40・Coups Musicaux
Rhéa Kei.
Ce qui était clair, c'était qu'Eos Hunt était un véritable puits d'émotions. Il avait le pouvoir de m'effrayer jusqu'à incarner mes cauchemars, la capacité de me déstabiliser par son apparence inhumaine, et sa facilité déconcertante à rentrer dans mes jeux de provocation.
Nous voulions prouver à l'autre à quel point nous avions changé. À quel point nous étions armés contre l'autre, capables de nous défendre nous-mêmes, sans l'aide de personne.
C'était notre combat. Entre nous et contre notre passé.
Mais là, tout de suite, je me sentais terriblement mise à nue. Il ne m'avait fallu que quelques secondes pour comprendre, en voyant le visage d'Eos se refermer lentement.
Quelle ironie ! Toutes ces fois ou je m'étais confiée à lui, ces fois ou je m'étais montrée faible, à la hauteur de mes pensées les plus enfouies. Toutes ces fois ou je parlais de lui, sans savoir que je m'adressais réellement à lui.
Et c'était la même chose pour lui. On s'était fait avoir par nos propres pensées.
Pourquoi nous ? Pourquoi cette année ? Pourquoi après mon amnésie ?
J'aurais dû m'en douter, j'aurais dû me méfier davantage. La fois ou j'avais fouillé son esprit contre son gré, le souvenir que j'avais pu apercevoir. Ce n'était rien d'autre qu'une journée d'entrainement. Moi contre lui. " Tu n'es pas concentrée aujourd'hui, tu veux que je te tue ?"
Eos ?
??? : Oui.
Merde.
Apprendre l'identité de l'autre ne changeait rien. Mais changeait tout à la fois.
Comment m'éloigner du seul homme avec qui j'avais le mystérieux pouvoir de communiquer par la simple force de ma pensée ?
Ignorer notre don était impossible autant que stupide. Même si je ne m'étais pas penchée dessus ces derniers temps, j'étais convaincue que si l'on possédait quelque chose, il fallait apprendre à s'en servir.
Et il était sans équivoque que nous ne savions rien de ce que nous cachait la télépathie.
Mis à part le fait que ça forçait une liaison plus intime. Intérieure, mentale et mystérieuse.
— Je n'avais pas compris. Tu m'as appelé pour me demander d'aller venir en aide à une femme dans la rue. Mais tu n'as en aucun cas mentionné son prénom.
Face à notre absence de réponse et à nos visages chargés de choc et d'incompréhension, Zayn reprit, un sourire aux lèvres.
— Je veux ma contrepartie. Maintenant.
La musique avait maintenant fait place à Superman de Eminem. Donnant un côté encore plus mauvais garçon à Zayn.
Dixon était occupé à ranger le matériel. Il préférait sûrement s'occuper plutôt que d'être entrainé dans d'autres histoires, et d'entendre plus que ce qui avait déjà pu lui parvenir.
Il semblait être un chic type, qui souhaitait simplement que son bar fonctionne, et que tout soit carré. Malheureusement pour lui, il avait fallu qu'il croise la route de Zayn.
Eos croisa mon regard en une fraction de secondes, et Zayn émets un faible rire.
— Je ne lui ferais rien. Et pas seulement parce que je ne dois pas l'abimer. Je tiens à elle.
C'est la première fois qu'il avoue ce qu'il ressent envers moi. Et sans surprise, un frisson de dégout m'envahit. Je ne veux pas de quelqu'un qui supporte ce qu'EUX font.
Mais je me ressaisis. Il venait de m'avouer sa faiblesse. Moi.
— Qu'est-ce que tu veux ? Lança Eos, sur la défensive, une main sur sa nuque.
— En gros, te rouer de coups. C'est assez simple à priori. Mais tu n'as pas le droit de te défendre.
Je fronce les sourcils. Ça ne sent pas bon. Du tout.
— Tu te fous de qui ? Répliqua Eos, révolté.
