( MARIGOLD ✶ Minehead. )

‎ ‎‎ ‎‎ ‎‎ ‎‎ ‎Voilà de retour la symphonie du vent. Il avait chassé les nuages dans le ciel et les dernières gouttes sur le sol. Il crie maintenant dans la plomberie ㅡ c'est là sa symphonie. Un orgue construit rien que pour lui.

ㅡ Et vous étiez ici, quand vous les avez vu ?

ㅡ Oui. Juste là, derrière ma fenêtre. ( Sevrin tend son doigt noueux vers les carreau et Marigold boit une gorgée de thé. Elle compte sur Remus pour aller voir ). Allez-y, jeune homme, vous verrez. D'ici, on a une vue imprenable sur la plage.

Sevrin Vos disait vrai. Son nom avait glissé de bouche à oreille, passant parfois sur un morceau de parchemin déchiré à la hâte et transmis à une main de confiance ; le voilà enfin. Il était vieux mais pas sénile, et Marigold se dit alors qu'ils avaient gagné un peu de temps ( la montée vers sa petite maison à flanc de colline ne s'effectuait que par un chemin de terre. Les graviers y étaient friands de farces et ravis de pouvoir tordre une cheville à l'occasion. )

ㅡ Et à quoi ressemblaient-ils, Monsieur Vos ? Marigold demande, alors Sevrin la regarde comme si elle était la mort en personne.

ㅡ Ils étaient deux, puis trois. Ils sont apparus sur le sable comme des nuages d'orage, de l'eau jusqu'aux chevilles. Une grande dame riait de son camarade, parce qu'il avait les pieds mouillés et pestait. Un autre est apparu dans un tourbillon noir, et alors, ils se sont tous envolés. Transformés en brume sombre, mais ils n'ont laissé aucune trace dans le ciel. Je les ai vu passer au-dessus de ma maison.

ㅡ Ils sont apparus de nulle part ?

ㅡ Oui, comme vous hier soir. Je vous ai vu, aussi. J'étais derrière ma fenêtre.

( Regard échangé entre les personnages principaux ; ils se méfieront la prochaine fois. )

ㅡ Oh, ne vous en faîtes pas, je ne le dirais à personne. Je suis un cracmol, vous savez ? Pas de pouvoirs, alors je vis ici. C'est pas plus mal... Au moins, les moldus ne me jugent pas. Ça ne vous pose pas de problème, à vous, que je sois un cracmol ?

ㅡ Non Monsieur.

ㅡ Ma grand-mère est une cracmol. Elle s'est mariée avec un sorcier, c'est son amour de jeunesse. C'est une très bonne personne.

Voilà Marigold qui sourit ( on ne lui donne que rarement l'occasion de parler de sa grand-mère. C'est bien dommage! La magie de Geneviève Rhett se trouve pourtant au bout de ses doigts ㅡ c'est ce que sa famille disait toujours. Elle était une cuisinière hors pair ).

ㅡ Alors vous savez sûrement ce que l'on pense de nous dans la communauté magique! Oh, et par les temps qui courent... Je ne vous en parle pas! ( Sevrin Vos avait malheureusement raison. Il y a bien des mois déjà que Geneviève et le grand-père de Marigold avaient fui l'Angleterre. Le reste de la famille a fini par les rejoindre en France ).

ㅡ Monsieur Vos, auriez-vous plus de choses à nous dire ? Sur les mangemorts que vous avez vu ?

ㅡ Laissez-moi réfléchir... Non, ils étaient trois. Une femme aux cheveux presque frisés, noirs comme la nuit. Les hommes, ils avaient l'air fatigué. Je le sais parce qu'ils étaient voutés, penchés en avant comme s'ils portaient le poids du monde sur leurs épaules. Pas très costauds, non plus. C'est tout ce dont je me souviens! Ils sont passés par-dessus ma maison et sont restés dans la forêt quelques temps... Je ne les ai jamais vu repartir.

ㅡ Merci. On va y aller, on ne veut pas vous déranger.

ㅡ Vous savez, un vieil homme comme moi a besoin de compagnie. M'enfin, je vous raccompagne jusqu'à la porte. Profitez du beau temps, les jeunes, c'est rare en cette saison.

( Remus ne parlait pas. Dans le ciel bleu, on apercevait l'ombre de la pleine lune qui menaçait ). Ils dirent au revoir, les deux sorciers ; et si Marigold attrapa la main de Remus du bout des doigts, ce n'était que parce qu'elle avait peur de tomber. Une fiole de potion sommeillait dans son sac, sous le lit qu'ils partageaient à l'auberge, il n'avait qu'à en boire la totalité ( c'était un sacrifice que de voir ses amis à son service, mais il le ferait ).

ㅡ Pourquoi l'Ordre t'as-t-il envoyé ? Ils savent... dans quelle période du mois nous sommes.

