Chapitre 38

— Qu'est-ce que tu fais là ?

Adrian se sentit à la fois soulagé et perplexe en voyant sa sœur sur son palier. Pendant un horrible instant, il avait cru que son père aurait poussé le vice au point de venir le torturer chez lui. Mais ce n'était qu'Ariana... QU'EST-CE QU'ELLE NOUS VEUT ? C'est louche ! Ne la laisse surtout pas entrer ! Pourquoi tu as ouvert la porte, d'ailleurs ?! FERME TOUT DE SUITE !

Son loup avait raison. Et pourtant, Adrian ne pouvait se résoudre à claquer la porte au nez de sa sœur. C'était la première fois qu'elle venait chez lui... Que lui voulait-elle ? Comme d'habitude, son visage était de glace, Adrian n'arrivait pas à deviner le fond de ses pensées. Il ne ressentait cependant aucune hostilité, elle restait juste immobile sur le palier à le dévisager froidement.

Comme d'habitude quoi ! Maintenant, ferme la porte !

— Qu'est-ce que tu fais là, Ariana ? répéta Adrian, sincèrement curieux de connaître la réponse.

MAIS FERME JUSTE LA PORTE, PUTAIN ! hurla son loup, exaspéré.

Adrian l'ignora, trop occupé à guetter la réaction d'Ariana. Celle-ci ne répondit pas. Fidèle à elle-même, elle se contenta de pincer les lèvres et le toiser de bas en haut.

— Comment vas-tu ? demanda-t-elle au bout d'un long moment inconfortable.

— Quoi ?

Adrian était abasourdi. C'était la première fois de toute sa vie qu'Ariana lui posait cette question.

Ne te laisse pas attendrir ! C'est une ruse ! IL NE FAUT SURTOUT PAS LUI FAIRE CONFIANCE ! Son loup avait une fois de plus raison. Merde ! Adrian se maudit. Il avait failli se faire avoir !

Comme si elle avait deviné le fond de sa pensée, Ariana soupira avec agacement.

— Arrête de faire cette tête. Je ne suis pas venue pour te tuer.

— Permets-moi d'en douter après ce qui s'est passé avant-hier, cracha Adrian avec amertume.

— C'était une discussion entre père et toi. Je n'avais pas à m'en mêler, se rebiffa sa sœur.

Cette réponse lâchée d'un ton sec lui fit l'effet d'un couteau en plein cœur.

— Tu te fous de moi ? s'écria Adrian, furieux et blessé. Il me torturait, Ariana ! Et tu n'as rien fait pour m'aider. Tu étais juste là à regarder ! Tu me détestes vraiment à ce point ?!

Sa tirade fut suivie d'un long silence assourdissant. Ariana le dévisageait à nouveau froidement. Elle semblait sérieusement réfléchir à la question. Sa réaction blessa encore plus Adrian.

Putain, Adrian ! Arrête de prendre ça à coeur ! Tu ne dois plus rien espérer d'elle !

La ferme...

— Je ne te déteste pas, finit par répondre Ariana en le fixant droit dans les yeux.

Adrian soutint son regard, dans l'espoir d'y déceler... y déceler quoi exactement ? Qu'espérait-il au juste ? Bien sûr qu'elle le détestait. Il n'avait jamais représenté quoi que ce soit pour sa sœur.

Mais on s'en fout, merde ! ON-S'EN-FOUT !

— Je ne te déteste pas, Adrian, répéta Ariana, comme si elle avait à nouveau lu dans ses pensées. Elle le toisa ensuite un instant, avant de hausser les épaules : tu m'indiffères c'est tout.

Bien sûr.

Sale conne !

— Ravi de l'apprendre, grinça Adrian en se étouffant la petite bulle de déception qui enflait dans sa poitrine. C'est très réconfortant, merci. Qu'est-ce que tu me veux ?

— Arrête de prendre ce ton. Je ne suis pas particulièrement ravie d'être ici, non plus, rétorqua sèchement Ariana. La prochaine fois, réponds au téléphone.

— Et toi, la prochaine fois, envoie un putain de texto au lieu de venir m'emmerder chez moi ! cracha Adrian en choisissant les mots les plus offensants possibles pour sa coincée de sœur.

Cette dernière le fusilla des yeux, Adrian lui rendit son regard avec défi.

Il décida ensuite qu'il en avait marre, que c'était ridicule et qu'il n'avait plus envie de parler. Il s'apprêtait à lui claquer la porte au nez lorsque son portable sonna. C'était peut-être Holy !

