Chapitre 7
- Les placards sont vides, nous dit Nathan en nous rejoignant dans la cuisine. Il faudrait acheter quelques trucs à manger.
- Tu as raison, approuve Darel. Nous irons au supermarché pendant que Sarah et toi resterez ici.
Quoi ? Et laissez ces mecs acheter n'importe quoi ? Hors de question. Je suis assez difficile côté nourriture et je ne les laisserai pas y aller sans moi.
- Je viens, j'annonce d'un air décidé.
- C'est hors de question, me répond Darel. Si des espions te repèrent...
- Ils ne me reconnaîtront pas, le coupai-je. C'est plutôt vous qui risquez de compromettre votre identité. Trois mecs qui font leurs courses ensemble, ça va sembler bizarre. En plus, ils connaissent probablement votre visage.
- Nous allons nous déguiser, ne crains rien. Et tu n'as qu'à faire une liste de ce que tu veux si tu ne nous fait pas confiance.
Il a toujours le denier mot, celui-là !
- Non ! m'exclamé-je. Il est hors de question que je reste enfermée ici. J'ai besoin de sortir.
Cela ne fait même pas huit heures que nous sommes arrivés que je me sens déjà oppressée par toute cette testostérone.
- Désolée, mais tu n'as pas ton mot à dire.
Finalement, je préférais lorsqu'il me vouvoyait. On dirait mon père...en plus jeune.
- Je ne suis pas votre captive. J'ai le droit de sortir.
- Tu n'as qu'à aller te promener sur le bord du lac. Nathan t'accompagnera.
C'est bien la dernière chose que je veux. Un frisson d'horreur me parcours au souvenir de la dernière fois que je me suis approchée d'un lac. C'est le jour où mon père a trouvé le corps de mon frère qui flottait près du ponton. Pour ma part, je ne l'ai pas vu, sinon j'en aurais fait des cauchemars jusqu'à ma mort. Cependant, j'étais présente lorsque les ambulanciers sont passés devant moi avec le brancard comportant mon frère. Une couverture couvrait son corps, mais cette vision est restée gravée dans ma tête.
Je crois qu'a mon air, Darel a compris à quoi je songe, car il se reprend :
- Tu peux aussi aller explorer le boisé derrière le chalet.
- Et qu'est-ce que je vais y faire ? Cueillir des champignons ? Regarder les escargots ? Franchement !
Le temps allait être long dans ce trou perdu !
- Je ne changerai pas d'idée. Vas faire une liste et nous la respecterons à la lettre.
À la lettre, hein ? Je viens d'avoir une super idée.
- D'accord, dis-je alors avec un sourire mielleux.
Les gars m'observent avec suspicion pendant que je prends une feuille et un crayon et que j'y inscris ce que je veux.
Lorsque je lui tends ma liste avec un petit sourire en coin, Darel prend le temps de l'inspecter.
- Tu te fous de notre gueule ! s'exclame-t-il après l'avoir balayé du regard. Je n'achèterai certainement pas ça.
Il la donne à Derek, qui la lit à son tour en secouant la tête.
- Aucune chance, lance-t-il en tendant à son tour le morceau de papier à Jaime.
- Tu as dis d'y écrire tout ce dont j'avais besoin, rétorqué-je, fière de moi.
- Tu as fait exprès, m'accuse l'agent.
Peut-être. J'ai toutefois besoin de tout ce que j'y ai noté.
- Tampons, serviettes hygiéniques, douche vaginale, crème épilatoire, rasoirs à trois lames, déodorant à la vanille, lit Jaime. Ça se trouve à l'épicerie, tout ça ?
- Bien sûr, réponds-je. Dans le rayon pharmacie.
- Qu'est-ce qu'une douche vaginale ? demande Derek.
- Faut-il vraiment que je t'explique ? Ça sert à laver, évidemment. De préférence, après les règles.
Nathan se bouche les oreilles.
