Chapitre 7 - Effets secondaires indésirables
Cindy était perturbée par sa séance d'hypnothérapie avec François. Pourtant elle en avait vu des choses bizarres avec ses patients : des comportements déplacés et surprenants, des rêves incroyables, des phobies, des angoisses, des doutes, des questionnements, des peurs, mais cette présence intérieure monstrueuse chez François semblait plutôt relever de la psychiatrie ou de la possession diabolique.
Aucun de ses clients n'était passé de la peur de son "monstre" à l'adoration. Cindy voyait le jeune homme comme une victime du syndrome de Stockhölm : l'esclave volontaire de son bourreau. Elle imaginait qu'il était attiré, comme dans "La Guerre des Étoiles" par la puissance destructrice de La Force.
Elle se voyait déjà pratiquer sur lui un véritable exorcisme et s'attendait à lutter contre des forces occultes surpuissantes.
Elle était perdue dans ses pensées quand François lui dit d'une voix légère :
- C'était extra Cindy ! Je me sens super bien ! Beaucoup mieux qu'avant ! Merci beaucoup !
Sa voix sonnait faux. Son regard avait changé. Ses yeux étaient devenus noirs et sa bouche fermée comme concentrée et déterminée. Comme s'il avait soudain prit conscience de son incroyable puissance.
Son état bienheureux inquiétait beaucoup la divinatrice. Elle voyait qu'elle avait peut-être libéré en lui soit un océan de créativité bénéfique, soit un raz-de-marée destructeur.
Il lui faisait penser à un enfant qui venait de trouver une arme à feu chargée, et qui était tout excité intérieurement en pensant pouvoir la pointer sur la première menace venue. Il devait se sentir extrêmement fort mais ne voulait pas montrer la grosse voix grave qui riait au fond de lui et qui avait, déjà, subrepticement, commencé à prendre le contrôle. Il se disait qu'il pourrait, enfin, se défendre et ne plus être le faible de l'histoire, le timoré ridicule. Il allait être, enfin, un super-héros, brave, fort, courageux, puissant, magnifique, un chevalier sans peur et sans reproche !
L'enfant qui était en lui avait trouvé l'armure et l'épée qu'il cherchait.
Cindy prit la main de François et en profita encore discrètement pour prendre ses pulsations. Elles étaient étrangement régulières. Il paraissait reposé, détendu, comme si de rien n'était ...
À la grande peur de cette "bête" intérieure avait succédé un calme religieux, une paix profonde, une sérénité rassurante. Avait-il parlé à son "démon" et que lui avait-il dit ? N'était-ce pas plutôt une énorme force en lui qu'il percevait sous les traits d'un loup gigantesque ? Un chien-loup protecteur, ou le "grand méchant loup" des contes de fées qui dévore les enfants ?
Cindy était perdue dans ses pensées et en oubliait presque de libérer son "patient" après sa "thérapie".
- Viens François ! On sort d'ici, lui dit-elle. Je te rends à tes amis.
Elle ouvrit la porte avec la clé qu'elle portait autour de son cou. (Elle avait vu ça quelque part dans sa boule de cristal !)
Trop émue et touchée par sa séance, Cindy ne put s'empêcher de faire un baiser sur la joue de François en guise d'au revoir.
Anna vit la scène et se jeta immédiatement au cou de son bien aimé ! Le couvrant de mille baisers fougueux et angoissés.
Cindy se recula d'un pas et déclara :
- Bon ... on va dire que ça s'est bien passé ! Je n'ai pas le droit de vous divulguer plus d'informations. Cela reste de l'ordre du secret médical. Mais nous allons nous revoir François ! Tu en as besoin. Grandement besoin. Il me faudra d'autres séances pour obtenir des résultats probants. Mais c'est déjà un bon début. Heu...Roro ?!
- Oui ma biche !
- La première séance... elle a été payée ?
- Heu ... oui c'est bon ! 150 ! Comme prévu !
- Ok ! Bon ! Je ne vous cache pas que mon planning est chargé. Je vous ai pris entre deux rendez-vous. Mais il faut qu'on se cale une autre date sans tarder. Faut pas attendre trop. La mayonnaise est prise ! Faut pas laisser le soufflet retomber. Il faut battre le fer tant qu'il est chaud ! Oui je connais plein d'expressions ! Ça vient de ma grand-mère ! Elle tirait les cartes ! C'est elle qui m'a "convertie" ! Reviens dans 3 jours François ! Allez ! Au revoir. Appelle-moi à n'importe quelle heure de la nuit si jamais tu fais des cauchemars ! Je te dirais quoi faire !
- Non mais c'est moi qu'il doit appeler s'il va mal, intervint Anna.
