5. Retour au collège
La nuit dernière s'était terminée sans autre accoup pour Yoshida. Il avait dit au revoir à sa camarade, sans trop d'animosité, puis il était allé se coucher, faisant table rase, sur le moment, de tout son tourment.
Mais l'ignorer n'était que le mettre sous un tapis, et le voir ressurgir décuplé sous peu. Le lundi même, dès le réveil, le jeune collégien qui se préparait pour les cours était pour le moins déboussolé, mais faisait mine de rien. Après tout, sa béatitude, quand elle était, n'était jamais trop discernable sur son visage non plus.
C'est en route pour le collège, et notamment lors de la montée de cette foutue colline sur laquelle la classe E était jonchée, que tout se corsa considérablement. Aujourd'hui, il aurait à voir Takuya, et sans qu'il s'en rende compte, ça lui donnait une sorte de tournis.
"Alors, salut Taisei!" initia le susnommé, sourire aux lèvres. "Ça va? Tu t'es pas trop épuisé sur la piste avant-avant-hier soir?"
Et voilà que ça lui revenait en pleine face, d'avoir fait une faveur à Nakamura. Ça s'ébruiterait sûrement, et, de fil en aiguille, qui sait ce qui finira par se propager au rayon potins...
Sans s'en rendre compte, Taisei était devenu sec et rapide en termes de réponses, malgré que ce soit à l'égard de son meilleur ami.
"Tu m'as même pas dit tes plans! T'imagines?"
"J'imagine, oui, car je l'ai fait, mais y'a rien à dire dessus."
"Mouais, mais ça aurait été marrant de débriefer. T'es même pas passé par le restau' du week-end."
"J'ai rien à dire dessus car y'a rien à dire dessus."
"Vraiment? Tu ramènes Nakamura sur ton terrain en un coup de vent, passe la nuit à traîner avec elle, et je suis le dernier au courant? Ça rime à quoi?"
"Ça veut rien dire, à part que t'extrapole des faits. Sérieux, tu formules tout n'importe comment, tu piges rien."
"Je pigerai peut être mieux si j'avais toute l'histoire."
"Je t'ai déjà dit," s'en alla conclure Taisei, "qu'il n'y a pas d'histoire. Tu te montes la tête pour r."
"T'es gavant quand tu t'y mets."
La pause déj' arriva, et la tension entre les deux s'était entretenue par une non communication, pas si notable car ils sont des personnages secondaires de l'anime.
La tête de Taisei, et ce durant toute la journée du lundi, eut l'air d'aller à toute berzingue. Il se sentait bouillonnant, pensif jusqu'au bout de ses nerfs, et clairement à fleur de peau. Pas les meilleures conditions d'études, donc. La compréhension de la trigonométrie - ou de ses conflits intérieurs - n'était pas optimale, pour peu dire.
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Être dans la remise était son échappatoire, parfois. Une sorte de rempart, même, pour assortir ses émotions comme il assortissait les équipements mécaniques qu'on lui avait chargé de ranger. Y'a pas à dire. Takaoka avait le mérite d'être organisée, et d'avoir toujours des tâches à proposer à ses compères et consœurs - pour Yoshida, c'était une aubaine pour se vider la tête - et qu'on lui foute la paix.
Dite paix, à l'abri des regards et ponctués seulement et cliquetis de la ferraille des outils et des pas sur le plancher, fut de courte durée quand Muramatsu fit son entrée.
"Bon. On rentre ensemble, ou bien?"
"Je suis occupé."
"Je vois ça. Mais bon, t'as vraiment le chic d'éviter les questions qu'on te pose."
"Et ça te soule, j'imagine?"
"Même pas. Je suis juste confus. Tu me fous un silence radio depuis vendredi soir, n'me dit mot du week-end, et fais des escapades avec une camarade."
"T'es jaloux?"
"T'as toujours pas répondu à ma question de base. Mais car moi je suis du genre à répondre, pour te dire en toute vérité? Je m'en fous de ce que tu branles avec Rio."
Ça pinça Taisei plus qu'il ne l'eut imaginer. A tel point qu'il rata une respiration en plein cours, avant de reprendre ses esprits, mais sans être moins contrarié, loin de là.
"J'aimerai juste savoir quelle mouche t'as piqué pour que t'agisses comme ça depuis aujourd'hui. C'est comme si t'étais retombé dans tes devants de poser un mur entre toi et moi... Et c'est gavant."
La dernière phrase s'exprima avec un soupir, et une sorte d'inquiétude, qui se retranscrit jusqu'à Taisei, pour qui ses propres faiblesses en communications l'avait mené jusqu'à cette engueulade-là. Ça le frustrait. Il savait pas quoi dire, car entre ce qu'il pensait, et ce qu'il disait, il y avait un gouffre qui semblait être insurmontable.
Bon sang, ça l'enrageait encore plus, quel cercle vicieux, quelle idée d'écouter ce que cette blondasse avait à dire, le statut quo ne serait-ce que de jeudi dernier serait préférable...
"Je suis là pour toi, Seisei. Tu le sais, non?"
Takuya s'était accroupi à côté de son ami complètement recroquevillé sur la boîte à outils, et avait posé sa main sur son épaule. Il avait appris son fonctionnement à la lettre, après tout. C'était devenu une seconde nature d'appréhender et gérer ses surmenages, et de le comprendre.
Il savait que c'était le plus beau cadeau qu'il pouvait faire à un Yoshida qui peinait tellement à être vu pour celui qu'il était vraiment, et, dans une honnêteté qu'il n'avait jamais même envisagé d'analyser, ça lui procurait un plaisir monstre aussi. Connaître Yoshida sur le bout des doigts, littéralement à l'instant T car il caressait le tissu de son gilet, c'était une chose qu'il aimait vraiment, vraiment faire.
Taisei regardait son ami, un peu ébahi, mais sorti de son état second où rien ne faisait sens, et surtout pas lui-même. Il tenta à plusieurs reprises de bredouiller ça ou ça, mais il était vaincu par une gorge qui se bloquait.
"Je... Je... Désolé. Vraiment, je..."
"Je sais que c'est dur. Je suis là pour toi. Je te le dis en boucle."
"Je suis là pour toi aussi, mince... Désolé de tout... Ça!" il gesticulait en pointant ses mains vers toute sa personne, de la tête aux pieds. Enfin, vu la position basse dans laquelle il se construisait sa propre scoliose, c'était de la tête, aux genoux fléchis, aux pieds.
"Pas la peine. Allez, debout, haut les cœurs." souria Muramatsu avant de se remettre sur pieds après avoir entrepris de faire de même pour son ami. Littéralement, pour l'instant, car il lui tendit les mains pour qu'il se redresse.
"Merci..."
"Tu viens manger? Je te jure, j'ai assez saoulé mon père pour qu'il achète un meilleur préparatif à bouillons, ce sera moins déglingué qu'auparavant."
"Tu me dis ça depuis des lustres, l'évolution est lente."
"Eh, one step at a time, comme on dit."
"Oh non, pas toi! Tu vas pas te mettre aux anglicismes aussi?"
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Voici le chapitre cinq!
J'aime beaucoup écrire Muramatsu et Yoshida, leur amitié est basée sur une confiance et une connaissance tellement complète de l'autre, c'est génial. J'espère que ça vous plait toujours, n'hésitez pas à réagir en commentaires et voter :) A la semaine prochaine!
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