Chapitre 2 : Devant le portail
La voiture roule depuis plusieurs minutes, mais j’ai l’impression qu’on n’avance pas. Ou plutôt, que chaque mètre qu’on parcourt est un pas de plus vers un cauchemar. Mon estomac est complètement retourné. J’ai l’impression que si je dis un mot, je vais vomir.
À côté de moi, ma mère est calme, comme toujours. Elle conduit tranquillement, jetant parfois des coups d’œil dans ma direction. Elle n’a pas l’air de comprendre à quel point je panique.
— Alexia, ça va ? me demande-t-elle doucement.
Je grogne en me tournant vers elle.
— C’est Alex, maman ! Combien de fois je dois te le dire ?!
Elle soupire avec un sourire qui m’énerve encore plus.
— D’accord, Alex. Mais calme-toi un peu. Je vois bien que tu stresses. C’est juste la rentrée, pas la fin du monde.
Pas la fin du monde ? Facile à dire pour elle. Elle n’a pas à marcher devant tout le monde, à chercher ses amis en priant pour qu'elle ne soit pas en retard et pour ne pas se ridiculiser. Je ne réponds pas, je croise les bras et je fixe la fenêtre. Peut-être qu’elle va comprendre que j’ai pas envie de parler.
Mais bien sûr, elle continue.
— Tu sais, tout va bien se passer. Tu vas retrouver Leila, et puis tes autres amies. Elles doivent être aussi nerveuses que toi. Et puis, t’es courageuse, ma grande.
Je roule des yeux sans qu’elle me voie. Elle dit ça comme si c’était censé me rassurer. Mais au fond, ça ne fait que me rappeler à quel point je me sens incapable de gérer cette matinée.
Le silence s’installe enfin. On ne dit plus rien jusqu’à ce qu’on arrive devant le portail côté lycée (tout les collégiens doivent passer par là pour la rentrée). C’est là que je vois les premiers élèves. Ils marchent vers le portail en petits groupes, certains qui rigolent, d’autres le nez sur leur téléphone. Ils ont tous l’air tellement à l’aise. Moi, je me sens minuscule.
— Regarde là-bas, c’est pas Julia ? dit ma mère en pointant quelqu’un du doigt.
Je plisse les yeux et je la vois. C’est bien elle. Julia marche tranquillement, son sac sur le dos. Je ne comprends pas comment elle peut être aussi détendue.
Maman ralentit et se gare juste à côté. Elle me sourit et pose une main sur mon épaule.
— Bon, c’est ici que je te laisse. Tout ira bien Alex, je te le promets. Tu m’appelles quand tu sors à 12h, d'accord ?
Je prends mon sac et ouvre la portière.
— Ouais, ouais… Merci, maman.
Elle me fait un gros bisou sur la joue, et je descends. Julia me voit et lève la main en souriant.
— Alex ! T’es là ! Je croyais que t’étais pas prête à affronter la rentrée.
Je marche vers elle, un sourire un peu forcé.
— Moi non plus, crois-moi. J’ai failli demander à ma mère de faire demi-tour.
Elle rit, comme si c’était une blague.
— T’inquiète, moi aussi je stresse autant que toi. Mais c'est quand même existant, non ?
Je hochait la tête comme pour lui donner raison, tout en criant silencieusement : NON PAS DU TOUT JE VEUX RENTRER CHEZ MOI !!!!!! POURQUOI MOI ?
On commence à marcher ensemble. La foule près du portail devient de plus en plus dense. Julia continue de parler, et ça me change un peu les idées.
— Tu sais, j’ai rêvé qu’on avait Mme Martin, notre prof de français remplaçante en 5eme, comme prof principale. Tu te rends compte ? Le cauchemar.
Je ris un peu, malgré moi.
— Si on l'a vraiment en prof principale, je change de collège direct.
— Pas si tu me prends avec toi, répond Julia en rigolant.
On arrive presque devant le portail, et je commence à repérer des visages familiers. Je hoche la tête en direction de certains élèves que je connais. Mais mon regard est attiré ailleurs. Je le vois. Lui. Il est là, adossé à un mur, en train de parler avec ses potes.
Mon cœur s’arrête une seconde. Il est toujours aussi beau, peut-être même plus. Je n’entends plus rien autour de moi. J’aimerais aller lui parler, mais même si on est ami, je suis paralysée à l'idée de lui adresser la parole.
— Alex ? Alex ? T’écoutes ou quoi ? fait Julia en agitant la main devant mon visage.
Je cligne des yeux et me force à détourner le regard.
— Hein ? Oui, oui, je t’écoute. Désolée.
— T’es sûre ? T’avais l’air totalement ailleurs…
— Non, c’est rien. Juste le stress, tu vois.
Mais elle a déjà perdu tout intérêt pour ma réponse, parce que soudain, nos amies surgissent de nulle part. Elles crient nos noms et courent vers nous, un tourbillon de rires et de câlins. En quelques secondes, on est entourées.
— Alex ! Julia ! Vous êtes trop belles ! Ça va ?
— Vous avez fait quoi cet été ?
— Oh là là, ça fait trop longtemps !
On parle toutes en même temps, on rit, on se serre dans les bras. Ça fait tellement de bruit que tout le monde nous regarde. Mais pour une fois, je m’en fiche. Tant que je suis avec elles, je me sens un peu mieux.
Je me dis que finalement, cette journée ne sera peut-être pas si horrible. Mais au fond de moi, il y a encore une petite voix qui chuchote que ce n’est que le début, et que tout pourrait basculer à tout moment.
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