L'amour c'est lorsqu'il te manque une dent, mais que tu n'as pas peur de sourire, parce que tu sais que tes proches t'aimeront toujours, même s'il manque une partie de toi.

Pourquoi Jimin y pensait maintenant ? Pourquoi pleurait-il encore, espérant le retour d'une personne qui ne reviendrait pas ?

Est-ce que ça en avait valu la peine ? Est-ce que tout ça avait eu un quelconque sens un jour ?

Jimin ne le savait plus.

Il ne le croyait plus.

Il se sentait mal.

Mais pour une fois ce n'était pas pour lui-même, dans un désir égoïste d'évacuer sa peine.

Ces larmes, il les versait pour lui.

Après le message de Jungkook, il était resté sous le choc, ne sachant comment réagir. Il avait voulu aller le chercher et tout recommencer. Mais ne l'avait finalement pas fait. C'était déjà trop tard.

Il était alors rentré dans leur appartement, ses yeux se mouillant encore à cause de l'odeur qui y était présente. Celle de son ami, celle de son amant d'une nuit, celle de son âme-soeur.

Il avait ramassé les morceaux de miroir brisés, que Jungkook avait sans doute laissé, souhaitant s'extirper de cette maison le plus rapidement possible. À chaque bout de verre, il étouffait un sanglot, ne voulant pas vocalement se laisser aller à sa peine.

Mais dès qu'il eût terminé, se dirigeant vers la poubelle pour se débarrasser, il fit une pause au niveau de l'évier de la cuisine. Une poêle sale y était encore et là il ne put plus se retenir.

Ses sanglots se faisaient de plus en plus audibles alors que ses dernières barrières s'abaissaient. Il posa ses mains sur le plan de travail collé à l'évier, laissant sa tête reposer sur celui-ci alors que de sa bouche ressortaient des sons semblables à des miaulements.

Il repensait. Il se refaisait le film de tous les évènements de ces derniers mois, de tout ce qui avait pu les mener là. Laquelle de ses actions aurait-il dû modifier pour arriver à changer les choses, pour le retenir, pour ne pas le blesser, pour ne se pas blesser.

Sa toux de miaulements se transformait en un bruit de moins en moins étouffé et de plus en plus grave.

Le visage de Jungkook revint dans ses pensées, ses sourires, son regard, sa présence. Tout ce qui le caractérisait et qui avait toujours fait que Jimin se sente à l'aise dans ses bras.

Était-ce lui qui l'avait détruit ? Était-ce de sa faute si rien n'avait fonctionné ?

Et là, il ne put plus se retenir. Il hurla, les larmes dévalant ses joues à rythme toujours plus rapides. Il cria de plus en plus fort, sentant sa gorge s'enrouer mais pourtant pas sa peine diminuer.

Comment allait-il y arriver ? Comment allait-il arriver à vivre sans lui ?

C'était beaucoup trop dur de l'imaginer. Devait-il vraiment y être confronté ?

Ce que Jimin ressentait actuellement n'était pas un rejet, c'était bien pire que ça. On aurait dit qu'à l'aide d'une hache, on le martelait de coups pour le séparer en 2 et ainsi lui ôter toute une partie de son être.

Dans un dernier hurlement, il reposa sa tête sur le plan de travail, se laissant glisser jusqu'au sol, les bras ballants le long de son corps et les jambes pliées en L.

Il resta ainsi toute la journée.

Seuls les premiers rayons de soleil s'infiltrant dans l'appartement firent prendre conscience à Jimin du temps qu'il avait passé là, sans dormir, sans manger et sans même se changer.

Il se décida à se lever pour se rendre dans sa chambre, mais avant d'y arriver, il fallait passer devant celle de Jungkook.

Il jeta un oeil vers cette porte, cette porte blanche derrière laquelle, quelques jours avant, Jungkook s'était réfugié.

Pouvait-il lui aussi y trouver refuge ? Ce qu'il aurait aimé. Il aurait voulu faire un tour dans la chambre de Jungkook, se réconforter sur son lit enveloppé par son odeur. Mais il savait qu'il ne le méritait pas. Alors, il ne supporta pas plus longtemps de rester enfermé dans cette nouvelle prison à ses yeux.

C'est dans la précipitation de ses gestes qu'il avait pris ses clés, sans même entrer dans sa chambre vers laquelle il se dirigeait, et avait fui, lui aussi, loin de son chez-lui.

Namjoon ne fut même pas surpris, lorsqu'il récupéra un Jimin, la tête baissée devant sa porte.

- Je n'ai pas eu le courage de cogner.

Namjoon secoua juste la tête de haut en bas et déverrouilla la porte. Il accrocha son manteau au lieu indiqué pour ça et proposa un thé à Jimin qui hocha la tête. Le grisé paraissait fragile ainsi, vulnérable. Il ne résista donc pas longtemps à l'envie de le prendre dans ses bras avant d'aller lui chercher cette tasse de thé.

- Il reviendra, ne t'inquiète pas. Il reviendra.

***

C'était une période d'examen à l'université. Malgré les stéréotypes, en école d'art tous les cours n'étaient pas amusants et les examens étaient une période particulièrement rude pour tous les étudiants. Et pour une fois, Jimin se sentait particulièrement concerné. Il avait tout donné, plongeant sa tête dans un nombre incalculable de livres sur l'histoire de la danse, la philosophie, les théories artistiques au fil des siècles et son mémoire.

Lui qui prenait toujours tout à la légère, commençait à prendre ses études particulièrement au sérieux. Ça fascinait autant que ça inquiétait ses Hyung, chez qui il restait depuis plusieurs mois déjà.

Les cours et la danse, surtout les cours de danse. Voilà ce qui l'avait fait tenir jusque-là.