— Ils m'ont dit que si je te croisais, je ne devais pas te laisser indemne. Alors il suffit que je te prenne en photo en sang pour leur envoyer. Et tout le monde sera content. Je n'aime pas la violence de base.
Eos ne répondis pas tout de suite, occupé à s'étirer en soupirant, hésitant entre un rire hilare et un coup dans la gueule de Zayn. Il finit par se tourner vers moi et sortir quelque chose de sa poche. Des écouteurs.
— D'accord. Mais attends.
Il me mit les écouteurs sans fil dans les oreilles, et nous échangeons un bref regard que je ne saurais décrire. Ensuite, tout se passe très vite.
Il m'emmène de force dans la deuxième pièce du studio, les toilettes. Il croisa mon regard tandis que sa main se posa sur ma tête. Un geste qu'il faisait souvent, avant.
Et en un court instant, je me retrouve enfermée comme une idiote, la main sur la poignée.
— Eos, je te jure que...
— Aie du respect pour mon ego et n'enlève pas ces écouteurs, fit-il derrière la porte. La vie n'est pas un long fleuve tranquille.
La gorge nouée, je l'entends s'éloigner de la porte. L'instant d'après, Skyfall de Adele, rugit dans mes oreilles, le volume à fond. C'est ma chanson préférée.
Malgré tout, je ne retire pas les écouteurs. Pas seulement parce qu'il me l'a demandé, mais aussi parce je ne veux pas moi-même entendre ce qui allait suivre.
Il venait vraiment d'utiliser ma propre phrase contre moi. Mauvais joueur.
Je tentai de garder mon calme, de faire comme si ça ne m'atteignait pas. Mais ça m'angoisse tant que commence à faire les cents pas le long des cabines, le cœur battant à tout rompre.
Je déteste ce qui se passe. Je déteste ne rien pouvoir faire. Je déteste que ce soit lui mon télépathe et je déteste qu'il m'ait enfermée. Je déteste le fait d'avoir vu Zayn comme un homme innocent.
Je devrais m'en foutre, mais je n'ai jamais détesté Eos avant ces derniers jours. On avait tout simplement grandi ensemble. Et s'il faisait tout ça, c'est parce qu'il avait une raison. Mais il préférait me torturer mentalement plutôt que de se justifier.
Quant à Zayn, je ne le comprenais pas non plus. Il semblait du genre à ne pas s'attirer de problèmes, à faire ce qu'on lui demandait. Mais qu'il ne soit pas du genre violent avant Eos et toute cette histoire me titillait.
Quelque chose clochait. Comment pouvait-il dire du bien d'eux tout en semblant être aussi inoffensif et loin des disputes ?
Eos !
La musique me déconcentra, mais têtue, je m'époumonai à tenter de lui faire parvenir mes pensées. Son bouclier n'était pas dressé, mais des sons dérangeants et faibles murmuraient dans mon esprit.
Ce devait être la douleur qui se manifestait à chaque coup qu'il se prenait. Et il la cachait grâce à la musique qui embrouillait ce que je pouvais percevoir. Je grimaçais en devinant qu'il l'avait prévu en quelques secondes.
Réponds ! Eos. Bouge...Bouge.
Le temps commençait à paraitre long, et je sentais la colère monter en moi. Incontrôlable. Quand la musique prit fin dans mes oreilles, je me rendis compte qu'aucun bruit ne se faisait entendre de l'autre côté.
Jetant violemment les écouteurs au sol, je fis un pas en arrière avant d'enfoncer la porte d'un coup de pied violent, entendant au même moment un "désolé" de la part de Zayn. Ma colère s'étant diffusé dans mes membres, la porte s'ouvrit en claquant bruyamment contre le mur, me libérant de cette mini prison.
En sang. Il était en sang. Tout comme les poings de Zayn. Celui-ci était occupé à prendre Eos en photo, mais il ne souriait pas pour autant.
