Je vous dérange?
<<-Qui est Simon?>>
Je quitte François des yeux pour écrire la réponse.
"C'est le nouveau dont je te parlais."
<<-AAAH oui, le bavard...>>
Je hoche la tête, ces derniers temps nous ne nous parlons pas vraiment, j'ai presque l'impression qu'il m'évite.
Je passe la plupart du temps à côté de François, il est vraiment gentil, j'aime beaucoup l'écouter me raconter sa vie d'avant, il me parle de sa fille, Clara, qui est morte renversée par une voiture. Je pense que c'est aussi pour ça qu'il est déprimé, perdre un enfant est la pire chose au monde... Du moins je l'imagine...
<<-Je veux pas faire le vieux con, même si je fais déjà partie du club... Mais fais bien attention quand tu traverses, les voitures... Les motos... C'est vraiment des inventions pourries...>>
J'opine en détournant la tête, on m'a déjà reproché d'être trop prudente, que ça ralentissait les autres. Je me souviens... Les filles étaient de l'autre côté de la route à m'attendre, et moi, c'était le feu vert que j'attendais. Elle me criait de venir, elles riaient entre elles, et quand j'ai traversé au vert deux minutes après, elle m'a tiré par le bras prétextant en riant qu'on allait être en retard à cause de moi.
Simon marche sur la pelouse et s'assied contre le tronc, nos regards se croise, il fait mine de rien en détournant la tête. Je fronce les sourcils, fais signe à François, prends mon cahier et me lève.
Je traverse la pelouse en me mordant la lèvre inférieure, pourquoi il m'évite? Qu'est-ce que j'ai fais?
Quand j'arrive près de lui, il lève la tête en grimaçant à cause du soleil, je lui souris, il me rend mon sourire, heureusement. Je m'assieds à côté de lui et pose mon menton sur mes genoux, les jambes repliées.
Au bout d'un moment, je tourne la tête vers lui, j'ai un pincement en coeur en voyant sa mine triste. Ses sourcils sont légèrement froncés, les yeux dans le vide, son teint est pâle, presque toutes ses tâches de rousseurs on disparu. Il est dans la mauvais période, et ça se voit, sa tristesse est contagieuse.
C'est surement pour ça que je prends sa main, il cligne des yeux, puis baisse la tête vers sa main. Son regard remonte le long de mon bras, pour enfin se plonger dans le mien. Il essaie de sourire, mais il ne réussi qu'à produire une grimace. Je me rapproche un peu plus de lui et pose ma tête sur son épaule en serrant encore plus sa main. Je le sens se raidir.
<<-Eden...>>
Mon nez effleure son cou, un frisson le parcourt. J'inspire son odeur, je ne savais pas qu'elle pouvait être aussi rassurante.
<<-Arrête... Tu... Tu devrais pas être avec moi quand je suis comme ça...>>
Je m'écarte et le regarde en fronçant les sourcils, il baisse les yeux et retire sa main de la mienne, sa chaleur me manque déjà.
Je prends mon carnet et mon crayon et écris.
"Pourquoi?"
Je lui tend le carnet, il le prends en soupirant.
<<-Parce que je suis déprimant, et que je sais que ça t'affecte aussi... Ça affecte tout le monde. Quand je suis joyeux, je t'énerve, et quand je suis triste... Je te déprime. Je peux m'énerver pour un rien et faire quelque chose que je regretterai. Je suis pas quelqu'un de fréquentable... C'est pour ça que je suis là non?>>
Je sens la colère grandir en moi, j'écris la réponse en secouant la tête.
"Tu n'est pas déprimant, on est triste parce que tu es triste. Quand tu es joyeux tu ne m'énerve pas, du moins plus maintenant. Simon... Tu es quelqu'un de bien. Vraiment. Demande aux autres, tu verra, ils diront la même chose."
Il lit puis lève la tête vers moi.
<<-Les autres... Les autres m'importe peu...>>
Il me regarde avec intensité, pendant un moment, j'arrête de respirer, mon coeur s'arrête même de battre. Je suis plongée dans ses yeux, si noirs. Je pourrait m'y noyer, personne ne retrouverait mon corps. Je frissonne, on va dire que c'est le vent... Ses lèvres s'entrouvrent, comme s'il voulait dire quelque chose, il prends une grande inspiration.
