Après sa discussion avec ses aînés, Jimin n'était toujours pas prêt à faire face à la réalité. Il ne le voulait pas et ne le pouvait pas.

Il le savait bien que Jungkook ne l'aimait pas comme ça. Il ne se souvenait que trop bien de ce fameux jour où il en avait eu la preuve, les paroles de son dongsaeng réduisant à néant le petit espoir qu'il nourrissait chaque fois que Jungkook lui souriait.

Il ne l'aimait pas de façon romantique et toute cette histoire d'âme soeur avait juste embrouillé ses pensées, lui faisant croire que l'attachement fraternel qu'il ressent pour lui depuis leur tendre enfance était plus que de l'affection, que c'était de l'amour.

C'est évident que ça n'en était pas. Comment Jungkook pouvait il penser l'aimer lorsqu'il n'avait jamais fait de remarque sur toutes les conquêtes qu'il faisait défiler à la maison ?

Jimin se rappelait encore de la première conquête qu'il ait ramenée. C'était un gars qu'il avait rencontré quelques minutes plus tôt.

Pour être totalement honnête, il ne l'attirait pas tant que ça.

Mais le grisé espérait, en le faisant entrer dans leur chez-eux, faire réagir le plus jeune. Il souhaitait voir une lueur de jalousie dans son regard et se dire qu'il n'était pas le seul à avoir ses pensées orientées vers son cadet, à vouloir le garder rien qu'à lui, à se sentir apaisé par sa présence et horriblement paniqué par son absence.

Il voulait savoir que la pensée de le voir avec un autre bouleverserait l'alpha. Juste une étincelle, un soupçon d'inquiétude allait l'animer et que peut-être il aurait le droit d'espérer.

Espérer qu'une amitié aussi forte ne sois rien d'autre que le début d'une idylle plus profonde, qu'à force de ne l'avoir qu'à lui, Jungkook serait horrifié par l'idée qu'il appartienne à quelqu'un d'autre.

Mais non, Jungkook n'avait rien dit d'autre qu'"amusez vous bien" et était parti vaquer à ses occupations loin de leur appartement.

Pourtant, le grisé aurait dû se demander, pourquoi son cadet n'avait pas décidé de rester. Quelle raison avait le brun de prendre ses jambes à son cou et de pratiquer ce sourire détaché pour ce moment où il allait demander "Alors c'était un bon coup" ?

La première fois c'était une relation charnelle qui avait permis à Jimin d'oublier le fait de vivre une affection à sens unique. Ce désir d'un être si proche mais pourtant si éloigné.

Les fois d'après, il s'était pris au jeu, au point d'oublier la raison première de ce penchant pour la chair.

Et quand ce lien d'âme sœur a été déclenché, tout s'est accentué. Ses émotions étaient devenues insupportables.

Il ne savait pas quoi ressentir. Il voulait s'empêcher de ressentir quoi que ce soit car, pour lui s'autoriser ces pensées étaient faire de nouveau face à la dure réalité.

Celle d'un amour non partagé.

Rien ne se perd, tout se transforme. Le seul moyen qu'a eu son esprit de rationaliser toutes ces émotions pour l'empêcher de souffrir, était de créer des fantasmes pour lui permettre d'externaliser son ressenti.

Pour l'oméga, il n'y avait rien de mal à se branler en pensant à son colocataire. Au moins durant ces moments, il s'autorisait à penser à lui d'une autre façon qu'en tant que son meilleur ami. Et là, ça ne faisait plus si mal de penser à son cadet.

Sans même s'en rendre compte, il vivait ses sentiments pour Jungkook au travers de son attirance physique pour lui car, le désir étant différent de l'amour, il pouvait bien s'autoriser à le désirer sans avoir la sensation de continuer à l'aimer.

Bien sûr que désirer ce n'est pas aimer, mais désirer une personne à ce point, ce n'était clairement plus de l'amitié.

Le lien d'âme sœur avait certes augmenté son attrait pour le plus jeune. Mais s'il pensait à lui aussi souvent, même quand Jungkook n'était pas là, ce n'était pourtant plus en lien avec ses phéromones.

Et s'ils couchaient ensemble pour le libérer ? L'humain a tendance à idéaliser ce qu'il n'a pas, atteignant un objectif juste pour se rendre compte que cela ne nous suffit pas. On a ce besoin de conquête de l'inconnu, cette attirance face à l'inédit.

Il lui fallait le démystifier. Arrêter de le préserver pour lui se libérer. Peut-être avoir son corps, était le meilleur moyen de le sortir de son cœur. C'était évident, coucher avec lui était la seule façon de se sentir apaisé, d'enfin arrêter de l'aimer.

Il deviendrait ainsi comme tous les autres. Ceux-là qui ont partagé son lit mais dont il ne souvenait même plus du nom. Il ne serait plus l'ami dont il est amoureux mais qu'il ne mérite pas. Juste l'ami qu'il s'est tapé une ou deux fois.

Il ne se rendait même pas compte du jeu tordu par lequel son esprit était en train de s'amuser. Le rendant esclave de ses désirs, émotions et pensées qui s'entremêlaient.

Il secoua la tête de droite à gauche refusant une nouvelle fois de l'accepter.

Non, non, il ne pouvait pas l'aimer.

Il a pourtant longtemps espéré que Jungkook ressente cette belle émotion à son égard. Il croyait même voir de l'amour quelques fois dans le regard de son cadet. Et à chaque fois, ça lui donnait envie de tout arrêter. D'arrêter les plans d'un soir et les relations sans lendemain, mais surtout d'arrêter de saigner à cause d'une blessure qui aurait enfin pu être pansée.

Avec Jungkook le jeune oméga voulait d'une véritable relation, comme celle que l'on voit dans les films de Noël, directes, insensées mais surtout tellement simples et belles. Le genre d'histoire d'amour dont on devine la fin, qui ne nous surprend pas, mais dans laquelle on apprécie chaque petite parcelle de bonheur et chaque nouvelle avancée.

Romantique ?

Non Jimin ne l'était pas.

Mais pour Jungkook il se serait déguisé en cendrillon, tendant délicatement sa jambe lorsque le prince Jeon le chausse de sa pantoufle de verre.

Il voulait vivre le véritable amour, pas d'une relation amoureuse décidée par un jeu d'hormones et de phéromones sur lesquels il n'a aucune maîtrise. Il voulait que Jungkook l'aime à tout prix, mais pas qu'il en soit forcé.

Et il en est persuadé, ce qu'il ressent actuellement n'est pas cet amour dont il a tant rêvé.