Maybe We Could Be Enough...
Fox avait terriblement envie, voire besoin, d'embrasser Wolfgang. Et comme ils se connaissaient encore trop peu, il réussit à se convaincre que ce n'était qu'une pulsion physique. Cette pensée le rassurait assez bien, sauf quand il s'enfermait trop longtemps dans son esprit.
Heureusement pour lui, ces périodes étaient moins fréquentes depuis qu'il côtoyait l'autre adolescent. Mais il avait interdit à son cerveau de faire le lien entre, s'autorisant même officiellement à sauter quelques lignes dans son fil de pensées. Et c'en était presque un soulagement.
Il était donc heureux ce jour-là: il avait fait ses devoirs, proprement et sérieusement; il avait terminé son livre de la semaine ("Boy Meets Boy" de David Levithan) et avait réussi à dormir quasiment 7 heures la nuit dernière.
Tout allait bien. Même le lycée était plus agréable à vivre: il avait accepté d'intégrer la table des "sportifs" à la cafét' face à l'insistance de Wolfgang, et il ne regrettait pas encore sa décision. La plupart était sympa et rigolote, quoi qu'un peu trop cliché par moments mais cela ne le gênait pas.
Mais bien évidemment, comme tout espoir que Fox osait avoir, il fut vite balayé en rentrant chez lui. Il avait invité Wolfgang à lui tenir compagnie, pensant que seulement sa mère serait présenté, mais mauvaise surprise: il n'y avait que son père.
Et il fut tenté de leur faire faire demi-tour mais son père, comme un chien de garde reniflant les inconnus, apparut pile devant son nouvel ami.
Il ne désirait pas vraiment lui présenter mais se mettre encore à dos son père...il devait rester de bonne humeur et agir comme un être humain civilisé. Une opération bien complexe, en somme.
"Papa, j'te présente Wolfgang. Wolfgang, voici mon père."
Il y eut un moment silencieux gênant pour les trois individus,aucun n'osant bouger; puis l'invité retrouva sa politesse.
"Bonjour, Monsieur Hill. Content de vous rencontrer", en tendant la main mais le mensonge était quasi visible donc l'adulte ne lui opposa qu'un léger rictus censé ressembler à un sourire chaleureux. Fox n'attendait que le signal pour fuir, avec Wolfgang si possible.
"Vous allez travailler un peu, c'est ça?", comme prévenant que ce serait la seule possibilité pour que l'invité puisse rester ici sous cet agréable toit.
"Oui, je suis quasiment son tuteur, en fait...", tentant de ne pas en rigoler. Son ami lui donna un coup de coude, perdant un peu de sa gêne devant le père de famille.
"Pourtant, Fox a redoublé...et tu as l'air plus...mature."
Il avait l'air peu certain de son choix de mots: cela n'avait jamais été son fort. Faire des compliments ou une bonne remarque à propos d'un nouvel ami de son fils ne paraissait pas être un objectif. Il se méfia immédiatement de lui et le duo de lycéens le comprit directement.
"Disons qu'on s'aide mutuellement, papa", répondit Fox qui ne voulait pas que Wolfgang fasse une possible gaffe face à la figure d'autorité. Celle-ci jaugea l'inconnu, l'observant du sommet de son crâne à ses converses quelques peu noircies, et Wolfgang en fut quelque peu désarçonné et Fox tentait de tout garder en lui.
"Donc c'est purement scolaire?", Wolfgang commença à esquisser un sourire mais Fox, un peu moins stupide, préféra lui arracher l'herbe sous le pied.
"Oui et on laissera ma porte de chambre ouverte."
"Parfait. Alors vous pouvez y aller."
Il afficha un faux sourire et ne les quitta pas des yeux tout le long de leur descente vers la chambre. Et Wolfgang eut vraisemblablement du mal à garder un ton doux quand Fox se tourna vers lui.
"C'est vraiment ton père, ce gars?", complètement halluciné et Fox eut un rire triste.
"Je t'avais prévenu..."
"Je pensais que t'exagérait... Il croit qu'on va se jeter l'un sur l'autre si on ferme la porte?", pas totalement fermé à cette idée évidemment.
Fox se rapprocha de lui, et ce fut si inattendu qu'il en perdit son souffle un instant.
"C'est pour ça que je n'invite jamais personne si c'est lui ici... Il pense que je peux faire n'importe quoi avec n'importe quel garçon."
Il était dégoûté mais Wolfgang ne réussit qu'à en être vexé... "N'importe quel garçon"? Ça s'appliquait à lui aussi? Il était si semblable et si peu remarquable aux yeux du rouquin?
"D'accord...", il brûlait d'envie de l'interroger, de le coincer sur ses propos; mais la journée et peut-être même la semaine entière, pourrait être gâchée ensuite...
"Ça ne va pas, Wolfie?", Fox effleura ses doigts et le jeune adolescent faillit transformer ce presque geste en véritable signe d'affection. Mais il n'était pas forcément bienvenu...
"Ton père va rester longtemps?", Fox fut un peu surpris par le virement du sujet.
"Euh...oui, il passe la soirée ici. Il ne sort que pour le boulot, donc..."
"Donc on n'a aucun moyen d'être seuls tous les deux?"
Le roux avala difficilement sa salive, et Wolfgang avança un peu plus, effleurant à son tour l'autre main de son ami.
"Ça me paraît compliqué, en effet..."
"Mais est-ce que tu le voudrais?"
"Mmmhh?", il avait laissé ses yeux se perdre dans la contemplation des fines et trop rosées lèvres de Wolfgang et ce dernier sourit en s'en apercevant.
"Quelque chose d'intéressant face à toi, peut-être?", Fox était comme congelé sur place.
"J'ai envie de...", il approcha sa bouche et Wolfgang, paniquant, recula brusquement, laissant au moins 2 mètres de sécurité entre eux.
Fox parut sortir de sa torpeur.
"Ton père! Fox...", l'interpellé secoua la tête, comme chassant l'autre Fox ayant momentanément pris les commandes. Il eut un léger rire, tout sauf communicatif.
"Merde, quel con! Désolé, t'as raison. Mon père nous tuerait."
Et l'ambiance gela de nouveau...
*
"Ce serait si simple avec toi...tout serait bien meilleur avec toi à mes côtés..."
Fox courait et courait sans relâche mais la terrible voix le suivait, elle résonnait et s'entrechoquait autour de lui.
Aucune échappatoire. Aucune issue de secours.
Il la vit finalement: cette lueur verte au bout, juste devant lui, qui l'avait narguée tellement de fois...
À chaque fois, il avait crut qu'elle serait sa solution, sa délivrance mais c'était toujours pire...
La voix disparaissait et les ténèbres aussi mais il se retrouvait entouré, attaqué, cerné par des souvenirs de son mort...
Des photos, des bouts de vidéos d'eux deux et c'était ce qu'il redoutait le plus.
Faire face à ses souvenirs la journée pouvait lui couper le souffle quelques secondes; mais quand il réussissait à s'endormir, il avait comme l'impression que son cœur, que son âme le quittait peu à peu...
Il ne respirait plus réellement et même si parfois, cette alternative le tentait; mourir de cette manière était difficilement supportable.
Mais dans ce cauchemar-là, il ne semblait n'y avoir que le chemin vert qui lui ouvrait les bras, plein de promesses vides; alors il se stoppa net.
Il fixa le point d'entrée, espérant que les voix disparaissent totalement; parfois, elles lui laissaient un léger répit, mais ce soir...
Ce soir-là, les voix explosèrent entièrement: oreilles, crâne et parois autour de son enveloppe corporelle semblaient porter le son terrifiant et dangereux.
Ces voix qu'il avait toujours eu du mal à repousser...
Et Fox faillit abandonner, "lâcher ses armes" et seulement faire demi-tour. Chose qu'il n'avait jamais encore tenté, se doutant que ce serait probablement pire.
Mais pouvait-il être assez courageux pour finir par essayer cette option?
Il crut entendre un hurlement de loup juste derrière lui; et peut-être était-ce un signe? Un présage qui lui conseillait de suivre son instinct cette fois...
Il se retourna, comme animé par un affreux ralenti, et fit face à son retour arrière, lui qui avait toujours détesté revenir sur ses pas...
Il poussa un long soupir, se préparant déjà mentalement au pire, mais priant pour que le silence lui revienne finalement. Et il finit par se pousser en avant; et plus il se rapprochait de la pénombre dont il venait, plus il se sentait léger...comme si son âme quittait son corps mais doucement et sans une once de douleur.
Il finit par remarquer qu'il lévitait littéralement au-dessus du sombre sol. Et c'était un soulagement...un véritable havre de paix semblait s'offrir à lui maintenant.
*
Quand le rouquin arriva au lycée le lendemain, il portait un ravissant sourire prêt à affronter n'importe quel problème ou contrariété: il était tout simplement heureux.
