Chapitre 16
Ma brassée n'est pas encore terminée, mais je m'en tape. Je préfère me pointer chez Mickael accoutrée comme la sportive que je ne suis pas que de me mettre sur mon trente et un. Peut-être va-t-il se rendre compte que je suis loin d'être une poupée qu'il peut manipuler à sa guise. C'est donc vêtue d'un pantalon moulant en nylon et d'un débardeur noir que je me rend chez le chef de la mafia avec ma guitare que j'ai récupérée en vitesse dans notre appartement.
Darel me suit comme son ombre et nous sommes accueillis par une femme tout en courbes habillée d'une robe très courte. Elle nous sourit aimablement et nous fait signe d'entrer.
- Enchantée, nous dit-elle. Mickael arrive. Il est...
- C'est bon, beauté, ils n'ont pas besoin de savoir ce que nous faisons dans la chambre à coucher, la coupe Mickael en venant nous accueillir.
Il porte son habituelle tenue noire, qui semble avoir été enfilée en vitesse. Ses cheveux sont ébouriffés, signe qu'il n'a pas eu le temps de sauter sur une brosse. Par contre, il semble avoir sauté sur autre chose...
- Pourquoi nous avoir fait venir, puisqu'apparemment, on vous dérange ? lui demandai-je.
- Tu ne me déranges jamais, Trésor.
Je me retiens de lever les yeux au ciel.
- Comme cela, il parait que vous avez rencontré mon vieil ami, Maxim. Il est charmant, n'est-ce pas ?
La colère revient immédiatement. Ce connard semble s'amuser de cette petite trahison.
- Charmant ? explosai-je. Il m'a menacée de me baiser, puis de m'égorger quand il en aurait terminé avec moi.
Mickael éclate de rire. Sauf que je n'ai pas du tout le goût de plaisanter.
- C'est tout à fait son genre, rit-il.
Puis, il reprend son air sérieux.
- Ne t'inquiète pas, me dit-il, il n'en fera rien.
J'en doute vraiment. Toutefois, je ne dis rien et Mickael nous invite à nous installer au salon. Je sors ma guitare et m'installe tandis que le parrain de la mafia me scrute avec attention.
- J'aimerais que tu t'achètes des fringues un peu plus... présentables, me dit-il.
- Pourquoi ?
- Comme tu as pu le constater hier, tu devras parfois faire des petits spectacles devant certains invités, alors ce serait mieux si tu portais des vêtements convenables. À moins que tu préfères te balader en bikini. Pas que ça me dérange...
Je lui jette un regard noir. Puis, avant qu'il ne puisse ajouter quoique ce soit, je commence à jouer. Les deux frères m'écoutent attentivement.
Je continue ainsi pendant des heures jusqu'à ce que ma voix devienne rauque et que la nuit soit bien avancée.
Finalement, je m'arrête et remarque que Mickael me fixe avec convoitise tandis que les yeux de Darel brillent d'un éclat singulier. On dirait...de l'affection. Cependant, le temps d'un battement de cil et la magie a disparu !
Je réalise que je meurs de faim puisque je n'ai pas dîné. Cet égoïste de Mickael ne m'a pas laissé une seule seconde pour me reposer.
- Ça ira pour ce soir, dit-il enfin.
Ce n'est pas trop tôt !
Je hoche la tête et me lève, suivi par Darel. Nous retournons dans notre petit studio où je m'affale sur le tapis, exténuée. La vie de chanteuse, c'est dure !
L'agent s'affaire dans la cuisine et me rapporte un sandwich.
- Merci, lui dis-je en croquant dans mon dîner.
Darel mange à son tour, puis une fois notre fringale passée, nous nous couchons. Par contre, cette fois-ci, mon compagnon prend la peine de disposer une barrière d'oreillers au milieu du lit. Bref, le message est clair : Reste de ton côté.
Après le rapprochement dans la laverie, je suis déroutée par son comportement et je réalise qu'il le regrette amèrement. Pour lui, c'était un instant de faiblesse, qui, je le comprends, n'est pas près de se répéter.
...
Le lendemain, j'ouvre les yeux en sentant un souffle sur ma peau et sursaute lorsque j'aperçois Darel penché sur moi.
- Qu'est-ce que tu fabriques ? l'apostrophai-je, furieuse de m'être fait réveillée ainsi.
À ma stupéfaction, il se met à palper mes bras et mes jambes sans aucune douceur.
- Mais arrête ! criai-je alors que sa main palpe mon ventre.
