[ Chapitre 6 ]

• Le début de l'enfer •

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[ PDV Jisung ]

Je ne m'étais jamais levé aussi tôt de toute ma vie pour aller en cours. Dire que Minho devait se lever à six heures du matin tous les jours...

J'étais en train de boire un café à la librairie, attendant mon petit ami.
Je m'en voulais de ne pas avoir penser à demander à ma tante de nous conduire, il pleuvait des cordes dehors.

Quand mon aîné arriva enfin, il était trempé de la tête aux pieds. Ses cheveux lui collaient au front, la chemise de son uniforme était presque transparente et son corps tremblait de froid.

- Minho ! C'est pas vrai...

Il courrut vers moi et m'enlaça. Le gérant de la libraire, avec qui je m'entendais très bien, s'approcha.

- Tout va bien ici ?

- Monsieur Jung, auriez-vous de quoi le réchauffer, s'il vous plaît ?

- Bien sûr. Veux-tu boire une boisson chaude, mon garçon ? Je vais demander à ma femme de ramener une couverture.

- U-Un chocolat chaud, s'il vous plaît... M-Merci...

Monsieur Jung était un homme de petite taille d'environ 50 ans. Il vivait avec sa femme juste au-dessus de la librairie.

Le temps qu'il revienne, je sortis un large pull en laine de mon sac et le tendit à Minho.

- Je suis vraiment désolé, amour. Je n'ai pas pensé à regarder la météo ce matin... Je ne pensais pas qu'il pleuvrait aussi fort et ma tante était déjà partie... Alors je t'ai ramené ça...

- Tu es le meilleur, Jisung... Tu n'as pas à t'excuser...

Minho souriait comme si tout allait bien, et ça me fendait le cœur. Je savais bien qu'il se détruisait de l'intérieur, que son monde s'écroulait.

- Je vais aller me changer au toilette, merci d'y avoir pensé...

Je lui souris en retour malgré tout, comme si on allait pas se faire martyriser dans une heure.

Monsieur Jung revint avec une petite couverture.

- Où est le jeune homme ?

- Il est au toilette, il se change... Merci, Monsieur Jung.

- De rien, mon garçon. Je vais aller préparer le chocolat chaud de ton ami, tu désires autre chose ?

- Non, merci beaucoup.

L'homme me sourit gentiment et retourna à son boulot.

Au bout de cinq minutes, Minho revint avec mon pull en laine. Malgré la fatigue visible sur son visage, il était toujours aussi beau.

Il s'assit à côté de moi, sur le petit canapé. Je l'emmitouflai dans la couverture, couvrant même le dessus de sa tête pour sécher ses cheveux. Étant arrivé à l'ouverture, nous étions seul.

- Je meurs de froid... Murmura Minho.

- Viens là... Répondis-je en ouvrant les bras pour qu'il s'y réfugie.

Minho se blottit contre moi et, au même moment, Monsieur Jung arriva avec une tasse.

- Et voilà pour toi, jeune homme !

- Merci beaucoup...

Je pris la tasse moi-même le temps que le chocolat chaud refroidisse un peu. De la sorte, Minho pouvait encore rester dans cette position confortable.

- Je suis mort de peur...

- Je sais, moi aussi... Mais tout ira bien, parce qu'on est ensemble.

Au bout de trois minutes, je me permis de tremper les lèvres dans le chocolat chaud.

- C'est bon, tu peux le boire.

- Merci...

Mes bras toujours enroulés autour de lui, il buvait sa boisson chaude tout doucement, pour ne pas se brûler.

- Comment va Bouboule ?

- Il s'est attaché à toi très vite. Il attendu dans la chambre d'amis pendant toute une journée. Et maintenant, ça va. Ça lui arrive de dormir dans mon lit. Regarde.

Je sortis mon téléphone de ma poche pour lui montrer le chaton endormi dans le creux de mon cou.

- Il est trop mignon... Je donnerais tout pour pouvoir rentrer à la maison et lui donner toute l'attention qu'il souhaite...

- Je sais...

J'embrassai son front et passai une main dans ses cheveux.

