CHAPITRE 49

Adrian se réveilla en sursaut.

Son premier réflexe fut de se redresser et porter une main tremblante à ses yeux, lorsqu'une tornade brune se jeta dans ses bras. Le parfum de Holy l'enveloppa dans un cocon rassurant alors qu'il se serrait de toutes ses forces contre lui. Adrian lui rendit aussitôt son étreinte, paniqué par les sanglots qui le secouaient tout entier.

Son loup était complètement catastrophé. Holy ! Ne pleures pas ! Ne pleures pas !

Ce dernier enfouit son visage dans leur cou en pleurant de plus belle. Il s'accrocha presque violemment à eux, comme si sa vie en dépendait. Adrian lui caressa les cheveux d'un geste maladroit, mais tendre, dans l'espoir de le calmer et le rassurer.

— C'est fini, mon ange, murmura-t-il. Je suis là. C'est terminé, d'accord ? C'est fini...

Holy refusa cependant de le lâcher et encore moins de sécher ses larmes. Il continuait de sangloter, tout en balbutiant des phrases sans queue ni tête. Adrian comprit cependant les mots "mort", "vivant", "mon amour" et "merci, mon dieu".

Il voulut le serrer plus fort dans ses bras, mais une nouvelle tornade se jeta contre lui et des cheveux blonds lui fouettèrent le visage. La seconde suivante, des bras puissants entourèrent également ses épaules pour une étreinte brutale.

Adrian se retrouva coincé en sandwich entre Holy, Ava et Isaïah.

Ils restèrent ainsi pendant de longues minutes. Aucun des trois ne semblait prêt à le lâcher. Adrian ne savait pas comment réagir. Son loup, lui, s'agitait d'impatience. Seul Holy avait le droit d'envahir leur espace personnel aussi longtemps.

Il grogna de soulagement lorsqu'Ava et Isaïah finirent par s'écarter.

La première pleurait sans retenue, tandis que le second avait le regard humide. Ils semblaient aussi bouleversés que Holy. C'était la première fois depuis très longtemps qu'Adrian voyait ses deux meilleurs amis dans un tel état de détresse. Son cœur se serra et sans même s'en rendre compte, il tendit le bras pour un nouveau câlin collectif.

— Qu'est-ce qui s'est passé ? demanda-t-il lorsqu'ils se séparèrent.

Personne ne lui répondit.

Ava s'installa à son chevet en séchant ses joues. Isaïah se planta près d'eux, les bras croisés. Holy, lui, restait obstinément blotti contre son torse. Adrian continuait de lui caresser les cheveux avec tendresse, lui aussi n'avait pas envie de le lâcher.

Il jeta un bref coup d'œil autour de lui et reconnut sa chambre attitrée chez les Scaveau. Celle qu'il occupait adolescent lorsqu'il venait squatter chez son ami pour échapper à Anthony et plus tard, à son père. Curieusement, penser à ce dernier ne lui arracha aucune nausée ou frisson. Adrian ne ressentait plus aucune peur...

C'EST PARCE QU'ON EST ENFIN LIBRE ! jubila son loup.

Quoi ? Comment ça ?

— Qu'est-ce qui s'est passé ? répéta Adrian, mais toujours aucune réponse de la part de ses deux meilleurs amis et encore moins de la part de Holy.

Adrian le sentit se raidir tout contre lui, alors que l'ambiance devenait soudain tendue. Il voulut resserrer son étreinte rassurante, Holy le repoussa cependant d'un geste doux, mais ferme. Il le fixa un instant sans un mot en lui caressant la joue du bout des doigts. Ses yeux étaient rouges à force de pleurer, mais il semblait enfin calmé.

Sans se soucier d'Ava et Isaïah, il attrapa le visage d'Adrian pour partager un long baiser salé, avant de se lever d'un léger bond. Nooooon ! Holy ! Reste !

— Je vais te chercher à boire et à manger, dit-il en chassant hâtivement ses larmes. Tu dois avaler quelque chose, tu es resté inconscient pendant une semaine.

Une semaine ?!

— Holy, at...

Mais il avait déjà quitté la pièce d'un pas pressé. Comme s'il prenait la fuite.

Adrian bondit hors du lit. Son loup était en panique.

Pourquoi il nous fuit ? On a fait quelque chose de mal ?

Ils voulurent se précipiter à sa suite, mais Isaïah les stoppa dans leur élan :

— Laisse. Holy a vraiment besoin de souffler un peu. La semaine a été horrible...

Adrian n'écoutait cependant pas. Il se figea, ses yeux descendirent lentement sur la main de son ami, fermement posée sur son bras. Pour une raison qu'il ne comprenait foutrement pas, son cerveau bloquait dessus. Le geste était... un ordre ?

Son loup laissa échapper un grondement incrédule.

De quel droit Isaïah osait leur donner un ordre ?

Une brusque vague de rage envahit Adrian et son loup à cette idée. Ils se tournèrent brutalement vers Isaïah pour montrer les crocs, mais surtout pour l'écraser d'un regard impérieux. Contre toute attente, il recula aussitôt d'un pas.

Adrian vit l'appréhension dans ses yeux. Il y vit la peur.

Cela lui fit l'effet d'une douche froide. L'étrange besoin de dominer son meilleur ami, de le soumettre, s'évapora aussi vite qu'il était apparu. Merde, c'était quoi ça ?

