Chapitre 52
Une heure plus tard, Nemuri décida de son plein chef d'arrêter les rattrapages, voyant bien que Shota commençait à se fatiguer.
Ils s'échangèrent leurs numéros, puis la jeune fille raccompagna le noiraud jusqu'à chez lui, bien qu'il refusait de lui donner cette peine.
Une fois dans son appartement, Shota partit se doucher et se changer, puis s'écroula dans son lit.
Il repensait encore à Hizashi, à la façon dont il l'avait quitté. Son regard était si froid, son ton si las, et ses mouvements si lents. Il ne se comportait plus comme avant, il était devenu distant avec tout le monde. Il leur parlait, mais c'était à peine si son sourire était réel.
Shota prit son oreiller et le serra fort, si fort. Il pleurait silencieusement, et de toute manière, personne ne l'entendait. De toute façon, personne ne l'entendait, puisqu'il était seul. Nozomi n'était pas là, et Hizashi ne reviendra pas.
Quelques minutes plus tard, il sentit une boule de poils se frotter contre son dos. Il se retourna, et Harumi était là, à le regarder de ses yeux bleus et brillants, cherchant à réconforter son maître. Shota sourit maladroitement, et tapota juste devant lui pour qu'elle s'approche un peu plus de lui. Et lorsqu'elle fut au niveau de son menton, il lui grattouilla la tête, en disant :
_ Tu as de la chance. Tu n'as pas à te soucier de quoi que ce soit. Pas d'engueulades, pas de problèmes de cœur... Rien...
Et sur ces mots, il versa une dernière larme, avant de s'assoupir, la main sur le dos du chat.
Le lendemain matin, c'est Harumi qui fut chargée de son réveil, en miaulant dans toute la chambre. Shota ouvrit ses yeux lentement, avant de se lever et de s'étirer ; pour une fois qu'il se réveillait sans trop de difficultés.
Il se préparait, commençant à ranger ses affaires dans sa valise et veillant à bien laisser des croquettes dans la gamelle du chat. Mais lorsqu'il noua sa cravate, il remarqua que l'orchidée était complètement fanée.
Il se rua dessus et l'observa ; durant son absence, c'était Nozomi qui s'en était occupée, et elle s'y prenait bien pour les plantes. Et pas une seule fois il avait oublié de l'asperger d'eau.
Il s'habilla rapidement sans prendre de petit-déjeuner, mit son sac sur le dos et la pauvre fleur d'une main et sortit précipitamment. Il courut dans la direction opposée de Yuei ; il devait faire un détour.
Les chemins étant trop fréquentés, Shota décida de passer par les toits. Grâce à son écharpe, il sautait d'arbres en lampadaires, en courant sur les toitures des maisons, jusqu'à arriver enfin devant la maison qui l'intéressait.
Mais il constata que les fleurs qui ornaient la maison étaient toutes fanées, et plusieurs personnes y étaient présentes. Il s'approcha lentement, son pot en main, et un jeune homme de la vingtaine l'interpella :
_ Je peux t'aider, mon garçon ?
_ Euh... Est-ce que vous savez où est Harumi Hanako ? Demanda-t-il innocemment.
Le visage du jeune homme s'assombrit, et il déclara :
_ Elle est morte hier, dans la nuit. Pendant son sommeil.
_ Oh... Je suis désolé, je ne savais pas...
_ Qui es-tu ?
_ Shota Aizawa. Je l'ai aidé un jour à porter ses courses, et Hanako m'a offert cette fleur.
_ Une de ses fleurs personnelles, je suppose...
_ Que voulez-vous dire ?
_ Dans notre famille, ceux qui possèdent l'alter Floraison peuvent faire fleurir et faire garder des plantes fraiches. Mais ils ont aussi la capacité de "communiquer" avec les plantes. Quand ils offrent une plante à quelqu'un, ils savent si la personne s'en occupe bien ou pas. Mais même si on ne s'en occupe pas pendant des jours, la plante restera fraiche et belle éternellement. Jusqu'à la mort de celui qui l'a fait fleurir.
_ Alors, c'est pour ça que toutes les fleurs de sa maison sont fanées ?
_ Oui. Et la tienne n'y fait pas exception. Grand-mère adorait offrir des fleurs aux gens, mais généralement, elle donne aussi quelque chose de plus matériel. Elle t'a offert autre chose ?
_ Oui... ceci...
Shota sortit ses clés, et montra le froufrou rose accroché. Le jeune homme se mit à rire légèrement, en disant :
_ Elle ne manquait pas d'imagination ! Elle t'a dit où elle l'a trouvé ?
_ En gagnant à un jeu au supermarché.
_ Ah ! Je comprends ! C'est elle tout crachée !
