Chapitre 20

Je me redresse immédiatement comme si une décharge électrique m'avait traversée. L'homme à mes côtés m'adresse un petit sourire perfide que je reconnais aussitôt. J'ai l'impression de recevoir un sceau d'eau froide sur la tête.

-       Non...ce n'est pas possible, je murmure pour moi-même.

Mon sang se glace dans mes veines, j'arrête de respirer et je me tend. Je me dépêche de couvrir mon corps même si le mal est fait : je viens de coucher avec le jumeau de l'homme que j'aime.

Je réalise alors que mes sentiments pour Darel sont bien plus profonds que l'amitié. J'ai cet homme dans la peau. J'aime son self-control, sa confiance en lui, son petit côté autoritaire et mystérieux, bref, je suis totalement accro à lui.

Et son frère vient de me baiser. C'est le terme adéquat. Mickael n'a aucun sentiment pour moi. C'est un être égoïste qui fait ce qui lui plaît et qui n'a aucune considération pour autrui.

La lèvre de mon amant se retrousse lorsqu'il voit ma réaction. D'une main, je m'empare de son bras. C'est impossible qu'ils aient le même tatouage...

Je remarque alors de l'encre sur ma main. Elle a coulé à cause de sa transpiration et le dessin ne ressemble plus à rien. J'en reste bouche bée. Je me suis fait avoir comme une débutante.

-       J'ai toujours ce que je veux, me lance le mafieux en se levant.

Il se rhabille. Comment a-t-il fait pour se vêtir des mêmes vêtements que Darel ?

-       Tu es un enfoiré, je crache d'une voix enragée.

-       Je sais.

J'ai envie de l'étrangler et de le découper en minuscules petits morceaux pour ensuite les lancer aux oiseaux.

-       Ça été un plaisir de faire affaire avec toi, Trésor, me dit-il tout juste avant de sortir de la chambre.

En plus, il me traite comme une prostituée. Sauf qu'il ne m'a pas payée et que j'étais plus que consentante.

Je reste étendue sur le lit en me maudissant. Comment peut-on avoir une vie aussi foireuse ? Le jumeau de Darel s'est servi de moi et de mon corps sans aucun remord.

-       Que fais-tu au lit à cette heure ? me demande alors l'agent en pénétrant dans la chambre.

Est-ce que je lui dis que j'ai fais la pire connerie de ma vie ?

Non.

J'ai trop peur de sa réaction. Il ne voudra jamais de moi s'il découvre que j'ai été une conquête de son frère. Je n'ai pourtant pas dit mon dernier mot à ce sujet. Je suis prête à tout pour conquérir son cœur, quitte à lui cacher cet...accident. J'ai couché avec Mickael par accident ; c'est un fait.

-       Sarah ? insiste Darel en voyant que je ne réponds pas.

-       J'étais fatiguée, je dis seulement.

-       D'accord.

Il repart aussitôt et je me souviens alors de ce que je lui ai dis sur sa sœur. Il m'en veut. Je m'en veux également. Je crois que je ne le mérite pas, finalement. Je suis une grosse égoïste à ne penser ainsi qu'à moi. Darel a mis sa vie entre parenthèse pour me protéger et voilà ma façon de le remercier !

C'est alors que j'ouvre les vannes. Je cache ma tête dans l'oreiller, qui étouffe mon cri et mes pleurs. Je frappe la pauvre taie pour évacuer la violence qui fait rage en moi. Je suis affligée, perdue et j'air la rage au ventre.

Après un long moment à pleurer, je sèche mes larmes, m'habille et sors de la chambre. J'entends alors la voix de Darel dans la cuisine. Il parle au téléphone puisque je ne reconnais pas son interlocuteur.

-       C'est bon, je monte, dit-il seulement en raccrochant.

L'agent lève les yeux et m'aperçoit alors.

-       Je vais chez Mickael, m'annonce-t-il. Il veut me parler.

Oh non ! Mickael va-t-il lui dire ce qu'il vient de se passer entre lui et moi ? Ce connard veut-il créer encore plus de discorde entre nous ? Ce serait son genre.

