Chapitre 24
Les deux étudiants se jaugèrent, comme si chacun d'eux attendait une parole de l'autre. Hugo semblait réfléchir à toute vitesse. La tension était si intense que ça faisait presque des étincelles. Malia se sentait tellement mal, c'était affreux. Elle se demandait quand est-ce que le garçon avait tellement pris de place dans son cœur, dans sa tête. Hugo ouvrit finalement la bouche.
-J'ai pas envie qu'on passe notre vie à ce crier dessus.
Il se passa la main sur le visage.
-Je sais même pas comment j'en suis arrivé là, continua t'il. Tu n'as rien fait de mal, et moi je ne te fais pas confiance.
Silence radio de la part de Malia. Elle attends la suite, elle espère.
-Tu vas m'en vouloir à mort.
Elle haussa un sourcil, de plus en plus perplexe.
-Mais je te jure, je ne savais pas que tu allais le prendre comme ça.
-Arrête de tourner autour du pot, ça m'énerve.
Il l'a regarda étrangement.
-J'ai flirté avec elle pour que tu sois jalouse.
Malia encaissa la nouvelle avec calme. L'information montait doucement à son cerveau. La jalousie est une étrange chose, n'est-ce pas ? On ne la comprends pas, jusqu'au moment ou elle nous envahit le cerveau, inhibant toutes nos autres pensées.
-Comment ça, me rendre jalouse ? fit-elle, légèrement tremblante.
Son cœur battait trop fort. Ses yeux papillonnaient.
-Je sais que tu es très sensible à ce genre de trucs, donc je m'en suis juste servi.
Malia ouvrit des yeux ronds.
-"Juste" servi ? Tu te rends compte que tu as utilisé une de mes faiblesses? Tu n'es pas censé... Je... Je sais même pas quoi te dire. Je n'arrive pas à croire que tu as fait ça ! Je te faisais confiance! J'étais obnubilée par ça pendant tout mon morceau. J'ai surement raté le concours. Mais tu t'en fiches, pas vrai ?
-Mais non ! tenta Hugo.
-Ne fais pas l'innocent, Hugo, tu me l'as dit. Ce n'était pas pour me rendre jalouse, c'était pour que je rate le concours.
Elle voyait le mal partout. La rancune sortait par torrents noirs de sa personne.
-Mais qu'est ce que tu vas inventer ? s'énerva le jeune homme.
-Je sais pas. Je ne sais plus quoi penser de toi. Ce n'est pas digne du Hugo que je connais, de manipuler les gens. Je ne sais pas si c'est moi qui t'as transformé en égoïste fini, mais...
-Égoïste ?
-J'ai raté mon concours, avec tes conneries, Hugo.
Il devint rouge.
-Mais tu n'as que ce mot à la bouche ! Tu n'as pas que le piano dans ta vie ! Ce n'est pas grave si tu rates UN concours ! Il y'en aura des centaines d'autres !
-Tu n'as toujours pas compris. Ça ne sert à rien que je discute avec toi, Hugo. Tu ne COMPRENDS pas combien c'est important pour moi de devenir pianiste. C'était le rêve de mon père, c'est le mien, et je vais y'arriver, je vais devenir célèbre, et quand je saluerai des milliers de gens dans ma belle robe rouge, je penserai à lui. Tu sais ce qu'il me disait toujours? Tu as de la graine de grande pianiste ! Tu es plus douée que moi, Malia. (Les larmes affluent) Je veux juste y'arriver. Je...Je vais y'aller.
-Malia...Laisse moi au moins te serrer dans mes bras. Je peux pas te regarder pleurer sans rien faire.
-Non, Hugo. NON ! Tu sais quoi ? Je pense que je suis complètement folle.
-Ne dis pas ça !
Il paraissait complètement paniqué.
Son cerveau était sur pause, les mots qu'elle contenait depuis trop longtemps sortirent comme un torrent de sa bouche.
-Je...Tu me fais du mal et moi je pleure, je pleure, parce que je suis trop sensible, et que... Je vais te dire un truc ! Tu ne vas pas y croire. Je t'aime, Hugo. Je t'aime. Depuis le premier jour. Alors je m'énerve, je crie, je hurle, mais au fond de moi, je te pardonne. Je te pardonne d'être un être horrible. Parce que c'est ça aimer. Mais tu en joues. Tu m'utilises, tu utilises tout le monde ! Je te...
Les lèvres d'Hugo se pressèrent contre les siennes. C'était brusque, c'était doux. Il avait un gout salé, celui des larmes de Malia. C'était comme un calmant. La chaleur se rependit dans ses veines. Son cœur cognait dans sa poitrine, mais elle ne pouvait pas faire ça. C'était trop simple. Elle se détacha à contre cœur.
-Non, Hugo. Tu peux pas être maître de mes émotions comme ça ! Laisse moi, s'il te plaît. J'ai besoin de temps, d'espace, de réflexion, de... Je sais pas ! Je n'ai jamais ressenti ça avant, cette peine qui me serre le ventre, qui m'empêche de réussir mon concours!
-Ca s'appelle l'amour, Malia.
-Mais je m'en fiche! Je suis complètement inconsciente ! Tu te joues de moi, et tu appelles ça de l'amour !
