chambre de Darel. Celui-ci dort depuis plus de douze heures. Les gars m'ont dit qu'il avait besoin de repos et j'en suis bien consciente, mais il se trouve que ce con a toujours mon téléphone. Il ne me l'a jamais redonné après notre première rencontre et j'aimerais le ravoir. Pas pour faire des appels ou en recevoir puisque plus personne ne se soucie de moi, mais plutôt pour jouer à des jeux car, à part regarder la télé, il n'y a rien à faire dans cet endroit.
Les agents sont occupés à assurer la sécurité du chalet et à guetter le moindre signe de danger, alors je m'ennuie royalement.
Je pousse doucement la porte afin de ne pas réveiller l'homme endormi et pénètre dans l'antre du guerrier. La chambre ressemble beaucoup à la mienne, à l'exception des teintes plus sombres sur les murs. Le mobilier est identique et la décoration est plus masculine. Je dois avouer que Darel est beaucoup plus ordonné que moi. Rien ne traîne par terre, contrairement à ma chambre où les vêtements jonchent le sol.
Je jette un rapide coup d'œil sur le petit bureau face à la fenêtre, mais n'aperçois pas l'objet convoité.
Ah ! Le Voilà !
Il est sur sa table de nuit à côté de sont propre portable.
Je m'avance sur la pointe des pieds après avoir vérifié que la respiration de l'agent est régulière, signe qu'il dort profondément. Les couvertures cachent tout son corps, excepté sa tête, mais il est couché sur le dos. Ses traits sont détendus et son visage semble paisible. Je suis fascinée par son air juvénile lorsqu'il dort. Il n'a plus cette allure stricte que je lui connais si bien. Il ne semble plus avoir tous le poids du monde sur ses épaules. Je sais que je suis un fardeau pour lui. Je dois sa protection à l'unique amitié qu'il partageait avec mon frère. Sans lui, je serais déjà morte à l'heure qu'il est.
Je m'empare doucement de mon téléphone en retenant mon souffle et recule vers la porte en ne quittant pas l'homme des yeux. Puis, une fois dans le couloir, je peux enfin respirer normalement. Menace écartée !
Contente d'avoir récupéré mon bien, je me dirige vers la cuisine en vérifiant mes messages. Aucun.
Rien de surprenant.
Je dépose le téléphone sur la table, me prépare un bol de céréales, me verse une tasse de thé noir et pose mes fesses sur le tabouret rembourré. Je suis seule et profite du silence pour relaxer avant que les autres ne débarquent tous en même temps.
Soudain, mon téléphone se met à sonner et la chanson « Praying » de Ke$ha me sort de mes pensées. Je décroche sans même vérifier qui m'appelle.
- Sarah ! s'écrie la voix de ma sœur. Où es-tu, bordel ?
Je retiens un soupir.
- Je suis partie faire un petit road trip avec des amis, je lui réponds.
- La direction m'a appelée pour me dire que tu n'es jamais allée à tes examens, crie-t-elle à mes oreilles, hystérique. J'ai eu honte d'être ta sœur.
Ah ! Voilà ! Son problème n'est pas que je ne me sois pas présentée à mes examens, c'est plutôt le fait qu'on l'associe à moi.
- Pourquoi n'ont-ils pas communiqué avec les parents au lieu de toi ? questionné-je.
- Ils n'étaient pas joignables.
Peu surprenant de leur part.
- Et puisque je suis le seul autre membre de ta famille...
Encore vivant. Et ça l'embête très certainement.
- Écoute, lui dis-je. Je n'ai pas passé mes examens pour la seule et unique raison que ça n'en valait pas la peine. J'avais déjà échoué mon année. Même avec de super notes, ça n'aurait rien arrangé.
- Sarah, il va valoir que tu te reprennes en main. Ça fait plus d'un an qu'il est mort. Tourne la page.
Difficile lorsqu'on a la mafia à ses trousses.
Je ne réponds rien. Ma sœur ne me connait pas. Elle ne sait pas ce que je vis présentement et je n'ai pas l'intention de le lui confier.
- J'ai décidé de prendre une année sabbatique, lui dis-je alors.
- Tu n'es pas sérieuse ?
- Oh que si ! J'ai besoin de réfléchir à ce que je veux vraiment faire de ma vie, et non ce que les parents ont décidé pour moi. Au revoir, Alys.
Je raccroche avant qu'elle ne puisse répondre. Quelle plaie, cette fille ! Et dire qu'on a le même ADN.
Les agents entrent dans la cuisine dix minutes plus tard. J'ai terminé mes céréales et sirote mon thé.
- Bon matin, me lance Nathan. Tu as bonne mine.
Je comprends qu'il veut dire que j'ai bonne mine pour quelqu'un qui a failli se faire descendre.
Je hausse les épaules.
- Darel dort toujours ? leur demandé-je même si je sais déjà la réponse.
- Oui, il récupère. Sa blessure l'a beaucoup affaibli, mais je suis sûr qu'il va aller mieux en se levant et qu'il va vouloir reprendre les choses en main.
On entend au même moment un cri provenant de l'étage.
- Quand on parle du loup ! s'exclame Derek.
- Mais qu'est-ce qui lui prend ? interroge Nathan.
J'ai une vague idée...Il a dû se rendre compte que je suis allée récupérer mon téléphone. Pourquoi cela le dérange-t-il autant ? C'est ma possession ; j'ai donc le droit de le reprendre.
Deux secondes plus tard, un Darel hors de lui débarque dans la cuisine. Il fonce immédiatement sur moi.
- Où est-il ? m'agresse-t-il d'un air furibond.
