Chapitre 20

Juin 2011, La Nouvelle-Orléans

Ce serait donc lui le prochain Alpha Suprême ?

Il ne ressemble pas du tout à son père.

Rien à voir avec Anthony... dommage qu'il soit mort.

Et si ce n'était même pas son fils ?

Regardez-le, ce petit louveteau n'a pas l'étoffe d'un Alpha !

Il est fort, mais ce n'est qu'un gamin...

— Mon loup, mon cœur...

Adrian fut tiré de son mauvais rêve par la douce voix de Holy. Il ouvrit les yeux lorsque ses lèvres chaudes effleurèrent les siennes avec une douceur infinie. Adrian sourit en croisant son regard rieur. Penché sur lui, Holy continua de picorer sa bouche de petits bisous taquins.

— Mon bel au bois dormant, susurra-t-il en lui caressant le visage.

— Me suis endormi, constata Adrian en se redressant. T'es là depuis longtemps ?

Il ouvrit les bras et Holy s'y lova aussitôt pour partager un tendre baiser.

— Non, je viens juste d'arriver. Et toi ? Tu m'attends depuis longtemps ?

— Peu importe, t'es là maintenant. Tu m'as trop manqué...

Adrian fondit à nouveau sur sa bouche, ses mains se faufilèrent sous son haut pour l'enlacer et cajoler sa peau de caresses. Holy se colla tout naturellement contre lui, ils basculèrent sur le sol recouvert de couvertures sans se quitter des lèvres.

C'est tellement bon !

Comme à chaque fois, être avec Holy apaisa immédiatement Adrian. La tension accumulée au cours des dernières semaines passées à Lafayette (1) avec son père s'évanouit, balayée par le bien-être et le bonheur de l'avoir dans ses bras. Son cœur virevoltait de joie dans sa poitrine.

— Toi aussi, tu m'as manqué, fit Holy entre deux câlins. Tout s'est bien passé à Lafayette ?

— Ouais, ça va. Je crois que j'ai réussi à faire mes preuves. Père avait l'air satisfait.

— C'était pas trop dur ? s'inquiéta Holy.

Adrian se redressa sur le coude, un bras enroulé sur la taille de son petit ami à moitié affalé sur lui. Celui-ci le couvait d'un regard anxieux, comme à chaque fois qu'il revenait de voyage avec l'Alpha. Une bouffée d'affection envahit Adrian qui lui fit un bisou esquimau pour le rassurer.

— T'en fais pas pour moi, mon ange. Je vais bien. Je suis juste un peu claqué. Mais ouais, tout s'est bien passé à Lafayette. Juste que j'avais la désagréable impression d'être une bête de foire. Tout le monde me regardait, m'évaluait, guettait la moindre faiblesse de ma part.

Cette bande de cons !

Holy le serra dans ses bras sans un mot, Adrian enfouit sa bouche dans ses cheveux.

— Ils n'ont rien dit, mais c'est clair que personne ne veut de moi comme prochain Alpha Suprême, continua-t-il sur le ton de la plaisanterie. Ça tombe bien parce que moi non plus j'ai pas envie de le devenir ! Tout ce que je veux c'est être avec toi, mon ange.

— On pourrait s'enfuir. Partir loin. Là où ton père ne nous retrouvera jamais, hasarda Holy.

Adrian y avait déjà pensé. Tellement de fois. Il ne comptait plus le nombre de plans foireux qu'il avait fantasmés pour échapper aux griffes de son père et parcourir le monde avec Holy.

— C'est impossible, murmura-t-il amèrement. L'Alpha me retrouvera où qu'on aille. Il me retrouvera toujours. Il s'en prendra à toi pour me punir, ensuite il me tuera.

— Arrête, ton père n'oserait quand même pas aller jusque là...

Mais Holy se tut, atterré. Bien sûr qu'il oserait. Pour Aaron Ashes, seul l'honneur de la famille et le titre d'Alpha Suprême importaient. Adrian n'avait aucune valeur s'il ne lui obéissait pas.

— Je ne le laisserais jamais faire ! s'écria soudain Holy. Ton père ne me fait pas peur !

Il se redressa d'un geste brusque et Adrian croisa ses yeux plein de défi. Il ne put s'empêcher de sourire, attendri par son côté fougueux et protecteur. Mais son amusement retomba aussi vite qu'un soufflé lorsque des images de Holy défiant son père firent irruption dans sa tête. Le simple fait d'imaginer une telle confrontation lui glaça le sang. Aussi puissants étaient ses pouvoirs de dhampire, Holy ne tiendrait même pas une minute face à l'Alpha Suprême.