De nouveau, l'espoir renaissait en lui et Wolfgang en fut plus que surpris, mais d'une bonne façon.
"Hey! Ça a l'air de rouler pour toi! Qu'est-ce qui t'arrive?", en se posant contre le casier voisin de celui de son nouvel ami. La tête orangée ferma son antre et joint ses bouquins contre son torse, son sourire éclatant de sincérité et cette vision réchauffa Wolfgang.
"J'ai juste décidé que de temps en temps, être de bonne humeur et voir la vie du bon côté pouvait aider à tout affronter, c'est tout! On fait quoi cet aprèm'?"
"Ah bah ça, c'est cool! (Après une pause servant à réfléchir) Hum...on a tous les deux cours, non? Pas ensemble malheureusement, mais on doit s'en contenter pour le moment."
"N'y allons pas", ajouta tout simplement Fox.
Là, Wolfgang crut que ses yeux sortiraient.
"Comment ça? N'y allons pas? Tu veux...(baissant la voix) sécher?"
"Ce n'est pas un crime de s'autoriser quelques heures libres, si?", il avait un air coquin et l'autre se prit à espérer que Fox avait déjà concocté un programme alléchant.
"Non, non, ça m'étonne juste un peu de toi... Je pensais que t'étais une sorte d'élève modèle."
"Et c'est payant la plupart du temps, mais là...j'ai besoin d'air pur."
"Alors...allons-y! Allons-y!" Et il attrapa Fox par la manche de son pull, les faisant cavaler comme deux irrésistibles petits voleurs à l'étalage.
*
"T'es en train d'affirmer, haut et fort, que tu n'écris pas d'histoires? Toi?"
"Pourquoi est-ce que tu croyais que je faisais ça?", Fox se baissa et ramassa une jolie pierre grise et brillante, se demandant bien ce qu'elle faisait ici. Elle était trop unique pour appartenir à un endroit aussi...ordinaire? Et il en était presque outré, mais il la rangea juste avec précaution dans sa bandoulière et continua à scruter le sol boueux.
"T'as l'air d'un rêveur doté d'une imagination fertile, et t'es passionné par les livres, donc j'me suis dit que...", il trébuchait un peu sur ses propres mots et c'était assez inhabituel, Fox le savait bien.
"T'as l'air nerveux. Qu'est-ce qui se passe?", Fox releva son regard bleuté vers l'autre adolescent, sa main tenant une nouvelle petite pierre précieuse à ses yeux.
"Je sais pas... Franchement, j'en sais rien du tout."
"Tu regrettes d'avoir séché les cours, c'est ça? Tu le fais jamais, hein?"
Il y avait comme une once de défi dans sa voix et Wolfgang se sentit stupide un court instant.
"Oui, peut-être un peu... Je fais jamais ce genre de choses. Mais maintenant, j'me doute de la raison pour laquelle t'as redoublé!"
Il laissa fuir un léger rire mais son ami semblait avoir perdu tout amusement à présent.
"Nope, c'était pas à cause de ça...mais bien essayé?", il esquissa un sourire plastique, se détourna de lui et avança de nouveau, prêt à se concentrer sur ses futurs trésors.
Wolfgang resta bêtement planté, puis comprit que bouger serait mieux pour continuer à discuter.
"Alors je peux te demander pour quoi?"
"Tu peux mais pas sûr que t'obtiennes une réponse."
Il se baissa, contempla avec émerveillement une traînée brillante et pailletée laissée sur le sol, totalement hypnotisé.
"Qu'est-ce que c'est...", il en effleura la surface et il se sentit plus serein, ce qui était vraiment étrange, et quasiment magique. C'était comme si des centaines de milliers de paillettes s'étaient écrasées là et avaient décidées d'y loger pour une durée indéterminée.
Wolfgang s'accroupit à son tour, un peu trop proche de Fox, mais ce dernier ne dit rien.
"C'est magnifique...", chuchota t'il et Fox acquiesça vaguement, toujours aussi ébloui par cette étonnante découverte. Il avait enfin trouvé un endroit réellement intéressant et adorable dans cette petite ville dans laquelle il galérait à trouver sa place.
"Tu ne veux pas te confier un peu à moi, Foxie?", toujours chuchotant, effrayé de briser la magie de ce moment privilégié. Et bizarrement, Fox décida de lui donner un peu de lui-même.
"J'étais en sale état...à cause de Lui, et j'ai foiré examens sur examens; et j'avais honte de devoir redoubler donc mes parents ont décidé de prendre un nouveau départ ailleurs. Mais ça arrangeait surtout mon père pour son boulot, donc...gagnant-gagnant, j'imagine."
Il avait de nouveau revêtu son masque concentré et Wolfgang hésitait réellement à pousser plus en profondeur son "interrogatoire".
"Qu'est- ce qu'il t'a fait exactement? Pour que t'en sois arrivé là, ça devait être grave...", le doux son de sa voix inquiète apaisait presque Fox. Et sa bonne humeur demeurait imperturbable.
"Oui, c'était grave...mais maintenant, c'est du passé. (Fox posa ses genoux à terre, et tourna son buste vers son ami, sa main venant se déposer sur le genou gauche de Wolfgang, l'invitant à s'assoir.) On est bien là, non?"
"Oui, super bien...", il se tâta mais finit par flancher et laissa sa main aller au-dessus de celle de Fox, celui-ci soupira d'aise et se permit un véritable sourire.
"Wolf? T'as déjà voulu t'installer ailleurs? Changer un peu de décor?"
"Non, je crois pas... J'ai toujours vécu ici avec ma famille et j'ai toujours adoré, donc j'y ai même jamais pensé... Et toi? Tu te plais ici au moins?"
Soudain, il paniqua à une possible annonce de déménagement... Impossible: il venait de s'y poser! Il ne songeait quand même pas déjà à le quitter...si? Il n'osa même pas croiser le regard de son ami.
"Ah...ouais, tu as toujours été heureux ici, c'est pour ça...c'est cool. Non, non, je veux pas déjà partir si c'est ça qui t'inquiètes."
Il lui caressa la paume de sa main et Wolfgang osa de nouveau le regarder, Fox étudiait déjà son visage avec toujours son sourire en coin.
Il était prêt à tenter, il le devait...cette occasion ne se représenterait peut-être pas avant des semaines et il voulait goûter à son renard maintenant. Tout de suite.
Il s'approcha donc, mais Fox perdit instantanément sa gaieté et tourna la tête, faisant se figer sur place Wolfgang.
Il avait tout imaginé? Il pensait que leur rapprochement les menait à ça...
"C'est trop tôt pour moi, Wolf... Désolé mais je ne peux pas pour le moment."
Donc il y avait bien quelque chose, un réel lien, une connexion invisible entre eux: Wolfgang n'était pas complètement dingue.
"D'accord...je comprends."
Mais il arborait quand même une mignonne petite moue et Fox en sourit de nouveau.
"Vraiment? (Après une brève pause) Ce n'est pas que je ne veux pas, c'est juste...je ne suis pas prêt à réessayer ce genre de choses pour l'instant."
Son regard était doux et pas meurtrier, alors son ami en profita pour continuer dans la douceur.
"Donc tu m'autorises à retenter dans 2 jours?", Fox lui tira la langue.
"Nope encore trop tôt mais bien essayé, petit." Et Wolfgang ne put qu'en sourire.
"J'ai l'impression que tu as trouvé ton nouvel endroit préféré...j'me trompe?"
"Non, t'as raison."
Et il s'accrocha fermement à la main que son ami lui laissait encore avoir.
"Ici, c'est parfait."
*
Wolfgang rêvassait et ne pensait à absolument rien, et c'était réellement libérateur pour lui et sa curiosité presque maladive. Ces derniers jours aux côtés de Fox l'avaient rendu encore plus sensible, plus ouvert.
Et toutes ses pensées étaient positives, que demander de mieux?
Il était paisible et prêt à tout affronter de front dans le monde, et ce sentiment d'être invincible lui procurait un éclat quasi surnaturel.
"Tu utilises du highlighter, Wolfie?", l'accosta le spécial Fox.
C'était lui-même qui venait à sa rencontre pour une fois et ce changement était revitalisant. Lui aussi rayonnait et illuminait le couloir du lycée et c'était un véritable délice pour les yeux.
"Du quoi?!"; oui, il n'y connaissait rien du tout... Fox s'en moqua gentiment.
"Du maquillage, Wolfie! Pour rendre la peau brillante et éclatante, tout simplement."
"Ça n'a pas l'air très pur tout ça... Je préfère rester naturel, moi."
"Et tu es naturellement superbe, donc c'est parfait."
Wolfgang s'approcha et lui embrassa la joue la plus proche, faisant rougir le rouquin.
"C'était pour quoi?", réussit-il à articuler malgré tout.
"Tu es juste adorable: j'étais obligé de craquer. (Remarquant la tenue de son "ami") Woah...quelqu'un a décidé de faire son coming-out aujourd'hui?"