ㅡ Certains ne savent pas. Certains ont oublié. C'est facile d'oublier quand on n'est pas concerné. Je ne leur en veux pas, t'en fais pas. T'as pas à leur en vouloir non plus.

ㅡ Je leur en veux. On a grandi ensemble, ils te connaissent. James, Lily, Sirius et Peter! Même Emmeline et Alice... Elles étaient là, à Poudlard.

ㅡ Ils étaient tous à Poudlard.

ㅡ Oui, mais ce sont elles qui prenaient les cours pour moi quand je restais à l'infirmerie avec toi. Elles savent pour ta condition.

ㅡ Alice n'a pas la tête à ça, avec Neville.

Marigold se mord la lèvre sous son écharpe, elle a oublié. C'est drôle, ce que la colère peut faire ( Alice est sa meilleure amie. Elle n'a jamais vu le bébé. )

ㅡ Et Emmeline ?

ㅡ Emmeline est triste, Goldie. Tu lui manques, mais elle n'ose pas t'appeler. Elle a peur que les membres de l'Ordre lui tournent le dos.

Aucune morsure involontaire, cette fois. La Emmeline d'autrefois n'en aurait que faire de l'avis des autres. Ils ne sont même pas ses amis, pas vraiment. Marigold ne peut rien dire ; elle est coupable et rongée par la colère ( elle tient ça de sa mère. Elle coule dans leur sang depuis plusieurs générations ㅡ‎ ‎pas étonnant que Silas ait choisi son camp. )

ㅡ Si c'est moi qui l'appelle, elle décrochera et alors la finalité sera la même ? Je ne comprend pas.

Remus hausse les épaules ( il ne comprend peut-être pas non plus ).

( BENJY ✶ Bureau des Aurors. )

La lettre était là, posée sur son bureau. Benjy Fenwick ne l'avait lue qu'une fois, chaque plein et délié s'encrant dans son esprit ㅡ et il l'avait laissée là.

ㅡ Monsieur... C'est un courrier privé. ( Le jeune coursier n'avait pas eu le temps de repartir. Attendait-il une réponse à délivrer ? Il y a longtemps que le courrier n'était plus délivré par le service de poste volante, c'est bien dommage. Les hiboux parlent moins que ce garçon ).

ㅡ Eh bien dans ce cas, tâchez de ne pas le lire derrière mon dos.

ㅡ Oui, Monsieur.

Le garçon prit la fuite, dans le sens inverse ( car voyez-vous, Benjy Fenwick a à faire. Il vient de quitter son box au Bureau des Aurors, abandonnant la lettre sur un tas de papiers et au regard des charognards assez malins pour tendre l'oreille ; comprenez, ses collègues ).
Si par malheur, le coursier venait à croiser Benjy Fenwick devant l'ascenseur... Le voilà. Tant pis! Il prendra l'escalier ( pour rien au monde l'adolescent ne voulait se retrouver dans une cage avec lui ).

C'était très bien ainsi. Benjy n'avait même pas eu à user d'un regard agacé ( en tant que Directeur Adjoint du Bureau... Il maîtrisait ceux-là à la perfection ). Non, il a mieux à faire ( il appuie sur un bouton, saisit une poignée. S'il a de la chance, le trajet sera court ; et aucun sorcier ne viendra l'interrompre avant qu'il n'arrive au Département des Mystères, sept étages plus bas ).

ㅡ Fenwick.

ㅡ Rookwood.

ㅡ Beau temps aujourd'hui, vous ne trouvez pas ? ( Oh, ce n'est pas de la politesse que voilà. Augustus s'amuse juste ).

ㅡ Si vous le dîtes.

ㅡ Il semblerait que nous allions au même endroit.

Benjy hoche la tête, une seule et brève fois. L'ascenseur s'arrête brusquement ; tout le monde descend ( ils ne sont que deux et ne cessent de se toiser, en réalité ). Fenwick est pressé, fait semblant de ne pas l'être... Voyez-vous, sa fonction d'Auror est nouée autour de son cou comme une main gantée ( il ne s'en détachera jamais, ce n'est pas plus mal ㅡ il sait qu'Augustus et lui ne se battent pas du même côté de cette Guerre ).

Alastor Maugrey est quelque part, derrière les pierres lisses qui ondulent sur les murs. Le conseil du Magenmagot s'est réuni, Fol Œil a capturé un Mangemort. Rosier ( Benjy le sait, il a lu le dossier ). Aujourd'hui, il s'en excusera plus tard, mais il doit les interrompre.

ㅡ Alastor ? Un instant, s'il vous plaît. J'ai à vous parler.

ㅡ De quoi s'agit-il, Fenwick ? Le Conseil a commencé depuis une bonne heure, les informations que Rosier s'apprêtait à nous révéler...

ㅡ Il y a eu une découverte, Alastor. Deux Moldues ont trouvé le corps de Camille Bamber à Gardenstown.

( Ce n'est pas la fin d'un acte. Ça pourrait tout aussi bien l'être. )