Sans plus se soucier d'Ariana, Adrian s'empressa de décrocher, avide d'entendre la voix de son bien-aimé. Il soupira de déception lorsque ce fut celle d'Ava qui résonna à l'autre bout du fil.

— Adrichou ! Comment tu vas ?

— Salut, Ava. Ça va... Je suis parti pour avoir des courbatures pendant quelque temps, mais ça va. Et toi ? Désolé pour la soirée de merde... Mon père ne vous en a pas trop fait baver ? Et les louveteaux ? Comment vont-ils ? Et leurs proches ? Pitié, dis-moi que tout le monde va bien !

Une énorme boule dans la gorge, Adrian s'accrocha à son téléphone, guettant la réponse de son amie avec angoisse. Si quelqu'un avait été blessé par sa faute... CE N'ÉTAIT PAS TA FAUTE !

— Adrian... soupira Ava, son ton était plein de lassitude. Elle semblait très fatiguée. Tu m'avais promis d'arrêter d'être désolé pour tout ! Ce qui s'est passé avant-hier... ce n'était pas ta faute. Tu n'es pas responsable des atrocités de ton père, d'accord ?

Fourre-toi enfin ça dans le crâne, abruti !

— Tes Betas sont un peu secoués, mais ils vont s'en remettre. Ils sont surtout très inquiets pour toi. Les adultes en revanche... c'est compliqué. Ils sont choqués, Adrian. Ils ne savent plus quoi penser. L'Alpha Suprême les a terrorisés. Et te voir en position de faiblesse...

Ava s'interrompit, mais c'était trop tard. La honte et la culpabilité envahirent Adrian, menacèrent de l'étouffer. Il ferma les yeux et dut prendre une longue inspiration pour se calmer.

— Magda et Yann ont réussi à les calmer et les convaincre de ne pas fuir à l'autre bout du pays avec leurs gosses, mais ce n'est que temporaire. Il faudra que tu leur parles, Adrian. Ils ont besoin d'être rassurés et tu es le seul à pouvoir le faire. Toi, ils t'écouteront...

Adrian en doutait sérieusement, mais il préféra ne pas débattre sur la question.

— OK, je m'en occupe demain. Je me sens encore un peu trop patraque ce soir...

— J'imagine... Prends bien soin de toi, d'accord ? Magda t'as préparé un remède qui devrait te remettre d'aplomb en quelques jours. Elle a donné toutes les instructions à ton petit ami...

Les deux derniers mots semblèrent lui arracher la bouche. Les lèvres d'Adrian s'étirèrent en un petit sourire amusé. Il ne résista pas à l'envie de taquiner sa meilleure amie.

— Tu veux parler de mon infirmier sexy ? demanda-t-il d'un ton innocent. Tu n'as aucun souci à te faire, Ava. Holy s'occupe vraiment très bien de moi. C'est un amour.

Ava grommela il ne savait quoi en réponse, ce qui le fit rire. Adrian se sentait un peu plus léger, une fois qu'elle eut raccroché. Parler de Holy, taquiner Ava, c'était comme si tout était normal et que les deux derniers jours n'étaient qu'un simple mauvais rêve.

Reviens sur terre ! Tu as complètement oublié l'ennemi !

Merde !

Sans même s'en rendre compte, Adrian s'était éloigné de la porte pour éviter qu'Ariana n'entende sa conversation avec Ava. Grave erreur ! Sa sœur en avait profité pour se faufiler dans l'appartement et s'installer sur le canapé en attendant qu'il raccroche. Assise sur le bout des fesses, elle fronçait le nez comme si elle était incommodée par une odeur très désagréable.

Adrian resta un instant bouche bée. C'était tellement bizarre de la voir aussi... expressive.

Si c'est pour avoir l'air aussi dégoutée, je préfère de loin le robot ! rétorqua méchamment son loup. Maintenant, VIRE-LA DE NOTRE TANIÈRE TOUT DE SUITE !

L'ordre eut le mérite de lui faire reprendre ses esprits et une bouffée d'agacement envahit Adrian.

— Putain, Ariana ! Personne ne t'a invité à entrer ! aboya-t-il contre sa sœur.

— Langage, Adrian, rétorqua cette dernière d'un ton presque sévère.

— Je suis chez moi, je parle comme je veux ! grogna Adrian, les bras croisés en un geste puéril.

Ils se fusillèrent des yeux pendant plusieurs secondes, Ariana se détourna ensuite pour regarder autour d'elle, jugeant ouvertement les lieux. Elle fronça à nouveau le nez avec dégoût.