A genoux, les cuisses légèrement écartées, Eos avait renversé sa tête en arrière, sa respiration douloureuse et saccadée. Le sang coulait le long de son visage et de son cou mais aussi de ses bras.
Des traces de sang au sol montraient que la violence émise avait fait gicler le sang s'échappant de son corps.
Lui : Si j'ai pu le laisser faire, c'est parce que je sais.
Je résiste à l'envie de m'accroupir près de lui, et garde les yeux rivés sur Zayn, le souffle court de panique.
Tous mes muscles se contractaient, à l'affût.
Tu sais quoi ?
Lui : Que tu ne partiras pas, cette fois.
Mon cœur se resserra a l'entente de sa réponse. Il avait toujours eu confiance en moi. Et moi, j'étais partie. Mais il continuait de me dévouer cette même confiance. Il venait de me l'avouer. Comme s'il tentait de me montrer à quel point il était déterminé et sûr de lui. Mais de quoi ?
Pourtant, il avait raison. Je ne partirai pas, cette fois. Car ma décision avait déjà été prise.
Je vais te sonder, Eos Hunt. Et je saurais tout de toi, comme avant.
Je vais te faire face comme tu le désires, à tel point que c'est toi qui vas en être effrayé.
Même s'il m'énervait et que je persistais à vouloir me défendre seule, il ne pouvait pas fermer les yeux sur Zayn et le fait que j'étais en danger avec lui. Et puis, je n'aimais pas être redevable, autant payer ma dette tout de suite.
— Pourquoi tu voulais faire ce shooting ? Questionnai-je Zayn.
Il me fallut rassembler toute la volonté du monde pour ne pas me jeter sur lui. La phrase d'Eos retentissait dans mon esprit comme une malédiction. Rire pour cacher mes émotions, ou pleurer nerveusement ?
Aucun. Je n'ai pas le droit.
Il rangea son téléphone dans sa poche et posa son regard sur moi. Vert et perdu. Qu'est ce que cela voulait dire ?
Je me positionnai entre les deux hommes, mon regard suivant le moindre mouvement venant de la part de ma cible.
— Je voulais te parler. Pourquoi rester avec un mec qui veut te tuer ? J'ai envie de comprendre. Alors explique moi.
Néanmoins, il n'obtient qu'un silence de ma part.
Parce qu'il me retrouvera si je fuis. Parce que j'ai décidé de changer. Parce que rien ne me garantit que tu ne t'en prendras pas à lui de nouveau. Parce qu'il est ma faiblesse, et que je fais tout pour les faire disparaitre.
— Pourquoi vous avez réagi comme ça, au bar ? Je ne comprends pas...Pourquoi vous étiez si effrayés ? Détendez-vous.
Eos lâcha un faible rire en se relevant difficilement, la main sur sa cote. Au même moment, je fus prise de légers vertiges et ma vue sembla se diviser en deux. Mais je fis de mon mieux pour ne rien laisser paraitre. Pas maintenant.
J'aurais l'air con si je m'évanouis au milieu des deux comme une crêpe.
— Un guet-apens. Allez, on y va, souffla Eos en titubant.
Je regardai Zayn avec une expression de dégout, avant de me tourner vers Dixon.
— Si Zayn te fait quoi que ce soit, dis-le-moi.
Celui-ci n'osa pas hocher la tête, mais la baissa facilement, fixant le sol.
En passant devant Zayn, j'approchai mes lèvres des siennes en relevant son menton, et susurra d'une voix suave :
— Cours toujours.
Arrivés dehors, je ne pus m'empêcher de constater les blessures d'Eos en ignorant son regard malicieux et son souffle court.
Le haut de la joue, l'arcane et la lèvre fendue. Supplément œil au beurre noir. En clair, son visage était un mélange de rouge et de violet.
— Il a une frappe de fille, souffla Eos. Viens.
Je le suivis tandis qu'il marchait en grimaçant vers une moto. La blanche, celle de Zayn.