- Je vais certainement être malade... Soupira Minho en regardant son chocolat chaud.

- Si ça peut te réconforter, ça ne m'empêchera pas de t'embrasser. Tentai-je.

Je me doutais bien qu'il était dévasté. Même s'il était quelqu'un de profondément gentil, Minho avait été ce genre d'enfant qui avait toujours eu facile. S'il n'arrivait pas à avoir ce qu'il voulait par lui-même, on le lui donnait. Et aujourd'hui, il se retrouvait à devoir se battre pour ce qu'il voulait pour, certainement, la première fois de sa vie.
Et le combat promettait d'être lourd.

❖❖❖

Quinze minutes avant que les cours ne commencent, nous avions quitté la librairie pour nous rendre à notre établissement. Heureusement, la pluie s'était calmée.
Une fois devant le bâtiment, l'enfer débuta.

Tout le monde nous regardait.
Non, ils ne nous regardaient pas.
Ils nous fixaient, nous dévisageaient.
Comme si nous n'étions pas de simples humains, comme si nous n'étions pas normaux...

J'avais déjà connu ça, une fois.
Mais grâce à ma tante qui avait été porter plainte, ça s'était calmé. Mais pour mon petit ami, c'était une première. Lui qui avait toujours été apprécié de tous.

Il se sentit instantanément mal à l'aise par tous ces regards perçants. Je glissai alors une main dans la sienne pour le rassurer.

- Regarde droit devant toi, la tête haute... Ne fais pas attention à eux.

- Plus facile à dire qu'à faire... Tout le monde me connaît ici...

- Je sais... On va aller rejoindre Jiwon, elle doit être en-dessous de son arbre. Tu vas enfin découvrir notre point de rendez-vous.

Je lui souris et il tenta d'en faire de même. Mais il pâlit en voyant trois garçons autour de notre amie.

- Aller, t'es proche du p'tit Han, nan ? Insista un des trois garçons.

- Ce ne sont pas vos affaires ! Ce n'est pas à moi à dire quoi que ce soit ! Répondit Jiwon en tapant du pied.

Je vis dans le regard de mon aîné à quel point il se sentait coupable. La jeune fille nous remarqua et nous fit un signe discret de partir.
Incertain, je hochai malgré tout la tête. Jiwon était une dure à cuire, je savais qu'elle gérait la situation.

Et là fut le moment le plus angoissant pour Minho; l'entrée dans le bâtiment. Alors que nous nous dirigeâmes vers les casiers, je sentis la main de mon petit ami se contracter autour de la mienne.

- J-J'ai la boule au ventre...

- Shh, ça va aller... On s'en fout d'eux, c'est pas leurs affaires...

- Jisung, j'ai p-peur... Je ne peux p-pas...

Les chuchotements se firent entendre dans tout le couloir et cela empira l'état de Minho. Il se sentit comme oppressé et il s'arrêta de marcher.

- Minho, il ne faut pas rester là, en plein milieu de la foule... Lui murmurai-je en lui tendant la main.

- J-Jisung, ils sont l-là... Là-bas... Fit remarquer Minho, mort de peur.

Je me retournai et vis Hyunjin et Changbin. Ils fixaient Minho et moi d'un regard noir, empli de haine. Alors qu'ils commencèrent à s'approcher, le premier réflexe de mon aîné fut de courir.

- Lee Minho ! Hurla Hyunjin au fond du couloir.

En les voyant se mettre à courir, je n'eus d'autre choix que de partir à la recherche de mon petit ami.

- Merde... Jurai-je en prenant le même chemin que lui.

C'était celui qui menait au gymnase. Connaissant Minho, il se cacherait sûrement dans les vestiaires ou les douches.

- Minho... C'est moi, Jisung... T'es où ? L'appelai-je dans un chuchotement.

J'entendis subitement un sanglot provenant des douches. Je m'empressai d'entrer dans les vestiaires et je poursuivis mes recherches.

- Amour, tu es où...

- I-Ici...

