Chapitre 2 [partie II] (version NON officielle)

SETH

De retour à la maison, la réalité me rattrape. Une femme se tient devant l'arche de l'entrée principale. Je n'ai pas l'habitude de recevoir des visiteurs, encore moins des visiteuses, je suppose donc que c'est une autre candidate pour le travail à pourvoir.

Au moins, ses habits sont appropriés...

Quoique !

Je fronce les sourcils.

Qu'est-ce que c'est que ça ?

Je cligne des yeux afin de vérifier que je ne suis pas victime d'une hallucination. Non, c'est bien ça. Elle porte des mules en forme de lapin rose avec son tailleur jupe.

Je soupire. Ce serait trop demander d'avoir, rien qu'une fois, une personne normale qui se présente ?

Je me racle la gorge :

- Je peux vous aider ?

La femme couine telle une souris apeurée, se retourne... Et pousse un cri d'effroi.

- Mais qu'est-ce que... ? Co... comment ? Par... par où ? bégaye-t-elle, en totale panique.

Sa réaction me déstabilise, mais pas autant que ses paroles ni de sa voix qui me semblent étrangement familières.

Elle lève les yeux en direction du ciel, me lance un regard trouble, puis tend à nouveau le cou vers le ciel.

Oh, putain ! C'est la fille de l'ascenseur !

- Vous me suivez ? m'accuse-t-elle alors.

C'est la meilleure. Moi, je la suis ?

Pense-t-elle que je suis un pervers fétichiste de femmes péteuses ?

- Je vous retourne la question ! je réplique durement. Qu'est-ce que vous fichez ici ?

Elle pointe le menton vers le haut, essayant de reprendre contenance.

- Je suis venue voir Helen Montgomery.

J'arque un sourcil.

- Pour le poste de gouvernante ?

- C'est ça. (Toute une palette d'émotions traverse son visage.) Vous aussi ? demande-t-elle avec ce qui semble être une pointe d'espoir.

- Moi aussi, quoi ?

- Vous êtes ici pour... pour le poste ! Hein ? Et après, vous allez repartir et... rentrer chez vous.

Je suis son regard qui se plante à nouveau dans le gris du ciel.

OK. J'ai compris. Son pet, il est aussi au casque.

Au moment où je m'apprête à la renvoyer manu militari chez elle, la porte s'ouvre sur une Helen rayonnante.

La fille pousse un soupir de soulagement.

- Vous êtes Helen Montgomery ?

- Tout à fait. Entrez, mon p'tit.

Je fais de gros yeux à Helen en secouant la tête, les siens m'intiment au silence, tandis qu'elle poursuit :

- Vous allez être trempée comme une soupe autrement.

Je grommelle :

- Il ne pleut pas.

Néanmoins, les premières gouttes s'écrasent déjà sur les dalles de l'allée. Helen me lance un regard entendu. Je déteste quand elle a raison.

Miss péteuse hésite un instant, un pied sur la marche ; j'en profite pour me glisser devant elle.

- Hey ! s'insurge-t-elle. J'étais là avant ! Vous attendez votre tour, nanmého !

Elle me donne un coup de coude, puis grimpe les escaliers à toute vitesse.

- Je viens pour le poste de gouvernante, précise-t-elle à Helen, et j'étais là avant ce malotru.

La surprise se peint sur les traits d'Helen, avant qu'un léger gloussement s'échappe de ses fines lèvres cernées de rides :

- Vous êtes rafraîchissante.

- Complètement folle, oui.

J'ai parlé dans ma barbe, malgré cela leurs têtes pivotent vers moi.

- C'est M. Sutton qui m'envoie, poursuit miss péteuse.

- QUOI !

Mon exclamation furieuse lui tire un glapissement étranglé.

Comment ce connard a-t-il réussi à retrouver la fille de l'ascenseur ? Si je n'étais pas si en colère, je serais impressionné par ce tour de force.

- Ou... oui, souffle-t-elle, il m'a précisé que son beau-frère cherchait...

- Je suis son beau-frère !

- Non !

- Si !

- Non. (Elle s'agite, nerveuse.) Non, c'est impossible, insiste-t-elle. Vous êtes...

- Je sais encore qui je suis ! je la coupe sèchement.

Elle n'est pas croyable, cette fille !

- Pourtant, j'ai gagné ma partie de Candy Crush, soupire-t-elle, affligée. Je ne comprends pas, la scoumoune était censée être derrière moi.