— Quelle bonne idée.
— C'est bon, c'est un emprunt, fit Eos nonchalamment.
— Je refuse, t'es déjà assez cassé comme ça, s'il recommence, y'aura plus d'histoire de dix-huit qui porte chance.
Je tournai les talons pour appeler un taxi, mais au moment où je pivotai, Eos me retint par le poignet pour me ramener face à lui. Il me souleva par la taille et me déposa sur l'arrière de la moto comme une vulgaire poupée. Il leva sa main droite et me montra un tatouage sur le côté. Un dix-huit romain.
Oh.
— Tu vois, il est toujours avec moi, le dix-huit.
Je déglutis. La culpabilité gagnait du terrain et diable que je détestais ce sentiment. Alors comme ça il était même allé jusqu'à se tatouer mon chiffre porte-bonheur. Et ça ne voulait signifier qu'une chose : je l'avais marqué. Et je comptais pour lui au point que s'il regardait le coté de sa main, il penserait à moi. Quand l'avait-il fait ? En cachette au manoir ? Ou après ?
Le pire, c'était que le fait qu'il soit blessé et qu'il souffre le rendait plus sérieux, moins sarcastique et blagueur. Je me demandais comment il venait de prendre ce qu'il s'était produit. Trouvait-il qu'il avait fait le bon choix ou attendait-il simplement le bon moment pour tuer Zayn ?
Je le regardai attraper le casque et demanda :
— Pourquoi tu ne le tues pas ?
— Mets le casque, je n'en ai pas besoin, ignora-t-il ma question.
Je m'exécutai en lui prenant des mains alors qu'il s'assit à son tour sur la moto, devant moi. Voyant que je ne fis pas le moindre mouvement tandis que le moteur rugit sous nos corps, il lança :
— Accroche toi ou je ferais exprès d'aller vite pour que tu meures.
Je plaçai alors mes mains des deux côtés de la moto, à l'arrière.
— Hunt est content ? grognai-je.
— Je ne te sens pas, là.
A ces mots, il fit exprès de faire piler la moto, freinant brutalement. Le mouvement brusque me fit tomber en avant, sur lui, et mes mains enlacèrent automatiquement sa taille.
Je redoutai une quelconque grimace de douleur de sa part, mais il n'en fit rien.
Le souffle coupé, il démarra en trombe. Le vent devait accentuer la douleur de ses blessures au visage, et pourtant il préférait que ce soit moi qui porte le casque. Sa conduite était maladroite, rapide, pressée.
— Je pensais que tu savais mieux rouler que ça.
— T'évanouir sur la route, c'est un de tes plus grands rêves ?
Alors il avait vu l'apparition de mes vertiges. Il se dépêchait à cause de ça.
— Et si on ne fait rien pour ta brulure, Zayn va prendre ça comme excuse pour redoubler d'efforts.
— Tu as un trop grand cœur pour le tuer direct ? Ironisai-je.
— Il a toute la famille avec lui.
— Et je suis cheffe de gang.
— Rhéa Kei n'a peur de rien, on dirait.
Je resserrai ma prise autour de son ventre tandis qu'il prit un virage.
Sauf de toi.
— Plus maintenant. Toi si ?
Il décida de ne pas me répondre. Et je sus que c'était une réponse.
— Je commande pizza ce soir. Et tu vas en manger une entière sous mes yeux. Je ne penses pas que tu aimerais que je te donne la becquée. A moins que tu préfères l'avion ?
Alors Hunt avait remarqué que je n'avais pas mangé depuis que j'étais chez lui. Super. Il avait toujours été du genre papa poule qui n'assumait pas. Ironique, pour quelqu'un qui n'avait d'empathie pour personne.
— Je paie.
Hors de question qu'il prenne ses grands airs et qu'il affirme prendre soin de moi et me nourrir. Ma santé, mon argent. Et puis vu comment il était blessé, il le méritait.