<<-Salut!>>
Je sursaute et me tourne vers Xavier, qui arrive en sautillant. Simon lève les yeux au ciel et détourne le regard, je fronce les sourcils.
<<-Ça va? Demande Xavier.
-Ouais.>>
Ses yeux vont et viennent entre moi et le nouveau -qui n'est plus très nouveau d'ailleurs-. Il fronce les sourcils et se tourne vers moi, son regard veut tout dire. Je baisse les yeux.
<<-Heumm... Je vous dérange ? Vous... Vous étiez occupés?
-Nan. On faisait rien. Rien du tout.>>
Peut-être qu'à première vue, elle n'a rien de méchant, mais cette phrase à été soigneusement taillée pour qu'elle ai une signification différente dans l'oreille de nous deux.
Pour Xavier c'est imperspectible mais pour moi, c'est presque un reproche, taillé comme un poignard, froid comme la pierre. Je tourne la tête vers Simon, il serre la mâchoire et regarde fixement le sol, on dirait que ses yeux vont tirer des lasers et brûler l'herbe verte, son coude repose sur son genou qu'il secoue nerveusement.
Xavier hausse les épaule et s'assied à côté de moi. Je lui sourit, je n'ai même pas eu besoin de l'aider, il progresse, je pose ma tête sur son épaule. Je vois Simon lever les yeux au ciel, je fais semblant de n'avoir rien vu.
<<-Vous savez pas la nouvelle?>>
Je secoue la tête, Simon lui jette un regard sans tourner la tête.
<<-Ils vont nous emmener au lac!
-Au lac?
-Ouais! Ils ont eu une permission exceptionnelle, on y va demain après-midi si tout se passe bien! Ça va être trop cool! Bon c'est vrai qu'on sera surveillés de près mais bon quand même!>>
Le lac? Se baigner... Montrer son corps? Oh non... J'imagine qu'on est obligés...
Encore un long silence...
<<-Ma mère m'a écrit.>>
Je me tourne vers Xavier, il est heureux, un sourire plein d'espoir emplit son visage.
Je lui rend son sourire, lui demandant de continuer.
<<-Elle ne m'as pas pondu un roman, mais... On va dire que... Ce n'étais pas très froid. Elle me disait que je lui manquais, que mon père n'était pas très présent à la maison donc qu'elle se sentait seule. J'ai de la peine pour elle. Entre son fils qui perds une jambe à cause d'un putain de cancer et qui se retrouve chez les fous parce qu'il est dépressif et son mari qui n'est pas là pour elle... Je... Je pense pas que j'arriverais à le supporter à sa place...>>
Il baisse les yeux et fronce les sourcils, son visage est devenu triste, il est vrai que la famille de Xavier n'a pas vraiment de chance. Je secoue la tête et le prends dans mes bras, il me serre contre lui, je caresse ses cheveux et plante mon nez dans son cou.
J'entends du mouvement à côté, puis un grognement, je vois Simon s'éloigner au loin, je fronce les sourcils et reporte mon attention sur Xavier, des larmes coulent le long de ses joues. Je lui souris, j'essaie de prendre le sourire le plus rassurant et écris:
"Tu peux lui demander de venir te voir après demain."
<<-Je... Il renifle. Je veux pas la déranger... Elle doit faire au moins cent kilomètres pour venir jusqu'ici.>>
"Demandes-lui. Fais le pour toi, pour elle, et pour moi. J'aime pas te voir triste."
Il lit lentement les lignes du cahier, puis lève les yeux vers moi. Je lui souris encore, il rit doucement, des larmes coulent encore, je le prends dans mes bras et tapote son dos.
<<-Xavier! Eden! On vous attends au réfectoire!
-Allez, c'est parti mon kiki.>>
J'éclate de rire, et l'aide à se lever en prenant sa main, je la passe autours de mes épaules et l'aide à marcher, il avance en sautillant. Quand nous arrivons -au moins cinq minutes plus tard, à cause des escaliers- au réfectoire, nous trouvons nos amis à notre table habituelle.
Je m'assieds et lève la tête vers Simon.
Mon coeur rate un battement quand je vois son expression, on pourrait croire qu'on a frotté du charbon autours de ses yeux, une ombre noir part de ses sourcils et descends jusqu'à ses pommettes. Il a les poings serrés autours de ses couverts.
Quand son regard croise le miens, je manque de m'évanouir.
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