🎻56🎻
"Ace ?
_Mmh ?"
Je me retournai pour faire face à Sabo.
"Ah... Salut, frangin...
_Qu'est-ce que tu fais ?"
Il poussa un peu la porte de la chambre de Marco, et je pu voir la petite bouille de Luffy me scruter.
J'étais là, entouré de toutes ces toiles, que j'avais essayé de réorganiser dans l'ordre, comme pour fuir le moment où je devrais reprendre pied avec la réalité :
Marco, l'hôpital, la peur de le perdre.
"Il... Il m'a laissé ça. Il m'a dit que c'était important... J'ai..."
Je reniflai.
Sabo, après avoir demandé mon autorisation d'un regard, poussa un peu plus la porte et pénétra dans la pièce, suivit de Luffy et de Kikunojo.
"Qu'est-ce que c'est que ce bazard ?
_Ce sont ses toiles... C'est...
_Magnifique, me coupa Luffy, c'est magnifique."
Il s'approcha du lit où j'étais assis, détaillant les 43 peintures étalées au sol et sur les draps, réarrangées dans l'ordre qui me paraissait logique, l'ordre dans lequel l'histoire se racontais.
Notre histoire.
Certaines étaient grandes, d'autres petites. Certaines étaient colorées, d'autres sombres. Certaines étaient réalistes, d'autres très imagées, voire abstraites.
Mais je comprenais.
Ça, c'était ce qu'il voulait que je vois.
Ce qu'il m'avait laissé.
Ce quelque chose d'important.
C'était... Notre histoire.
L'important, c'était qu'il fallait que je me souvienne de nous.
Il savait. Il savait que j'allais avoir peur, tellement peur que j'aurais pu mourir sur place.
Cette anxiété... Elle me rongeait.
C'était pour ça. C'était pour ça qu'il m'avait laissé ça.
Pour que je pense au "nous", avant de penser à "lui", avant de laisser le "moi" trembler de peur pour "lui".
"Nous", c'était ce qui comptait.
Mais...
Il n'y aurait pas de "nous" sans "lui".
Comme il n'y aurait pas de "nous" sans "moi".
Je compris que Marco voulais me préserver de l'angoisse, pour que le "nous" ne soit pas menacé.
Mais...
Comment ne pas angoisser ?
Et dire qu'il s'occupait encore de "moi", de "nous", quand il devait s'occuper de "lui".
C'était...
Tout bonnement... Marco tout craché, en fait.
Il avait tout prévu.
Tout.
"C'est Marco qui a fait tout ça ?"
La question de Sabo me tira de mes pensées. Je hochai la tête silencieusement.
Kiku laissa un léger rire passer la barrière de ses lèvres.
"Je le vois peindre presque tous les jours depuis que je le connais, il est passionné. Mais, quand il a commencé cette série là... Il était tellement différent... Il avait cet air rêveur, ce sourire doux collé au visage. C'était comme... Un renouveau, pour lui. Je me souviens très bien de quand il a peint celui-ci."
Elle pointa la toile du métro.
"Il était complètement ailleurs quand il est rentré, est il avait cet air doux. Puis, il a commencé à peindre. J'ai vu ce jour là qu'il était..."
Elle marqua une pause.
"...Lui même.
_Marco..., soufflai-je pour moi même.
_Tu sais, ce jour là, où tu as appelé. C'est moi qui ai décroché, Tu te souviens ?
_Oui.
_Après ton appel, il était aux anges, ricana-t-elle, c'était comme si tu avais illuminé sa journée. Puis, il a peint, encore. C'était vraiment drôle de le voir comme ça, super énergique, toujours content, rêveur... Amoureux, quoi."
Je souris.
"Hey, Sabo, regarde."
Je reportai mon attention sur mes frères.
"Regarde, là, c'est nous !"
Je posai une main sur l'épaule de Luffy.
Il pointait une des représentations de l'arcade.
Nos bagues de fiançailles en plastique, Luffy et sa tonne de peluches et puis, Sabo, qui riait, avec des gaufres à la main.