— Je te l'offres, ce repas, répliqua-t-il.
— Tu ne m'offres rien du tout, je peux et je vais me le payer seule. Et si tu insistes, j'offre le repas à tout le monde.
— Ne crois pas que tu contrôles tout là où tu poses le pied, c'est chez moi, ricana-t-il.
— Laisse-moi rire.
— Je suis un gentleman, nique pas tout, je devrais avoir un diplôme pour ça.
Oh non, l'arrogance de retour.
— Et je suis indépendante, je n'ai pas besoin de toi.
— Tu me brises le cœur, Rhéane.
— Tu me les brises à moi aussi.
Il pouffa et m'envoya un baiser volant dans le rétroviseur. Je fis mine de faire la même chose avant de lui monter mon majeur. Ses yeux se plissèrent, il souriait.
Ma tête me tournait, et mes membres me paraissaient engourdis. Ma prise s'affaiblit autour de sa taille, mais il s'empressa de ramener mes mains sur lui avant qu'elles ne glissent trop.
— Bouge.
Ce simple mot suffit à me donner un faible frisson. C'était comme si toutes nos conversations, et tous nos souvenirs dataient d'hier. Comme si j'étais restée la petite Rhéa fragile et pleurnicheuse. Comme si je n'avais pas évolué.
Je me concentrai de toutes mes forces. Ma vue divisée en deux me donnait envie de vomir, et pourtant toute mon attention était rivée sur mes pensées. Il fallait que je tienne jusqu'à destination.
Lui : Bouge.
Occupe-toi de la route. Et commence pas à envahir mon esprit.
Lui : Et dire que je t'ai lancé mes meilleures phrases de drague sans savoir que c'était toi.
T'es meilleur quand tu la ferme.
Lui : Tu commences à reprendre tes aises comme avant, fais gaffe à ton popotin gamine.
Je prends mes aises partout.
Lui : T'as pas encore visité mon lit.
Je haussai les sourcils dans le rétroviseur.
Ne commence pas.
Lui : Au moins, tu ne t'évanouis pas. On est bientôt arrivés Kei.
Avec ta conduite, c'est un haut le cœur qui va bientôt arriver.
Lui : T'as vu notre tableau aussi ? Un mec complétement cassé qui conduit et un chiffon à l'arrière. Estimes toi heureuse, râleuse. Et évites de me baver dessus, t'as l'air d'une triso là.
Parce que toi t'as l'air de quoi tu crois ? T'es boursouflé, rose et violet. On dirait un Pokémon qui n'a pas réussi à évoluer.
Et il était vrai qu'il n'avait pas évolué.
Lui : Tu l'enlèveras, ce pull, fit-il alors que son sourire s'effaçait.
Et si je veux le garder ?
Lui : Je sais ce que t'essaies de faire.
Faire quoi ? Fis-je innocemment.
Lui : M'emmerder.
Je n'aurais pas utilisé ce mot...
Lui : Tu veux que je te fasse une cicatrice assortie à Chris chéri ? Ce n'est pas cher, comparé aux colliers d'amitié.
T'es vraiment...
Lui : Charmant ? Drôle ? Parfait ?
Lourd.
Il me sourit dans le rétroviseur.
Et si je dis à Lian que c'est moi qui t'ai blessé, il me tuerait ?
Lui : Non, il te déteste mais à peur de toi en même temps. Il me fait rire.
Peur de moi ?
Lui : Oui, Ô grande disciple de Masayuki, ne me faites pas de mal.
Une pointe de fierté surgit. Alors comme ça, il savait.
Pas toi ?
Lui : Et puis quoi encore ? C'est comme me demander si j'ai peur des donuts.
Alors là je vais t'en faire bouffer des donuts.
Lui : C'est le seul exemple qui m'est venu.
Mais tant mieux, plus tu me sous estimeras, mieux je te vaincrais.
Lui : Rhéane, j'ai été créé pour être plus fort que toi.
