Chapitre 26

Lorsque je me réveille, Darel n'est plus là. Il m'a laissé un message sur la table de chevet.

« Je suis parti rejoindre Jaime et Nathan au café du coin. Je n'en ai pas pour très longtemps, alors ne sors pas seule. Darel xxx »

Il a signé son nom avec trois petits x. Je réagis comme une adolescente en effervescence et sautille partout. Personne ne laisse un seul x, ceux qui en laissent deux sont au stade de l'amitié, à trois, c'est un amour possible et à quatre, c'est l'amour fou. Darel et moi n'en sommes pas rendus là, mais après ce qui s'est passé hier, j'ai encore de l'espoir. Il ne peut nier qu'il y a quelque chose entre nous et que c'est plus que du sexe. D'accord, c'était terriblement plaisant, mais j'ai ressenti cette petite étincelle qui était loin d'être présente avec Mickael et mon ex. Darel ne m'a pas baisée ; il m'a fait l'amour. Passionnément.

Je décide de manger en l'attendant, mais le temps passe et il ne revient pas. Dépassé l'heure du midi, je commence à être inquiète. Lui serait-il arrivé malheur ?

Deux heures plus tard, je tourne en rond dans le salon comme un lion en cage. Quelque chose ne tourne pas rond. J'enfile ma veste et décide de sortir. Il a parlé du café du coin. Je crois que je sais où il se trouve. Ce n'est qu'à une rue d'ici. Je vais aller vérifier et s'il n'est pas là...j'improviserai.

La rue est plutôt calme en ce dimanche matin. Aucun magasin n'est ouvert. C'est à croire que tout le monde reste cloîtré chez soi le dimanche ! En plus, le temps est plutôt gris. Je n'ai apporté aucun parapluie, alors j'espère qu'il ne pleuvra pas.

Lorsque j'arrive au petit café, l'endroit est désert. Qu'est-ce que je fais ? Et s'il parlait d'un autre café ? Je décide de poursuivre ma marche et avance à travers la ville qui m'est presqu'inconnue. J'essaie de me souvenir du chemin pour le retour.

Au bout de presqu'une heure, je m'avoue vaincue. Darel n'est nulle part. Je décide de rebrousser chemin. Peut-être est-il rentré ? Il va péter un plomb s'il voit que je suis partie. Je souris à cette pensée ; c'est toujours drôle de voir l'agent sortir de ses gonds, lui est est habituellement si impassible. Ça ne lui arrive pas souvent, mais j'ai l'impression qu'il est plus humain lorsque ça arrive.

Je passe par une petite ruelle déserte et m'aperçois que je n'ai pas pris ce chemin à l'allée. J'ai dû rater le tournant. Je suis en train de me demander si je dois continuer, de toute façon, tous les chemins mènent à Rome, comme on dit, mais j'entends au même moment des bruits de pas derrière moi. Je me retourne et retiens un cri lorsque je vois trois hommes obstruer mon chemin. Le premier semble avoir la petite cinquantaine. Il porte des habits noirs et propres et possède une petite barbiche. Les autres derrière lui paraissent un peu moins propres. Ils sont habillés comme des clochards avec de longues vestes sombres et leurs pantalons bruns troués. Ils sont mal rasés et ont les dents croches. Je grimace de dégoût, mais reporte mon attention sur le premier.

-       Perdue ? me demande-t-il avec un sourire vicieux.

- Non, je sais où je vais, je rétorque, ce qui les fait rire.

Probablement parce personne de sensée ne se serait aventurée dans ce fond de ruelle.

-       Ce n'est pas une bonne idée pour une fille comme toi de se promener seule le soir.

Mince ! Je n'ai pas porté attention, mais le ciel s'obscurcit, signe que c'est la tombée du jour.

-       Je retournais justement chez moi, leur lancé-je.

-       Je ne crois pas, non, réplique l'individu. Jamais je n'aurais songé que Darel aurait laissé sa douce sortir seule. Ça va grandement nous faciliter la tâche.

-       Hein ?

Ils connaissent l'agent. Je comprends alors qu'ils comptent faire de moi leur monnaie d'échange pour faire pression sur Darel. Mais pourquoi ?

Alors, je comprends.

-       Vous êtes son beau-père, c'est ça ? lui demandé-je.

-       Plus maintenant. Désormais, je suis son adversaire. Jamais il ne gagnera contre moi.

Ses deux sbires sortent alors un poignard de leur poche.

-       Alors, voilà ce qui va se passer, me dit l'homme abject. Tu vas être docile, sinon ce petit con va retrouver ton corps dans les poubelles. Suis-je clair ?