"C'est parce que vous comptez pour lui, dis-je, calmement.
_Nous ? Même moi ?, me demanda Luffy.
_Bien-sûr, nunuche. Il t'adore, Marco.
_Moi aussi je l'aime beaucoup."
J'essquissai un léger sourire.
"J'veux pas qu'il meurt, Ace."
Il pleurait.
Sabo se mordait la lèvre inférieure, Kikunojo serrait les poings.
Je reniflai.
"Je sais, Luffy. Personne ne le veut."
J'inspirai profondément.
"J'y retourne..."
J'attrapai le livre au sol, "La tombe des Lucioles", et enjambai les peintures.
"Je veux venir avec toi !
_Luffy...
_S'il te plaît !
_C'est pas un endroit pour toi, l'hôpital.
_Laisses moi venir..."
Je soupirai.
"Il t'as dit que tu pourrais aller le voir quand ce sera finit, il est très tard Luffy.
_J'm'en fiche. J'veux y aller."
Ses yeux, déterminés, perlés de petites larmes, perçaient les miens.
Je jetai un regard à mon jumeau.
"Je veux y aller aussi.
_Moi aussi, souffla l'asiatique."
Je finis par capituler.
"D'accord... Mais ça risque d'être long...
_Tant pis, au moins on sera avec vous, répondit Sabo."
Ainsi, nous quittâmes la collocation.
Le ciel pleurait toujours.
Sabo s'était réfugié sous le parapluie de Kiku, Luffy me suivait à la trace, capuche sur la tête.
Moi, je laissait les larmes de nuages me tremper.
J'avais besoin de ressentir cette pluie.
Comme pour me rappeler que j'étais en vie. Comme pour être bien sûr que ce n'était pas un rêve, une illusion.
J'avançai doucement, pour suivre leur rythme. Pourtant, je voulais courir.
Je voulais être à ses côtés, le plus vite possible.
Ma tête me faisait mal.
J'étais étourdi, pris de vertiges, une peur lancinante me traversait de toutes parts.
Je respirais vite, fort.
Mon cœur palpitait au rythme des gouttes qui tombaient sur le bitume.
Ploc. Ploc. Ploc. Ploc.
Ba-Boum. Ba-Boum. Ba-Boum. Ba-Boum.
Le ciel pleurait.
Mes yeux aussi.
Le monde entier, autour de nous, était en larmes.
Les immeubles, les arbres.
Le trottoir, les gouttières.
Les feux de signalisation, les chats errants.
Tous pleuraient le sort de Marco.
Si on avait dû jouer un morceau de violon, ça aurait été...
Frédéric Chopin, Nocturne n°20 en do dièse mineur, sûrement.
Un violon qui pleure, un piano qui l'accompagne mélancoliquement.
Une mélodie d'hiver, une saison d'été, pour une pluie d'automne.
Et, je l'espérais, un miracle de printemps, peut-être enfin un renouveau, pour Marco.
Ce que j'avais joué la première fois sur scène.
Son sens m'apparut soudain comme chamboulé.
Cette musique que j'avais joué ce jour là.
Elle prenait un tout autre sens.
J'espérais seulement que ça n'était pas une nuit à Op 69 n° 1 Bémol Majeure, Piano.
Ou...
Chopin, la Valse D'adieu.
Oh, de toutes façons je préfèrerais le violon.
Avec un peu de chance, cette nuit serait un joyeux morceau d'été de Vivaldi.
Comme les choses devaient être.
"Mmh..."
La pluie en décidait autrement.
Quand elle tambourinait sur mes épaules, mon cœur s'accélérait encore dans ma poitrine.
Ma respiration, les clapotis de la pluie, les voitures au loin qui grondaient, les chats errants qui miaulaient, l'eau des gouttières qui coulait, qui coulait, qui coulait...
Des bruits infernaux.
Incessants.
Puis, soudain, sa main dans la mienne.
Ses doigts sur mon cœur.
Son visage d'enfant, mon petit frère.
Un sourire et...
"Angoisse pas, Ace."
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