Chapitre 3
Sérieusement, quel genre de prof vous colle un contrôle surprise un jour avant les vacances d'été ?!
C'était ce que pensait Keigo Takami, seize ans, presque dix-sept, en plein cours de mathématiques. C'était sur les vecteurs, en plus, il n'y comprenait foutrement rien, à tout ce charabia. Il allait encore se payer la pire note de la classe, et Toya la meilleure. Ce petit salaud était rudement bon, décrochant toujours des dix-huit, des vingt, alors que lui ramait déjà pour avoir douze. Et en plus, après ça, le rouge, enfin plutôt le brun maintenant, le narguait toujours, avec ses copies toujours impeccables. Il fallait dire que les siennes étaient barrées de rouge, à chaque fois...
Keigo souffla du nez et gonfla ses joues. Il allait réussir ce fichu contrôle !
-J'ai tout raté... se plaignit-il auprès de son ami en sortant de la salle de classe.
-Encore ? plaisanta le brun.
Keigo lui tira la langue, vexé.
-Arrête de te moquer, salaud ! C'est pas ma faute si je comprend rien à cette merde, déclara-t-il au garçon qui arborait un sourire narquois.
-Langage ! s'exclama une voix.
Keigo et Toya se retournèrent simultanément. Toya grogna alors que Keigo sautilla vers son autre meilleur ami.
-Pas toi, gémit le premier.
-Tenko ! C'est lui qui est méchant avec moi, l'accusa le blond sans prendre la peine de saluer le nouveau venu.
-Toya, je t'ai déjà dit d'être gentil avec les petits, railla Tenko Shimura.
Keigo s'immobilisa, puis gratifia Tenko d'une tape sur l'arrière du crâne, offensé.
-Je suis pas petit ! C'est juste vous qui êtes des géants ! Bande de cons, affirma-t-il.
Tenko lui tapa l'arrière du crâne de la même façon que le blond.
-Langage ! Je ne t'ai pas élevé comme ça, petit voyou, ricana-t-il.
Keigo continua de s'énerver tout seul et de sautiller derrière les deux plus grands, ce qui était totalement ridicule. Tenko et Toya ricanèrent ensemble, puis les trois amis finirent par engager une "vraie" discussion, marchant dans les couloirs bondés d'élèves. Lorsqu'ils croisèrent le chemin de Kagami et sa bande d'extras, Keigo baissa les yeux au sol, intimidé et ne voulant pas de problèmes. Toya fit complètement l'inverse et ne lâcha pas les terminales des yeux, en particulier Kagami. Ce dernier le fixait déjà depuis longtemps, avec un petit sourire mesquin. Les extras sifflèrent lorsque le petit groupe passa près d'eux, et marmonnèrent des paroles que Keigo ne comprit pas et c'était tant mieux. C'était sûrement des insultes.
Il sentit que Toya passa un bras protecteur autour de ses épaules, et rougit comme une pivoine. Il se gifla intérieurement, sa réaction était celle d'une adolescente qui venait de parler à son crush !
Pourquoi est ce que je rougis, d'abord ? C'est juste Toya !
-Kei', ça va ?
Keigo redressa la tête, et rencontra les yeux bleus de Toya. Ils avaient dépassé les connards depuis un petit moment.
-Oui, c'est bon. J'ai juste pas envie de les croiser en sortant. Vous croyez qu'ils vont signer mon album ? Un truc du genre "Cher Keigo, désolé d'avoir pourri ton année de première, passe un bel été !" !
Toya leva les yeux au ciel et Tenko ricana dans sa barbe inexistante. Keigo repartit dans son bavardage sans fin, se plaignant des profs, de Kagami, de ses notes de maths catastrophiques, et même d'eux. Tenko l'écoutait à moitié et était si peu concentré qu'il buta brutalement contre l'épaule de quelqu'un.
Le quelqu'un, qui était une fille, lui jeta un regard noir, mais passa son chemin sans faire la moindre remarque.
Cette même fille, qui s'appelait Kaori Huroko, se dirigeait d'un pas ferme vers les toilettes des filles. Une des ses congénères lui pointa une toilette du doigt, Kaori se planta devant celle-ci et donna un violent coup de pied à la pauvre porte qui n'avait rien demandé.