— L'odeur du dhampire est partout. Vous habitez ensemble, maintenant ?

QUOI ? Mais de quoi elle se mêle ?!

C'est Holy ! s'écria Adrian, brusquement en rage. Il s'appelle Holy, OK ? Et qu'est-ce que ça peut te foutre qu'on habite ensemble ? Ce n'est vraiment pas tes affaires !

— Bien sûr que si, ce sont mes affaires. Que crois-tu que Père vous fera s'il l'apprenait ?

Le cœur d'Adrian chuta dans sa poitrine, son estomac se tordit et la bile lui monta aux lèvres. Il ravala cependant la terreur qui enserrait soudainement sa gorge et serra les poings.

— Quoi ? Tu vas tout lui rapporter comme un gentil toutou ? cracha-t-il entre ses dents serrées.

Bien envoyé !

La réplique eut le mérite de faire réagir sa sœur.

Adrian ressentit une satisfaction féroce à la vue de son masque de froideur qui se fissurait lentement. Il voulait voir ce putain de masque exploser en mille morceaux.

— Je ne suis pas son toutou, siffla-t-elle en plissant les yeux.

— Ah oui ? Mademoiselle je-le-suis-partout-comme-son-ombre !

Ariana bondit sur ses pieds, désormais hors d'elle.

— Tais-toi, Adrian ! Tu ne sais pas du tout de quoi tu parles !

— Bien sûr que si ! Tu es toujours collée à ses basques, à le suivre partout et valider toutes ses monstruosités ! Tu prends tellement ton pied à le regarder me torturer, c'est ça ?

— Arrête de faire ta pauvre petite victime éplorée, répliqua sa sœur, le ton cinglant. Tu ne peux t'en prendre qu'à toi-même ! Pourquoi tu n'arrêtes pas de le désobéir ?

Le désobéir ? répéta Adrian, incrédule. Non, mais tu t'entends parler ? On n'est plus des gamins, Ariana ! On ne lui doit plus une obéissance aveugle ! Je ne suis plus un gamin et j'estime avoir le droit de vivre ma vie ! C'est lui qui a un putain de problème pas moi !

Bien dit !

— Tout ce que Père veut, c'est faire de toi le meilleur Alpha Suprême possible, rétorqua Ariana, la voix tremblante. Tu devrais être honoré qu'il t'accorde autant d'attention malgré toutes tes provocations ridicules. Tu devrais être honoré qu'il continue de croire en toi, mais surtout de penser à toi comme son successeur. Au lieu de ça, tu es là à faire ton petit rebel, à te plaindre et pleurnicher dans les jupes d'Ava Sinclair et toute ta pitoyable meute. Tu n'es qu'un imbécile.

Les derniers mots furent jetés avec froideur et mépris, Ariana retrouva ensuite son masque impassible, elle se dirigea vers la porte sans plus un regard pour Adrian. Ce dernier la suivit des yeux, mais ne fit rien pour la retenir. Bon débarras ! se réjouit férocement son loup.

— Oui, c'est ça, va-t'en ! lança Adrian avec colère et amertume. Tu as raison de partir avant que Holy ne revienne ! Je ne veux surtout pas qu'il croise ta sale tête de robot !

Adrian savait qu'il était parfaitement puéril et ridicule, mais il avait besoin de cracher son venin. Ariana se figea à nouveau pour son plus grand plaisir. Mais lorsqu'elle se retourna, un petit sourire méchant étirait le coin de ses lèvres, comme si elle s'apprêtait à prendre sa revanche.

— Ah oui, le dhampire... murmura-t-elle. J'avais oublié que c'était pour lui que je suis venue...

— Quoi ? Holy ? Qu'est-ce que tu lui veux ? demanda aussitôt Adrian, sur ses gardes.

Cette folle ne doit surtout pas s'approcher de Holy !

— Rien du tout. Ton dhampire suicidaire ne m'intéresse pas.

Suicidaire ? Comment ça suici...

Adrian se sentit foudroyé sur place lorsqu'il comprit.

— Non, gémit-il, le cœur au bord des lèvres. Non, non, non. Putain, Holy... Non !

— Oh que si, fit Ariana, sans cesser de sourire. Ton dhampire est allé voir l'Alpha.

Putain de bordel de merde.  


Je vous mets deux petites illustrations d'Ariana pour vous donner une idées de sa tête de coincée XD Je n'ai toujours aucun mérite bien sûr, les illu ont été bidouillées sur Picrew


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