La voix provenait d'une des cabines, là où l'on se douchait. J'ouvris la porte et vis mon petit ami en pleurs, assis dans la douche.

- Hey...

Je verrouillai la porte derrière moi et m'assis à ses côtés. Il se blottit contre moi et se laissa pleurer.

- Ils... Ils m-me... Détestent....

- Ils sont juste cons, Minho... Comme le reste de cette école...

- J-Je me sens pas en sécurité i-ici... Je veux r-rentrer...

- Fuir n'est pas la solution, amou-

Je m'arrêtai subitement de parler en entendant Changbin hurler le prénom de mon petit ami qui se remit à pleurer. Je m'empressai de couvrir sa bouche de ma main pour étouffer le bruit de ses sanglots.

En entendant les pas s'approcher de notre cabine, je sentis son souffle se couper.

- Je sais que t'es là... Avec Jisung. Rit Hyunjin.

À notre plus grand soulagement, la sonnerie retentit.

- Bon, moi je veux pas être en retard. 'Bin, on s'en va...

- Putain...

Minho sursauta dans mes bras lorsque Changbin frappa la porte de notre cabine de son pied.
Puis, les pas s'éloignèrent...

Une fois sûr d'être seul avec moi, il fondit de nouveau en larmes contre moi.

- O-Oh m-mon d-dieu...

- Shh... Je suis là...

Son corps tremblaient si fort...
Il semblait tétanisé.
Il se cramponnait à moi d'une telle force que je pus ressentir toute la frayeur qui parcourait ses veines.

- J-Jisung...

- Mon amour... Je suis là, je ne vais pas te laisser tomber... Je vais te protéger...

- O-Oh Jisung, c-c'est... C'est h-horrible...

Minho regardait tous les messages non lus sur son compte Instagram et, en voyant le nombre incalculable de notifications, mes yeux devinrent ronds.

- Donne-le moi...

- M-Mon téléphone... ?

- Oui, je ne vais pas te laisser te torturer comme ça...

Minho hocha la tête et me le tendit.
Connaissant le mot de passe, je comptais bien le débarrasser de toute cette haine mais en garder des preuves. On parlait probablement déjà de cyberharcèlement.

Je rangeai le téléphone de mon petit ami dans mon sac avant de reporter mon attention sur lui. Je le pris par les joues et forçai le contact visuel.

- Tout ce qui t'arrive ici, ce n'est ni de ta faute, ni de la mienne. Certes, on aurait pu être plus prudent, on aurait dû s'y attendre... Mais je refuse que l'on s'excuse auprès des élèves de cette école.

- D-D'accord...

- Même si la nature a dit qu'il faut un homme et une femme pour se reproduire, personne n'a dit qu'il fallait être hétérosexuel pour avoir le droit d'aimer.

- J-Je... Je t'aime, J-Jisung...

- Moi aussi, je t'aime. Je t'aime comme un fou...

Je posai mes lèvres délicatement contre les siennes pour le réconforter. Il y répondit immédiatement et son corps se décontracta au fur et à mesure.

- Aller... On y retourne ?

- On... On peut s'assoir l'un à côté de l'autre... ?

- Tu es sûr ?

- Oui, je n'arriverais pas à rester concentrer en classe...

Je me levai pour ouvrir la cabine et tendit la main à mon petit ami pour qu'il puisse se relever.

❖❖❖

- Lee Minho, Han Jisung. Comment se fait-il que vous êtes en retard ? Demanda notre professeur d'anglais.

- J'ai eu un problème personnel, madame Park. E-Et il m'a aidé. Se justifia timidement Minho.

La chose la plus horrible pour ce dernier arriva; la classe entière partit dans un fou rire. Il n'y avait rien de plus humiliant.
Je serrai les poings et me mordit la lèvre, essayant d'ignorer tous ces crétins.

- Silence ! Allez vous asseoir les garçons. Aucune sanction pour cette fois-ci.

Après l'avoir remercié, nous avions pris place dans le fond, l'un à côté de l'autre. Minho se sentait vulnérable, il avait l'impression d'être nu face à toute sa classe.