Il se tourna vers la maison et afficha un air mélancolique.
_ Je peux te débarrasser de ça, si tu veux ! Fit-il en lui montrant le pot.
_ Ah ! Oui, merci.
Le noiraud lui donna le pot, qu'il se mit à inspecter minutieusement.
_ Tu t'en es vraiment bien occupé ! Déclara-t-il en posant le pot près des autres fleurs fanées. J'ai aussi hérité de son alter, et en l'analysant, ton orchidée semblait heureuse de vivre à tes côtés, malgré une longue absence, à ce que je vois.
Il se tourna vers Aizawa et lui dit :
_ Quand on offre une fleur à quelqu'un, très rares sont ceux qui s'en occupent un minimum. Mais toi, tu es différent, et grand-mère devait être sûrement heureuse de voir ça là où elle est à présent.
_ Peut-être...
_ Bon, je ne te retiens pas plus longtemps ! Tu as cours, je suppose.
_ Oui.
_ Eh bien, bonne journée, et à bientôt, j'espère !
_ Merci, et au revoir.
Shota s'inclina respectueusement, puis se retourna et marcha en direction de Yuei.
Une fois à l'abri des regards, il revint sur les toits. Et comme la gare ne se trouvait pas loin de là où il était, il se dirigea vers celle-ci. Mais n'ayant pas de pass ou de tickets, ni même d'argent, il sauta sur le toit du train sans que personne ne le sache, et restait accroché dessus, appréciant le vent qui emportait ses cheveux et les bouts de son écharpe.
Puis, arrivé à bon port, il redescendit aussi vite qu'il était monté, et se dirigeait vers le grand bâtiment imposant où étaient affichées fièrement les initiales UA. D'autres élèves arrivaient, tous en groupe de deux, trois ou quatre, avec un visage radieux. Le ciel était gris, et tous se réjouissaient que dans deux semaines, les vacances de Noël arrivaient.
Shota, lui, était seul. Il n'y avait plus cette petite tête blonde qui fonçait sur lui telle une fusée, et le pressait de rentrer en classe pour discuter.
À cette pensée, l'adolescent fixa le sol, les mains dans les poches. Il était seul. Et pour la première fois de sa vie, cette solitude le faisait souffrir terriblement.
Mais cette solitude s'en alla bien vite, puisqu'il sentit des bras l'entourer, une poitrine se presser contre son dos, et un corps de jeune fille mature se jeter sur lui en criant :
_ Yo, Shota-kun !!
Il ne mit pas longtemps à savoir de qui cela s'agissait. Les regards étaient braqués sur les deux adolescents : faut croire que l'arrivée de Nemuri faisait grand bruit partout où elle passait.
_ Lâche-moi, Nemuri.
_ Moi aussi, je suis contente de te voir !
Elle se sépara de lui en le prévenant :
_ Tu te souviens que ce midi, on va continuer les rattrapages ?
_ Oui...
_ Et tu n'as pas oublié tes cahiers ?
_ Non...
_ Tu as bien dormi, j'espère ?
_ Peut-être...
_ Arrête de me répondre aussi mollement !
_ Tiens, c'était quoi ce que tu m'as fait, hier soir ? Lui chuchota-t-il d'un coup.
Nemuri le toisa du regard, puis continua à marcher à ses côtés, les mains derrière la tête, en disant :
_ Un simple test ! Pour voir si ça en vaut la peine que je t'aide.
_ Vraiment ?
_ Tu sais, t'es pas le premier mec à me demander de l'aide. Mais souvent, il s'avérait que les gars que j'aidais voulaient juste profiter de moi. Alors, je fais ce test pour voir si celui que j'aide en a vraiment besoin. Et je peux t'assurer que même des mecs gays se sont laissés faire !
_ Et il y en a combien qui t'ont repoussé ?
_ Mmh... je dirais... quatre... non, cinq avec toi ! Sur une vingtaine de mecs, hein !
_ Je vois...
Et ils continuèrent à discuter tout le long du chemin, ignorant le regard insistant des autres jeunes garçons sur la belle Nemuri Kayama.
Mais loin derrière, il y avait une autre personne qui les observait. Et cette personne ne s'intéressait pas à la jeune fille, mais plutôt à Shota Aizawa.
Le cœur d'Hizashi se serrait en voyant Nemuri aussi familière avec lui ; personne n'a jamais été aussi familier que lui avec Shota. Il voulait hurler, il voulait se lamenter ; mais il sentait derrière lui un regard plein de reproches, signifiant bien que s'il désobéissait à cette personne, il quitterait Yuei sur le champ, et jamais plus il ne reverra le garçon qu'il aime tant...
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