- J'en ai déjà trop entendu, dit-il en s'éclipsant. Je vais faire des cauchemars.
Lâche !
- Tu n'es pas capable de faire ça avec le pommeau ? interroge Jaime.
- Et pourquoi pas un vibrateur, tant qu'on y est ! s'exclame Derek.
Ce n'est pas une mauvaise idée... Une chance qu'il n'a jamais vu la collection complète cachée sous mon lit ! Ben quoi ! Mon ex-petit ami n'était pas vraiment à la hauteur pour ce genre de truc. Heureusement, il avait d'autres qualités...dont je ne me souviens plus vraiment, d'ailleurs...
- La conversation est finie. Tu as gagné, me dit Darel avec un long soupir de découragement.
Je sautille partout, trop contente.
- Mais tu restes à mes côtés en tout temps, ajoute-t-il.
- Oui, papa.
- C'est grand frère, ne l'oublie pas !
Comment le pourrais-je ?
- En route ! me dit Darel.
- Et n'oubliez pas la pizza, nous lance Nathan du salon.
- Ne t'inquiète pas, tortue Ninja, m'écrié-je pour qu'il m'entende.
Le rire qui vient de la pièce d'à côté signifie qu'il a compris mon allusion.
Darel enfile un sweat à capuchon et se couvre la tête afin de cacher son identité. Il a un look mystérieux et attirant habillé ainsi. Tout à fait mon genre.
Lui et moi quittons la maison et nous dirigeons vers la ville la plus proche. Heureusement, elle n'est qu'à dix minutes du chalet.
Nous arrivons à la supérette du coin et prenons un panier. Darel et moi parcourons les allées et ramassons tout ce qui pourrait nourrir les quatre agents et moi.
- Mince ! m'exclamé-je alors que nous sommes rendus au rayon des fruits et légumes. J'ai oublié les serviettes hygiéniques. Je reviens immédiatement. Et n'oublie pas les carottes bio. Je n'aime pas les produits chimiques dans ma nourriture !
Avant qu'il ne puisse répondre, je suis déjà partie. Je me dépêche de prendre ce dont j'ai besoin et, alors que je me retourne, une voix s'écrie :
- Couche-toi !
On me pousse une seconde avant qu'un coup de feu ne retentisse dans le magasin et je m'affale par terre en accrochant par le fait même l'étalage de marchandise. Des dizaines de boîtes de tampons me tombent littéralement dessus. Une chance que je n'étais pas dans la rangé des cannes de conserve ! Je réalise alors que celui qui vient de me sauver la vie n'est nul autre que Darel. Il a sorti son fusil et tire sur nos agresseurs. Je me bouche les oreilles, croyant devenir sourde. J'ai tellement peur que j'en pleure. J'entends les balles siffler à mes oreilles et je prie pour m'en sortir vivante.
Les coups de feu s'arrêtent enfin.
Je suis vivante !
Je jette un regard vers Darel pour le remercier et pousse un cri d'horreur en me rendant compte qu'il a été touché. Il se prend l'épaule en grimaçant de douleur.
- Oh mon Dieu ! m'écrié-je. Tu es blessé !
- Ce n'est rien. Il faut partir d'ici.
- Mais...
- Tout de suite, Sarah. J'ai tué nos adversaires, mais nous ne devons pas nous attarder car les policiers vont bientôt débarquer.
J'entends au même moment les sirènes de police retentir.
- Je n'ai pas envie qu'on nous embarque et qu'on nous interroge, rajoute-t-il. Ça risquerait de ralentir la mission.
- Il faut t'emmener à l'hôpital.
- Non, surtout pas. La mafia risque d'avoir des taupes là-bas. Nous retournons au chalet. Les gars savent quoi faire dans ce genre de cas.
Je n'ose pas le contredire à nouveau. Nous laissons nos courses là où elles sont et Darel me donne les clés afin que je conduise.
