.oO-Bulle Dorée-Oo.

Chloé se sent seule. Terriblement seule. Pourtant, avec un père richissime comme le sien, tout le monde croit que la peste nationale est heureuse. Définitivement, le mot "heureuse" n'est pas celui qu'aurai employé la jeune fille pour se décrire. On ne connait pas grand chose de Chloé, cette fille que tout le monde semble détester. Elle a pourtant réussi à trouver une bulle de sérénité, là où personne n'aurait cru la voir un jour.

Il ne faut jamais juger quelqu'un par son comportement ou son apparence. Certaines personnes qui semblent désinvoltes peuvent cacher des combats et des blessures plus que douloureuses...

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« On passe sa vie coincé dans le labyrinthe à essayer de trouver un moyen d'en sortir, en se régalant à l'avance de cette perspective. Et rêver l'avenir permet de continuer, sauf qu'on ne passe jamais à la réalisation. On se sert de l'avenir pour échapper au présent. »

Qui es-tu Alaska ?, John Green.

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Couchée sur mon lit bien trop grand pour moi seule, je fixe le plafond de ma chambre. Je connais un nombre incalculable de personnes qui rêveraient d'être là, à ma place, dans le dernier étage du palace « Le Grand Paris ». Je pense même qu'il y en a d'autre qui se damnerait rien que pour avoir le quart de mon train de vie. Et pourtant, je ne suis pas heureuse. Je suis trop seule pour ça.

L'argent peut faire beaucoup de choses. Ouvrir des portes. Payer du personnel. Avoir une vie de luxe. Profiter de ce que ce que le monde fait de meilleur. Corrompre les hautes sphères de la politique. Mais elle ne permet pas de combler réellement. Elle ne peut acheter l'amitié, le bonheur, la joie. Toutes les relations que j'ai nouées grâce à l'argent ne m'ont rien apporté sur le plan humain.

Depuis que Maman est partie, l'amour est sorti de ma vie. Oui, mon père m'aime, certes, mais ses obligations de maire richissime l'éloigne de moi. Il m'a éduquée de façon à ce que je fréquente uniquement des enfants de même condition sociales que moi. Mais mis à part Adrien, il n'y avait personne de mon âge. Mieux vaut être seule que mal accompagnée, me répondait Papa à chaque fois que je lui avais parlé de ma solitude. A force, j'ai commencé à y croire moi aussi, pour me persuader que la sensation désagréable que je ressentais dans ma chambre de princesse n'était rien.

« Mademoiselle, votre chauffeur vous attend dans la cour »

La voix désincarnée du majordome de notre hôtel se fait entendre dans mon haut-parleur du service d'étage et interrompt mes pensées déprimantes. En soupirant, je me lève de mon lit pour lui répondre.

« Dites-lui que j'arrive.

-Bien, Mademoiselle. »

Je suis bien trop lassée pour paraître méprisable comme à mon habitude avec le service de l'hôtel. Et surtout, ça ne m'avancerais à rien. Ils ne font que leur travail. Je devais me changer avant de partir dans la limousine de mon père. Il faut que je me secoue, sinon mes pointes vont fourcher si je continue de déprimer ainsi, songé-je en esquissant un sourire. C'était ce que me disait Jean Claude à chaque fois que je ne souriais pas assez à son goût. Pourtant, malgré ce faible réconfort, je ne peux m'empêcher de me sentir stressée, bien que je fasse ça toutes les semaines depuis bientôt sept ans.

Allez, courage, m'exhorte ma conscience. Tu peux le faire.

Je me dirige vers mon dressing surdimensionné croulant de vêtements plus chers les uns que les autres. J'ouvre la porte avec appréhension, comme chaque samedi. Pourtant, j'ignore les sublimes robes et les T-Shirt de créateur qui le tapissent pour sortir une simple boîte en carton blanche un peu limée sur les bords. Tout en remettant en place une de mes mèches blondes, je la pose avec précaution sur ma table basse en verre et referme la porte en m'appuyant contre. Je conserve ici mon bien le plus précieux, qui vaut bien plus à mes yeux que toute ma penderie réunie.