- Oui ma biquette, bien sûr ! lui répondit Cindy d'un ton placide et ironique. Mais c'est moi son thérapeute ! Si ta voiture va mal, t'appelle ton garagiste ! Pas ton chéri !
- Heu...
- Réfléchis pas trop blondinette ! tu vas te faire un claquage au cerveau ! Ha ha ! Allez zou ! Hors de ma vue tout le monde ! Hasta louego les amis ! Bye bye ! Ciao ! Auf wiedersehen !
- Mais tu parles combien de langues Cindy ? demanda Ponce. C'est dingue !
- 7 ! Ponpon ! Ça te fait rêver hein petit canaillou ! Hé Pierrot !?
- Oui quoi ?
- Tu m'envoies ton ex la prochaine fois ! ta greluche ! Je vais trop m'amuser à la décoincer celle-là !!
- Ouais ! Trop ! fit Rafeu en mode ghetto. Je vais te l'emmener par la peau du dos la miss ! T'inquiètes ! Allez on y va ! A+ ma Cindy ! La bise !
- Bye Bye mes loulous !
- Au revoir... Cindy ! À la prochaine fois, énonça froidement François en lui faisant un petit signe de la main, sans aucune émotion, et en la regardant fixement, comme si le diable lui donnait rendez-vous...
Cindy fut glacée par cette vision. Elle ferma très vite sa porte à double tour une fois ses "amis" sortis.
- Oh mon Dieu il était là ! Je l'ai vu dans ses yeux !
- Mais t'as vu quoi ma jolie reine de cœur ? lui demanda Rodolphe.
- Le Diable ! Il est en lui ! Je le reconnais ! Et arrête avec tes sobriquets ridicules !
Cindy appréhendait la prochaine séance. Elle allait devoir préparer tout l'attirail pour un véritable exorcisme et surveiller de loin l'état mental du jeune homme.
Les 4 amis sortirent de chez la guérisseuse chamanique et se demandèrent où ils pourraient aller encore ensemble. Cindy proposa un restaurant car il était bientôt midi. Ponce voulait juste boire un verre. Rafeu pensait à écouter les recommandations de Cindy et voulait retourner au commissariat pour inciter son ex à venir faire une "séance". François, lui, ne disait mot. Il avait un sourire figé. Il semblait pour la première fois être en paix avec lui-même. Il était d'accord pour chacune des 3 propositions. Tous prirent la direction du restaurant le plus proche. Une pizzeria ! "Au Tutti Quanti" ! Rafeu commanda une grande pizza royale, qu'il partagea avec Ponce. Anna prit des spaghettis carbonara. François surprit tout le monde en englouttissant deux grandes pizzas : une "Calzone" et une "Reine". Il n'avait jamais eu aussi faim de sa vie. Il se sentait changé, transformé de l'intérieur. Il ne se rongeait plus les ongles. Il n'avait plus l'air effrayé ou dubitatif en permanence. Il avait la tête haute et le regard fier. Il n'avait plus de bégaiements ou d'hésitations. Ponce lui fit remarquer :
- Wow ! Ben dis donc mon FranFran ! T'as un appétit d'ogre mon biquet ! Tu me surprends !
- Ne m'appelles pas FranFran ! Mon nom c'est François, répondit sèchement le jeune homme.
- Oh la la ! Mais quel changement ! Il me plaît trop comme ça le nouveau François ! Froid ! Viril ! Distant ! Bigre ! Je craque ! J'en ferais bien mon quatre heures ! Pierrot, tu ne le trouves pas changé toi ?
- Oh ben oui ça alors ! Qu'est ce qu'elle t'a fait la Cindy à toi aussi mon grand ?! Hé ! Calme-toi quand même un peu Ponpon ! Il est pas à toi celui-là ! Il est à Anna !
- Ah oui pas touche Ponpon ! Il est à moi ! cria Anna avec un sourire.
- Je n'appartiens à personne ! Je n'appartiens qu'à moi ! réagit encore d'un ton glacé François.
Anna se sentit gênée et intriguée.
- Mais pourquoi tu parles comme ça mon chéri ? Qu'est-ce qui te prend ?
- Rien. Je suis bien comme ça ! Je me sens en pleine forme ! Cindy m'a ouvert la voie ! Je suis moi-même ! Mon vrai moi !
- Ouais ben c'est pas génial ce "vrai" toi, pensa tout haut Anna. Je préférais comment tu étais avant.
- Quoi ? Tu préférais quand j'étais peureux, hyper anxieux, prise de tête, coincé, perdu dans mes livres pour me cacher de la société ?
- Non ! Je préférais quand tu étais doux, gentil, sensible, charmant, réfléchi, et poète ! Tu es un écrivain François ! Tu as le droit d'avoir tes phases ou tes changements d'humeurs !