Le fait qu'il utilisait le verbe créer pour se définir le rendait inhumain. Et c'était surement comme ça qu'il se considérait, au fond de lui. Voilà pourquoi je l'avais poussé à trouver une passion. Il faisait allusion au fait qu'il avait quasiment été élevé pour me protéger.
Et même s'il n'avait pas tort, j'étais persuadée de pouvoir gagner un affrontement contre lui. J'avais évolué en très peu de temps. Liam m'avait enseigné le karaté et Connor la boxe. Mais ce qu'Eos ne savait pas, c'était qu'à chaque fois qu'il s'était entrainé et que je l'avais regardé, j'avais mémorisé. Chaque mouvement et chaque coup. Chaque angle et chaque technique.
Et le soir, en cachette, je m'étais forcée à les répéter, encore et encore. Au détriment de la nuit qui tombait, de mes courbatures, de ma fatigue et de ma sueur. Parce que voir Eos souffrir autant juste pour me protéger moi, me tuait à petit feu. Parce que le voir, sous mes yeux, suer, saigner et cracher du sang alors que je me contentai de l'observer me rongeait de l'intérieur.
Je voulais l'aider. Je voulais être capable de me défendre. Je voulais lui ôter ce poids des épaules et lui prouver qu'il n'avait pas à s'inquiéter. Et j'avais réussi à me forger. Grace à lui.
Est-ce que Lian est plus fort que toi ?
Lui : Disons qu'il a son propre style de combat. Mais il a travaillé autant que moi. Alors on est à égalité. Il y a de véritables monstres autour de toi, Kei.
Il ne m'appelait plus gamine. Il avait opté pour mon nom de famille. Avait-il enfin décidé pour de bon de me voir comme une femme ?
Alors comme ça, Lian avait travaillé autant que Eos. Sachant que celui-ci avait passé toute son enfance à se peaufiner. Impressionnant, je devais l'admettre. Mais venant de sa part, j'aurais dû m'en douter.
J'avais cerné son personnage dès que mes yeux s'étaient posés sur lui.
Ils devraient apprendre à reconnaitre leurs semblables. Lian y est presque, lui. Mais il ne peut pas l'imaginer. Et je vais me faire un plaisir de lui montrer.
Il croisa mon regard dans le rétroviseur. Il me sous-estimait. Encore.
Prépare-toi, Hunt. Les monstres ne sont pas tous du genre à se dévoiler en un coup.
Il fit son fameux sourire en coin. Amusé.
Lui : Ça fait longtemps que je suis prêt.
Peu de temps après, Il se gara devant chez lui. Le grand espace de verdure devant sa maison était gigantesque, la maison en elle-même étant beaucoup plus éloignée derrière. Si elle paraissait affreusement petite et anodine de l'extérieur, ce n'était qu'un trompe-l'œil.
Les pierres noires réfléchissaient faiblement la lumière et les nombreuses grandes baies-vitrées lui donnaient un petit côté moderne et luxueux. La pelouse étant parfaitement taillée autant que les petits buissons qui l'encadraient, on pourrait croire que c'était une maison appartenant a un PDG égocentrique et maniaque.
Raté. Il s'agit d'un espion-mercenaire qui adore foutre le bordel et prendre son temps pour tuer.
Lui : Je n'aurais pas dit mieux.
Merde. Je coupai court a la communication en quelques secondes, refusant de croiser son regard. Je me concentrai et dressa mon bouclier, empêchant toute entrée intrusive dans ma tête. Il ricana derrière moi sans se faire prier.
Un petit garçon à vélo passa près de nous, un casque trop grand sur sa petite tête. Il tomba soudainement, ayant mal contrôlé son guidon de ses petites mains maladroites et hésitantes.
— Je te rassures, tu ne tomberas pas plus bas, lança Eos en descendant de la moto après moi.
Je lui fis les gros yeux, et enleva mon casque que je lui jetai dans les mains avant de me précipiter pour aider l'enfant à se relever.