Non ! Holy ne doit jamais se retrouver face à l'Alpha ! Jamais, jamais, jamais !

L'angoisse le prit soudain aux tripes et Adrian attrapa les épaules de son petit ami d'un geste plus brusque qu'il ne l'aurait voulu. Son regard se fit à la fois autoritaire et suppliant.

— Holy, tu m'as promis de toujours rester loin de mon père quoi qu'il arrive.

— Non, tu m'as obligé à te faire cette promesse, répliqua-t-il avec colère. Ton père est le pire des connards. Si ça ne tenait qu'à moi, j'irais lui régler son compte avec mes pou...

— Surtout pas ! Promets-moi de ne jamais t'approcher de l'Alpha Suprême, Holy. S'il te plait.

Ce dernier ne répondit pas, il se contenta de croiser les bras et le fusiller d'un regard buté. Adrian soupira, frustré. Il détestait ramener ce sujet sur le tapis, leur discussion finissait toujours en dispute. Holy haïssait profondément son père et ne s'en cachait pas.

— Cet homme te fait du mal, Adrian ! cracha-t-il, toujours aussi furieux. Ses méthodes d'entraînement sont immondes et révoltantes. Je suis malade d'inquiétude à chaque fois que tu pars le rejoindre. J'ai tellement peur pour toi, Adrian. Je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi t'acceptes tout ça ? Ce qu'il te fait subir, c'est de la violence sur mineur !

— On en a déjà parlé mille fois, Holy, rétorqua Adrian avec humeur. Tu sais très bien que je ne peux pas... que c'est compliqué... que c'est IMPOSSIBLE pour moi de... C'est l'Alpha ! Tu comprends ça ? Et puis je suis plus mineur, maintenant. J'ai dix-huit ans, tu te souviens ?

Holy ouvrit aussitôt la bouche pour répliquer, mais Adrian ne lui laissa pas le temps de placer un mot. Il l'attira à lui pour une étreinte. Toujours fâché, Holy se raidit entre ses bras.

— S'il te plait, mon ange, je veux pas qu'on se dispute, lui souffla Adrian au creux de l'oreille. Je sais très bien que t'as raison. Si ça ne tenait qu'à moi, j'enverrais bouler mon père et ses conneries d'Alpha tout de suite. Je te promets de le faire un jour. Et on partira loin, très loin.

Tu sais très bien qu'à moins de le tuer, ça n'arrivera jamais !

— On ira faire le tour du monde, poursuivit Adrian, ignorant les interventions défaitistes et inutiles de son loup. On achètera une maison avec un immense jardin où on plantera plein de fleurs. Tu monteras un groupe de rock, j'irais à tous vos concerts, je serais ton plus grand fan...

— N'importe quoi, pouffa Holy. Toi, assister à un concert de rock ? Tu déteste la foule !

— Ouais, mais pour toi, je ferais tout. Je t'aime comme un fou.

Holy se dégagea légèrement de son étreinte pour lui faire face. Ses grands yeux argentés le dardèrent avec émotion et intensité, comme à chaque fois qu'il lui susurrait ces trois petits mots. Adrian ne se lasserait jamais de les lui répéter, c'était la vérité pure et simple.

— Moi aussi je t'aime, Adrian Ashes, lui murmura Holy. Je t'aime plus que tout au monde.

***

— Mon dieu ! J'arrive pas à croire qu'on est vraiment à Bâton-Rouge rien que tous les deux ! Et qu'on va vraiment assister à un concert de Moonflowers ! C'est tellement merveilleux, Adrian !

Ce dernier s'assura une dernière fois que sa moto ne risquait rien, vérifiant son emplacement, l'antivol et tout. Pendant ce temps, Holy sautillait de joie à ses côtés. Adrian se redressa et sourit de le voir aussi enthousiaste. Son regard brillait de ravissement, ses longues mèches bleues et violettes virevoltaient autour de son visage au rythme de ses mouvements surexcités.

Le visage rayonnant, Holy se hissa sur la pointe des pieds pour déposer un bref baiser à la commissure de ses lèvres, mais Adrian le retint par la taille en grognant.

— Je mérite bien plus qu'un chaste petit bisou, exigea-t-il d'un ton faussement boudeur.

— C'est vrai, admit Holy en riant. Voilà pourquoi je ferai tout ce que tu voudras ce soir, après le concert, lui chuchota-t-il ensuite à l'oreille, le ton sensuellement provocateur.