- Mais là je suis moi ! Je me sens fort et invincible ! Et maintenant que j'ai bien mangé, on va boire un coup et filer voir ton ex, Pierrot ! On va l'envoyer se faire dérider chez Cindy ! Elle a plein de pouvoirs ! Elle peut la changer comme elle a fait avec toi, "PonPon" ! ...
-- Oui c'est vrai, acquiesça Ponce !
-- et après avec toi, Pierrot !
- Ben ma foi c'est pas faux, fit Rafeu.
- et moi aussi elle m'a transformé ! Alors elle peut décoincer ta Marie sans problème ! Et j'aimerai bien voir comment elle a changé après sa séance ! Je suis sûr que tu la reconnaîtrais pas Pierrot !
- Ah ouais ! Ça serait trop génial ! Ok on fait ça les gars, fit Rafeu tout excité comme un gosse qui allait faire une bêtise !
- Yes ! hurla Ponce de sa voix suraiguë !
- Heu ... se demandait Anna. Vous voulez vraiment lui faire ça, la pauvre ?
- Rohhh ! Tu vas trouver ça marrant ma caille ! Tu vas voir ! Suis-moi dans mes délires s'il te plaît, lui ordonna presque François d'une voix posée, virile, directive, et très sensuelle.
Anna sentit son cœur s'emballer devant ce nouvel homme qu'il était devenu. Elle eut envie de le chevaucher là, maintenant, et de monter au septième ciel avec lui ! Mais il fallait se tenir un peu ! Elle se mordit les lèvres de frustration et se dit dans sa tête :
"Toi mon gars, tu vas pas tarder à passer à la casserole ! J'ai trop envie de toi !"
François la fixa d'un regard interrogatif. Il avait compris sa pensée, ou l'avait peut-être même "entendue" par on ne sait quelle forme de télépathie mystérieuse. Était-ce un don de divination que lui avait transmis Cindy, ou François était-il devenu un expert de la communication non verbale, où les expressions faciales, les attitudes corporelles, l'intonation de la voix et les aspects du langage n'avaient pas de secret pour lui.
Il lui sortit, sûr de lui et de son analyse :
- Quand tu veux Anna ! Depuis le temps que j'attends ça !
Elle fut doublement estomaquée, autant parce qu'il avait lu dans son esprit que par ce charisme qu'il affichait, sa confiance en lui et sa force nouvelle qui émanait de son aura. Anna était complètement sous le charme. Elle était prête à se donner entièrement à lui, à succomber à ce mâle alpha, à ce chef de meute. Sa transformation était juste irrésistible. Elle se sentait parcourir l'échine d'un désir irrépressible. Chaque cellule de sa peau réclamait le corps de son homme, soumise, dominée par lui. Elle était désormais obnubilée par l'idée de cette fusion charnelle qu'elle ne le quittait plus des yeux en se léchant et en se mordillant délicatement les lèvres ...
Ponce avait entendu les paroles de François et vu la réponse mutine d'Anna et trouva opportun de sortir :
- Non mais dites donc vous deux ! Vous gênez pas pour nous surtout ! Allez vous trouver un hôtel et qu'on en finisse !
Et là on vit carrément le changement qui s'était opéré en François. Il n'y avait plus de peur ni de doutes mais plus que l'affirmation de soi.
- Ferme-la Ponce ! On te dit rien quand tu sors ta langue et que tu fais tes yeux doux à ton copain ! Ok !?
Ponce n'en revenait pas d'un tel affront de la part de ce jeune homme auparavant si timide. Il avait tellement changé qu'il commençait à devenir infecte, méprisant et hautain. Anna le reprit.
- François mon chéri ! Tu es blessant ! Excuses-toi s'il te plaît !
- Ohhh ça va ! Ok je m'excuse Ponce !
- Mouais, s'énerva Ponpon. Je préfère ça mon biquet ! Ça m'a fait de la peine comment tu m'as parlé ! Je te reconnais plus mon petit ange !
- Parce que je suis plus ton "petit ange", affirma François.
- Ohh !!! réagirent Anna, Ponce et Rafeu en même temps. Mais qu'est-ce qui lui prend bon sang ? dit Rafeu. Il a ses ragnagnas ou quoi ?
- Bon on y va ? On bouge chez les poulets rencarder la greluche ? lança le chef de gang d'un ton supérieur.
Tout le monde se plia sous son autorité et, dans un lourd silence, ils prirent le bus, suivant aveuglément leur chef et se rendirent au commissariat.
Arrivés sur place, François passa devant, entra en premier et demanda à voir "en urgence" L'agente Marie Colombine. Il allait même jusqu'à dire que c'était une question de vie ou de mort !
