Septembre 1957 (Toujours oui)

Je dois dire que je regrettais déjà ma chambre et son confort des plus appréciable. Premier jour au lycée, première heure de cours et je m'ennuyais déjà comme un rat mort... Drôle d'expression soit dit en passant ! Lorsque l'on considère que même une chose complètement crevée est capable de s'ennuyer, ça laisse place à l'imagination. À l'appréhension de ce qui nous attend dans l'autre monde (si autre monde il y a) si même dans l'après vie nous sommes destinés à nous ennuyer solennellement. Peut-être que l'ennui est la pire des punitions, et considérant les rats comme des nuisibles, nous leur avons réservé une sorte d'enfer spécial où eux aussi ont le droit à un cours de biologie des plus rasoir et cela dans une langue étrangère qui plus est...

Peut-être était-ce cela mon après vie ? Peut-être m'étais-je faite écrasée par un piano tombé d'on ne sait où avant d'entrer dans ce sinistre bâtiment et que j'étais entouré d'esprits de rats ayant pris l'apparence d'humains dans leur enfer personnel car l'on avait posé mon âme dans la mauvaise catégorie...

Je passais donc les dix premières minutes du cours à divaguer, la tête appuyée sur mes bras eux-même appuyés sur la table. Dix minutes, c'était quand même court pour déjà prétendre s'ennuyer mortellement. Mais j'étais ainsi, je manquais de concentration et pourtant je réussissais bien en cours, raison pour laquelle on m'avait fait sauter une classe en primaire bien que j'étais déjà plus jeune que mes autres camarades, étant née en fin d'année.

Je fermais les yeux, méditant encore et toujours sur les rats, pauvres rongeurs incompris et unanimement détestés quand le coude de mon voisin de table me réveilla enfin me détourna de mes préoccupations un peu inhabituelles.

Je me tournais lentement vers lui tout en me redressant, essayant de conserver un air neutre bien que sa façon brutale de requérir mon attention m'ait un peu énervé.

« What? *Quoi ?* » Fis-je donc.

« This is no place to sleep. *Ce n'est pas un endroit pour dormir.* » il me répondit alors l'air sévère.

Je le regardais quelque peu décontenancée, et alors ? En quoi cela le concernait-il. Je soufflais bruyamment tout en me frottant les yeux. Le prof lui ne m'avait pas remarqué alors pourquoi lui trouvait quelque chose à y redire.

« I really don't see where the problem is. *Je vois pas vraiment où est le problème.* » rétorquais-je froidement.

« You can't even speak english properly, you better be listening in class. *Tu parles même pas anglais correctement, alors tu ferais mieux d'être attentive en classe.* » répondit-il aussi froidement.

Il retournait alors son attention vers le prof alors que je reprenais ma position initiale. J'allais pas obéir au bon vouloir de monsieur, non mais. Celui-ci en décida autrement puisqu'il me malmena de nouveau avec son satané coude alors qu'un gars derrière nous, le gars super confiant de tout à l'heure, pouffait pas du tout discrètement.

Alors que je me redressait de nouveau en jetant un regard noir à mon agaçant voisin de table (moment auquel je me fis la promesse de ne plus jamais me mettre à côté de lui), je le détaillait en vitesse. Il était blond...ou peut-être roux, quoi que châtain peut-être ? Non il avait une couleur de cheveux indéfinissable mais l'on pouvait dire qu'ils étaient clairs. Il avait l'air pas mal grand, bien que assis et il avait des yeux bleus en amandes et incroyablement froids. Il faisait constamment la gueule et avait l'air de s'ennuyer aussi fermement que moi et pourtant il avait l'air décidé à m'ennuyer toute l'heure.

« What's your name? *C'est quoi ton nom ?*» me demanda-t-il alors que je remarquais qu'il n'avait pas l'accent anglais ou américain d'ailleurs.

Je le regardais étonnée, ne m'attendant sûrement pas à ce que monsieur convivialité veuille faire connaissance.

« Um Um... Kat, yours? *Hum.. Euh Kat, et toi?* » fis-je hésitante.

« Olaf . » répondit-il alors brièvement.

« You're not from around here, am I right? *Tu n'es pas du coin, je me trompe ?* »

« Neither are you. * Toi non plus.* » rétorque-t-il alors avec un sourire.

Je dois dire que j'étais surprise de le voir sourire.

« Now that we've both established that none of us is from here, would you be more polite Olaf? *Maintenant que nous savons que nous ne sommes ni l'un ni l'autre d'ici, pourrais-tu être plus poli Olaf ?* » lançais-je très sérieuse.

Il leva les sourcils apparemment surpris.

« I've been quite polite I think, Kat. I come from Norway by the way and you're French I suppose? *J'ai été poli il me semble, Kat. Je viens de Norvège soit dit en passant et je suppose que tu es française ?* »

« Okay . »

« Now that we've introduced ourselves properly, would you fancy being my friend? *Maintenant que nous nous sommes correctement présenté, être ami ça te tente ?* » demanda-t-il solennellement tout en me tendant la main.

Je fixais sa main un moment, quelque peu décontenancée. Peut-être était-ce une façon de faire en Norvège. Je serrais sa main avant de répondre.