Fox portait en effet un sweatshirt noir avec les couleurs arc-en-ciel dessus, des vans ornées du même motif et même un petit pin's avec un arc-en-ciel de plus. Et il avait l'air plutôt fier de lui.
"J'ai enfin reçu mon pull alors je devais l'inaugurer!"
"C'est d'un groupe de musique, non? (Moue perplexe) Je croyais que t'en écoutais pas..."
"J'ai menti. C'est très rare, mais The 1975 est le meilleur groupe existant, alors je fais une exception pour eux. Surtout pour Matty."
Clin d'œil et sourire idiot. Clin d'œil? Mon dieu... Wolfgang était plus que confus maintenant... Pourquoi Fox avait menti sur une chose pareille?
"Mais juste...pourquoi?", et il en faisait peut-être tout un drame mais c'était dans sa nature.
"Pourquoi je l'adore? Ce mec est LA Perfection incarnée, tout simplement."
Comme si cette évidence énoncée servirait à faire oublier la trahison dont était victime Wolfgang...
"Non, non, pas ça! Pourquoi tu m'as dit que tu détestais la musique?"
Fox fut silencieux trop longtemps et son ami comprit qu'il allait changer de sujet ou mentir de nouveau.
"C'est si important? Wolfie? Depuis le début de la semaine, je m'étais pas senti aussi bien depuis des mois et je ne veux pas qu'on gâche tout pour rien."
Il tenta un sourire timide.
"Non, pas forcément; mais maintenant, je vais pas pouvoir m'empêcher de me demander sur quoi d'autre t'as menti. Ou si tu le fais juste constamment, comme une véritable nature."
"Wolfgang...s'il te plaît...", il avait de nouveau cet air las et son ami le détesta l'espace d'une seconde.
"Non, non, j'ai besoin de savoir qui tu es! Si tout ce que tu me dis sur toi, c'est des conneries, comment je vais faire, moi?"
"Comment ça?", Fox sembla perdu à son tour.
"Tu m'as compris...très bien compris, Fox."
Celui-ci leva la tête vers le plafond, comme tentant d'obtenir une aide du ciel, mais rien à faire... Il était seul et sans support.
"Je t'ai juste menti sur ça...j'ai juste du mal à en écouter."
"Pourquoi? Parce-que ça te déconcentre de tes bouquins et de ton côté intello?", il y avait une pointe de venin transparaissant dans sa voix. Et c'en était insupportable.
Alors Fox décida d'être entièrement honnête.
"Parce-qu'Aaron adorait ça. Et en créait. Voilà pourquoi."
Wolfgang se sentit tout con, et en balbutia presque.
"Je...je savais pas...désolé?"
"C'est pas grave, tu ne pouvais pas deviner. Il passait son temps à en composer, à en jouer, à répéter...et à m'en faire écouter. Et du coup, ça me le rappelle toujours."
Il croyait en avoir trop dit...il pensait que son nouvel ami lui ferait les gros yeux, s'excuserait maladroitement et le laisserait planté contre ce casier.
Toute sa peur l'envahissait de nouveau et une crise surviendrait sûrement, et Fox n'était pas prêt à la subir. Il était vidé de toute son énergie, et son carburant de joie se consumait trop vite pour tenir tout le long.
Il voulait disparaître de la vie de Wolfgang avant que celui-ci ne le fasse de son plein gré: ce serait plus facile à accepter et à supporter. C'était ce qu'il désirait se faire croire en tout cas...
"Et tu n'es pas prêt à lui pardonner...et à passer à autre chose. Je comprends."
Fox baissa la tête pour que leurs visages soient face à face et eut un sourire triste: il était sauvé. Et il n'était plus seul. Pour l'instant.
"Exactement ça... On fait quelque chose après les cours?"
"Après et pas pendant? Je suis un peu déçu..."
"On va pas sécher tous les jours! Sinon tu risques pas de comprendre quoi que ce soit à la chimie...", son sourire taquin faisait son retour fracassant et Wolfgang en sourit aussi.
"Okay...tu m'as bien eu là. Donc ça te dirait de m'aider pour de vrai cette fois?"
"Pour de vrai? Je t'aide depuis des semaines. Juste pas en chimie."
"Et tu peux me rafraîchir la mémoire, s'il te plaît? Je ne me souviens pas de ton soutien."
Il souriait toujours et Fox comprit que ce n'était que plaisanterie.
"Je t'aide à contrôler ta curiosité, ton côté fouineur: tu te souviens maintenant?"
"En évitant toutes les questions sur ta vie? Ah ouais d'accord, je vois...ingénieux."
"N'est-ce pas?"
La sonnerie retentit au loin mais les deux lycéens ne voulaient pas se quitter si rapidement...alors ils prétendirent n'avoir rien entendu.
"Donc...tu me fais réviser ou on fait plus intéressant?"
"Comme quoi? Dévaliser l'usine à bonbons?"
Wolfgang acquiesça aussitôt.
"En voilà une super idée, petit mignon hors-la-loi!"
La sonnerie se fit de nouveau entendre et le couloir était déjà vide de toute autre âme dissipée. Il était temps de se séparer...
"Bon...on décide de notre programme quand on se rejoint? (Fox acquiesça timidement et Wolfgang ferma son casier, prêt à rejoindre sa salle de cours. Mais le renardeau vint lui embrasser la joue droite, le faisant se figer net.) Et ça, c'était pour quoi?"
"Peut-être que c'est parce-que tu me manques déjà?" et il disparut, comme volatilisé.
"Je suis foutu. Délicieusement foutu."
Mais son sourire était resplendissant.
*
Fox passa la journée entière sur un doux nuage multicolore flottant et rien ne le pousserait à en chuter. Même la présence constante de Romance, alors qu'il aurait aimé rester un peu seul avec ses pensées positives, sans cette légère pointe de culpabilité lui enfonçant le crâne.
"T'es de bonne humeur depuis lundi, ça fait du bien!", lança t'elle, passant pour une innocente amie, fière de ses progrès. Mais il sentait qu'elle avait de réelles interrogations et il ne la laisserait pas faire.
"Mon petit hérisson est en pleine forme et accepte docilement nos selfies, donc je suis comblé, oui."
Et il "priait" pour que cela soit suffisant à la lancer sur sa semaine à elle.
"N'essaye pas de me faire avaler que t'es tout souriant et joyeux juste grâce à un hérisson. Sauf si celui-ci s'appelle Wolfgang."
"Celui-là pique beaucoup moins", et il s'autorisa un rire, mais pas son amie.
"Ça se passe si bien que ça avec lui?", on sentait poindre une crainte dans sa voix et Fox la détesta quelques longues secondes.
"Wolfgang est un bon ami, oui. Et grâce à moi, il va réussir la chimie, l'histoire-géo ET la littérature, donc je crois que je suis le plus utile de notre duo."
"Donc...il n'y a rien de plus entre vous?", Fox leva les yeux au ciel, pas blasé mais surtout déçu qu'elle croit qu'il puisse passer aussi vite à autre chose.
"Non, Romance, nous ne sommes pas ensemble. Juste amis, comme toi et moi." Sauf que lui, j'ai envie de l'embrasser. Souvent. Mais il ne pouvait lui confier cette pensée honteuse.
"D'accord...super. Très bien. (Soupirant d'aise) Bon alors, on la fait quand notre prochaine soirée?" Et cette question détendit l'atmosphère.
"Plus jamais, petite!" Et les deux amis en rigolèrent.
*
"Allez, dis-moi! J'suis sûr que c'est pas aussi ridicule que tu veux me faire croire!"
"T'as une petite sœur?", Fox hocha négativement la tête: fils unique...et il détestait sa situation. S'ils avaient eu d'autres enfants, peut-être que son père ne serait pas autant sur son dos, à surveiller chacun de ses pas.
"Donc t'en as sûrement jamais entendu parler... Les One Direction, ça te dit quelque chose?", il baissa le visage vers le sol sur lequel ils étaient installés, et ses joues étaient plus roses que café à cet instant.
Et Fox dut se retenir très fort de ne pas les lui croquer, les mordiller. Mais surtout de ne pas rire face à cette confession.
"C'est assez dur de ne pas en avoir entendu parler, Wolfie. Y en a un qui a claqué la porte Y a quelques mois, non? Un beau mec avec de superbes cheveux noirs et des yeux dorés, c'est ça?"
Peut-être que c'était un peu détaillé...
"Hum, c'était il y a 2 ans et demi quand même... (Et il avait l'air si défait en en reparlant que Fox perdit toute envie de se moquer de son goût douteux) Mais oui, ce sont eux. Et oui, c'est lui qui est parti. Mais j'imagine que j'ai eu de la chance que ce soit pas mon préféré... Enfin, maintenant, ils sont tous chacun de leur côté...", il soupira de tristesse et Fox posa sa main sur son genou.
