Chapitre 25
LIAM
Liam s'assit sur le tabouret. Le cuir crissa quand son pantalon vint le frotter. Il ferma les yeux pour se concentrer. Il devait retenir chacun des détails. Ses yeux se rouvrirent. Le projecteur illuminait le piano. Les grains de poussière virevoltaient. Le stress qui émanait de son corps se sentait presque. Ses doigts tremblèrent de nervosité. Il leva une main nerveuse pour replacer une de ses mèches de cheveux. Les trois juges le fixaient, attendaient. Il s'attendait surement à une prestation médiocre. Mais comment leur faire comprendre que LUI était spécial ? Souvent quand il disait qu'il faisait du piano, les gens pensaient " Encore un ! ". Quand ils le voyaient en concert, il était comme une peinture que le public ne comprenait pas vraiment. Mais aujourd'hui, il devait se démarquer. Plus tard, il se rappellerait de ce jour comme le début d'une immense aventure. Alors il posa ses mains sur le clavier, et se mit à jouer. Une intense sensation de calme l'envahit. Le moment était arrivé. Son mois de travail, résumé en quelques minutes à peine. Ses doigts étaient flous par moments, et sa tête et son dos se balançaient d'avant en arrière, très doucement. Il se sentait heureux, à sa place. Si le moindre doute persistait dans sa tête jusque là, il était effacé. Il était fait pour ça.
****
Le jeune homme était content. Son sourire illuminait son visage, et ses yeux pétillaient de bonheur. Ses doigts tremblaient encore de nervosité, son ventre se détendait, la musique résonnait encore dans tout son être.Liam sauta en l'air. L'excitation s'emparait de lui comme une folie. Il était persuadé qu'il serait pris pour le deuxième tour. Jamais le jeune homme n'avait été aussi sûr. Il avait tout donné. Son âme s'était envolée avec chacune des notes, son esprit avec la mélodie. Liam avait livré un morceau de lui aux juges. Comment pouvaient-ils être mécontents de sa prestation ? Posture : parfaite. Fausses notes : aucunes. Épaules : relâchées. Rythme : respecté. Émotions : il en avait tellement qu'il s'était mis à trembler. Soudain, il se sentit compressé dans son corps. Il n'avait pas la place.
La place pour quoi ?
Liam n'en savait trop rien. La musique pouvait l'apaiser comme le rendre fou. Il se mit à courir. Il n'était pas en habit, n'avait pas les bonnes chaussures, et sa grosse veste bloquait ses mouvements. Mais ça le défoulait. Il avalait de grosse goulées d'air frais. Le vent lui giflait le visage, et son euphorie était immense. La pression accumulée s'était complètement évaporée, il se sentait léger comme une plume. Il courait sur les bancs, sautait dans l'herbe, tournoyait parmi les milliers de feuilles qui tombaient. Ses yeux regardèrent le ciel. Il se sentait tellement bien sous l'immensité bleu qui le surplombait. Ses mains étaient toutes rouges. Son corps avait arrêté de bouger. Il était immobile, dans la plaine. Le bonheur coulait dans ses veines, se distillait dans chacune de ses cellules. Ce n'était pas un mythe. La musique rendait heureux, effaçait les peines de cœur, et supprimait les soucis. Il s'assit dans l'herbe verte. Elle était trempée. Liam n'y pensa même pas. Il se coucha même dedans, les mains derrière la tête. Un enfant s'approcha de lui, curieux. Liam adorait les enfants.
-Pourquoi tu es couché par terre ?
-Je ne sais pas.
-T'es bizzare.
-Je suis heureux, petit.
-Quand on est heureux, on se couche par terre?
-Moi, je le fais.
-Je vais faire comme toi.
Le petit se coucha à côté de lui.
-J'aime bien le ciel.
-Moi aussi, répondit Liam.
-Mon papa est au ciel.
-Comment ça ?
-Maman m'a dit qu'il s'était envolé dans le ciel, car il était trop malade pour rester ici.
-Tu es triste qu'il ne soit pas avec toi ?
-Oui, mais il est surement mieux là, non ?
-Je connais quelqu'un qui n'a pas de papa, comme toi. Elle s'appelle Malia.
-J'aime bien son prénom.
-Moi aussi. En plus elle est jolie.
-Tu es amoureux d'elle, alors?
Liam sourit tristement, les yeux fixé sur un nuage.
-Oui.
-Chouette. Moi j'ai pas d'amoureuse. Andréa, elle est jolie, mais j'ose pas jouer avec elle.
-C'est pas mon amoureuse.
-Pourquoi ?
-Elle veut jouer avec quelqu'un d'autre.
-C'est nul. Dit lui de jouer avec toi, alors.
-Ca marche pas comme ça, quand on est grand.
-Peut-être que si. Tu as essayé ?
Liam uvrit la bouche pour répondre.
-WALDO ? WALDO ? WALDO ? OU EST TU ? fit une voix, une centaine de mètre derrière eux.
-Tu ferais mieux de rejoindre ta maman, Waldo.
-Dis à Malia que j'aime bien son prénom.
-D'accord.
-C'est quoi ton nom ?
-Liam.
-J'aime aussi ton prénom.