Adrian frissonna de la tête aux pieds, imaginant déjà tout ce qu'il aimerait bien que Holy lui fasse. Son loup avait également plein d'idées, il en gambadait de joie et d'excitation.

Adrian secoua la tête, chassant toutes les pensées coquines qui envahissaient son esprit. Il devait d'abord se concentrer sur le concert, Holy lui en voudrait à mort s'il osait bailler aux corneilles alors que son groupe préféré de tous les temps se produisait sur scène. Et si ce n'était que ça ! Adrian avait surtout peur de faire un malaise ou de mordre quelqu'un...

N'importe quoi ! On maîtrise parfaitement nos pulsions, maintenant !

— T'es sûr que ça va aller ? demanda Holy en lui prenant la main, l'air soudain soucieux. Je sais à quel point tu détestes la foule et ce concert... ça va être une torture pour toi et ton loup. On n'est pas obligé d'y aller, tu sais. Y a plein d'autres trucs à faire et visiter à Bâton-Rouge...

— Arrête de dire n'importe quoi, rétorqua Adrian. On est ici pour voir Moonflowers en concert et c'est ce qu'on va faire. Ne t'inquiète pas pour moi, mon ange. Ce soir, tu profites et tu t'amuses.

— OK, mais si jamais tu te sens mal, tu me le dis tout de suite, d'accord ? insista son adorable petit ami, les sourcils légèrement froncés. J'adore Moonflowers, mais c'est toi ma priorité.

— Oui, maman, plaisanta Adrian en le câlinant tendrement. Bon, maintenant que la sécurité de la moto est OK, allons-y. Faut se dépêcher, sinon on n'aura plus de place dans la fosse !

Le concert se déroula sans heurts, dans la mesure où Adrian ne perdit pas le contrôle au milieu d'une foule en délire. L'ambiance était totalement folle entre la musique métal assourdissante, les hurlements du public, le jeu de lumière... Fut un temps où toute cette agitation l'aurait rendu malade, mais Adrian n'était plus un gamin maintenant.

Merci papa et les entraînements, ne put-il s'empêcher de songer avec ironie.

Pour se tempérer, Adrian concentra ainsi toute son attention sur Holy, il se focalisa sur ses mouvements, son odeur, occultant tout le reste. Il veilla jalousement à ce que son petit ami ne se prenne pas des coups par mégarde. Personne n'était hostile, mais ils étaient tous tellement à fond (mais aussi complètement bourrés et défoncés pour certains) que beaucoup ne se rendaient même plus compte lorsqu'ils bousculaient rudement quelqu'un.

Adrian garda ainsi un œil vigilant sur Holy, tout en admirant son bonheur d'assister enfin à un concert de Moonflowers. Il connaissait toutes les chansons sur le bout des doigts et hurlait à tue-tête en chœur avec Sasha, le chanteur et guitariste du groupe.

Grâce à Holy, Adrian savait tout de Moonflowers et ses membres. Et il savait à quel point Holy adorait Sasha. C'était son préféré et Adrian ne pouvait pas lui en vouloir : maintenant qu'il le voyait en vrai, il devait admettre que le type avait un charisme fou avec ses longs cheveux blancs et ses lentilles de couleur rouge. Sans parler de son magnétisme sur scène, le public (dont Holy !) était tout simplement sous le charme. Adrian en était presque jaloux.

Mais bon. Ce serait vraiment bête et ridicule de jalouser quelqu'un avec qui Holy ne parlerait sûrement jamais ! N'est-ce pas ? Son loup grogna avec mauvaise foi dans un coin de sa tête, mais Adrian l'ignora. S'il l'écoutait, il sauterait sur scène pour arracher la tête de ce pauvre (et séduisant) chanteur de métal qui n'avait rien demandé à personne.

A la fin du concert, Adrian fut extrêmement soulagé et reconnaissant lorsque Holy proposa de ne pas s'attarder et retrouver au plus vite le cocon douillet qu'ils avaient loué pour le week-end.

— Merci pour ce merveilleux cadeau, mon loup, lui murmura-t-il à l'oreille, alors qu'Adrian démarrait la moto. Et maintenant rentrons vite pour que je puisse t'offrir le mien.

***

— J'aime tellement quand on fait l'amour, gémit Holy. Je m'en lasserais jamais.

Toujours en lui, Adrian l'enlaça plus étroitement en réponse, gardant son dos contre son torse. Il ne se retira pas encore, trop occupé à déposer milles baisers sur sa nuque et ses épaules. Les yeux fermés, Adrian savoura sa peau dont le goût et l'odeur étaient encore plus addictifs après l'amour. Lui non plus ne se lasserait jamais de ces moments intimes avec Holy.