Au moins, il ne pleurait plus.

À la sortie d'un cours, des bras entourèrent ses épaules.

- Eh Hyung, tu ne viens pas voir la finale de basket ? L'équipe du campus est favorite. En plus Suhyon va jouer~ chantonna son ami avec un regard plein de sous-entendus.

Jimin soupira.

- J'ai encore des devoirs à faire et un exposé à préparer.

- Mais Hyuuuuuuung... Imagine Suhyon, ton fantasme depuis première année, le maillot en sueur qui lui colle sur le torse, quelques mèches de cheveux sur son front et sa langue qui passe sur ses lèvres pour les humidifier.

L'ami de Jimin en était tout excité.

- Ça ne m'intéresse pas vraiment Minjae.

- Dîtes-moi qui vous êtes et ce que vous avez fait de mon ami ! s'offusqua Minjae qui réussit tout de même à tirer l'éternel grisé jusqu'au terrain de basket.

Minjae s'excitait et sautillait dans tous les sens, alors que Jimin ne se sentait pas vraiment à sa place. Il se demandait comment il appréciait ça dans le passé. Rien de tout ça n'avait de sens. Son monde avait comme perdu de ses couleurs.

Il repensa à Jungkook.

Que faisait-il à ce moment ? Est-ce qu'il allait bien ?

Il espérait au moins qu'il allait mieux que lui. Il aimait lui aussi le basket. Peut-être il aurait été sur ce terrain, s'il n'était pas parti.

Parti...

Et la douleur revint.

Il devait se concentrer sur autre chose. Il savait qu'il aurait dû rentrer étudier. Tous ces cris, ces lancers, ces rebonds.

Tout ça lui rappelait Jungkook.

- On va gagner ! On va gagner criait Minjae durant les dernières secondes de la rencontre.

Mais alors que la douleur grandissait dans sa poitrine, Jimin ne pouvait être heureux. Son esprit semblait lui jouer des tours.

C'était un jour comme celui-ci, que tout avait changé. C'était à une finale comme celle-ci, que tout avait réellement basculé.

***

3 ans plus tôt

- Ta petite copine viendra encore te voir cette fois-ci ?

- Je parie que tu auras droit à une nuit particulièrement torride si on gagne.

Jungkook souriait, sachant que ses coéquipiers ne faisaient rien d'autre que rigoler.

- Déjà ce n'est pas une fille mais un mec.

- On s'en fou il est tellement bonne !

- Ewww arrête ! Ne dis pas ça de mon Hyung !

Chan roula des yeux.

- Tu vas me dire que tu n'as jamais eu envie de te le faire ?

- Tu as vu ce cul de malade ? Ajouta un autre.

- Mais non ! C'est mon ami d'enfance. Je ne le vois pas du tout comme ça !

Premier mensonge.

- Pourtant tu lui fais les petits yeux tout le temps avec tes "Hyung tu es enfin arrivé, tu es venu voir à quel point je suis extraordinaire et ne regarder que moi. Prends moi par la main et embrasse-moi nianiania". Il mima des bruits de baisers qui firent faire à Jungkook une nouvelle tête de dégoût.

- Tu es certain que tu n'as vraiment aucun sentiment pour lui ? J'aurais cru pourtant vu comment tu le regardes Continua un autre

- Mais arrêtez ça je vous dis ! Je n'aurais JAMAIS ce genre de pensée envers lui même s'il s'agissait du dernier homme sur terre. Ce serait comme sortir avec son frère !

Deuxième mensonge.

- Si je me lance, ça ne te dérange pas alors ?

- Pas le moins du monde. Je te donne même ma bénédiction. Depuis que j'espère qu'il se mette en couple ! Qui sait, tu es peut-être son âme-soeur et vous formerez un couple parfait, vivrez longtemps et aurez beaucoup d'enfants. Il illustra ses propos en chantonnant une mélodie de mariage sous le regard amusé des autres membres de l'équipe.

Troisième mensonge.

Ce fût le mensonge de trop.

Si Jungkook repensait à ces moments que se serait-il dit ?

Avait-il menti pour se protéger des moqueries de ses coéquipiers ? Ou pour protéger son propre cœur ?

Jimin et lui avaient grandi ensemble. Et il ne savait même plus vraiment quand est-ce qu'il avait commencé à remarquer les courbes de son Hyung.

Mais Jimin ne le verrait jamais comme ça.

Non, non.

Il ne pouvait pas se permettre de laisser Jimin s'éloigner de lui, prendre le risque de tout gâcher en se permettant d'avoir des sentiments plus que fraternels envers lui.

Pourtant, c'est bien en pleurs que Jimin courut en dehors des vestiaires.

Il voulait souhaiter bonne chance à son ami avant la compétition. C'était la finale après tout.

Il avait même prévu un bouquet de fleurs à lui remettre en cas de victoire. Ou même de défaite. Toute occasion est bonne pour offrir des fleurs.

Jimin était pourtant parti un peu trop tôt. N'entendant pas la dernière phrase du brun.

- Mais c'est la personne la plus importante pour moi alors tu ne lui fais pas de mal.

Hoseok l'avait vu courir en direction des toilettes, l'avait rejoint et avait essuyé ses larmes, se contentant du mutisme du blond.

Jimin ne lui avait plus jamais parlé de ses sentiments envers Jungkook. Il était même sûr que ce dernier avait oublié cette petite phrase qu'il avait laissée échapper, qui avait trahi ce que le danseur semblait pourtant savoir depuis un moment déjà.

Et si Jungkook se souvenait de cette journée-là, s'il y repensait, est-ce qu'aujourd'hui ses mots, il les changerait ?