Ce contact des plus simples fut agréable pour les deux garçons.
"Et donc? Ça devrait être cool, non? T'as 5 fois plus de musique maintenant!"
"T'es sérieux? Tu te moques pas de moi?"
Fox haussa gentiment les épaules.
"Nope. Si tu les aimes, tant mieux pour toi. Tu ne dois pas laisser les autres t'influencer, Wolfie."
L'adolescent adorait sincèrement que son ami ose l'appeler de cette manière.
"Donc ça ne te dérangerait pas d'en écouter un peu avec moi?"; là, Fox crissa presque des dents mais finit par y consentir pour continuer d'admirer l'adorable sourire de son ami.
"Mais d'abord, montre-moi une photo d'eux tous ensemble et désigne-moi ton chéri. Wow, je crois que c'est la chose la plus gay que j'ai jamais dite!"
Il se marra bien tout seul et Wolfgang l'observait tout simplement, se délectant de la pure vision.
"Ah bon? Pas la fois où tu m'as trouvé irrésistible? Tu vas jouer la carte de l'amnésie?", il tira sa langue à moitié et Fox leva les yeux au ciel, clément.
"Quelle fois? Ça a dû arrivé plus d'une fois."
Wolfgang rangea sagement sa langue et esquissa un moue timide.
"Mais ton adoration sans limite pour ce boys band...ça va peut-être changer ma vision de toi."
Ce fut à son tour de montrer sa langue et Wolfgang en sourit un peu plus.
"Tu ne dira pas ça après avoir entendu mon best of!"
"Hum...juste par curiosité, y en a combien dans ton best of?"
"À peu près une quarantaine?", Fox soupira mais caressa le genou de Wolfgang.
"Alors allons-y: avec un peu de chance, on aura fini avant que la nuit tombe."
"Sauf si tu tombes amoureux de l'un d'eux et que tu veux découvrir ses chansons solos..."
"Nope: ça risque pas d'arriver."
Mais Wolfgang pressentit que Fox deviendrait faible à l'écoute de leurs ballades pleines de douceur et de mélancolie.
*
Fox aurait dû mentir, mais il avait étrangement décidé d'être honnête avec Wolfgang après leur discussion plus tôt au lycée.
Alors oui, il avait avoué à mi-voix que oui, il adorait les voix de Zayn et Louis. Wolfgang préférait Harry lui, et déplorait que ce n'était pas original, que tout le monde l'adorait. Mais qu'il n'avait pas choisi: c'était venu à lui tout simplement.
"Est-ce que Louis et Zayn chantent rien que tous les deux? À un moment?"
"Tu veux dire une chanson entière rien qu'avec eux? Non, jamais. Est-ce que ça te rend triste, petit renard?"
Fox le poussa sur le sol et vint s'allonger sur lui, y mettant tout son poids; mais son ami était loin d'en suffoquer. Il croisa les bras sur le torse de son ami, la tête penchée, et Wolfgang apprécia beaucoup leur position.
"Je ne me suis pas moqué de toi quand tu m'as parlé de ton obsession pour Harry Styles, donc tu dois respecter mes nouveaux chéris."
L'adolescent acquiesça et vint lui caresser les cheveux, Fox en ferma les yeux et se laissa gentiment faire.
"Je pourrai rester là toute la journée...", chuchota t'il presque malgré lui. Mais il ne regrettait pas réellement sa petite confession.
"Ici? Sur moi? À moi aussi, ça me plaît..."
"Je voulais dire en général...ce lieu surtout. J'adore ta chambre et votre maison. La mienne n'est pas assez lumineuse...", et c'était probablement sa faute, ne cessait de se répéter Fox.
"Changez d'ampoules."
Fox rigola à cette "blague" et Wolfgang se sentit encore mieux.
"T'es vraiment con parfois..."
"Mais tu m'aimes bien, donc tant pis pour toi."
L'autre rouvrit les yeux, les plantant dans ceux du loup.
"Tu es vraiment orgueilleux et très sûr de toi...", répliqua t'il en lui pinçant le ventre.
Wolfgang profita de l'occasion pour attraper ses mains.
"J'ai juste un très bon pressentiment pour nous deux."
Mais se rendant compte qu'il s'approchait peut-être un peu trop de la limite, il ajouta rapidement: "S'il te plaît, ne t'enfuis pas. C'était pour rire."
"J'espère pas, Wolfie. (Après une courte pause: parfois, il adorait le suspense) J'en ai aussi un pour nous."
*
"C'est ça, ta surprise? On peut pas plutôt se poser dans l'herbe et écouter Mind Of Mine?", proposa un Fox très ronchonnant.
Wolfgang se posta devant lui, ses mains sur les hanches, comme prêt à annoncer le prochain numéro d'un spectacle de cirque: ce que Fox détestait par-dessus tout.
"Je regrette presque de t'avoir fait découvrir Zayn, Foxie. Et fait scientifique prouvé: la glace arrange tout. Vraiment vraiment tout."
"C'est pas moi qui ait eu une sale note...", toujours têtu et prêt à tourner les talons.
"Mais moi oui! Alors allons-y, mauvaise troupe! Peut-être aurais-tu envie de me faire plaisir, non? En goûtant mon parfum favori."
Fox chercha de l'aide à droite, à gauche, n'importe où; mais visiblement tous les gosses du coin adoraient sautiller pour enjoindre l'antre des crèmes glacées.
Il avait un peu honte...
"Je n'aime pas ça...", chuchota t'il donc, priant pour que cet aveu ne provoque aucune réaction mélodramatique de la part de son acolyte.
"TU N'AIMES PAS LES GLACES? COMMENT EST-CE POSSIBLE?", et c'était raté.
Autour d'eux, des familles avec enfants surexcités lui lancèrent des regards choqués: à Fox pas à Wolfgang.
"Je vois pas ce que tout le monde leur trouve, c'est tout...", hésitant encore à croiser le regard de son ami. Sa vie sans glace semblait être un crime...c'était dingue.
"Tu ne veux pas ou tu ne comprends vraiment pas? Explique-moi, s'il te plaît."
"Quand j'ai besoin de me remonter le moral, je préfère lire, ou peindre ou bien manger des fruits. Et parfois, me faire du bien."
Et Wolfgang faillit s'étouffer avec sa propre salive.
"Qu'est-ce que tu viens de dire?", sincèrement sous le choc de la tournure de la conversation dans cet endroit familial.
"Qu'est-ce qui te choque le plus? Que j'aime les fruits ou me branler?"; wow, Fox était en forme ce jour-là...et son ami ne savait même pas comment réagir.
"T'es au courant que manger fruits et légumes est bon pour l'organisme? Mieux que toutes ces cochonneries que les capitalistes veulent nous faire consommer? Y a pas de honte à aimer ça."
Il osait afficher un sourire innocent, comme si sa précédente déclaration n'avait jamais eu lieue. Mais Wolfgang n'était pas sujet à des hallucinations, comme son cher Mr Robot.
"Je suis totalement d'accord. Et je te soutiens. C'est 5 fruits et légumes par jour pour toi, donc? Et l'autre passe-temps? Pas autant, j'espère."
Pourquoi...
"Il faut se libérer de tout ça de temps en temps, mais pas trop souvent, sinon ça peut devenir dangereux. Et peut se transformer en addiction."
"Donc...tu n'es pas accro à ça?", comment en étaient-ils arrivés à ce sujet exactement?
"Nope, je m'en occupe seulement en cas de besoin. (Reportant son regard derrière son ami, observant avec méfiance la façade trop colorée du glacier) Donc on va vraiment y aller? Dis-moi au moins que ton parfum préféré est original. Parce-que si c'est vanille, fraise ou chocolat, je fais demi-tour sans discussion."
Wolfgang l'adorait beaucoup trop...
"Je suis toujours original, non? Comment oses-tu douter de moi une seule seconde?"
"Ne le prends pas mal mais on se connaît depuis 20 secondes. J'exige des preuves de ton originalité, mon cher."
Toujours arborant ce sourire à tomber et cet air enfantin.
"Excuse-moi, mon chéri, mais cela fait en réalité 1 mois et 2 semaines. Et n'oublie pas notre adorable petit enfant qui nous attend à la maison."
"Tu es la femme au foyer dans notre histoire, hein?", Wolfgang lui frappa doucement le bras tout en rigolant.
"Bien sûr, bien sûr; mais aujourd'hui, la dame exige d'avoir le dessert avant le bon petit dîner qu'elle a concocté. Et c'est ton rôle de lui offrir."
"Je parie que tu ne sais même pas cuisiner."
Petit rictus moqueur sans gêne.
"Attention, cher mari: vous pourriez vous contenter de votre main pendant les prochaines années."
"Heureusement que je peux me servir des deux alors, sinon je serai vite fatigué. (Wolfgang ne put retenir sa mâchoire de lâcher et Fox le contourna, se dirigeant vers le lieu de tous les gourmands de la ville) L'offre ne va pas tarder à expirer, Wolfie!"