Je ne sais pas quoi faire. Si je cours, ils me rattraperont certainement. Pourtant, je n'ai pas envie de devenir leur captive.

-       Donc, si je vous suis gentiment, vous ne me ferai rien, récapitulé-je.

Son sourire faux me prouve le contraire. Que j'obéisse ou pas, ils me tueront. Je sais que le beau-père de Darel veut sa vengeance à n'importe quel prix. Peux-tu deviendrai-je une prisonnière jusqu'à la fin de mes jours. De cette façon, Darel ne pourra pas le coincer si je suis toujours envie. Je crois que je préfèrerais mourir... Vais-je être enfin en sécurité un jour ou suis-je maudite ? Si les circonstances n'étaient pas aussi graves, j'éclaterais en sanglots.

Je pleurerais de désespoir. Quitter un gouffre pour plonger dans un autre. J'ai vraiment la poisse.

Alors, je choisis l'option la plus stupide. J'aurais pu essayer de négocier ma liberté mais, au lieu de cela, je me mets à courir. Je fonce dans la direction opposée. J'entends les pas de mes agresseurs. Si je n'accélère pas, ils vont m'attraper. Il n'y a aucune issue. Les portes de ces entrepôts lugubres sont verrouillées et il n'y a pas âme qui vive. Si j'arrive à l'intersection de l'autre rue, peut-être que je pourrai appeler à l'aide.

Alors qu'un infime espoir perce en moi, je sens une main empoigner mon épaule. On me tire par derrière, mais je me débats.

-       C'est une furie, cette fille ! s'exclame mon assaillant.

-       Calme-là.

Une énorme baffe me fait voir trente-six chandelles et j'arrête alors de remuer. Ma lèvre saigne et je vais probablement avoir un jolie cocard à l'œil. Il ne m'a pas raté, ce salaud !

L'autre brute me met un sac sur la tête dans lequel je peine à respirer. J'essaie de crier, mais l'air me manque. Je panique, alors je donne des coups de pieds à l'aveuglette, mais ils m'immobilisent.

-       Donne-lui un tranquillisant, ordonne le beau-père de Darel.

Non ! Ils vont me droguer, ces infâmes individus ! Ils vont m'emmener dans un endroit où je ne ressortirai jamais vivante. J'ai assez vu de films et d'émissions télévisés pour savoir que je ne ressortirai pas vivante de cette histoire. Alors, je puise dans les dernières forces qu'il me reste et je hurle autant que mes poumons le peuvent. Le cri est étouffé par le sac, mais il se répercute quand même dans la ruelle. Assez pour qu'un passant en soit alerté.

Sauf qu'il n'y a personne, ou qu'on m'ignore, allez savoir !

Je commence à pleurer, à bout de forces.

-       Cette salope va regretter d'avoir croisé cet agent de merde, avise le monstre. Et Darel va regretter tout ce qu'il m'a fait perdre.

On remonte la manche de ma veste et mes sanglots s'accentuent.

-       Non, pas ça, pitié, leur dis-je. Je ferai tout ce que vous voudrez, mais ne m'endormez pas.

-       Ça, tu peux le dire, ricana le bandit. Tu feras tout ce qu'on veut. On enverra des photos à ton amoureux de toi accrochée à...

Un coup de feu le fait taire. Je ne vois rien, mais j'entends un gémissement de douleur, puis un bruit de chute. On me pousse par terre et ma tête heurte le trottoir. Assommée et à-moitié consciente, je ne parviens pas à comprendre ce qu'il se passe. Je me débats et arrive à arracher le sac, mais je suis désorientée.

Puis, je vois des hommes de battre. Ils sont vraiment doués et donnent une raclée à mes agresseurs. Le premier git par terre, toujours vivant, mais l'épaule en sang. Le deuxième se fait rapidement maîtriser et se retrouver les mains lier dans le dos. Le beau-père de Darel se retrouve immobilisé par ce dernier, que je reconnais alors.

Une boule de soulagement se forme dans ma gorge ; ils sont venus à ma rescousse !

-       J'espérais que tu commettes un impair, dit Darel à son beau-père, mais j'ignorais que tu le ferais sous mon nez. J'ai désormais assez de preuves pour t'envoyer en prison pour le reste de tes jours.

L'homme, que Nathan et Jaime maintiennent immobile, crache sur Darel.

-       Tu ne perds rien pour attendre, petit ingrat. Je t'ai moi-même élevé et voici comment tu me remercies !