Helen hausse les épaules dans ma direction, l'air de dire « Je n'ai aucune idée de ce qu'elle baragouine. »

Nous l'observons, médusés, s'emparer de son téléphone et s'acharner dessus en grognant.

- Je peux savoir ce que vous faites ?

- Je désinstalle ce maudit Candy Crush. (Elle nous dévisage tour à tour.) Voilà, c'est fait. Maintenant, je vais rentrer chez moi et... me bourrer la gueule pour noyer ma honte. Si vous voulez bien m'excuser.

C'est alors que je remarque pour la première fois ses grands yeux. Ils brillent sous l'humidité des larmes qu'elle tente de contenir, ce qui fait ressortir le bleu profond de ses iris.

- Attendez, s'écrie Helen. Hors de question de vous laisser repartir dans cet état, n'est-ce pas M. Manning ? (Si elle pense me culpabiliser ainsi, elle se trompe.) Je vois bien que vous êtes toute chamboulée. En plus, il pleut à verse. Venez plutôt à l'intérieur et dites-moi votre petit nom.

Je siffle entre mes dents :

- Elle s'appelle Ava Summer, et elle s'en va.

Encore une fois, les têtes se tournent vers moi. Miss péteuse est sur le point de défaillir.

- Com... comment connaissez-vous mon nom ? s'alarme-t-elle.

J'ai vraiment l'impression qu'elle me prend pour un psychopathe, alors que c'est elle la folle ici.

- Certes je n'ai pas applaudi, néanmoins j'ai des oreilles et une bonne mémoire. « Ce pet de compétition hisse mademoiselle Avaaaa Suuuummer directement en... »

- C'est bon ! m'arrête-t-elle. Je... (Elle soupire.) Vous n'avez pas un endroit discret dans votre immense jardin où je pourrais m'enterrer ? N'importe quel petit trou fera l'affaire, vraiment, je ne ferai pas ma difficile.

- Cesse de la taquiner, me houspille Helen. Venez, nous allons discuter un peu.

Houla ! Il vaut mieux que j'intervienne de suite pour mettre mon véto.

- Hors de question qu'elle s'occupe de mes enfants. Cette fille a visiblement un problème mental.

- Pas du tout ! Je ne vous permets pas ! s'offusque aussitôt l'intéressée. Ce n'est pas parce qu'il s'est produit un léger incident dans l'ascenseur que cela fait de moi une attardée. Tout le monde pète à ce que je sache !

- Mais tout le monde ne s'en félicite pas. Et tout le monde ne vient pas non plus à un entretien d'embauche avec des chaussons lapins.

- Noooon !

Son cri désespéré me tire un presque sourire, tandis qu'elle se penche pour lorgner ses pieds.

- Pourquoi ?

Elle tend les mains au ciel.

- Pourquoiii ?

Cette fois, mon sourire est plus franc. Difficile de ne pas s'amuser de la situation.

Ma gouvernante hoquette. Cependant, son regard n'est pas rivé sur les mules d'Ava, mais sur moi. Elle pose une main sur sa poitrine, tandis que ses traits s'illuminent.

Lorsqu'elle s'adresse à Ava, sa voix n'a jamais été aussi chaleureuse :

- Allons, allons, ce n'est pas si grave. Mon instinct me souffle que vous êtes la candidate idéale pour ce poste.

- Ton instinct est aussi détraqué que ton taux de glycémie.

Elle saisit Ava par le coude pour l'entraîner vers le séjour.

- Ne vous inquiétez pas, il aboie plus qu'il ne mord.

- Parce que ça lui arrive de mordre ? s'affole-t-elle, le timbre tremblant.

Je perçois le gloussement d'Helen en réponse.

J'ouvre la porte de mon bureau, me dirige vers la desserte pour me servir un verre de scotch que j'avale d'une traite.

Qu'on me pende haut et court si cette femme devient ma gouvernante !

Je préférais encore la bimbo de ce matin. Toutefois, pour une raison que j'ignore, elle semble plaire à Helen. C'est la première fois qu'une des candidates retient son attention, et cela, sans même amorcer la moindre conversation. Heureusement que c'est encore moi qui ai le dernier mot ! Qu'elle discute avec elle de tout son soûl si ça lui chante, cela ne changera pas mon opinion.

Ma décision est prise : miss péteuse n'approchera pas mes enfants.

***

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