-       As-tu une idée de ce dont il veut te parler ? je lui demande en essayant de ne pas montrer mon anxiété.

-       Non. Reste ici et verrouille la porte. Je reviens aussitôt que possible.

Je hoche la tête pendant qu'il sort.

Sauf que je veux savoir ce que son frère va lui raconter exactement sur moi. Je me doute qu'il va mettre les faits à son avantage et qu'il va probablement mentir à Darel alors je veux savoir à quoi m'en tenir afin de pouvoir défendre ma version des faits.

Quelques minutes après le départ de l'agent, je décide de le suivre en catimini. Je prends l'ascenseur et me rends à l'étage du mafieux. Sauf que je ne frappe pas à la porte avant d'entrer. Je la pousse doucement, enlève mes chaussures sans faire de bruit et marche sur la pointe des pieds.

Je reconnais immédiatement les voix des deux hommes, qui se trouvent au salon, alors j'avance dans le couloir, me faisant aussi petite qu'une souris, et tend l'oreille.

-       Qu'est-ce qui pressait autant pour que tu me demandes de venir de voir ? fait la voix de Darel.

-       J'ai reçu une proposition intéressante, mon frère.

-       Arrête de m'appeler ainsi.

-       Comme tu veux. Figure-toi que Maxim Goussev a retrouvé la trace d'Isabelle.

-       Quoi ? Tu veux dire que la mafia russe sait où elle se cache ?

-       Exactement. Ils veulent qu'on fasse un échange. Si on leur livre Sarah, ils nous révèleront où se trouve notre sœur.

Eh merde ! J'ai l'impression que le ciel me tombe sur la tête. Je leur faisais confiance (peut-être pas à Mickael, mais à Darel, si) et voilà qu'ils veulent me livrer à ceux qui ont tué mon frère.

Il y a un grand silence.

-       Je ne sais pas si on doit leur faire confiance, dit Darel.

-       Regarde cette photo d'elle. Ce sont eux qui l'ont prise. Elle est datée d'il y a deux jours. Ce n'est pas un canular, Darel.

J'ai l'impression d'étouffer. Tout ça pour me faire finalement tuer ! Ou pire ! Je me souviens de la promesse de Maxim.

-       Je ne peux pas faire ça, dit alors Darel. J'avais promis à Ethan de protéger sa petite sœur. Et elle compte pour moi...

-       Je ne crois pas que ce soit réciproque, rétorque Mickael. Après tout, je viens de la baiser.

-       Quoi ?

-       Elle m'a littéralement sautée dans les bras. Je dois avouer qu'elle est plutôt bonne au lit.

J'en ai assez entendu. Je tourne les talons et sors du penthouse de ce traître de Mickael. Ma décision est prise : je me tire d'ici avant d'y trouver la mort. Je sais que mon temps est compté. En vitesse, je lance mes affaires pêle-mêle dans mon sac à dos, prends ma guitare et me dirige vers le hall d'entrée. Toutefois, je suis à quelques pas de ma liberté lorsque la porte s'ouvre à la volée. Le Darel que je connais n'est plus. Son visage n'est que fureur et j'en devine la raison.

-       Est-ce que c'est vrai ? demande-t-il. Je sais que tu nous écoutais.

Mes larmes dévalent mes joues en cascade.

-       Est-ce que mon frère t'a touchée ? hurle-t-il, cette fois.

Je hoche la tête et l'entends jurer.

-       Pousse-toi, lui dis-je.

-       Hors de question que tu partes.

-       Je sais que je suis ta seule et unique chance de retrouver ta sœur, mais je te ne laisserai pas me livrer à la mafia russe, lui dis-je.

Ses yeux me lancent des éclairs.

-       Tu ne sortiras pas d'ici le temps que ma décision ne sera pas prise, crache-t-il.

-       Elle l'est déjà, je crie. Tu m'as clairement fait comprendre que tu la choisissais, elle.