Et il s'enfuit, ses cheveux blonds trop long voletant derrière lui. Liam cogita. Il n'allait quand même pas convaincre Malia de l'aimer lui. C'était complètement absurde. Il rigola tout seul. Les enfants sont mignons, mais ça ne marchait pas comme ça. Pas du tout. Malia avait seulement Hugo dans son cœur, il devait juste s'y faire. L'euphorie de tout à l'heure s'était dissipée. Malia occupait de nouveau ses pensées amères. Il resta couché pendant des heures. La nuit tomba peu à peu, et les lampadaires s'allumerent un à un. L' animation ne diminuait pas pour autant. Les marchands de hot-dogs criaient plus fort que jamais, des bandes de jeunes dansaient sur des musiques pourries, des personnes âgées finissaient leurs promenades, et des étudiants se relaxaient, le regard vide. L'énergie présente dans le parc semblait vibrer, et Liam se sentait complètement neuf. Il ne s'était même pas ennuyé. Le jeune homme connaissait à présent toutes les nuances de bleu, et saurait dessiner parfaitement les arbres qui se découpaient au dessus de lui. Regarder des détails lui avait toujours occupé l'esprit, et ce depuis qu'il était petit. Ca lui apaisait l'âme. La méticulosité de ses contemplations si précises effaçait tout le reste, et c'était exactement ce qu'il cherchait.
Son téléphone était tombé plat, et il était dans la poche du jeune homme, vide de notifications et de tracas. Il n'était qu'une carcasse, et il ne pouvait plus lui rappeler à quel point il était tard, à quel point il était débile de rester coucher par terre comme un con.
Et c'était un soulagement.
Il sourit, et se mit à fredonner une chanson qui lui passait dans le tête. Il avait l'impression d'être au bord de la compréhension totale, d'être dans un moment clé de la vie, un de ceux où tu comprends le pourquoi du comment, ou tu sais enfin qui tu es. Mais il n'y eut pas de déclic. Rien qu'une voix, qui s'éleva dans le noir comme un chant.
-Je peux me coucher à côté de toi ?
Malia n'attendit pas la réponse, et Liam entendit le bruissement de ses vêtements.
-Salut, fit il, les yeux fixés sur le ciel.
-Salut.
MALIA
La jeune fille ne savait pas trop par où commencer. Elle devait se confier, mais c'était vache de sa part, de faire ça à Liam. Elle ne voulait pas le blesser, d'autant plus qu'il avait l'air tellement bien, en paix avec lui même. Une sorte d'aura de sagesse émanait de lui, et Malia ne pouvait pas s'empêcher de penser qu'il était très beau.
-Crache le morceau, princesse. Qu'est-ce que Hugo a fait ?
Malia le fixa, ses deux yeux grands ouverts de surprise. Comment avait-il su ?
C'est Liam. Il te comprends comme personne...
-C'est pas très compliqué de savoir ce qui te tracasse. C'est toujours le piano, ou bien Hugo.
Malia rigola, gênée.
-Vas-y, tu peux me raconter. Ca ne me fera pas de mal.
Malia savait qu'il mentait. Mais son côté égoïste pris le dessus, alors sa bouche s'ouvrit, et elle parla. Pendant vraiment longtemps. Que son manque de confiance en elle la blessait, qu'il se servait d'elle, qu'elle se sentait stupide. Elle se retrouva collée contre Liam, les yeux rougis, les joues trempées, et les pensées en vrac. Il lui caressait les cheveux, et son odeur l'apaisait. Son cerveau était embrouillé, obsédé par une seule pensée.
Putain, qu'est-ce qu'il est beau.
Peut-être parce qu'il était toujours là pour elle,
Peut-être parce qu'elle voulait se venger d'Hugo,
Peut- être parce qu'il la faisait rire,
Peut-être parce qu'elle était folle,
Peut-être parce que ce grain de beauté au coin de ses yeux le rendait encore plus craquant,
elle posa ses lèvres sur les siennes.
LIAM
Une décharge de dix mille volts lui électrisa les entrailles. Ses mains se mirent à trembler d'émotion. À nouveau, ses émotions étaient trop intense pour son corps. Il se sentait complètement cinglé. Son cœur battait tellement vite. Des frissons ne cessaient pas de l'agiter, et le bonheur lui étouffa la gorge. Il posa ses deux mains sur les joues froides de Malia.
Ses lèvres dont il rêvait depuis tout ce temps étaient encore plus douces qu'il imaginait. Son cerveau disjonctait. Il ne pouvait pas traiter autant de bonheur d'un coup. C'était comme si tous les moments heureux de sa vie n'était que des échantillons, des essais. Ce baiser était le plus incroyable de toute sa vie. Liam était entraîné dans un spirale d'émotions, et il se perdait dans ses sensations exquises. Les mains de Malia caressaient ses cheveux, et ses cils frôlaient doucement la joue du jeune homme.
Il se sentait tellement vivant. Des bulles de joie éclataient dans son cœur. La flamme ardente dans son ventre s'était rallumée, et grandissait, explosait, envahissait tout son corps.
Ce moment était le plus génial qu'il eut jamais vécu.
Il espérait que Malia s'en rendait compte.
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