Lorsque nous arrivons à la résidence, les gars viennent nous accueillir en chahutant. Toutefois, ils s'immobilisent lorsqu'ils aperçoivent Darel dont le sang dégoutte par terre.
Je ne l'ai pas regardé de tout le trajet, trop concentrée sur la route, mais lorsque je détourne le regard vers lui, je retiens un haut-le-cœur. Son sweat est imbibé de sang.
- Derek, sors l'artillerie, lui ordonne Darel d'une voix affaiblie. Nathan, tu vas m'aider à soigner ma blessure tandis que Jaime, tu t'occupes de Sarah. Compris ?
Tout le monde acquiesce et la pièce se vide aussitôt. Sonnée, je reste toutefois immobile, ayant encore de la difficulté à réaliser ce qu'il vient de se produire. Qu'est-ce que j'ai bien pu faire pour m'attirer autant de problèmes en si peu de temps ? On veut ma peau à tout prix, moi qui ne ferais pas de mal à une mouche ! J'aurais peut-être été mieux d'en finir au départ, comme cela je n'aurais pas eu à endurer tous ces soucis.
- Je sais à quoi tu penses, me dit aussitôt Jaime.
- Je ne crois pas, non.
- Tu te trompes. On a tous eu ton regard au moins une fois dans notre vie et on a appris à y faire face.
- Et qu'y vois-tu ?
- Des démons. Ceux qui gâchent ta vie.
Je hausse un sourcil.
- Crois-moi, Sarah, la solution à laquelle tu penses n'est pas la bonne.
- Et se terrer comme des lapins, c'est la solution, à ton avis ? répliquai-je avec hargne. Je ne veux pas fuir toute ma vie.
- C'est seulement à court terme.
J'en doute, mais m'abstiens de tout commentaire.
- Viens, allons au salon. Tu as l'air mal.
Il prend ma main et me soutiens lorsque je dérape dans une flaque de sang. Lorsque j'entends le cri de douleur que pousse Darel en provenance de la salle de bain de l'étage, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Je rends alors mon dîner en plein milieu de la cuisine.
Trois heures plus tard, je suis couchée dans mon lit, amorphe. Je n'ai plus l'énergie de me lever ni même de penser. Je fixe le plafond d'un regard vide. Chaque fois que je ferme les yeux, je me mets à cauchemarder.
Je pousse un énième soupir en me demandant comment va Darel. Jaime m'a expliqué que Nathan a dû lui retirer la balle et le recoudre à froid. Je n'ose pas imaginer la souffrance que l'agent doit endurer. Tout ça pour me sauver la vie. Je compte bien lui dire plus tard que je n'en vaux pas la peine. Il parait que l'homme a déjà enduré pire, mais juste d'y penser, j'ai la nausée.
Nathan entre dans la chambre sans frapper et s'aperçoit que je ne dors pas.
- Il est tiré d'affaires, ne t'en fait pas, me dit-il. Tu devrais dormir. Tu as une sale tête.
- J'en suis incapable.
- Je comprends, mais tu dois reprendre des forces. Il parait que tu as été malade. C'est l'état de choc.
Je ne réponds rien. Pas la peine.
- Tu peux dormir sur tes deux oreilles, me rassure Nathan. Les gars et moi avons sorti nos fusils d'assaut et nous surveillons la maison. Il nous reste encore deux jours avant que l'ennemi débarque.
- Comment le sais-tu ?
- Ils procèdent toujours ainsi. Ces criminels avaient seulement été envoyés pour faire de l'espionnage. En temps normal, ils ne vous auraient pas attaqués. Mais ils n'ont pas dû respecter les ordres. Puisque Darel les a tous éliminés, le temps que l'ennemi s'en rende compte et envoie du renfort, nous serons déjà partis. C'est pour cette raison que tu dois reprendre des forces. La suite risque d'être mouvementée.
Je me sens comme une brebis acculée par les loups. Au moins, j'ai de bons bergers à mes côtés.
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