— Hé, hé, calme-toi. Tu n'as rien. Ne pleure pas.
Je sentis le regard d'Eos dans mon dos, mais n'en prit pas compte. Enfin, jusqu'à ce que ses pas se rapprochèrent et qu'il m'obligea à me redresser, ses mains sur ma taille.
Oui. Sur ma taille.
Tout mon corps se tendit, traversé d'une décharge électrique, en réponse à son contact sur le sweat de Zayn. Voilà. Il était comme ça, Eos. Il détestait s'exprimer, parler de ses ressentis. En revanche, il avait toujours été du genre tactile.
Tout en sachant que moi, je n'aimais pas ça.
Tout pour m'emmerder.
— C'est bon, bonhomme ? Allez, va-t'en maintenant. Cette madame a besoin de se reposer.
Il reprit d'une voix tranchante, impatient en voyant que l'enfant continuait de pleurer :
— T'es pas mort, que je sache.
Le garçon, les yeux rougis par ses pleurs récents et les joues rouges, jeta un regard horrifié à Eos. Et d'une voix renfrognée, il lança :
— Toi, t'es méchant. Tu ne mérites pas de dessert.
— Tu sais ce que je vais avoir comme dessert, si tu ne t'en vas pas tout de suite ? Ton petit...
Je rejetai la tête en arrière, percutant le menton d'Eos. Il relâcha ma taille et je m'écartai.
— Quelle sauvage !
Si tu ne la fermes pas, je te promets que je vais t'éventrer, pensai-je sans me retourner, laissant une brèche dans mon bouclier pour lui faire passer le message.
Je me contentai d'adresser un sourire au petit garçon, le regardant s'éloigner après avoir raté deux fois son départ. Par la suite, je pris la direction de la porte d'entrée, et vis le sourire d'Eos du coin de l'œil, amusé. Il me suivit de près.
— Comment peux-tu parler comme ça a un enfant ? rouspétai-je, en ouvrant la porte.
— J'ai pas le temps de m'occuper de deux enfants à la fois.
Je levai les yeux au ciel. En les rabaissant, je me retrouvai nez à nez avec Dan. Son regard fut instantanément soulagé, et il s'empêcha de m'enserrer dans ses bras en voyant Eos. Il ne s'aventura pas à poser la moindre question sur les blessures de ce dernier.
Je forçai le passage, vexée, et entra dans le salon. Ils avaient préféré rester. Quels imbéciles.
Chris apparut à son tour, et son regard se fit plus dur lorsqu'il croisa celui d'Eos, rieur. Alors, j'éclatai.
— Je vous préviens, vous avez décidé de rester, vous avez décidé d'être prêts à mourir, à souffrir ou je...
Eos partit d'un rire de bon cœur, me coupant dans mon élan de remontrance. Il referma la porte à clé derrière lui avant de fourrer les mains dans ses poches avec une grimace de douleur. Rire lui faisait mal.
Ris bien, Hunt.
— Ils allaient forcément revenir. Le contrat est signé de leur sang.
— De leur sang ? Mais t'es taré ?
— T'emportes pas pour si peu.
Oh. Je vais vriller. Très, très vite.
— Rhéa...chuchota Dan.
Malgré mon mal de crane et mon sentiment de vertige, mon sang bouillonnait dans mes veines. Ce fut l'effet d'une claque qui réveillât tous mes sens. C'est bon, j'ai plus froid.
Je retirai mon sweat et le jeta à la figure d'Eos sans un regard. Lian arriva au même moment, et alors que je croisai son regard, il comprit qu'il était dans la merde.
— Affronte-moi.
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Je commence à vraiment adorer les interactions entre Eos et Rhéa, on sent qu'ils sont habitués à l'autre, et qu'ils se parlent de la même façon que dans les flash-back !
J'espère que vous allez bien et que ce chapitre vous plaira autant qu'à moi !
Kiss. 💋
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