Durant tout le cours, il avait gardé les yeux sur ses exercices alors que tous les regards étaient rivés sur lui.
Je lui avais transmis tout mon soutien en gardant ma main dans la sienne.

Les deux premières heures ne furent pas un cauchemar, malgré les regards, les chuchotements et les remarques.

En revanche, la pause fut bien plus terrible.

J'avais passé cinq minutes à arracher les photos de nous collées sur l'entièreté de mon casier. Mais je m'estimai heureux quand je vis celui de Minho. Le verrou ayant été forcé, quelqu'un avait versé du jus à l'intérieur, sur toutes ses affaires.

Mon cœur se fissura lorsque je le vis se décomposer devant son casier, qu'il ne pouvait à présent plus fermer.

- Bah alors, Min' ? Ton casier ne se ferme plus ? J'espère que toutes tes affaires rentreront dans ton sac pour ne pas te les faire volées... Ricana Hyunjin en s'approchant de lui.

- Ou que ton petit ami sera d'accord de les porter pour toi. Se moqua Changbin.

- J-Je n'ai rien fait de mal... Pourquoi vous faites ç-ça ? On était amis...

- Minho, je suis ami avec des êtres humains. Pas des phénomènes de foire.

Plusieurs élèves, ayant entendu la conversation, rigolèrent.
C'en fut de trop et je pris la parole.

- C'est quoi ton putain de problème ?

- Woah, tout doux ! J'explique simplement à mon ami qu'il devrait revoir ses fréquentations et surtout se reprendre.

- Se reprendre quoi, Hyunjin ? C'est toi qui devrait te reprendre ! Tu fais du mal à ton meilleur ami ? Parce qu'il aime les hommes ? Ça change quoi à ta vie ?

- Bien plus que tu ne l'imagines. Ma réputation ici, l'image que mes parents ont de moi et mon avenir. Franchement, j'aimerais pas qu'on apprenne que j'ai été pote avec quelqu'un comme lui.

- À ta place, j'aurais plus peur qu'on découvre que je sois un monstre qui gâche la vie d'autres étudiants que l'on découvre que j'ai soutenu un ami.

Les deux amis se mirent à rire, me faisant rouler des yeux.

- Jisung, sérieux. Va voir un psychologue. Pouffa Hyunjin.

- Frère, il peut pas. Il est pauvre. Rit fièrement Changbin.

Je levai les yeux avant de prendre mon petit ami par le poignet.

- Viens on s'en va...

- Pas tout de suite.

La clé, c'était l'ignorance.
Oui.
Mais ça n'empêcha pas Changbin de nous balancer une dizaine de préservatifs sur nos têtes.

- N'oubliez pas les IST, les enfants !

Je retirai ceux qui étaient restés coincés dans ma capuche avant de les jeter vulgairement par terre. Minho était à la fois très triste, à la fois fou de rage. Je vis dans son regard qu'il voulait retourner auprès de ses anciens amis pour leur faire payer. Mais je passai un bras autour de ses épaules.

- Ne te retourne surtout pas... Ça va leur donner encore plus envie de t'ennuyer.

Minho se contenta de soupirer simplement.

À midi, ce fut encore pire.
Quand je m'étais assis avec mon plateau, quelqu'un était venu et l'avait renversé par terre. Contraint de me relever pour me resservir.

Pendant ce temps-là, des garçons étaient venus ennuyer Minho. L'insultant, le touchant, l'humiliant....

Résultat, il avait pleuré toute la pause.

À présent nous étions au toilette, Minho vomissant et moi le soutenant. Même si je l'aimais de tout mon cœur, c'était épuisant.

- Ça va aller mon cœur...

- J'en peux déjà plus... Dire que ça risque d'être comme ça toute l'année...

- Hey... Je ne vais pas te lâcher, d'accord ?

Il hocha la tête et je lui donnai une bouteille d'eau.

- Merci...

Il se blottit contre moi, à la recherche de réconfort. Je passai un bras autour de lui et de ma dextre, je lui caressai les cheveux.

Cette dernière année allait définitivement être plus compliquée que prévue...

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