Elle éclata d'un rire sarcastique.
-Mais première nouvelle pour toi : Ce n'est pas en me rendant complètement folle de jalousie que je vais juste retomber dans tes bras !
Elle pleurait encore. La fatigue des dernières semaines remontait, et elle n'en pouvait plus, elle avait juste besoin d'extérioriser, d'exploser. Mais comment faire ? Elle n'était pas douée avec les mots. Et la musique ne l'aiderait pas, elle le sentait.
le visage de Liam surgit dans son esprit, aussitôt suivi d'un sentiment de culpabilité affreux.
Je vois pas le problème.
-J'y vais Hugo. À plus tard.
-A plus tard, murmura t'il doucement.
Il avait l'air triste. Il n'avait pas le droit. C'est de sa faute tout ça. Elle cessa de penser à lui. Elle courrait dans les couloirs. Bientôt elle sortit, et savoura l'odeur de la pluie. Le vent lui soulageait les pensées, lui vidait l'esprit, ankylosait ses maux de tête. Elle s'assit sur un banc. Il était trempé, et la froideur la saisit. Elle laissa l'eau infiltrer son pantalon, et s'adossa contre le bois. Elle n'arrivait plus à réfléchir, son cerveau était trop embrouillé.
-Je devrais arrêter de me prendre la tête.
Un rire gonfla dans sa poitrine. Ses yeux pétillèrent, et l'éclat sortit de sa gorge avec brutalité. Elle sentait comme une bulle dans son ventre. Les rires se multiplièrent. Elle se sentait bien, mais elle devait avoir l'air cinglée. Chacun évacue la pression comme il peut. Malia se tenait les côtes. Ses entrailles la brûlaient, ses yeux piquaient, ses larmes tombaient en cascade sur ses joues. Elle pleurait, elle riait. Pleurer de rire ne lui arrivait pas souvent. Pourtant aujourd'hui, elle ne pouvait pas s'arrêter. Pendant un instant, Malia eut l'impression d'être dans une autre dimension, un autre espace temps. Elle n'en avait plus rien à faire du regard des autres, et ça lui faisait un bien fou.
La pluie se mêla bientôt aux larmes de Malia. Elle coulait dans sa nuque, dans son dos, dans ses cheveux. La colère s'effaçait, mais pour laisser place à une très grande lassitude, et une profonde tristesse. Elle était trop fatiguée. Ses membres engourdis lui paraissaient lourds comme des boulets de prisonniers(pas qu'elle en ait déjà mit un jour, mais c'était comparable quand même).
Elle se leva doucement. Elle oublia Hugo un instant. Elle ne voulait plus voir Liam.
La jeune fille avait juste besoin de sommeil.
HUGO
Il sortit du bâtiment après être passé sur scène, les mains dans les poches. Ses cheveux avaient poussé, et ils voletaient autour de lui avec légèreté. Il avait merdé, il le savait. Depuis le début de l'année, Hugo devenait de plus en plus aigri. Il ne se reconnaissait même plus. Malia venait de lui avouer qu'elle l'aimait. Son cœur frétilla à cette pensée. Personne ne lui avait jamais dit une chose pareille. Il s'était senti tellement fort, tellement invincible. Quelqu'un lui avait confié son cœur. Et il avait tout gâché. Il se sentait vraiment idiot. Le jeune étudiant n'était qu'une boule de nerfs. Tout palpitait en lui. Que devait-il faire pour prouver à Malia qu'il prenait conscience qu'il avait été idiot ? Les idées lui manquaient, son cerveau était vide. Il ne pensait à absolument rien qui pourrait l'aider. Il n'avait jamais compris les filles, pourquoi il les comprendrait aujourd'hui ? Parce que il le faut ! Pensa t'il, les yeux dans le vague. Le vent de novembre lui gelait la nuque, il allait attraper une angine. Hugo se dépêcha de rentrer chez lui, alluma le radiateur, et enfila une écharpe. Il détestait être malade, autant prendre des précautions. Il s'assit sur son canapé, partagé entre l'envie de dormir, ou de regarder un bon X-men. Son choix se porta sur X-men. Il prit une bière dans le frigo, et soupira d'aise. Le film commença. Le jeune homme bougea son bras distraitement, pour le placer sur l'épaule de Malia. Son bras tomba lourdement sur le coussin.
Pourquoi elle n'est pas là ?
La question effleura son esprit un instant. Ensuite, il prit réellement conscience de la situation. Hugo avait besoin d'elle. Besoin de ses câlins, besoin de ses baisers, besoin de ses mots, besoin de tout ce qui faisait d'elle MALIA. Elle l'apaisait.
-Je pense que tu es amoureux d'elle, chuchota la voix de sa mère à son oreille.
Il le savait depuis longtemps. Elle avait tellement envahi ses pensées que ça en devenait flippant. Mais lui dire maintenant ne changerait rien. Elle ne le croirait pas. Il s'était montré monstrueux avec elle. Elle lui avait confié un jour qu'elle n'arrivait pas vraiment à avoir une vraie confiance en quelqu'un. Mais Malia lui avait dit "j'ai confiance en toi.
Il secoua la tête.
Il n'était vraiment qu'un imbécile.
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