Ce dernier se dépêcha donc de le rejoindre, impatient de prendre quelques kilos en plus.
*
"Pourquoi café? De tous les parfums cools et savoureux et sucrés...pourquoi...café?", ce dernier mot était exprimé avec énormément de dégoût et Fox tiqua face à cette mauvaise réaction.
"Je n'ai pas de leçon de goût à recevoir de Mr Brownie Noisettes, moi."
Il enfourna une gigantesque cuillère de glace et Wolfgang eut peur qu'il ne s'étouffe. Ou recrache tout sur leur table, ou pire: sur lui. Et ça, il aurait dû mal à lui pardonner.
Mais Fox allait bien et en avalait une autre de même envergure.
"Excuse-moi, Mr Je Déteste La Glace Mais J'avale Presque Mon Pot, mais ma combinaison est parfaite."
Wolfgang en reprit une bouchée et grogna de satisfaction.
"C'est le bruit que tu fais quand tu jouis?"
Là, le jeune homme faillit mourir instantanément.
"Pardon? Arrête de dire des trucs de ce genre ici, Fox! Y a que des familles!"
"Jouir est naturel, tu sais? Et tous ces enfants connaîtront cette joie un jour. S'ils ne meurent pas à cause de l'obésité de ce pays avant, bien sûr."
Il lécha sa grande cuillère à glace et Wolfgang enviait ce simple couvert.
"Et arrête d'autre aussi..." Inconvenant? Stupide? Irrésistible?
"Sexy? Je peux toujours essayer."
Il haussa les épaules et revêtit son sourire de parfait garçon catholique prêt à se rendre au catéchisme.
"Pourquoi le café? C'est un choix beaucoup trop...adulte?"
"J'ai toujours été trop mature si tu vois ce que j'veux dire", et il haussa ses sourcils, séducteur n'ayant honte de rien. Et Wolfgang en pinçait déjà pour cette facette de lui: c'était nouveau et excitant.
"Je pensais vraiment pas que t'étais aussi obsédé...", dit-il à mi-voix et Fox réduisit la distance entre eux en collant leurs nez au-dessus de la table.
"Et tu ne connais pas tous les détails de ma vie...", avec un clin d'œil suggestif et le louveteau faillit finir à terre.
"Alors surprends-moi."
Et il le pensait sincèrement: il mourrait d'envie de tout savoir sur l'adorable coquin renard qui avait le titre d'"ami".
"J'étais accro à mon prof d'histoire y a quelques années. Je lui laissais des petits mots doux, ou un peu plus crus; je me pointais en salle des profs pour lui parler rien que quelques secondes; j'ai même essayé d'obtenir des cours particuliers avec lui (clin d'œil); je le suivais toujours et lui posais trop de questions sur ses cours, sur la vie, sur la sienne. Il a compris ma petite obsession pour lui et à changé de lycée. Soit disant, il avait peur pour sa vie."
Il recula et vida vite fait bien fait le contenu de son pot.
"C'était un peu juste...je crois que je vais m'en reprendre. Tu en reveux?"
"Ce prof...il avait raison? (Fox fronça les sourcils, pas certain d'avoir compris) Il avait raison de te croire dangereux?"
Il y eut un silence étrange, mais Fox se reprit rapidement.
"Bien sûr que non! Je voulais juste qu'il me remarque et s'intéresse à moi. Mais j'étais trop jeune pour lui, évidemment."
Wolfgang était trop silencieux...
"Tu en reveux ou pas? Je meurs de faim, moi."
"Non, non, ça va pour moi. (Après une pause) C'était lui, Aaron?"
Fox sembla nerveux tout à coup et Wolfgang se maudit directement.
"Non, ce n'était pas lui. Mais à cause de ce prof, j'ai depuis une forte addiction à l'odeur du café, et tout ce qui en a le goût. C'est tout ce qui me reste de lui."
Il eut un petit rire mal à l'aise et se leva chercher sa nouvelle ration, laissant son ami avec plus d'interrogations que de réponses. Et il détestait ce genre de situation.
*
Fox se sentait soulagé, comme ayant perdu tout le fardeau, toute sa culpabilité, et plus important: toutes ses émotions. Il avait le regard un peu vague, ses cheveux se livraient bataille et l'ensemble de son corps semblait se désintégrer peu à peu.
Et c'était délicieux comme sensation, et très libérateur. Il aurait voulu se sentir de cette manière pour le restant de sa vie.
Il soupira d'aise et s'allongea par terre, dans la posture prête à effectuer la figure de l'ange dans la neige. Sauf qu'il était à l'intérieur, et bien que le sol était frais, il lui était impossible de le faire.
Fox désirait revoir la neige; et peut-être que son vœu se réaliserait très vite...l'automne passait toujours très rapidement.
Mais son silence intérieur et extérieur fut troublé.
"C'est pas censé être fermé à cette heure-là?", dit une voix sortie de l'obscurité.
"Si" et il ne prit même pas la peine d'ouvrir les yeux: Wolfgang semblait toujours présent.
"Donc...on est là par effraction..."
"Est-ce que tu nous vois commettre un crime?"
Petit silence encourageant.
"Non, mais... (Il se stoppa net en voyant ce que tenait une des mains de son ami) Tu fumes?"
"Yep. De temps en temps. Ça non plus, c'est pas un crime."
"Je suis juste...surpris. (Voyant que Fox ne lui donnerait pas plus d'explications volontairement, il reprit) Ça va? Qu'est-ce que tu fais seul là, du coup?"
Fox sentit qu'il s'asseyait à côté de lui.
"J'aime rester seul parfois."
"Donc tu n'as pas d'ennuis?", tenta un Wolfgang toujours avide d'infos.
"On en a tous, Wolf'. Ce soir, j'ai décidé de ne pas les laisser m'atteindre. Tu peux essayer avec moi."
"C'est si simple que ça?"
Fox ouvrit à moitié les yeux et actionna son autre bras pour ramener entre eux une bouteille que son ami n'avait même pas aperçue en arrivant.
"C'est quoi?"
"Du vin blanc. Pas super super, mais j'avais que 5 dollars sur moi donc j'ai fait avec. Mais il est pas mal après le 2ème verre."
Il sentit plus qu'il ne vit les yeux de Wolfgang devenir soucoupes. Et cela fit tousser et rire le renard.
"Donc tu bois, tu fumes...qui es-tu exactement?", il était plus inquiet que curieux cette fois.
Fox prétendait que tout allait bien; mais se bourrer la gueule un dimanche soir, ce n'en était pas l'exacte définition.
"J'avais juste besoin de me détendre...ça ne t'arrive jamais? De te sentir attaqué de toutes parts, transpercé, comme si quelqu'un voulait t'éventrer de l'intérieur? De sentir ta poitrine être compressée, et ton cœur se serrer si fort que tu crois que tu vas y rester?"
Ses yeux étaient complètement ouverts à présent et attendaient avec appréhension la réaction de son nouvel ami.
Aaron l'aurait compris lui... Il savait toujours quoi dire pour le rassurer de son mieux. Et Fox avait besoin de savoir que celui-ci n'était pas le seul à pouvoir le comprendre. Ou le soutenir.
Il ne souhaitait pas à Wolfgang d'avoir déjà ressenti ça, ou de le ressentir bientôt: il avait juste le besoin urgent de savoir qu'il ne le prendrait pas pour un fou.
Et ce vœu s'exaucerait peut-être aussi...
Wolfgang avait l'air perdu dans ses pensées et Fox garda espoir: oui, son ami saisissait ce qu'il traversait.
"Oui, je comprends parfaitement... Allez, passe-moi la bouteille, pochtron!", ils eurent un court rire complice et Wolfgang finit par s'installer comme Fox.
"Tu veux en parler?", essaya un Fox hésitant, pas certain d'être prêt à recevoir un poids supplémentaire mais voulant aider son ami à se soulager. Il était trop partagé.
"Toi?"
"Pas du tout."
"Alors moi non plus. N'en parlons pas."
Il leva la bouteille de l'oubli, du vide et en avala une grande gorgée.
C'était frais et chaud à la fois; et son corps, son cœur le remercièrent immédiatement. Il en avait eu besoin et il n'était même pas au courant.
"Il est vraiment sympa, ce vin."
"Ouais."
Et ils fermèrent leurs yeux simultanément, ces yeux si fatigués de tout ce qui les empêchait de rêver correctement. Puis timidement, Fox chercha dans leur pénombre sa nouvelle source de chaleur favorite: il tenait à présent la douce et grande main de Wolfgang et tout semblait pouvoir s'arranger.
La quiétude l'envahit de nouveau et aucune onde de peur ne le guetta cette nuit-là.
"Je suis content que tu m'ais trouvé ce soir", chuchota t'il.
"Et moi heureux de t'avoir coincé."