À ces mots Marie arriva en catastrophe et demanda :
- Mais qu'est-ce que tu fais là Pierre ! Mon Rafeu ! mon Pierrot ! C'est quoi cette urgence vitale ? T'es blessé ?
Francois fut sans détours :
- Il veut que tu fasses une séance de méditation spéciale pour redevenir celle qu'il a aimée. C'est non négociable. Si tu veux le reconquérir, vas-y ! Vas chez Cindy de la part de François ! Elle saura ce qu'il faut faire ! Tu ne seras plus là même ! Et tu retrouveras ton couple !
À ces mots Ponce était furieux.
- Mais je veux pas le perdre mon Pierrot ! On est bien ensemble tous les deux !
- T'inquiètes pas Ponpon, le rassura Rafeu, c'est juste pour la motiver qu'il dit ça !
- Ah bon ? T'es sûr ? Ah ben je préfère, pesta Ponce.
Marie était déconcertée.
Francois, devant son immobilisme, enfonça le clou.
- T'y vas maintenant ! Tu prends ta journée ! tu trouves une excuse, un prétexte, on s'en fout ! T'es attendue dans une heure à cette adresse ! Et il lui tendit la carte de visite de Cindy et Rodolphe. Ok ? Sois pas en retard ! c'est ta seule chance ! La loupe pas !
Marie prit la carte comme un trésor que lui offrait la vie, fila droit vers son chef, lui inventa une excuse en bois et prit son manteau.
En moins d'une minute elle était prête à quitter son poste sur les seules paroles de François.
- Incroyable ! dit Rafeu qui n'en revenait pas. Le gamin a réussi à lui faire quitter son poste en très peu de temps alors que c'est l'élément exemplaire du service, l'employée du mois ! La parfaite secrétaire !
Marie, elle aussi, était sous le joug et l'autorité de François.
- J'y vais. Merci beaucoup ! Si vous voulez, je vous enlève vos bracelets électroniques maintenant !
François, stoïque comme jamais, lui répondit :
- Non ! T'es bien mignonne ! On va le faire dans deux jours, quand j'aurais payé ma dette avec mon chèque de banque et on sera quitte ! Je veux faire ça dans les règles ok ?
- Oui Monsieur François ! Bien sûr ! Merci encore !
- Allez file ! Dépêche toi ! Va sauver ton couple !
Et l'agente Marie Colombine fila à l'arrêt de bus d'un pas décidé, toute excitée.
François lança un rire sonore qu'on ne lui avait jamais entendu jusqu'alors. Un de ces rires de manipulateurs diaboliques qui vous glace le sang. Anna ne le reconnut pas.
- François ! T'as fait quoi là ?
- J'ai juste envoyé une brebis égarée à l'abatoir !
Là les deux agents et Anna furent consternés et terrifiés.
- Mais non ! Je plaisante ! Elle me remerciera plus tard ! c'est certain ! C'est évident ! J'espère juste que Cindy ne va pas la transformer en grenouille ! HaHaHa !
Son rire faux etait un supplice aux oreilles de ses amis et son attitude tellement hautaine devenait insupportable.
- Bon les gars ! Maintenant veuillez me laisser seul avec ma femme ! On va se trouver un petit hôtel tranquille !
Anna croyait rêver ! Elle n'aimait pas du tout la façon qu'il avait d'en parler et son côté macho, mais l'idée lui plaisait d'être sa "chose", juste un instant. Elle était prête à accepter son attitude dominatrice et ultra virile qui lui manquait tant. Elle voulait goûter de ce nouveau personnage, comme si c'était un déguisement, un costume, un rôle. Elle voulait de l'aventure et de la surprise. Elle n'allait pas être déçue !
Et de son côté Marie non plus ! Elle arrivait bientôt devant la porte rouge...
François prit Anna par la main et l'emmena dans l'hôtel le plus proche. Il s'appelait "Le jardin d'Eden" et affichait fièrement une pomme d'amour écarlate sur son enseigne. Le rouge était là aussi la couleur dominante. Ils prirent une chambre. Sa clé portait le numéro 666. 6ème étage, porte 66. Prédestination diabolique ? Coïncidence malheureuse ? Qui sait ? C'était la chambre du karma, où Adam et Eve défièrent les dieux et les diables dans une étreinte charnelle passionnée, où les deux amants, avec leurs bracelets aux chevilles, connurent la pleine jouissance et l'orgasme divin.
Marie allait entrer, elle aussi, au "paradis". Cindy allait entr'ouvrir les portes lourdes de ses chakras et de ses désirs les plus fous, la rendant plus hédoniste et charnelle que jamais ! Une nouvelle femme allait éclore !
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