Avec délicatesse, j'enlève le couvercle cartonné et soulève le papier de soie qui protège ma chère tenue. Une culotte de cheval blanche, un haut sportif noir à manche longues et une veste jaune bourdon raffinée, brodée d'arabesques blanches sur les bords. A côté se trouvait les bottes d'équitation en cuir souple, parfaitement propres et cirée avec soin. Une petite broche en forme d'abeille était attachée au veston, délicatement ouvragée, complétant la tenue de cavalière de ma mère. Elle est presque comme neuve, grâce à l'attention que j'y fais porter. Aucun de mes autres vêtements n'a droit à autant d'attention de ma part.

En enlevant les vêtements de la boîte, je les serre quelques instant tout contre moi. Je sais bien qu'ils n'ont plus l'odeur fraîche et réconfortante de la citronnelle qui plaisait tant à ma mère, mais je le fais par réflexe. Puis je reviens à la raison : Maman n'est plus là, et il faut que je me change rapidement. Une demoiselle de mon rang social ne peut se permettre de se faire trop attendre le personnel, bien que ce soit mon sport favori.

Une fois dans la salle de bain, je troque mon top noir et mon short blanc pour enfiler la tenue. La mettre me donne toujours une étrange impression, à la fois réconfortante et nostalgique, mais j'essaye de faire fit de ses sensations perturbantes. Je coiffe avec soin mes cheveux blonds, et les rassemblent en une tresse française , bien différente de la queue de cheval que je fais chaque jour et qui se dresse fièrement sur mon crâne. Une fois prête, je sors de la pièce sans prêter attention à mon reflet dans le miroir. Je prends dans mon armoire ma bombe, seul matériel que j'ai consentis à remplacer pour rassurer mon père sur ma sécurité. J'attrape mon portable, ma sacoche ivoire de toujours et sors de ma gigantesque chambre.

Mis à part mon père, ma monitrice et mon chauffeur, personne ne sais où je vais chaque samedi matin. Et c'est tant mieux. Tout le reste du monde me croit chez mon coiffeur Jean-Claude ou chez Valérie, mon esthéticienne. Même Sabrina, ma « meilleure amie », n'est pas au courant. Mais je ne pourrais jamais le lui dire. Et de toute façon, que ce soit elle ou les autres, personne ne me croirait ou me comprendrait. S'il y a une chose que j'ai vite comprise, bien que je ne l'accepte toujours pas, c'est que je suis seule. Que je le veuille ou non. Ça doit sûrement être le prix à payer lorsqu'on nait avec une cuillère d'argent dans la bouche.

Les pneus de la limousine blanche crissent sur les cailloux de la cour du centre. Mon chauffeur vient m'ouvrir la portière et je sors sans dire un mot. J'aime et je déteste ce lieu à la fois. Il n'est pas très luxueux, et l'odeur est plus qu'insupportable pour moi, mais pourtant j'y retourne à chaque fois, chaque semaine, avec la régularité d'une horloge suisse. C'est le seul rendez-vous que je ne raterais pour rien au monde. Mon rendez-vous avec Star.

Sandra, la monitrice, m'attends pour ma leçon. Je la salue d'un signe de tête et la suis vers les box du centre. Même si je sais que je ne croiserai personne de ma classe ici, je préfère sauvegarder les apparences. Toujours garder la tête haute, comme me répète mon père depuis ma plus tendre enfance. Ne montre pas tes émotions, et soit aussi dure envers les autres qu'envers toi-même. Attaque, ou sois attaquée. Ce précepte m'a suivi toute ma vie, et je l'applique avec brio au quotidien de ma vie dorée.