Jamais, jamais, jamais.

Totalement exalté, son loup prit un instant le dessus, incitant Adrian à lécher langoureusement la nuque de Holy sur toute sa longueur, les doigts enfoncés dans ses hanches. Il resta un instant dans cette position, la bouche et la langue sur son épiderme tout doux et le souffle court. Adrian ne se retira finalement qu'au prix d'un immense effort de volonté. Il s'écroula aux côtés de Holy en soupirant, l'attira aussitôt contre lui, incapable de se détacher de sa peau.

— Moi aussi je me lasserais jamais de toi et ton corps de rêves. Vous me rendez dingue !

Holy rit alors qu'Adrian fourrait à nouveau son nez dans son cou. Ils restèrent ainsi durant de longues minutes pendant lesquelles Adrian ne put s'empêcher de taquiner paresseusement la nuque de son amoureux du bout des lèvres, les yeux fermés et légèrement somnolent.

— Adrian ? demanda soudain Holy d'un ton hésitant.

— Mmmm ?

— Est-ce que... ça t'arrive encore de vouloir me marquer ?

NON !

— Quoi ? demanda Adrian en sursautant, alarmé par sa question. Pourquoi tu demandes ça ? C'est parce que j'aime bien t'embrasser sur la nuque ? Désolé, je voulais pas te mettre mal à...

— Mais non, je suis pas mal à l'aise ! le rassura aussitôt Holy en se retournant pour lui faire face et attraper son visage entre ses paumes. Je veux juste savoir, c'est tout.

Adrian ne sut que répondre, alors que Holy le couvait d'un regard curieux et légèrement incertain comme s'il regrettait d'avoir posé la question. Adrian lâcha un imperceptible soupir.

— Parfois, finit-il par avouer. Mais je te promets que ça n'arrivera jamais.

Jamais, jamais, jamais.

— Pourquoi ? En quoi c'est mal ? insista Holy,

Du bout des doigts, Adrian écarta une mèche violette de ses yeux, tout en réfléchissant à la question. En quoi marquer quelqu'un était mal ? La liste était longue. Par où commencer ?

— Quand un loup ou une louve marque quelqu'un, cette personne est rattachée à lui/elle pour toujours. Ce lien est indestructible, la personne marquée ne peut plus rester loin de son loup.

— Mais en quoi c'est mal ? répéta Holy, sans comprendre. Je suis déjà à toi pour toujours.

Oui ! Pour toujours !

— Marquer quelqu'un, c'est lui priver de sa liberté, protesta Adrian. La personne ne pourra plus avoir une vie, elle devra toujours être avec son loup. Et jamais, je te ferai une chose pareille, Holy ! Je t'aime trop, je ne pourrais jamais te couper les ailes et t'empêcher de vivre tes rêves.

— Mon rêve c'est toi, riposta Holy avec véhémence.

Le cœur gonflé d'une tendresse infinie face à ses grands yeux à la fois outrés et suppliants, Adrian lui caressa doucement le visage, traçant ses pommettes et sa mâchoire du bout des doigts. Il lui prit ensuite les mains pour les embrasser avec douceur dans un geste rassurant.

— Moi aussi, je veux rester avec toi pour toujours, mon ange, murmura-t-il. Mais je refuse de te garder près de moi alors que t'as été accepté à la prestigieuse académie de musique d'Oslo ! Tu dois y aller, Holy. Tu peux pas rester à La Nouvelle Orléans et gâcher ton incroyable talent.

— Mais toi...

— Ne t'en fais pas pour moi, je trouverais un moyen de te rejoindre en Europe, OK ?

L'Alpha ne nous laissera jamais partir !

La ferme, grogna mentalement Adrian, agacé. Son loup était particulièrement pénible depuis quelque temps. Il n'arrêtait pas de faire des remarques défaitistes, lui rappelant sans cesse à quel point les prochains mois allaient être déprimants sans Holy et Isaïah. Les deux partaient à l'université alors que lui devait rester à La Nouvelle Orléans avec l'Alpha.

Et si Holy rencontrait quelqu'un à Oslo ? S'il ne voulait plus de nous ? Et si...

LA FERME !

Adrian ferma les yeux, il nicha son visage dans le cou de Holy, respira son parfum, sniffant presque sa peau comme un toxicomane en manque. Si Holy venait à rencontrer quelqu'un d'autre... Si jamais, il ne voulait plus de lui... Le cœur d'Adrian était en miette à cette horrible éventualité, les larmes lui montèrent aux yeux malgré lui. Il se sentit ridicule.