« I'm not French by the way, I lived there but I am not a native just to specify. *Je suis pas française soit dit en passant, j'y ai vécu mais je ne suis pas une native, juste histoire de préciser.* »

« Okay. »

Sur ces entre-faits (bordel j'aime ce mot!), il se contenta de recentrer son attention sur le cours, m'ignorant royalement pendant le reste de celui-ci.

Lorsqu'il arriva à sa fin, il me planta là, alors que je m'attendais à ce qu'il m'attende maintenant que nous étions « amis ». Et bien non, encore une coutume normale de Norvège je supposais.

Alors que je quittais le cours moi aussi, je ne remarquais pas une jambe sauvage apparaître d'un bureau voisin et je me rétamais proprement par terre, tête la première. Le responsable se leva nonchalamment tout en me toisant de haut puis se mit à pouffer avec le reste de sa clique dont l'un des membres (le gars confiant de tout à l'heure, et oui encore lui) se décida à venir me relever.

« Um sorry 'bout that. *Hum, désolé pour ça.* » fit-il. « Ivan's not usually mean, I do not know what he's playing at quite frankly. *Ivan est pas méchant normalement, je sais pas à quoi il joue franchement.* »

Je le fixais surprise, je ne m'attendais pas à ce qu'il s'excuse alors que son ami était le seul responsable je dois dire.

« But maybe he just have a personal thing against dwarves! *Après peut-être qu'il a juste un truc personnel contre les nains !* » continua-il très sérieusement avant de se mettre à pouffer et de me laisser là.

J'étais tellement sur le cul que sur le coup je ne trouvais rien à rétorquer, mais croyez-moi sur parole, lui ainsi qu'Ivan le Terrible allaient prendre cher pour cet affront.

Oui je parle comme un samouraï, et alors ?

Je me rendais à mon prochain cours en boitillant, m'étant quand même fait mal en tombant comme un gros caca sur sol. C'est que le sol, c'était dur.

« C'est que le sol, c'était dur. Putain on va te citer dans un bouquin de philo toi un jour ma fille ! » m'exclamais-je à haute voix sans m'en rendre compte.

Heureusement que j'avais parlé en français, parce que si on m'avait compris je serais juste passée pour une schizophrène.

Ce que j'étais, mais abordons ce sujet plus tard voulez-vous.

Néanmoins, que l'on m'ait comprise ou pas, l'on m'avait entendu.

« Someone's expressing herself in the language of Brigitte Bardot? *Alors, on s'exprime dans la langue de Brigitte Bardot ?* » m'interpella un gars qui avait l'air d'être dans une classe supérieure à la mienne.

Il avait des cheveux assez clairs, bien que pas blonds et un nez crochu mais pas forcément laid bizarrement.

« Uh uh, yeah. *Hum euh, ouai.* » répondais-je décontenancée.

Mais où était passée mon éloquence d'antan, je vous le demande !

« Should I come across a French girl it was to come across an ugly one, lucky me... *Fallait que je tombe sur une française pas sexy, c'est bien ma veine...* » souffla-il tout en traçant sa route sans un regard en arrière pour la pauvre petite chose que j'étais.

C'était ma fête aujourd'hui ou quoi ! Non parce que je trouve qu'on me vanne beaucoup aujourd'hui et ça me plaît pas du tout.

Le reste de la journée... Aussi merdique que le début, on s'est payé ma tête tout du long alors je dois dire qu'une fois après avoir mis un pied en dehors du lycée, j'avais l'impression d'avoir été libérée après 20 ans de réclusion mon gars !

Malheureusement, il me restait une sacrée longue trotte jusque chez moi à faire avant d'être tirée d'affaire.

Qu'avais-je fait pour mériter ça franchement...

J'attendais mon frère devant l'établissement...pendant près d'un quart-d'heure, mais aucun signe de la bête.

Je commençais à croire qu'il avait décidé de tracer sa route tout seul le saligot.

Et c'était le cas.

Sympathique le frèro.

Je passais donc le portail toute seule, alors que je surprenais nez crochu, Ivan le Terrible et le gars confiant (okay c'est nul comme surnom mais je connais pas son nom alors je fais avec ce que j'ai) en train de fumer en mode on se la pète, on est des grands, on a des houppettes à la Elvis et on gère la fougère.

C'était bien ma veine.

« Hehe she is! One of the seven dwarf showing up from the frog country, how charming. *Mais qui voilà ! Un des sept nain tout droit débarqué du pays des grenouilles, si c'est pas charmant.* » lança nez crochu avec un air condescendant.

« But of course I'm here, I only wanted to prevent the evil witch that you are to poison Snow White. *Mais c'est bien sûr, je voulais juste empêcher la vilaine sorcière que vous êtes d'empoisonner blanche neige très cher.* » rétorquais-je décidément fatiguée de leur conneries.

Et alors qu'ils se demandaient visiblement qui je désignais en tant que sorcière, je pointais nez crochu.

« Of course I'm talking about you, it seems pretty clear seeing your face. *Bien entendu que je parle de toi, ça paraît évident à la vue ton faciès.* » énonçais-je avec prétention.