-T'es toute seule là-dedans, Himiko ? Ou y'a la moitié des garçons de l'école avec toi, sale pute !
Himiko Toga sursauta. Elle était assise sur le cabinet, en train de fumer tranquillement sa cigarette. Elle s'était installée dans les WC pour avoir la paix, et aussi pour échapper à ses harceleuses et harceleurs. Mais, évidemment, l'une d'elles l'avait suivie et ensuite attirée les autres, parce que c'est plus drôle de faire chier quelqu'un en groupe.
Himiko écrasa sa cigarette sur la cloison séparant les toilettes, le regard vide. Elle était fatiguée des moqueries et des insultes à son égard.
-Je sais qu't'es là, p'tite salope, je le sens ! Pas étonnant que t'aies pas d'ami, qui voudrait être ami avec une salope comme toi ! cracha Kaori.
Himiko eut soudainement très envie de lui trancher la gorge, et de regarder son sang se répandre par terre en flaques rouges, pour pouvoir ensuite sauter dedans. Cette vision la fit doucement sourire, et l'encouragea à répliquer avec dédain.
-Décides toi, Kaori. Je suis une pute, ou une salope ? Faudrait savoir, ironisa Himiko.
Son ton sarcastique énerva Kaori au plus-au-point. Elle fit un signe à ses amies, qui avaient fini de remplir un sac poubelle des eaux usées des toilettes. Elles trainèrent le sac vers le cabinet d'Himiko, et entrèrent dans la cabine voisine. L'une d'elle monta sur la cuvette et saisit le sac, pour le vider au dessus du cabinet de leur victime.
Himiko eu à peine le temps d'empoigner son cartable et de le mettre au dessus d'elle pour se protéger qu'elle sentit les eaux usées répugnantes lui dégouliner dessus. La jeune fille poussa un cri de surprise et de dégoût, immédiatement accueilli par les rires goguenards et stridents de ses bourreaux.
-T'es un déchet, conclut Kaori. On voulait juste te le rappeler.
Sa mission accomplie, l'adolescente secoua fièrement sa chevelure châtain et se tourna vers ses amies.
-On y va. Je veux pas passer une seconde de plus avec cette pauvre ratée, déclara-t-elle.
Ses partenaires gloussèrent et approuvèrent ses dires. Elles quittèrent sans plus attendre les toilettes, laissant derrière elles leur proie.
Himiko ne voulait pas pleurer. Elle ne voulait pas leurs offrir ce plaisir. Mais rien que l'odeur nauséabonde qu'elle-même dégageait lui donnait les larmes aux yeux. Alors Himiko céda et laissa quelques sanglots rageurs s'échapper.
Elle en avait assez. De tout ça. Kaori avait raison, elle n'avait pas d'ami, parce qu'elle était bizarre, renfermée sur elle-même. Mais méritait-elle vraiment de subir un tel enfer ?
Les larmes de lamentation se transformèrent en larmes de rage. Elle avait envie de la planter, cette conasse, d'enfoncer son couteau de poche dans sa poitrine si pleine de vie, de voir son sang gicler, de l'entendre demander pardon en hurlant, pour finalement l'achever.
Himiko frissonna. Ce n'était certainement pas une pensée normale pour une fille de son âge, mais cela lui faisait du bien, d'imaginer ces pestes en train de brûler ou de mourir dans d'atroces souffrances.
Himiko ramassa son sac trempé, puis déverrouilla le loquet de la porte de ses toilettes. Il n'y avait plus qu'elle, et c'était mieux comme ça. Elle ne se sentait pas d'affronter le regard d'un élève.
Elle sortit tout ses cahiers, qui avaient ramollis et gonflés, et les jeta à la poubelle. Elle se lava plusieurs fois le visage à l'eau clair, et rinça son sac. Mais même après trois rinçages complets, l'odeur immonde collait toujours au tissus et Himiko abandonna l'affaire. Au moins, comme c'était les vacances d'été, elle n'aurait plus à affronter Kaori. C'était le principal.
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Merci d'avoir lu !
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