— Adrian ? Ça va ? s'inquiéta Holy alors qu'il se serrait davantage contre lui en reniflant.

— Je t'aime, répondit ce dernier d'une petite voix étouffée, le nez toujours enfoui dans son cou. Je t'aime tellement ! S'il te plaît, promets-moi de ne jamais oublier à quel point je t'aime...

— Promis juré, chuchota Holy en lui caressant les cheveux. Moi aussi, je t'aime.

Rassuré, Adrian se lova contre lui, entortillant carrément son corps nu au sien. Holy continua de le dorloter comme un enfant, glissant affectueusement ses doigts dans ses cheveux, sur sa nuque, ses épaules. Bercé par sa chaleur et ses caresses, Adrian ferma les yeux.

— Adrian ? l'appela doucement Holy.

Sa petite voix incertaine interpella aussitôt ce dernier qui se redressa, inquiet.

— Quelque chose ne va pas, mon ange ? demanda-t-il en attrapant sa main.

Holy ne répondit pas tout de suite. Il se contenta de le fixer sans un mot, il se mordillait la lèvre, comme à chaque fois que quelque chose le préoccupait. Adrian se maudit d'avoir fait son pleurnichard, c'était sûrement à cause de ça. Holy ne voudrait plus partir maintenant...

Et alors ? C'est une bonne chose, non !

La ferme.

— Ce que tu ressens pour moi... comment t'es sûr que c'est vraiment de l'amour ? demanda soudain Holy, la voix précipitée, comme s'il avait honte de poser la question.

— Quoi ? Mais pourquoi tu demandes un truc pareil ?

Adrian le fixa, bouche bée. Il ne s'attendait pas du tout à cette question. Il n'en comprenait même pas le sens. Holy rougit, l'angoisse envahissait peu à peu ses yeux.

— Parfois, j'ai peur de t'avoir envoûté avec mes pouvoirs et que tout ça... murmura-t-il.

— Quoi ? répéta Adrian, éberlué.

— Je sais pas. C'est juste que... ce qu'il y a entre nous c'est tellement fort... si fort que je me demande si c'est vraiment réel ou si c'est moi qui t'aie forcé à m'aimer autant.

Mais... mais n'importe quoi ! N'importe quoi !

— Holy.

Adrian se redressa et s'assit sur le lit, obligeant Holy à faire de même. Celui-ci se laissa faire, sans cesser de se mordiller la lèvre. Il était désormais tendu, une véritable boule d'angoisse. Adrian planta son regard dans le sien, saisit ses épaules d'un geste à la fois doux et ferme.

— Je ne veux plus jamais que tu penses à des choses pareilles, martela-t-il avec sérieux, les yeux toujours ancrés aux siens. Holy, je t'assure que ce que je ressens pour toi n'a absolument rien à voir avec tes pouvoirs. C'est vraiment de l'amour, tu m'entends ? Je te le promets. Ne me demande pas comment, mais je le sais, je le ressens au plus profond de moi.

Tout en parlant, il prit son visage en coupe. Les yeux toujours brillant d'angoisse, Holy frotta ses joues contres ses paumes, cherchant le contact. Adrian colla leurs fronts l'un contre l'autre, traçant des cercles aériens sur sa peau délicate du bout de son pouce.

— Je t'aime parce que t'es une personne incroyable, Holy Hell. Parce que t'es quelqu'un de si doux, gentil, mais en même temps si fougueux. Je t'aime parce que t'es magnifique, la plus belle personne que j'ai jamais rencontrée... Je t'aime parce que je suis tellement bien avec toi, parce que tu me rends heureux. Je t'aime pour tout ce que tu es et non parce que tu m'as envoûté avec tes pouvoirs de dhampire. Je t'aime, tu m'entends ? Je t'aime.

Il l'embrassa, puis le serra fort contre lui, avant de l'embrasser à nouveau, encore et encore.

— Je t'aime aussi, mon loup, finit par chuchoter Holy contre sa bouche. Pardon d'avoir douté...

Ils passèrent la nuit, tendrement entrelacés à se chuchoter des mots d'amour entre deux baisers et étreintes. Puis le reste du week-end, ils flânèrent à travers la ville, main dans la main, à se sourire niaisement et s'extasier sur tout et n'importe quoi. Adrian était au paradis.

Il aurait dû se douter que tout ce bonheur était beaucoup trop beau pour durer.

Que tout finirait par éclater en mille morceaux. 


(1) ville du sud de la Louisiane


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