Il eut un sourire reconnaissant mais Wolfgang ne put en profiter.
Ils laissèrent la nuit totale les submerger, poussant chacun un soupir de soulagement. Et seul les points lumineux nommés étoiles du lieu les protégèrent.
*
"T'as vraiment une tête de zombie...t'as dormi combien de temps?"
"J'ai bien dormi, juste fatigué de me lever."
Mais Romance ne le croyait pas.
"Tu sais...je prends un traitement pour m'aider à dormir et à ne pas avoir de crises d'angoisse; et ça marche plutôt bien. Peut-être que...que tu pourrais aussi tenter."
"Nope, ça m'intéresse pas."
Il laissa tomber ses manuels dans son casier, échangea ses cahiers et le referma, son sac à dos de nouveau en place. Il voulait qu'elle parte.
"Mais essaye avant de dire non: ça ne te fera pas de mal."
Très très convainquant, ce petit speech mais Fox n'était pas du tout prêt à franchir une autre frontière.
Il était bien trop atteint et ajouter encore plus de pilules, de gélules ne l'aiderait pas plus: il en était certain.
"Je sais que tu t'inquiètes juste pour moi, mais je gère. Et j'ai déjà un traitement, donc ça me paraît impossible que tout ça soit compatible."
"Ah...oui, c'est vrai. J'avais oubliée...désolée."
Comment avait-elle pu oublier ce genre de choses? Fox ne comprenait pas.
"Tu n'y es pour rien, pas besoin de s'excuser. Je peux rejoindre ma classe maintenant? On va me prendre la tête sinon."
Las. Il était las de leur relation en ce moment: on aurait plus dit son ancienne psy (qu'il haïssait) que son amie et c'était épuisant de faire comme si ça ne le gênait pas. Mais elle n'en avait toujours pas conscience et c'était le pire dans leur situation.
Il ne voulait pas la brusquer mais il ne voulait pas non plus l'avoir constamment sur son dos.
"Oui, oui, bien sûr, vas-y! Je dois aussi y aller. On se voit après les cours?", elle avait un sourire mal à l'aise et Fox secoua négativement la tête.
"Nope, peux pas. Vu que j'ai passé mon temps libre à aider Wolfgang, j'ai pas pu avancer sur mes propres devoirs, donc ce sera soirée studieuse pour moi."
Il détestait voir son visage se décomposer, mais c'était elle qui l'y obligeait.
"Ah...d'accord, okay. Un autre soir?"
"Ça me va. Allez, bonne journée!"
Et il lui tourna rapidement le dos, pressé de passer à autre chose.
*
Wolfgang hésitait réellement à rejoindre Fox après les cours. Il était censé avoir un entraînement de football mais il était déjà leur meilleur joueur, donc sécher un seul...serait-ce si dramatique? Il décida que non et se dirigea donc vers la salle du dernier cours de son ami (oui, il avait mémorisé son emploi du temps...) ; et il attendit, mais tous les élèves sortirent et aucun d'eux n'était l'adorable rouquin.
"Tu cherches Fox? Vous aviez rendez-vous?", l'adolescent se retourna: c'était Romance.
"Non, pas vraiment. Je suis pas censé être là, en fait...mais j'espérais le voir un peu."
"Il est parti étudier chez lui. C'est ce qu'il m' a dit en tout cas."
Il était évident qu'elle avait quelques doutes et cela surprit Wolfgang.
"Pourquoi ça t'étonne tant que ça? Fox est presque un élève modèle..."
"Peut-être mais il était bizarre quand je l'ai vu... Et il fait souvent ce genre de choses...", elle soutenait son regard et il oublia momentanément que c'était leur premier échange depuis la soirée...
"Faire quoi? Mentir?", il aurait voulu ne pas juger Fox mais ce "détail" le gênait encore, il ne nierait pas.
"Oui, il fait aussi ça... Ça l'aide à se protéger, je crois. Donc ne le prends pas mal s'il le fait avec toi."
Il était pourtant clair que même elle, ça l'embêtait de subir ces mensonges.
"C'est surtout compliqué de pouvoir lui faire confiance en sachant qu'il le fait souvent..."
"Désolée, désolée, je n'essaye pas de t'éloigner de lui, hein!"
"Pourtant, tu avais l'air d'en avoir envie l'autre soir."
Romance ferma les yeux un court instant et cela l'aida à se ressaisir.
"Je n'ai pas osé venir m'excuser et ça a peut être empiré la situation, alors crois-moi: je suis vraiment désolée. Mais je n'étais pas vraiment...je me suis laissée emporter parce-que je suis toujours inquiète pour lui."
Wolfgang aurait voulu rester silencieux mais il avait besoin d'une réponse honnête.
"T'es amoureuse de lui?", elle parut choquée, puis dégoûtée et juste effarée.
"Non! Non, non, pas du tout! Je sais très bien que...(elle baissa la voix) qu'il n'aime pas les filles de cette manière de toute façon. Je veux m'assurer qu'il va bien, c'est tout."
"Vous vous connaissez d'où, d'ailleurs? T'as déménagée en même temps que lui?", il avait beaucoup trop d'interrogations et Romance semblait plus facile à coincer que Fox pour obtenir des réponses. Et Wolfgang ne s'en plaindrait pas.
"On était amis avant de venir ici, oui. On vient de New York et du même lycée."
"Et c'est toi qui a convaincu ta famille de déménager pour le suivre?"
Elle était sûrement amoureuse de lui, mais ne s'en rendait pas compte...c'était ce que Wolfgang pensait en tout cas.
"Ma mère, en fait. Et oui, mais ce n'est pas ce que tu crois...", elle voulait développer, probablement le prévenir: ça y ressemblait.
"On dirait que tu as fait en sorte de venir t'installer dans une petite ville à plus de 200km de New York pour un mec...comment je pourrais ne pas me faire d'idées?"
"Je connaissais son petit ami, Wolfgang. Lui et moi, on était très proche: je n'aurai jamais rien fait pour les séparer. Je les enviais juste un peu mais je n'ai jamais voulu prendre sa place. Et c'est pareil aujourd'hui."
Et le lycéen resta bloqué sur un détail...
"Son petit ami? Donc ils étaient vraiment ensemble?"
"Oui. Mais c'était compliqué..."
"Ça, j'avais saisi... Il n'ose même pas m'en parler un peu..."
"Ne le prends pas contre toi: il est encore attaché à lui et tu vas devoir faire avec. (Elle vérifia son portable) Je dois y aller: ma mère m'attend. À plus, j'espère."
Mais Wolfgang était loin d'être rassuré: il avait même encore plus de questions et presque aucun espoir d'avoir les réponses souhaitées.
*
La bouche de Sean était brûlante et pressée, excitée et Fox arrivait presque à apprécier la scène.
"T'es sûr que personne va rentrer?"
"Yep, certain à 100%. Enlève ton t-shirt. Vite" et Sean s'exécuta docilement, Fox le fit basculer sur son lit et s'installa sur lui.
La vision était agréable.
"Je pensais vraiment que t'étais avec Wolfgang..."
"Je le suis pas. Je suis avec personne. (Plus bas) J'ai personne."
"Dis pas n'importe quoi: tu m'as moi quand tu veux, dès que tu veux."
Sean était vraiment pas mal physiquement, et il avait l'air si gentil... Et Fox aurait aimé en profiter entièrement mais ses pensées recommençaient à se disperser...
"Et c'est l'idéal pour le moment..."
Sean s'assit du mieux qu'il put et embrassa Fox. Ce dernier se laissa docilement faire, tentant vainement d'être aussi amnésique qu'il le puisse.
"Tu penses à lui, c'est ça? C'est pas grave, tu sais... Je peux prétendre que ca me dérange pas." Mais il avait l'air blessé et Fox l'aimait bien donc il mentit.
"Je ne pense à personne d'autre, promis. J'ai un gars adorable et sexy dans mon lit: j'ai tout ce que je veux."
Et il réunit de nouveau leurs bouches, retrouvant sa vivacité et son excitation. Il avait presque oublié à quel point embrasser des garçons était délicieux...
"Retourne-toi. S'il te plaît."
Sean obéit, bienheureux, et Fox sourit tristement avant de continuer.
*
"Je t'ai appelé des dizaines de fois et t'as pas répondu..."
"Perdu mon portable. Et beaucoup trop tard pour me faire des reproches, Wolfie! Au fait, t'as commencé le bouquin que je t'ai prêté? (Son ami hocha négativement la tête) IL LE FAUT! IL LE FAUT! T'AS BESOIN DE LE LIRE! MAINTENANT! HAN! TU SAIS QUOI? ENTRE, ON VA FAIRE LA LECTURE ENSEMBLE! ÇA TE VA?"
"Pourquoi tu gueules?", Fox cacha sa bouche, gêné un quart de seconde.
Quelque chose clochait.
"Désolé, je suis un peu agité: me suis pris 3 cafés après le sexe donc!"