A côté de son box, j'aperçois Star, mon cheval, sellé et bridé par les palefreniers du centre, prêt à être monté. Avec respect, je lui tâte doucement la croupe, et m'approche de son encolure pour se placer à gauche de sa tête pour ne pas l'effrayer. Je lui caresse son chanfrein décoré d'une petite tache noire d'un geste tendre. De ses yeux marron foncés, je vois de la douceur, presque candide, et esquisse un sourire à ma monture. Je dénoue ensuite la bride de Star pour le faire avancer hors de l'écurie. Sa robe blanche pommelée de gris resplendit au soleil, tandis que ses sabots claquent d'un rythme régulier le béton du sol.

J'entre dans le manège. Il est vide, hormis ma monitrice qui me prépare le matériel pour ma séance. J'ai demandé à Papa de m'obtenir des cours solitaires, car ça me permet de mieux me concentrer, et de retrouver ainsi un semblant de passé. Par habitude, je fais faire à Star un tour à pied, ce qui me permet de détendre un peu mes épaules crispées. Même après sept ans, je n'arrive toujours à pas à me défaire des mauvais réflexes que j'ai développés au départ de Maman.

Sandra me hèle de l'autre bout du manège, interrompant le fil de mes pensées :

« Fait lui faire un tour au pas pour l'échauffer, Chloé. Vas-y tranquille.

-D'accord Sandra. », lui réponds-je en souriant.

J'arrête Star, qui m'obéit, doux comme un agneau. C'est avec plaisir que je place mon pied sur l'étrier pour passer mon autre jambe de l'autre côté de son dos. Une fois perchée sur lui, je respire un bon coup, me saisis des rênes puis exerce une légère pression de mes mollets pour le mettre en marche.

Ses sabots s'enfoncent dans le sable brun, et j'ajuste mon assiette en suivant les mouvements de son corps. Méthodiquement, il avance ses membres, les uns après les autres, lentement mais d'une allure assurée.

« Descends tes talons, ma belle ! Et garde le dos droit ! »

Je m'exécute sans broncher. Dans cette salle, dans ce centre, je ne suis plus Chloé Bourgeois, la fille du maire hautaine et précieuse. Non. Je suis tout simplement Chloé, qui apprend à monter son cheval, et qui écoute ce qu'on lui dit sans râler.

« Bien. Passe au trot. Doucement... »

Je m'incline légèrement, et fait passer Star au trot enlevé. Je compte dans ma tête les mouvements afin d'essayer d'être un minimum en harmonie avec mon cheval : 1, 2, 1, 2, 1...

« Ton dos ! Relâche ton dos, tu es trop raide ! Voilà, c'est mieux. Suis ses mouvements. 1, 2, 1, 2, 1, 2...

« Ah ! Maman, ça secoue !

-Garde ton calme ma puce ! Pense à ce que je t'ai dit. Ne reste pas assise, suis les mouvements du cheval ! Assis, debout, assis, debout ! »

1, 2, 1, 2, 1, 2...

« C'est parfait ma petite abeille ! Continue c'est bien ! »

1, 2, 1, 2, 1, 2...

J'enchaîne ainsi les tours, en m'habituant à l'allure de Star. Je suis ses mouvements, me laissant porter par le rythme régulier. Je lui fais faire un tour dans le sens horaire, puis un autre dans le sens opposé pour l'assouplir un peu et le mettre en jambe.

« On va passer au galop, Chloé ! » me crie Sandra, suivant mes faits et gestes au centre du manège.

Je fais stopper mon cheval pour pouvoir mettre pied à terre. Sandra s'approche de moi pour ajuster les sangles de Star. Je remonte ainsi en selle pour le mettre au galop, tandis que ma monitrice passe de l'autre côté de la barrière du manège.

Je fais glisser ma jambe externe vers l'arrière et lui donne une nouvelle légère pression des mollets. Aussitôt, mon cheval s'élance dans le sable et gagne de la vitesse. Je ne fais que le guider avec les rênes de temps à autre. J'incline légèrement mon buste et ainsi ne fais qu'un avec Star.

Je ne suis plus Chloé Bourgeois, plus lorsque je suis ici, dans ce manège. Je suis qu'une fille à cheval, qui, le temps d'un instant oublie tout, et se laisse porter par sa monture, celle que Maman chérissait presque autant que moi. Le vent souffle dans mes cheveux et ma natte se balance au gré de mes mouvements de tête. Et ici, en ce moment précis, j'ose sourire et profiter de cet instant magique.