- Tu es blessée, répond-il. Les draps sont tachés...
J'écarquille les yeux...puis je lâche plusieurs jurons en comprenant que c'est ma période du mois. Je me lève en vitesse en pars m'enfermer dans la salle de bain. La journée commence mal !
Darel comprend vite qu'il doit éviter de m'embêter s'il veut garder sa tête. Je suis d'une humeur massacrante quand j'ai mes règles. Lorsque Mickael appelle et qu'il veut que je chante pour lui, je hurle des tas de bêtises à l'autre bout du fil. Même si ce n'est pas à moi qu'il parle, il comprend, surtout lorsque son jumeau lui explique la situation. Le mafieux me donne alors congé.
Je traîne toute la journée au lit, dont j'ai changé les draps. Mes maux de ventre sont épouvantables et même en avalant des comprimés d'ibuprofène, ça ne va guère mieux. En après-midi, j'entends les voix de Nathan et Jaime, mais je devine qu'ils n'osent pas s'aventurer dans l'antre de la bête.
Je me repose donc et rumine contre l'agent qui fout mon cerveau à l'envers. Pourquoi est-ce que je songe sans cesse à son baiser ? Pourquoi est-ce que j'aimerais recommencer ? A-t-il ressenti les mêmes pulsations que moi ? Sa réaction était-elle seulement due à ma provocation ?
Je n'arrive pas à trouver de réponse. Résultat : en plus d'avoir mal au ventre, j'ai un énorme mal de tête qui se pointe.
Le soir venu, Darel décide de dormir sur la carpette du salon. Quel lâche ! Il tue des criminels sans hésitation mais est incapable d'affronter une femme en plein déferlement hormonal !
Je tourne en rond toute la nuit et finis par m'endormir étendue en étoile. Lorsque je me réveille, les rayons du soleil traversent les lourdes tentures accrochées aux fenêtres. Je baille, puis m'étire. Je me sens mieux que la veille et, affamée, je cours presque jusqu'à la cuisine uniquement vêtue d'un long t-shirt. Je fonce vers le frigo, m'empare du lait et boit à-même la bouteille.
- Charmant ! dit une voix qui me fait sursauter.
Mon breuvage m'échappe des mains et se répand sur le carrelage de la cuisine.
J'aperçois alors Darel assis à la table en train de boire un café tout en lisant le journal. Il me dévisage.
- J'étais desséchée, je me défends.
- Et c'est une raison pour ne pas utiliser de verre ? Je vais devoir retourner à l'épicerie.
Dédaigneux, en plus ?
- Ça va, pestai-je. Je ne suis pas malade non plus.
- En tout cas, hier, tu n'en menais pas large.
- Peut-être, mais aujourd'hui est un autre jour.
Il me fixe, puis hoche lentement la tête, probablement rassuré.
- Bien, dit-il seulement. Dans ce cas, nous allons pouvoir t'acheter quelques tenues.
- Pourquoi ?
- C'est Mickael qui l'a exigé...souviens-toi.
Ce connard veut que je m'habille comme une petite p$%?$.
Je lâche un long soupire, puis repars dans la chambre m'habiller. Lorsque j'en ressors, les collègues de Darel sont là. C'est ensemble que nous nous dirigeons vers les boutiques branchées de New York. Jaime et Nathan sont excités à l'idée de magasiner...ce qui m'étonne d'eux. Je n'aurais pas cru qu'ils seraient aussi enthousiastes à l'idée de me suivre dans les magasins de vêtements. Au contraire, ils me proposent plein de différentes tenues de telle sorte que je me retrouve à essayer une dizaine de robes sophistiquées dans une cabine d'essayage.
- Oubliez l'idée que je défile, je leur lance à travers la porte. Vous ne me verres certainement habillée ainsi.
- Oh ! Allez ! me répond Nathan. Nous sommes venus pour ça.
Je refuse de leur montrer les robes que j'essaye car, en plus, d'être outrageusement sexy, plusieurs ne me font pas bien. J'opte finalement pour une robe à fines bretelle noire qui m'arrive en haut du genou, une bleu royal au décolleté vertigineux et un soutien-gorge à dentelle de style « push up » qui met en valeur mes atouts. Je choisis également une petite robe rouge bustier très très courte et une paire de souliers noirs à talon hauts.
Grâce à Mickael, je n'ai pas un sou à débourser car il a tenu à payer pour ces immondes vêtements.
Darel, fidèle à lui-même, reste en retrait et monte la garde à l'entrée de chaque boutique.