-       Tu ne m'as pas élevé, rétorque Darel. Tu n'as fait que bousiller la vie de ma famille. Tu mérites de crouler en prison comme le criminel que tu es.

L'homme tente de se débattre, mais les agents le maintiennent d'une poigne de fer. J'entends des sirènes et devine que l'aide arrive. Ce n'est que plusieurs minutes plus tard que j'aperçois des policiers qui déboulent tous en même temps dans la ruelle. Ils embarquent immédiatement les criminels et, une fois chose faite, on s'intéresse immédiatement à moi. Je touche ma tête et un liquide poisseux tâche mes doigts.

-       J'appelle l'ambulance, dit Nathan en sortant son téléphone.

-       Non, ça va, m'opposé-je.

-       Tu es blessée, me fait remarquer Darel en s'approchant précautionneusement de moi comme si j'allais fuir.

-       Je me suis juste cognée la tête en tombant.

-       Sauf que ta lèvre saigne et que tu as une ecchymose à l'œil, rétorque l'agent. C'est peut-être grave.

-       Non, s'il te plaît, pas l'ambulance, je le supplie.

Il secoue la tête, mais finit par abdiquer.

-       Je t'emmène à l'hôpital, dans ce cas, dit-il, et ne proteste pas.

On m'aide à me relever. J'ai la tête qui tourne, alors Darel me guide jusqu'à une voiture. C'est probablement celle de ses collègues puisqu'il n'en possède pas.

-       Comment avez-vous fait pour me retrouver ? lui demandé-je.

-       Lorsque je suis retourné à l'appartement, tu n'y étais plus, alors les gars et moi avons parcouru les rues pour te trouver. C'est ton cri qui nous a alertés. Nous n'étions pas très loin, fort heureusement.

Je hoche la tête, mais grimace lorsque la douleur surgit.

-       Ne bouge plus, m'ordonne Darel en m'installant sur le siège passager. Tu risque d'empirer ta blessure.

-       Je vais tacher tes sièges.

-       Si tu savais comme je m'en fiche !

Il roule jusqu'à l'hôpital et nous arrivons aux urgences, où on s'occupe immédiatement de moi. On me diagnostique une commotion cérébrale, alors je reste trois jours à l'hôpital. Nathan et Jaime viennent me voir tous les jours et m'apprennent que Darel s'occupe de l'affaire de son beau-père. Ce dernier est passé au tribunal et a écopé de vingt ans de prison ferme sans possibilité de libération conditionnelle. On m'a interrogée et, bien qu'il ne m'ait pas touchée, c'était bien lui le cerveau des opérations.

Je ne revois donc pas l'homme que j'aime pendant plusieurs jours et j'angoisse à l'idée qu'il ne veuille plus me revoir. Après tout, j'ai, une fois de plus, désobéi à ses ordres.

La journée de ma sortie, les agents apportent toutes mes affaires. Mon séjour à l'hôpital m'a fait réaliser que je dois m'éloigner de toute cette histoire d'agents secrets et de missions périlleuses. Je veux mener une vie paisible, alors j'ai contacté ma tante et j'ai l'intention de partir vivre chez elle en Australie. C'est même elle qui a payé mon billet d'avion. Elle m'a dit que la date était modifiable, alors que je pouvais partir n'importe quand. Puisque je ne veux pas m'attarder à Paris (je n'ai plus vraiment le goût de visiter. Je veux seulement m'éloigner de tout cela) et que Darel ne s'est pas manifesté, je décide de partir aujourd'hui même.

-       Es-tu certaine que tu ne veux pas rester un peu ? s'enquit Jaime.

-       Oui, je n'ai plus rien à faire ici, réponds-je d'une vois résolue.

Ils me conduisent donc à l'aéroport.

-       Tu vas nous manquer, me dit Nathan. Tu es devenue notre petite sœur adoptive.

Je leurs souris.

-       Vous allez me manquer aussi. Si un jour vous passez par Sydney, vous viendrez me saluer.

-       C'est certain ! Nous avons déjà une nouvelle mission. Nous partons dès demain à Shanghai.

-       Darel aussi ?

Les deux agents échangent un regard.

-       Non, lui, a une autre mission, me répond Jaime.

-       Oh...

-       Prends soin de toi, Sarah, me disent-ils en me serrant dans leurs bras.

Je retiens mes larmes. J'espère de tout cœur les revoir un jour.

Ils partent finalement et me laissent passer seule aux douanes. Puis, je m'assois en attendant le départ de mon vol. Je suis triste que Darel n'ait même pas pris la peine de me dire adieu. C'est comme si le temps que nous avions passé ensemble n'avait jamais existé. Je suis blessée par son attitude indifférente, mais, après tout, il ne m'a rien promis. J'espère toutefois parvenir à l'oublier un jour.