Si je viens ici toutes les semaines, c'est justement pour fuir Paris et mes habitudes de fille pourrie gâtée. Fuir les autres et retrouver un moment où je pouvais enfin être moi, uniquement avec Star, comme lorsque maman était avec moi.

Je me rappelle que l'équitation était le sport favori de ma mère. Avec la mère de Star, une magnifique jument rouanne nommée Promise, elle faisait déjà des concours. Puis, lorsque Star est arrivé, elle l'a dressé, petit à petit, pour qu'il devienne aussi beau, fort et talentueux que sa mère. Même si je n'ai jamais fait de concours avec lui, je sais qu'il pourrait être un superbe étalon de compétition.

Lorsque j'avais huit ans, Star pouvait commencer à être monté. Il était très docile et Maman m'emmenait chaque semaine. J'ai passé de merveilleux moment ici, avec Promise, Star et ma mère. Alors chaque fois que je reviens ici et que je galope, j'ai presque l'impression qu'elle est là, tout près de moi, ses beaux cheveux blonds flottant au vent. Son parfum à la citronnelle m'enveloppait dans ma bulle de souvenir, aussi doré que du miel d'abeille. Voilà pourquoi je viens chaque semaine pour monter ici, à l'abri des regards indiscrets. Pour revoir Maman. On du moins avoir l'illusion de sa présence.

Je me laisse porter par Star, et enchaine les tours de manège à une vitesse folle. Cependant, Sandra me fait bien vite signe de ralentir. D'un geste, je tire sur les rênes et me lève sur les étriers, pour faire comprendre à Star qu'il faut arrêter de voler. Obéissant, il passe au trot quelques secondes pour finir au pas le tour du manège. Je me dirige vers ma monitrice qui me félicite :

« Bravo Chloé, tu étais super. On passe à la suite ? Du saut ?

-Ça marche, Sandra », lui répondis-je, un brin essoufflée.

Je dirige Star vers les obstacles que Sandra avait installés au milieu de la piste. Ensuite, je lui intime une nouvelle pression des mollets pour le relancer à pleine allure. Là encore, je me sens de nouveau vivante, de nouveau moi. Je n'ai personne à impressionner, personne à qui soutirer des faveurs. Je suis seule, mais seule avec mon cheval. Je passe tout simplement un super moment, et amortis chaque saut de Star.

Lorsqu'on y pense, oui, je suis une sale peste : J'en suis une car je m'en fiche des autres. Et je me fiche des autres parce que les autres ne veulent pas de moi. Ainsi comme je n'en ai cure des autres, je ne me prive pas de dire et faire toutes sortes de méchancetés.

Ce joli cercle vicieux m'a vite enfermée dans une bulle dont je ne peux plus sortir. Je me suis ainsi composé un masque de mépris et de dédain en piquant tout le monde telle une guêpe agressive pour me défendre et paraître invulnérable. Cependant, si Maman était avec moi, je suis certaine que la guêpe que je suis ne serai plus qu'une tranquille petite abeille, butinant et profitant de la vie comme n'importe quelle fille de mon age. Comme Marinette. Comme Ladybug.

Si Maman avait été avec nous en ce moment, beaucoup de choses ne seraient pas comme elles le sont actuellement. J'aurai été une fille aimée de ses deux parents, passant de bonnes journées au collège avec ses amies, et vivant pour sa passion pour le graphisme. J'aurai passé chacun de mes samedis avec elle dans ce manège à entraîner Star pour faire une compétition de temps en temps, aurai emmené Sabrina et d'autres amies imaginaires en sortie dans Paris, aurai organisé des soirées où l'on viendrait par plaisir et non pour profiter de moi. Adrien m'aurai ainsi peut-être aimé, lui ou un autre garçon, et j'aurai été la plus heureuse des filles du monde.