En même temps ils l'ont cherché.

La vilaine sorcière jeta sa cigarette au sol et s'approcha de moi l'air menaçante. Okay ça fait bizarre de parler de lui au féminin alors on va s'en tenir à nez crochu.

Je commençais à prier intérieurement tout les dieux possibles et imaginables quand tout à coup il se mit à me sourire et me présenta sa main.

« I think I'm beginning to like you. My name's John, John Lennon and you? *Je crois que je t'aime bien au final. Moi c'est John, John Lennon et toi ?* » me fit-il amicalement.

Je me contentais de lui serrer la main, surprise pour changer avant de répondre.

« Uh we'll settle to Kat on this one I think, because if I continue with the full name, you will not manage very well. *Euh on va se contenter de Kat sur ce coup je pense, parce que si j'enchaîne prénom complet plus nom, tu vas pas t'en sortir je pense.* » répondais-je donc sans méchanceté bien au contraire.

« I confirm. *Je confirme .* »m'appuya le gars confiant bizarrement.

« Don't care and I'm curious, Throw it out. *M'en fout je suis curieux, dis toujours.* » insista John.

« Katarzyna Woczek. » énonçais-je donc.

« Oh well okay, we'll stick to Kat then love. *Ah ouai d'accord, nous nous en tiendrons donc à Kat très chère.* » articula-t-il dans un accent pédant.

Je me contentais de hocher la tête quand soudain quelque chose me vint à l'esprit. Je connaissais l'identité de Johnny boy, celle d'Ivan le Terrible mais celle du gars confiant m'échappait toujours.

Je le pointais du doigt alors qu'il me regarda surpris.

« Tell me your name, human! *Dis-moi comment tu t'appelles, humain !* » m'exclamais-je d'un ton presque biblique ce qui fit bien rire Johnny boy apparemment.

« Oh uh, me is Paul McCartney. *Ah euh, moi c'est Paul McCartney.* » fit-il confus.

Et c'était tant mieux, autant John m'apparaissait sympathique, autant lui et Ivan le Terrible, pas tellement.

« Okay then McCaca. Now I'll have to leave you, I shall go home. *Ça marche McCaca. Maintenant je vais devoir vous laisser, je dois rentrer chez moi.* »

Je les saluais et passait le portail alors que j'entendais John s'écrier derrière.

« See you tomorrow you hobbit! *On se revoit demain le hobbit !* »

Alors que du côté de Paul c'était plus de l'ordre du :

« McCaca ? »

Il était confus le chou, en même temps il devait pas trop piger de quoi je parlais.

Sur le chemin je croisais Slow Guy, je devais être à la moitié à peu près, et étant donné que pendant que j'attendais mon frère je ne l'avais pas croisé à l'entrée, j'en déduisait qu'il devait être vraiment lent sachant que j'étais quand même partie près de vingt minutes après lui et que pourtant j'avais réussi (bien que ce n'était pas mon intention de base) à le rattraper.

« Hi mate! *Salut mon pote !* » le saluais-je avec entrain alors qu'il se contentait de me retourner en réponse une sorte de sourire.

Mouai c'était plus de l'ordre du rictus si vous voulez mon avis.

Partant sur ma lancée, je tentais de connaître mon prochain en commençant par lui.

« What's your name anyway? So far I haven't asked you and in the end I told myself that it could become problematic in the future if I continued to ignore your name. Especially in the case where I should shout at you. It would be a little weird to just say "Hey you there!" If you know what I mean? Anyway, what's your name? *Sinon, comme tu t'appelles au fait ? Jusqu'ici je te l'ai pas demandé et au final je me suis dis que ça pourrait devenir problématique à l'avenir si je continuais à ignorer ton nom. Surtout dans le cas de figure où je devrais t'apostropher. Ça ferait un peu bizarre de dire simplement " Hé toi là-bas ! " si tu vois ce que je veux dire ? Enfin bref, c'est quoi ton nom ?* » m'éternisais-je à demander.

« Richard. » répondit-il sobrement, l'air quelque peu ennuyé mais peut-être était-ce simplement son air habituel.

« Like Little Richard? *Comme Little Richard ?* » ironisais-je dans l'espoir de le dérider.

« Starkey. » répondit-il brièvement encore une fois.

Okay d'accord.

Nous continuions alors notre route dans le silence le plus complet, à mon plus grand désespoir.

Une fois arrivé devant chez lui, il m'adressait un bref signe de main et s'engouffrait dans sa maison, sans un regard en arrière. Un vrai bout-en-train ce type !

Je faisais de même, et par de même je veux dire que je rentrais dans ma maison. Pas dans la sienne, ça aurait été un peu bizarre on va dire.

Je montais les escaliers quatre à quatre et je m'effondrais sur mon lit, exténuée.

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Here it is! Le troisième chapitre, on se voit la semaine prochaine pour le quatrième. Le temps que je le corrige, tout ça tout ça. Merci pour vos commentaires ultra motivants bande de choupie ! En espèrant que ce chapitre-ci vous aura plus 😀 Cheers beatlepeople.