Alors que je suis perdue dans mes pensées, un individu s'assoit à côté de moi. Je ne lève pas les yeux, trop perdue dans mes pensées.

-       Je crois que vous vous trompez de destination, mademoiselle, me dit-il.

Je vois alors sa main de tendre devant mon visage avec un billet d'avion sur lequel Las Vegas, Californie est écrit. Je lève les yeux vers l'individu et pousse un cri de surprise.

-       Darel ! Que fais-tu là ?

Celui-ci me sourit.

-       Je me disais que tu pourrais avoir besoin de compagnie.

-       Je ne veux pas aller à LasVegas, affirmé-je.

-       Qu'est-ce que j'irais faire là ?

-       Je pensais que tu aimerais te créer une toute nouvelle identité me répond-il. Repartir à zéro ailleurs.

-       C'est ce que je vais faire. En Australie.

-       Dans ce cas, je suppose que ceci ne te servira pas...

Darel me tend un passeport. Ma photo apparait sur celui-ci, mais j'ai les cheveux châtains.

-       Savana Smith. Qui est-ce ?

-       Toi.

Il me montre un autre passeport sur lequel il est écrit « David Smith ». Comme le chef-d'œuvre. Darel comprend que j'ai saisi le sous-entendu du nom parce que sa lèvre se soulève avec un petit sourire moqueur.

-       Tu veux encore te faire passer pour mon frère ? m'enquis-je.

-       Non, pas cette fois-ci.

-       Alors, pourquoi porte-t-on le même nom ?

-       Parce que nous allons nous marier à Las Vegas.

Ma mâchoire se décroche. Ai-je bien entendu ?

-       Je ne comprends pas, lui dis-je. Je pensais qu'on ne pouvait pas être ensemble.

-       Tu ne peux avoir une relation avec Darel l'agent secret, mais avec David, si. Moi aussi, j'ai décidé de changer d'identité pour être avec toi.

Je ne sais quoi répondre, mais mon cœur bondit de joie.

-       Pourquoi ? demandé-je.

-       Parce que je me suis rendu compte que je tiens à toi et que mes buts dans la vie ont changé.

-       Tu ne veux plus être agent secret ?

-       Disons que mes ambitions ont changé. Je préfère effectuer un travail plus stable et mener une vie avec ma bien-aimée.

Je me jette dans ses bras, folle de joie. Darel me serre dans les siens et glisse sa main dans mes cheveux. Des picotements de bonheur parcourent mon corps entier.

-       Dans ce cas, que proposes-tu pour l'avenir ? je lui demande.

-       Premièrement, nous allons nous marier à Las Vegas pour valider notre nouvelle identité et, ensuite, je propose une lune de miel...en Australie. Est-ce que ça te va ?

Je hoche la tête ravie.

-       Finalement, ajoute-t-il, j'ai pensé à un endroit où habiter qui, j'en suis sûr, te plairas. J'ai même trouvé une jolie petite maison de campagne.

-       Où ? je m'enquiers.

-       Charleston, Virginie-Occidentale.

Je reste bouche bée.

-       Comme dans la chanson ?

-       Exactement. Tu adoreras les paysages et c'est un endroit plutôt calme où nous serons tranquilles.

-       Et qu'y ferons-nous ?

-       Je me suis trouvé un poste comme enquêteur spécialisé en criminalité. Avec mon bagage et ma formation, ils m'ont tout de suite engagé. Je travaillerai en collaboration avec les forces de l'ordre.

-       C'est super. Tu as déjà tout prévu. Est-ce pour cette raison que tu n'es pas venu me rendre visite à l'hôpital.

Il hoche la tête

-       Oui, j'étais pas mal occupé à tout planifier. J'ai pensé que tu pourrais retourner à l'école. Suivre les cours de ton choix.

-       C'est tentant, sauf que je n'ai pas encore d'idée du domaine d'étude wue je veux explorer.

-       Prends ton temps pour décider. Rien ne presse pour l'instant. J'ai suffisamment d'argent pour nous deux.

J'entends l'annonce pour l'embarquement du vol pour Las Vegas.

-       Prête pour ta nouvelle vie ? me demande Darel avec un sourire ravageur.

-       Tu es beau lorsque tu souris ainsi, je lui réponds.

-       David sourira plus souvent que Darel, me promet-il avec un clin d'œil.

Il prend ma main et nous nous dirigeons vers la porte d'embarquement avec une toute nouvelle allégresse.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top