Il rigola, un peu comme un dément, et son ami resta figé.
"Après quoi? Avec...qui? Aaron est là?"
"Mais non! PAS POSSIBLE ÇA! (Il eut un nouveau rire) Je voulais dire: masturbation; pour moi, ça compte pour du sexe. Juste un peu trop égoïste pour être vraiment réel... C'est triste quand on y pense... On mange un morceau? J'AI FAIT DE SUPERS BROWNIES POUR TOUT LE MONDE! TOUT LE MONDE! TU VEUX INVITER QUELQU'UN? TU PEUX!"
"On est que tous les deux, Fox... T'es sûr que c'est juste le café? Ça a l'air...plus grave."
Il était inquiet, voire paniqué mais Fox avait sûrement besoin de son aide, donc il devait rester neutre.
"Ah, bah tant pis: ça en fera des tonnes pour nous! T'as faim? Quelle question! T'as toujours les crocs, toi! Tu veux un truc à boire en particulier? Whisky, vodka, Malibu, vin blanc, rosé, jus de pomme ou de clémentine? Ah non, merde! Désolé, j'ai fini celui de clémentine! Je voulais me passer un film mais un porno aussi, ça me tenterait bien. Ça te dit? Non? Ça a pas trop l'air... Tu veux faire quoi? Pas de jeux vidéos ici, par contre! Mes parents et moi, on DÉTESTE ça! Tu veux peut-être prendre l'air? Il fait un peu chaud ici... Merde! J'te laisse sur le palier comme un malotru! Entre, entre!"
Wolfgang fit un pas en avant, et un deuxième; mais il fut tenté de faire demi-tour...
"T'es pas bavard, ce soir! Tu veux dodo, Wolfie? C'est ça, t'es K.O? Ton entraînement a du te flinguer, mon pauvre! Installe-toi alors: on peut juste se dévorer mes brownies et s'endormir, ça me va aussi."
"Foxie? Qu'est-ce qui se passe? T'es tout seul?"
"Oui! Mes parents sont allés en urgence voir ma tante, donc... Alors, qu'est-ce que tu veux?"
Il avait un sourire très effrayant, et il sautillait sur place; cependant, ses yeux étaient normaux, donc ce n'était probablement pas la drogue...
Wolfgang referma la porte derrière lui et quand il se tourna de nouveau, Fox était hors de vue.
"FOX! T'ES OÙ?"
"LÀ! SALON! PETIT SALON! JE CROIS QUE LE COLONEL MOUTARDE A LAISSÉ SA PIPE ICI! (Rires et l'adolescent le rejoint bien vite: Fox était au centre de la pièce et...comment Wolfgang avait pu rater ça? Fox portait des bottines à talons, une courte jupe en jean et un chemisier fleuri et délicieusement féminin. Il était bourré? Pourtant, Wolfgang n'avait rien senti quand il s'était approché de lui.) CLUEDO? ÇA TE DIRAIT? ÇA FAIT LONGTEMPS MAIS TOUJOURS ÉTÉ DOUÉ MOI! (Grand, gigantesque sourire éclatant de...folie? Wolfgang s'avança doucement vers lui, ne voulant pas le surprendre et Fox le remarqua. Il alla jusqu'à lui et lui attrapa les mains, les balançant.) Tu veux mettre de la musique? Mon père a un super lecteur de vinyles mais il prend la poussière...c'est nul, hein? On fait ça? Je peux t'apprendre la valse ou le tango: tu choisis!"
"Foxie, s'il te plaît, calme-toi... Raconte-moi doucement, et en articulant, ce qui t'arrive."
Son ami pencha la tête sur le côté, arborant à présent une petite moue presque mignonne, mais Wolfgang était trop nerveux pour le reconnaître. Fox paraissait confus, lui.
"Qu'est-ce qui m'arrive? Rien du tout: je suis seul à la maison, enfin plus maintenant! T'as senti que j'avais besoin de compagnie et t'es venu à moi...c'est plutôt mignon, hein? Je t'adore, Wolfie...vraiment réellement passionnément. (Balançant de nouveau leurs mains malgré les yeux flippés de son compagnon de soirée) Alors: musique, film? Autre chose de plus...alléchant, peut-être?"
Wolfgang ne craquerait pas. Il ne profiterait pas de cet état second pour aller plus loin avec Fox: ils valaient tous les deux beaucoup mieux que ça.
"On va rien faire du tout: tu vas boire de l'eau. 1 litre, s'il le faut; et comme ça, on sera sûr que t'aura évacué ce que t'as dû prendre."
"Je suis pas un drogué. Enfin je prends rien d'illégal, en tout cas. Mais j'ai rien pris depuis des semaines et j'me sens tellement bien...si tu savais! j'me sens libre! JE SUIS LIBRE!"
Il leva les bras vers le plafond et recommença à sautiller sur place. Wolfgang ne savait vraiment pas quoi faire...
"FOX! FOX! Écoute-moi! (Son ami se stoppa net, le fixant avec un charmant sourire) Tu peux pas faire comme si tout allait bien, comme si t'étais...normal!"
Il regretta immédiatement son choix de mots quand il vit que Fox semblait prêt à grogner. Ses dents se serrèrent et son expression de colère froide était de retour: Wolfgang ne l'avait pas vue depuis des semaines et là, il aurait voulu avoir la solution pour tout arranger.
"Je sais que je ne le suis pas, mais merci de le dire à voix haute. Tu peux partir si tu veux. Hors de question que tu restes pour me saper le moral. (Remarquant que son ami ne bougeait pas) Va t'en si tu veux pas t'amuser avec moi!"
Mais Wolfgang avança vers lui, ses mains se tendant vers lui, prêt à le prendre contre lui si c'était ce dont il avait besoin.
"Je reste ici si ça ne te dérange pas. On va boire un peu, se mettre de la musique douce et...", mais Fox le coupa net, tout sourire éblouissant de retour en force.
"Ah, ah! J'le savais! T'essayes de me draguer là! Bien joué, parfait timing! Je suis à fond pour!"
Il applaudit sa géniale déduction et Wolfgang tenta de sourire avec lui, mais c'était un processus difficile visiblement.
"Oui, c'est exactement ça: tu m'as démasqué, petit coquin. Tu t'assois? Je vais nous chercher à boire et on discutera un peu."
Fox alla sauter sur le canapé et leva les pouces en l'air.
"PARFAIT! MAIS PAS D'EAU, HEIN! PAS D'ARNAQUE! BESOIN D'UN TRUC FORT!"
"Ça marche!" Et il l'imita en lui montrant ses pouces levés. Fox rigola et sauta plus frénétiquement, cherchant apparemment à atteindre le plafond.
Son acolyte se dépêcha donc d'aller dans la cuisine, ne voulant le laisser seul trop longtemps. Mais bien sûr, il remplit leurs verres d'eau minérale: il n'était pas inconscient.
Et avec un peu de chance, Fox serait trop à l'ouest pour remarquer quelque chose. Il l'espérait vraiment.
Quand il revint dans le salon, tout semblait aller bien: rien n'était cassé et Fox continuait de sauter sans se péter la gueule. C'était un réel soulagement.
"Tout roule ici?" et Fox descendit un peu trop brusquement du canapé, chutant presque.
"YEP! Ça roule! Tu trouves pas cette expression ringarde? Même mes parents l'utilisent jamais. Et Aaron non plus. Il me manque...", et voyant que le renardeau perdait légèrement son humeur vive et joyeuse, Wolfgang se hâta de lui donner son verre.
Fox, un peu méfiant, goûta son eau et fut un peu déçu.
"Elle est pas un peu soft cette vodka?"
"Peut-être qu'après 2 verres, elle sera mieux?", pas certain que l'eau puisse enivrer quelqu'un de toute manière. Il avait choisi la meilleure option, sans aucun doute: Fox ne s'était rendu compte de rien. Il acquiesça juste et avala une gorgée plus longue.
"Tu veux peut-être prendre tes médocs? T'as dit que t'en prenais normalement, c'est ça?", tenta t'il.
"Avec l'alcool? Wolfie! Très fou! (Après une pause) J'adore! T'es super! Allez, viens faire un câlin à ton renard!"
Wolfgang posa donc son verre d'eau et rejoignit Fox qui s'était installé confortablement sur le canapé.
"Viens, viens! FOX A BESOIN D'UN CÂLIN! VIENS!" Et il le prit lui-même tout contre lui. Cette proximité était quasiment chaleureuse et Fox le serra fort, déposant sa tête contre l'épaule de son ami. Il soupira (d'aise? Wolfgang n'était pas certain) et embrassa vite l'épaule face à lui, faisant sursauter son invité.
"T'as pas intérêt à me briser le cœur comme il l'a fait lui...", un avertissement brusque énoncé si doucement que l'adolescent faillit croire que c'était une hallucination.