- Terminé ? me demande-t-il lorsque nous sortons du dernier magasin.
Je hoche la tête, soulagée que cette comédie soit terminée, puis nous retournons en taxi jusqu'à l'immeuble à logement.
Je n'ai pas de nouvelles de Mickael les jours suivants et c'est tant mieux.
Puisque je n'ai rien à faire à part jouer de la guitare, je décide de cuisiner. Quitte à ne rien faire, autant mettre mes talents culinaires à profit. Je commence à me lasser des sandwichs.
Ce jour-là, je cuisine des côtes levées pendant presque quatre heures et je les réussis plutôt bien. J'invite donc mes amis les agents à dîner et je reçois de bons commentaires de leur part. Mardi, je tente un bœuf bourguignon, que je rate car je l'oublie dans le four, mais je réussis tout de même mon gâteau.
Le soir venu, j'initie Darel à des émissions cultes de télévision. Je lui fais donc écouter une saison complète de Beverley Hills. Malheureusement, il s'endort après le quatrième épisode. J'ai envie de lui jeter un sceau d'eau par la tête comme punition, mais sa gueule d'ange m'en dissuade. Lorsqu'il dort, il semble libéré de tout le poids qu'il a sur les épaules et je le contemple en me demandant si un jour il se sentira libre de toutes ses responsabilités. Probablement pas tant qu'il restera agent secret.
Le lendemain, j'ai en tête de préparer une pizza. J'en cuisinais souvent avec mon frère et, en un an, c'est la première fois que je tente à nouveau l'expérience. Je prépare minutieusement la pâte, puis coupe mes légumes.
- Darel ! criai-je afin qu'il m'entende depuis le salon.
- Quoi ?
- Je n'ai plus de pepperoni. Pourrais-tu aller m'en chercher à l'épicerie ?
- Tu n'as qu'à ne pas en mettre.
Non mais il est malade ! Je déteste les pizzas végétariennes.
- S'il te plaît. J'en ai vraiment besoin.
Il arrive dans la cuisine en soupirant. Moi aussi j'ai envie de soupirer...d'extase. Ce type est un spectacle à regarder à lui seul. Son t-shirt moule parfaitement son torse musclé et ses bras bien découpés. Son jean tombe sur ses hanches et lui fait de superbes fesses. J'en bave presque.
- C'est vraiment nécessaire ? questionne-t-il.
- Oui.
Je lui fais mon regard de petit chien piteux, et il accepte finalement à contrecœur.
- Je reviens dans dix minutes, me dit-il. N'ouvre à personne.
- Oui, papa.
Il me lance un regard noir, puis s'en va.
Je continue ma préparation et attends patiemment son retour. Entre-temps, j'entends une sonnerie et réalise que Darel a oublié son téléphone sur la table de salon. En y jetant un coup de d'œil, je vois qu'il a reçu un texto de son jumeau.
« Sarah doit immédiatement venir au penthouse avec sa guitare » est-il écrit.
Un second message entre.
« Si elle n'est pas ici dans les deux prochaines minutes, je vais changer d'idée sur sa protection...et dis-lui qu'elle s'habille avec soin ! »
Ce malade me fait enrager. Il s'attend à ce que je sois toujours à ses pieds. Hélas, cela fait parti de notre arrangement que je lui ai proposé. N'importe quand !
Je décide donc de m'y rendre à l'instant. De toute façon, je reste dans l'immeuble, alors il ne peut rien m'arriver.
J'enfile ma petite robe rouge avec mes talons aiguilles et je saisis ma guitare.
Une fois rendue à l'étage du penthouse, je frappe et attends.
Mickael vient lui-même m'ouvrir et son visage change lorsqu'il m'aperçoit.
- Jolie ! me lance-t-il avec un sourire de requin. Tu t'es surpassée, Trésor.
Je le remercie avec détachement, puis le suis jusqu'au salon.
- Ton garde du corps n'est pas avec toi ? questionne le mafieux.
- Il a dû faire une course urgente, lui réponds-je.
Son air satisfait ne m'échappe pas.
- Prendrais-tu quelque chose à boire ? me demande-t-il. Du vin ?
- Non, merci, je dis avec politesse.
- Dans ce cas, installe-toi, je reviens.
Je prends ma guitare le temps qu'il s'absente et l'accorde avec soin.
Mickael revient et me tend un verre rempli l'un liquide rosé. Je n'ose pas refuser de peur de l'offusquer, alors je trempe mes lèvres et goûte à la boisson légèrement sucrée.