J'essaie de ranger mon portable dans la poche de mon jogging, mais il l'a vu.
- Redonne-moi ça immédiatement ! me crie-t-il.
- Il est à moi, réponds-je.
- L'as-tu ouvert ?
Mon visage répond par lui-même.
- Arghhh, répond Darel en empoignant ses cheveux.
C'est la première fois que je le vois perdre son calme ainsi. Il devrait aller se recoucher.
- Que se passe-t-il, mec ? demande Jaime, qui ne comprend rien, tout comme moi.
- Cette idiote a ouvert son téléphone, ce qui veut dire que la mafia peut maintenant nous localiser.
- Oh merde ! s'exclame Nathan.
Tout d'un coup, je me sens mal. Je ne savais pas qu'on pouvait retracer mon portable aussi facilement. Je me ratatine sur place.
- Bon, qu'est-ce qu'on fait ? Interroge alors Jaime.
- On doit quitter l'endroit au plus vite, répond Darel.
- Mais tu es blessé...
- Je suis en état de voyager.
L'agent me prend mon téléphone des mains enlève la carte SIM.
- Soyez prêts dans trente minutes, dit-il en repartant avec mon bien, probablement de peur que je fasse une autre connerie.
Mince ! J'aurais dû me faire une petite partie de Candy Crush en petit déjeunant... Je vais devoir me trouver un autre passe-temps, maintenant !
Je pack en vitesse mon sac à dos contenant mes quelques effets et rejoins les autres, qui m'attendent déjà au salon. Moi qui pensais avoir faite vite !
Darel agit comme si je n'étais pas là et discute avec ses collègues.
- On n'a qu'à aller à l'hôtel, propose Nathan.
- Il y a qu'un seul motel dans le coin, répond Darel. C'est trop risqué.
- Et dans une autre ville ?
- Une chose est sûre : il faut s'éloigner d'ici le plus vite possible. Je suggère que nous nous rendions aux États-Unis. C'est si vaste qu'ils auront de la difficulté à nous trouver.
- As-tu une ville en tête ?
- New York ! m'écrié-je.
Quatre paires d'yeux se tournent vers moi.
- Quoi ? J'ai toujours rêvé de voir la statue de la Liberté et Times Square, expliqué-je.
- C'est trop prévisible, dirent-ils d'une même voix.
Bon, au moins j'aurai essayé.
- Et pourquoi pas Roswell ? propose Jaime.
- Roswell comme les extraterrestres ? interrogé-je.
- Exactement, dit Nathan.
- Le Nouveau-Mexique, c'est une bonne idée, approuve Darel. Alors, en route.
C'est ainsi que nous passons la frontière canadienne vers les États-Unis. Les agents vérifient sans arrêt si nous sommes suivis, ce qui n'est pas le cas, à mon grand soulagement. Allons-nous avoir un peu de répit un jour ? J'aimerais bien.
Darel et moi sommes dans une voiture et les gars dans l'autre. Ils nous suivent...ou plutôt, nous colle au cul, mais ça ne semble pas déranger Darel.
- Comment va ta blessure ? demandé-je à celui-ci.
- Ça va, répondit-il, l'air las. J'ai vécu pire.
- Comme quoi ?
Je suis curieuse de savoir quel accident il a pu avoir.
- Une fois, pendant une mission, je suis tombé d'un toit et me suis cassé les deux jambes. Une autre fois, j'ai reçu une balle en pleine poitrine. J'ai vraiment failli y passer ce coup-là. Et c'est sans parler de ma première mission où je me suis pris un poignard dans le ventre.
- On mon Dieu !
C'est la seule chose que je trouve à dire.
- Pourquoi risquer sa vie pour des inconnus ? lui demandé-je alors.
La question me trotte dans la tête depuis qu'il s'est pris une balle à ma place.
- Parce que c'est mon job.
- Pourquoi avoir choisi ce job ?
Il ne répond pas tout de suite. Puis, il lève son avant-bras. Je remarque une envolée d'oiseau tatouée à l'encre noire qui part de son poignet jusqu'à son avant-bras. Il doit y en avoir une vingtaine.
- Chaque fois que je réussis une mission, je me fais tatouer un oiseau.
- Il représente la liberté, lui fais-je remarquer.
- Oui, c'est celle de chaque vie que je sauve. Sans moi, c'est à une pierre tombale que ces individus auraient eu droit.
Je trouve ses paroles un peu prétentieuses, mais il a tout de même raison.
- Donc, tu continues ce travail pour la satisfaction de l'accomplissement ?
- Et pour un tas de raisons que je ne nommerai pas. Ce serait trop long.
Bon...chacun ses préférences. Je suis un peu moins casse-cou. Prendre des risques, ce n'est pas pour moi. J'avais prévu finir mes études en marketing et me trouver un emploi. Puis, partir enfin de chez mes parents et me louer un petit studio en ville avec mon copain. Malheureusement, tout est parti en vrille à la mort de mon frère. En plus, j'ai perdu l'envie de poursuivre mes études dans ce domaine que j'adorais avant. Comme quoi j'ai bien changé en un an !
- Nous avons beaucoup de route à faire, m'annonce Darel. Tu prendras le volant dans cinq heures et on inter-changera. Mon épaule est sensible et je ne pourrai pas conduire jusqu'à Roswell.
- Pas de problème.
Ainsi, le temps passera peut-être un peu plus rapidement.
- Oh, et en passant près d'un supermarché, on ira acheter tes trucs de fille.
Son commentaire me fait sourire. Il n'a pas oublié la douche vaginale...
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