Malheureusement, tout ça est impossible. Maman est partie, je me suis renfermée sur moi-même et les autres mes détestent. C'est pour ça que j'envie et déteste autant Marinette Dupain Cheng. Elle et ses parents ne roulent peut-être pas sur l'or, mais au moins elle semble bien plus heureuse et épanouie que moi. Marinette est douce, gentille, un peu excentrique mais aimée de tous. Jamais je n'oserais l'admettre devant elle ou un autre de mes camarades, mais j'aimerais tant être comme elle.

J'envie aussi Ladybug, pour son courage, sa beauté et sa détermination. Cette fille de Paris, mon modèle et mon idole, possède tout ce que je n'ai pas : la force, l'altruisme, la malice, la confiance en soi. L'amour et le soutien indéfectible de tous. J'aurai tant voulu être comme elles, être quelqu'un d'admirable, avoir mon truc à moi pour que les gens me remarquent positivement.

Cependant, la réalité me tombe dessus, et je me rends à l'évidence : Jamais je ne serais comme Ladybug, ou même comme Marinette. A la place, je continuerais à être la peste de service, qui finalement ne sert qu'à mieux faire briller les autres par sa méchanceté.

Je me suis donc piégée à mon propre jeu, plus seule et malheureuse que jamais. Je me retrouve ainsi ici, avec Sandra, à courir après une sensation fantôme sur le dos d'un cheval que je me suis presque mise à détester à force de penser à ma mère.

Les larmes ne sont pas loin, je les sens lorsque Star saute en enchaînant les obstacles avec facilité et aisance. Je l'envie lui aussi, et j'aimerais avoir également avoir la capacité de sauter au-dessus de tous mes problèmes aussi facilement que Star avec les croisillons ou les oxers du manège. Passer outre ces sentiments et pouvoir changer afin de devenir quelqu'un comme Marinette : une fille gentille, aimable, souriante, belle, créative... Heureuse.

« Eh Chloé ! Peux-tu t'arrêter un moment ? » me crie Sandra de l'autre côté de la barrière du bâtiment.

Après avoir essuyé mes yeux humides d'un revers de manche, je ramène les rênes contre moi en douceur pour arrêter l'allure de mon cheval. Il est un peu essoufflé par sa course dans le sable du club. Ça fait un bon quart d'heure que je lui fais faire des tours de piste dans tous les sens.

Une fois totalement à l'arrêt, je descends de ma monture, met pied à terre et flatte la belle encolure blanche de Star pour le récompenser de ses efforts. Lui au moins, n'est pas comme mes camarades de classe. Il semble presque content de me voir et que je le monte chaque semaine. Il n'a pas l'air d'avoir peur de moi ou de me détester, et c'est bien le seul ici-bas. Je lui caresse la tête d'un geste doux, lissant sa belle robe lustrée et chaude sous mes doigts. Sa respiration commence à se calmer un peu.

J'attrape une bouteille d'eau pour me rafraîchir un instant, moi aussi hors d'haleine.

« Tu sais..., enchaîne ma monitrice d'un air gêné pendant que je buvais. Tu devrais vraiment montrer plus souvent ce côté de ta personnalité...

-Pardon ?

Je manque de m'étouffer en buvant une nouvelle gorgée d'eau. Sandra me tape doucement dans le dos, le temps que je retrouve mon souffle.

« Qu'as-tu dis ?

-Quand tu montes Star... Quand tu es avec lui, c'est comme si... Tu n'étais plus toi-même. Tu es souriante, belle et... Impressionnante. Enfin encore plus que tu ne l'es en temps normal je veux dire. Rien ne semble t'atteindre, mais c'est différent que lorsque tu es devant moi. Tu sembles... rayonner. Être enfin entière. Enfin toi.

-Sandra...