L'homme s'assoit à mes côtés au lieu de sa place habituelle en face de moi.
- Que vas-tu me jouer aujourd'hui ? me demande-t-il.
- Qu'aimerais-tu ?
- Hum...voyons voir...Pourquoi pas une des chansons les plus populaires de tous les temps ?
Je le fixe en en réagissant pas.
- Despacito !
Il est sérieux ? Son petit sourire provocateur me donne le goût de l'assommer avec ma guitare. Toutefois, j'y tiens trop pour la briser.
- Oui, je connais, mais mon accent espagnol laisse à désirer.
- Ce n'est pas grave. Après tout, il n'y a que moi.
Merci de me le rappeler.
Je débute donc cette chanson que j'ai tant entendue qu'elle me sort par les deux oreilles.
Sí, sabes que ya llevo un rato mirándote
Tengo que bailar contigo hoy
Vi que tu mirada ya estaba llamándome
Muéstrame el camino que yo voy (Oh)
Tú, tú eres el imán y yo soy el metal
Me voy acercando y voy armando el plan
Solo con pensarlo se acelera el pulso (Oh yeah)
Ya, ya me está gustando más de lo normal
Todos mis sentidos van pidiendo más
Esto hay que tomarlo sin ningún apuro
Despacito
Quiero respirar tu cuello despacito
Deja que te diga cosas al oído
Para que te acuerdes si no estás conmigo
J'arrête subitement de chanter lorsque je sens le souffle de Mickael dans mon cou. Qu'est-ce qu'il fiche ? Il s'est subtilement rapproché de moi pendant que je chantais et, maintenant, il est si près que je peux sentir l'odeur de son parfum trop épicé à mon goût.
Puis, je comprends.
Il ne m'a pas demandé de jouer cette chanson pour rien ; il avait quelque chose derrière la tête et, lorsqu'il commence à caresser mon épaule dénudée, j'en frissonne d'horreur.
- Qu'est-ce que tu fais ? je lui demande même si je connais déjà la réponse.
- Tu voix m'ensorcelle, me répond-il d'une voix suave.
Je perçois immédiatement le danger et tente un mouvement de recul, mais il me maintient près de lui.
- J'aimerais te montrer jusqu'à quel point, me chuchote-t-il à l'oreille.
- Mickael...je ne veux pas de ce genre de relation avec toi.
- Tu ne le regretterais pas. Je suis un amant formidable. J'aimerais que notre relation ne se limite pas à passer notre soirée dans ce salon, mais plutôt dans ma chambre.
Je retiens un frisson de dégoût. Mickael est la copie conforme de son frère, mais son côté obscur me repousse. Son regard pervers me répugne et je ne veux pas être un trophée de plus à son tableau de chasse.
- Donc, tu m'offres de devenir ta pute personnelle, en déduis-je.
Il grimace suite à mon commentaire.
- Je ne l'aurais pas dit ainsi, rétorque-t-il, maintenant amusé. J'ai besoin d'une compagne qui est belle, douce, sexy et qui pourra m'accompagner lors de soirées mondaines.
- Et que tu pourras exhiber comme une poule de luxe, je termine.
Je me lève brusquement et replace ma guitare dans son étui.
- Malheureusement, je ne peux agréer à ta requête, lui dis-je alors. J'ai accepté de chanter pour toi, mais ma voix est l'unique chose que tu auras de moi.
Le mafieux n'a pas l'air content et je crains le pire, mais il se contente de me sourire avec une certaine férocité.
- J'aime les défis, me dit-il seulement.
Seigneur ! Il n'a rien compris du tout.
Je décide que c'est tout pour l'instant et lui tourne le dos.
- N'espère rien de lui, me dit-il alors.
Je m'immobilise, devinant de qui il parle.
- Jamais il n'abandonnera son boulot pour toi. C'est toute sa vie et elle n'implique aucune relation qui pourrait mettre en péril ses missions. Être agent signifie être seul. Darel l'a compris il y a longtemps et ne risquera pas d'aimer qui que ce soit.
Je m'en doute depuis le début, mais l'entendre le dire me broie le cœur.
Au même moment, un Darel remonté entre en coup de vent dans le penthouse. Lorsqu'il me voit, il s'approche de moi et me fixe de ses prunelles bleues. Il semble deviner que quelque chose me perturbe, car il ne dit rien. Il se contente de me suivre en silence tandis que je sors de la maison de ce maudit chef de la mafia.
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