"Tu m'entends, Wolfie? Ne me brise pas le cœur toi aussi. S'il te plaît."
"Je te promets que je ne ferai pas comme lui. Jamais. Promis juré."
Et il se permit de lui caresser le dos, lentement; voulant s'assurer d'offrir le meilleur réconfort possible.
"Si tu mens, tu déménages."
Wolfgang n'était pas sûr de bien suivre...
"Quoi?"
"Si tu me brises le cœur, déménage."
"Sinon tu me tues, c'est ça?", réussit-il à articuler, un rire forcé lui échappant.
"Non. J'ai déjà trop de sang sur les mains... Je ne supporterai juste pas de voir ton visage si parfait après, c'est tout."
Trop de sang sur les mains? Qu'est-ce qu'il voulait dire? Fox ne ferait jamais de mal à quiconque...en tout cas, il ne le voyait pas en être capable. Et c'était peut-être différent... Wolfgang avait besoin de plus d'explications.
"Comment ça? Fox, ne dis pas un truc pareil, s'il te plaît... Tu me fais flipper."
Son ami recula mais garda ses mains contre lui, et esquissa sûrement le sourire le plus dévasté que Wolfgang ait jamais vu. Ce n'était pas bon du tout...
"Désolé, mon ange... Désolé, je sais plus ce que j'raconte. Excuse-moi. Regarde-moi. Dans les yeux. (Wolfgang obtempéra avec difficulté) Je ne te ferai jamais de mal, compris? Je te le promets. Eh, une promesse chacun, si c'est pas cool, ça!"
Son ami continua de lui caresser le dos, espérant que cela le ferait dormir.
*
"Qu'est-ce que tu fais là, toi?", sympa comme réveil, mais seul Wolfgang s'éveillait. Mais il ne quitta pas pour autant le canapé: Fox dormait comme un loir tout contre lui, l'envahissant complètement.
"Jimmy, s'il te plaît...", intervint Mrs Hill, s'excusant du regard auprès du jeune homme.
"Qu'est-ce que tu fais chez nous?"
"Je...hier soir, quand je suis arrivé, Fox n'avait pas l'air...très bien et je ne voulais pas le laisser tout seul. Et on s'est endormi ici...on n'a rien fait: tout va bien. Il va bien."
"Qu'est-ce qu'il avait? C'était grave?", la façade du père s'effondrait légèrement et Wolfgang comprit que, malgré tout, il aimait son fils et s'inquiétait pour lui.
"Il est malade? Il a mentionné qu'il devait prendre des médicaments normalement mais que...", il se stoppa de lui-même, pas certain que tout révéler aiderait son ami.
"Mais que...? Finis ta phrase: ça pourrait nous aider à comprendre."
Son ton était redevenu dur, froid, tentant de masquer sa fragilité. Wolfgang ne comprendrait jamais ce genre d'homme: pleurer, ressentir des émotions était humain, pas exclusivement réservé aux femmes. Alors pourquoi la majorité d'entre eux avait si peur de se laisser aller de temps en temps?
"Il a dit qu'il n'avait rien pris depuis des semaines...mais il va bien, hein?"
La mère eut un petit sursaut mais tenta, sans succès, de dissimuler son choc. Et le père parut sur le point d'imploser...
"D'accord. (Avec réticence) Merci pour ton honnêteté, Wolfgang. Tu peux rentrer chez toi maintenant. Tes parents doivent s'inquiéter."
Mrs Hill leur tourna leur dos, sûrement rattrapée par les larmes...et l'adolescent se sentit encore plus dépité et inutile. Il aurait voulu la réconforter, la soutenir...dire ou faire n'importe quoi pour la calmer.
"Je peux...je peux peut-être faire quelque chose?", demanda t'il, convaincu que le père de Fox lui ordonnerait de partir rapidement.
"Quitte juste doucement ce canapé sans le réveiller. C'est tout ce que tu peux faire."
Le jeune homme acquiesça douloureusement, la gorge nouée, et mania le corps de Fox le plus délicatement possible. Mais visiblement, il ne voulait pas qu'on le quitte: ses mains s'accrochaient un peu plus et il grogna légèrement pour montrer son désaccord.
Mais Wolfgang se fit violence malgré la chouteté de la vision et le redéposant tranquillement sur le canapé, Fox redevenant une masse silencieuse.
"Vous êtes sûrs que je ne peux pas..."
"Tu en as assez fait. Tu peux partir."
L'homme ne le regardait même pas: il fixait son fils avec sérieux, dureté.
Wolfgang resta donc silencieux et fit son chemin vers la porte d'entrée, mais il sentit deux bras l'entourer.
La mère le serrait dans ses bras et cela lui dessina un faible sourire.
"Merci, jeune homme. Merci d'avoir fait attention à lui."
*
Quand il arriva au lycée après un court arrêt chez lui pour se préparer, Wolfgang ne fut pas surpris de ne pas y retrouver Fox. Et après leur étrange soirée, se pointer chez lui ne semblait pas la meilleure idée.
Cette journée avait été exécrablement atrocement lente et sans évènements sympas notables, donc il attendait impatiemment le retour de son ami le lendemain.
Mais quand il se retrouva dans le couloir où se trouvait le casier de Fox, il eut un doute: voulait-il vraiment le voir? Ou plutôt réussirait-il à lui parler comme si de rien n'était? Ou allait-il gaffer (une fois de plus) et les mettre à l'aise tous les deux?
Il lui fallut beaucoup de courage pour aller jusqu'à lui quand il le vit débarquer devant son casier. Et même de distance, Wolfgang sentit que quelque chose n'allait pas...Mais il se força à avancer, tentant de mettre de côté ses doutes.
"Hey."
C'était un peu juste et pas très lui, mais il fallait bien un début, non?
"Salut."
Mais son regard, et son corps ne se tournèrent même pas vers son interlocuteur.
Quelque chose déconnait vraiment...et Wolfgang allait empirer les choses, il le pressentait. Quoi qu'il lui dise, il mettrait Fox en colère, ou le pousserait à se refermer sur lui-même.
"Ça va? Tu m'as manqué hier."
Fox ne semblait toujours pas prêt à lui faire face.
"Ouais, me sentais pas bien."
Il referma son casier après que le silence se soit bien installé. Il restait toujours face à lui, comme s'il tentait de se remémorer où il devait aller ensuite, alors Wolfgang l'aida.
"T'as littérature après. Salle 210."
"Je le sais ça."
"Okay...comme tu semblais bloqué, je croyais que...", il s'interrompit quand Fox lui fit enfin face. Ce visage ne présageait rien de bien bon... Wolfgang devrait probablement faire demi-tour avant d'être blessé, mais il demeura debout, attendant la suite avec appréhension.
"Qu'est-ce que tu as raconté à mes parents?"
"Quoi?", ce n'était pas exactement ce à quoi il s'était attendu. Mais en y réfléchissant, cette question était assez logique.
"Hier matin. Tu les as vus. Et t'es parti. Mais qu'est-ce que tu leur as dit avant?"
"Je...je ne sais plus."
Mais il mentait et Wolfgang savait que Fox voyait à travers son mensonge.
"Tu mens. Dis-moi."
Sa voix était purement glaciale et un instant, Wolfgang crut être en face de Mr Hill...
"J'ai juste dit...juste dit que tu allais mal. Et que j'étais resté pour être sûr qu'il ne t'arriverait rien. Je ne voulais pas qu'ils s'imaginent que...je ne voulais pas que ton père croit qu'on faisait des choses. Ensemble ensemble."
"Quoi d'autre? Il y a sûrement autre chose: dis-moi tout."
"J'ai peut-être...j'ai dit que tu m'avais avoué que tu n'avais pas pris tes médocs depuis des semaines."
Il pensait que Fox péterait un câble, crierait ou lui interdirait froidement de lui adresser à nouveau la parole. Mais ce dernier ferma simplement les yeux un instant, stressant Wolfgang un peu plus face au jugement qui tomberait.
"Ok. Merci d'avoir été honnête. Avec moi, pas avec eux. Tu peux t'en aller maintenant."
"C'est tout? Tu ne vas pas m'envoyer chier, me prendre la tête ou juste gueuler un bon coup?"
Fox rouvrit les yeux, lassé de voir que Wolfgang était encore face à lui.
"Tu es encore là. T'as pas cours?"
"Dis-moi pourquoi tu es aussi calme et je m'en vais."
"J'ai du reprendre ces futurs médocs depuis hier et donc là, c'est la sous-version de moi."
"Ils t'aident à devenir un robot?"
Fox eut un rire sonnant très faux.
"Exactement. J'espère que tu es fier de toi."
Et il bougea, se dirigeant dans la mauvaise direction.
"FOX! Je suis vraiment désolé! Je savais même pas! T'es quoi? Hyperactif?"
"Crie encore plus fort, connard. (Se retournant malgré tout) On se verra sûrement pas pendant quelques temps. Et sache que c'est ta faute."
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