— Je... je suis désolé, balbutia Adrian en reculant à son tour.

Bordel ! De quoi tu t'excuses ? On n'a rien fait de mal !

La ferme...

— Je ne sais pas ce qui m'a pris. Je ne voulais pas...

Arrête de t'excuser !

— Non, c'est moi, fit Isaïah.

Il parlait d'un ton neutre, mais Adrian décela une étrange prudence dans sa voix.

— C'est ma faute, je n'aurais pas dû te toucher comme ça... sans ta permission. Et encore moins te dire ce que tu dois faire. Il hésita une fraction de seconde avant d'ajouter, le ton presque révérencieux : désolé, ça ne se reproduira plus.

Adrian en resta coi, il était perdu. Depuis quand Isaïah avait-il besoin de sa permission pour lui attraper le bras ? Pour le tempérer et l'aider à avoir les idées plus claires ?

Il nous a donné un ordre, oui ! rugit son loup.

Tais-toi.

Mais il bouillonnait toujours autant de rage. Limite s'il ne voulait pas qu'Isaïah rampe à leurs pieds pour implorer leur pardon. Adrian poussa un gros soupir, fatigué de ses exigences ridicules. Cet abruti se comportait vraiment bizarrement. Comme s'il était...

Non.

SI !

Adrian secoua la tête et préféra se concentrer sur ses deux meilleurs amis.

— S'il vous plaît, dites-moi ce qui se passe. Je ne comprends rien ! Le combat...

Le combat !

Adrian sursauta. Il toucha à nouveau ses yeux, sidéré qu'ils soient intactes. Comment c'était possible ? L'Alpha les avait crevés... Et sa jambe ! Elle avait été à moitié arrachée durant l'affrontement et pourtant... elle était en parfait état.

Adrian pourrait même courir un marathon s'il le voulait. Il n'avait pas une seule égratignure et il se sentait bien. Très bien. Trop bien même. C'était quoi ce putain de bordel ? Tu sais très bien ce que ça veut dire !

Non. Adrian ne savait pas ce que ça voulait dire.

Ou plutôt, il espérait que ce soit autre chose.

— Comment ça se fait que je sois en un seul morceau ? Que je sois... encore vivant ? L'Alpha... l'Alpha m'a quasiment arraché les yeux et la jambe ! Et pourtant, je suis là et je vais parfaitement bien ! C'est Naomi, pas vrai ? C'est elle qui a fait ça ? Elle m'a soigné ? C'est la seule explication logique... N'est-ce pas ?

Le souffle court, Adrian dévisagea ses deux meilleurs amis tour à tour, les yeux plein d'espoir. Ils se contentèrent cependant d'échanger un bref regard dans un silence prudent. Ils semblaient pris au dépourvu par toutes ses questions.

— Tu t'es soigné tout seul, Adrian, finit par répondre Ava, le ton hésitant.

— N'importe quoi ! protesta ce dernier. C'est impossible de régénérer des blessures aussi graves, même pour un puissant loup-garou ! C'est impossible... impossible !

Putain d'abruti ! Arrête de te voiler la face !

Non.

— Tu sais très bien ce que ça veut dire, répliqua Isaïah à voix basse.

Non !

— C'est impossible ! répéta Adrian en secouant frénétiquement la tête. Vous l'avez vu ! Je n'ai pas tué l'Alpha ! J'ai perdu le combat ! Ce n'est pas possible...

"C'est impossible, c'est impossible" ! le singea méchamment son loup. Arrête ça tout de suite ! Comment oses-tu te montrer aussi pathétique devant nos Betas ?

— LA FERME ! rugit Adrian, hors de lui.

Sa voix grondante explosa dans la chambre comme un coup de tonnerre.

— Adrian, le conjura Ava. Calme-toi... s'il te plaît.

L'ambiance n'avait plus rien à voir avec la séance de câlin collectif, un quart d'heure plus tôt. Adrian ressentait le malaise de ses deux meilleurs amis. Il les sentait inquiets et incertains, il voyait presque leurs cerveaux cogiter dans leurs têtes.

Ava et Isaïah ne savaient clairement pas quelle attitude adopter à son égard. C'était comme si un fossé venait de se creuser entre eux. Le cœur d'Adrian se serra à cette idée.

Il prit de grandes inspirations pour retrouver son calme.

— Écoute... fit Isaïah au bout de plusieurs minutes d'un silence pesant. Je t'assure qu'on ne comprend pas plus que toi ce qui se passe. On ne sait pas comment c'est possible, mais... on l'a tous ressenti aujourd'hui. Et toi aussi, tu le ressens.

— Non ! Je ne ressens rien du tout !

Menteur !

Son loup avait raison. Adrian ne pouvait plus ignorer l'énergie monstrueuse qui pulsait dans chaque cellule de son corps. Il n'avait encore jamais ressenti pareilles sensations, même lorsqu'il était au summum de sa force. Il avait l'impression d'être écrasé par une montagne de puissance brute. C'était à la fois jouissif et terrifiant.

N'importe quoi ! C'est absolument merveilleux.

— Je ne sais pas à quoi tu t'attendais en défiant ton père dans un combat de pleine lune, reprit Isaïah, le ton toujours aussi prudent, Adrian y décela cependant une pointe de fermeté qui fit grogner son loup. Mais tu dois en assumer les conséquences, maintenant. Tu comprends ça, Ad ? C'est toi le nouvel Alpha Suprême.

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