-       Je te faisais confiance, Sarah. Je pensais que tu me respectais, mais tu es allée te jeter dans les bras de mon frère.

-       Je...

-       N'essaie pas de te justifier. Ce que tu as fait est inexcusable.

Si je lui dis que j'ai cru qu'il était Mickael, il ne me croira pas. Mon regard est attiré par le pistolet que Darel a déposé sur la petite table console de l'entrée. Sans plus attendre, je me jette dessus avant qu'il ne devine mon plan et la pointe sur l'agent.

-       Laisse-moi passer, je lui ordonne, ou je te tire dessus.

-       Tu ne feras pas ça, dit-il d'un air assuré.

J'enlève le cran de sécurité. Serais-je capable de tirer sur l'homme que j'aime pour épargner ma vie ? Absolument pas. Mais je veux lui faire croire le contraire.

-       Tu as tord, je lui lance. Tu as tord sur tout.

Je pointe le fusil droit sur lui. Nous sommes à un mètre l'un de l'autre et nous nous fixons comme deux cowboys au far West. Lequel des deux attaquera le premier ?

-       Je te connais, me dit-il. Tu ne me tireras pas dessus.

J'ai envie de le faire juste pour lui prouver que j'en suis capable, mais ma main tremblante me démontre le contraire.

J'essaie de réfléchir rapidement au moyen de me sortir de cette impasse et je n'en trouve aucun. Je cogite encore et encore pendant de longues secondes et j'en viens à une conclusion : je ne cèderai pas. Soit il me laisse partir, soit je vais lui faire mal. Une balle dans un bras le retarderait probablement. Je le blesserais, mais il resterait vivant et je pourrais fuir loin d'ici.

Darel semble suivre le cours que prend mes pensées...ou plutôt mes yeux, qui sont maintenant posés sur son bras. Il lit en moi comme dans un livre ouvert et il devine que je veux lui tirer une balle à cet endroit. Alors, il dévie le canon du fusil avec sa main si rapidement que, lorsque je m'aperçois qu'il ma désarmée, je suis par terre avec lui par-dessus moi.

-       Laisse-moi, je hurle en me débattant.

-       Calme-toi, Sarah, nous allons discuter tranquillement si tu coopères.

Coopérer ? Il se fout de ma gueule. Je ne suis pas si naïve !

Il retient mes deux mains par-dessus ma tête et mes jambes entre les siennes. Une heure plus tôt, j'aurais adoré être enlacée ainsi à lui. Plus maintenant.

Notre corps-à-corps dure plusieurs minutes, puis je finis par abdiquer. Il me relâche alors, mais j'en profite pour lui donner un coup de pied dans l'entrejambe.

Darel a perdu ma confiance au moment où il m'a reproché d'avoir couché avec son frère. Il connait mes sentiments pour lui, alors comment a-t-il pu être aussi abject avec moi ?

L'agent pousse un cri et, pendant qu'il se tord de douleur, j'en profite pour me relever rapidement.

-       Désolée, lui dis-je. Désormais, tu es également mon ennemi.

Sur ce, je sors et cours vers l'ascenseur. J'appuie sur le bouton et, par miracle, les portes s'ouvrent quelques secondes plus tard.

-       Sarah, j'entends Darel m'appeler.

Vite ! J'entre dans la cabine et appuie frénétiquement sur le bouton pour refermer les cloisons mobiles. Je vois l'homme que j'aime courir vers moi, mais les portes se referment sur moi. J'ai tout juste le temps de voir ce regard transperçant qui hantera mes nuits pour le reste de mes jours.

Darel n'est pas triste de me perdre. Il est triste de perdre le seul moyen de retracer sa sœur. Je le comprends. À sa place, j'aurais agis exactement comme lui.

Toutefois, je veux vivre. J'ai peut-être fait une tentative de suicide quelques mois plus tôt, mais depuis que j'en sais plus sur la mort de mon frère, je veux me battre pour obtenir justice.

Mes ennemis me cherchent, alors ils vont me trouver !

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