-Je sais, dit-elle avec empressement. Tu m'as dit de ne pas en parler mais... Je t'assure que si les gens te voyaient à ce moment, ils-

-Ils ne comprendraient pas, l'interrompis-je avec autorité. Les gens ne savent que juger et critiquer les autres dans leurs dos. Alors non, Sandra. Jamais je ne montrerais cette facette de moi-même aux autres. S'ils décèlent la moindre once de faiblesse en moi, ils ne me rateront pas. Alors jamais il ne faut qu'ils ne me voient comme ça. Jamais ! C'est clair !? »

Sans que je m'en rende compte, une larme avait réussi à sortir de mes yeux déjà humides. Je l'écrase d'un geste brusque avec ma main, en colère. J'avais levé la voix d'un coup, gagnée par l'émotion. Oui. Les autres me démoliraient s'ils savaient tout ça. Alors autant donner l'illusion que rien ne nous atteint, au risque de passer pour une sale peste. Au moins j'ai leur respect, ou tout comme, et ils me laissent tranquille. Attaquer ou être attaqué. Règle ancestrale qui vaut aussi pour nous, faibles humains que nous sommes.

« Je... D'accord. Veux-tu continuer à faire du saut ou faire une pause avant ?

-J'arrête la leçon, Sandra, dis-je d'un ton glacial en laissant choir la bride de Star dans le vide. On stoppe là pour aujourd'hui. Merci pour le cours. »

Je marche d'un pas vif en direction de l'écurie, les yeux remplis de larmes, tout en enlevant la bombe de ma tête.

« Je comprends... », Lâche-t-elle à mi-voix en récupérant la bride de mon cheval, qui piaffait nerveusement.

Malgré la distance, je l'ai entendue. Et ces deux pauvres mots m'allument comme une bombe qui menaçait d'exploser à tout moment. D'un coup, je me retourne, les cheveux défaits formant une fine crinière hirsute, la mine sûrement affreuse vers Sandra, pour lui lâcher :

« Non ! Tu ne me comprends pas ! Personne n'en est capable, et sûrement pas toi ! Alors n'essaye pas de jouer les psychologues à deux balles ! Jamais tu ne comprendras ne serait-ce le quart de la moitié de ce que je ressens ! »

J'ai laissé libre cours à mes émotions, et voilà ce qui arrive. Je continue mon chemin vers les écuries comme une furie, où les chevaux hennissaient doucement, à l'abri dans leurs box. J'aimerais tellement être comme eux, à ne pas subir les regards constants de mes pairs sur moi, la pression sociale de ce monde pourri où je suis enfermée. Mes bottes martèlent avec force le sol pavé du club et résonne contre le plafond haut des écuries. Je pleurais maintenant. Je suis vraiment pathétique de pleurer ainsi pour si peu. Mais je ne peux m'en empêcher. Je ne pleure jamais d'ordinaire. Juste quelques larmes de crocodile pour attendrir mon père quelque fois lorsque je n'avais pas ce que je voulais. J'imagine alors que dès que j'en ai vraiment l'occasion, tout sort à flot. Je prie juste pour ne croiser personne du club risquant de me voir ainsi.

Sans m'arrêter, je sors du bâtiment vers le parking du club, où m'attendais mon chauffeur depuis une trois quarts d'heure à peine. S'il était surpris de me voir arriver aussi tôt et dans cet état pitoyable, il gardait ce même visage neutre qu'avait chaque membre du service d'hôtel. Sans rien dire, je monte dans la voiture qui démarre et m'éloigne du centre, et mon lien avec Maman se rompt, une fois encore.

C'est ainsi que, crasseuse, éreintée et en pleurs, je redeviens Chloé Bourgeois, la plus grande peste que Paris n'ai jamais connue, prête à enfermer ses émotions pour une nouvelle semaine.

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Bonjour à tous !

Voici là un OS qui me tenais à cœur d'écrire. J'aime beaucoup le personnage de Chloé, même si on la voit comme une sale peste pourrie gâtée, égoïste et égocentrique. Elle est si souvent traînée dans la boue par les fanfiction Miraculous que j'avais envie de redorer un peu son image à travers cette courte histoire, dans un univers dans lequel on ne l'imagine pas aux premiers abords.

En tout cas, merci pour votre lecture, on se voit très bientôt !

Kiss miraculeux <3

LadyButterFly, une Lady à votre service.

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