Late Night Drive


Bonjour à tous ! Voici mon premier jour de Week, qui met en scène des personnages de la mafia portuaire parmi lesquels un petit TachiharaxGin assez discret ! Bonne lecture.

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L'autoroute se vidait au fur et à mesure que les heures passaient. Plus un bruit sinon celui des pneus crissant sur le goudron. Un doux ronronnement qui résonnait dans l'habitacle. Et dehors, le vide noir de la nuit, éclairé çà et là par les imposants lampadaires et leurs lumières orangées. Un chemin qui paraîtrait aux plus jeunes sans issues. Quatre voies séparées par une barrière et isolées du monde par d'épais murs de béton.

L'automobile avalait les kilomètres et rapprochait par la même occasion ses passagers de leur foyer. Trois passagers dans une voiture gris ardoise, moderne mais plutôt discrète. Le genre de véhicule parfait pour les missions sanglantes à effectuer dans l'ombre, et pour échapper aux flics lors d'une course-poursuite le cas échéant. Le turbo de l'engin le permettait. Le tout facilité par les plaques d'immatriculation de secours sur le siège passager qui écopait du rôle de rangement de fortune. Heureusement, ils n'avaient pas eu à en user cette fois-ci.

Le conducteur réprima un bâillement et réajusta son monocle. Il passa une main dans ses cheveux gris pour augmenter son niveau de vigilance. Cela paraissait vain. Puis, il jeta un oeil sur la banquette arrière où deux adolescents, un jeune rouquin avec un pansement sur le nez et une brune dont le masque chirurgical s'enlevait grâce aux vibrations de la voiture, dormaient blottis l'un contre l'autre. Les enfants dormaient. Lui hésita à allumer une cigarette. Il tendit la main vers le siège passager pour se saisir du paquet et du briquet perdus au milieu des accessoires, puis se ravisa. Il n'allait pas intoxiquer des gamins dont la durée de vie était déjà raccourcie par le métier qu'ils avaient choisi d'exercer. Hirotsu secoua la tête. C'était plus précisément ce genre de pensées qui lui donnaient envie de fumer. Le fait de savoir que les deux jeunes qu'il supervisait et avait appris à apprécier ne semblaient pas décidés à quitter la mafia. Non pas qu'il les y encourageait, mais ce serait mieux pour eux. En restant, ils continuaient de perpétrer des crimes. Et y risquaient tout ce qu'ils avaient.

Les yeux d'Hirotsu se plissèrent, se firent pensifs. Même si sa loyauté envers Mori et les précédents parrains était indiscutable, il devait reconnaître qu'il comprenait pourquoi Dazai avait décidé de partir. Cet endroit était un abîme dans lequel ceux qui sombrent perdent tout avenir. Un tueur d'espoir, un cycle sans fin. Voilà comment il aurait pu qualifier la Mafia Portuaire. Presque pire qu'une prison, car la subtilité était qu'il n'y avait pas de date de fin de peine. C'était se condamner que d'y entrer. Devenir un pantin facilement remplaçable. C'était si simple d'aller manipuler un autre pour les remplacer. Hirotsu aurait souhaité que Gin et Tachihara qui semblaient si innocents sur la banquette arrière aient le courage de Dazai. Ou soient pris comme lui d'une impulsion. Qu'ils découvrent que ce lieu les tuait et qu'il fallait qu'ils partent tant qu'il en était encore temps. Ces enfants n'étaient pas entrés dans la pègre par choix. L'une avait suivit son frère qui avait saisi la main de Dazai. L'autre semblait avoir atterri parmi eux par hasard. Ils ressemblaient à deux papillons de nuit attirés par une même vieille lampe d'une lumière aveuglante. Puissante donc. Mais prête à exploser à tout instant. Une bombe à retardement. La situation allait bientôt dégénérer. Le vieil homme le sentait. Les années de métier l'avaient affublé d'un instinct infaillible quand il s'agissait de prévoir un évènement dramatique.

Les mains d'Hirotsu se crispèrent sur le volant. Et s'il osait ? S'il en avait le courage ? Il lui suffirait de prendre la prochaine sortie. De rouler de plus en plus vite. Mieux, de faire demi-tour et de repartir en sens inverse tant que Gin et Tachihara dormaient.

S'il avait le courage de les emmener à l'autre bout du monde pour les protéger. De les sortir du bourbier dans lequel ils avaient sauté à pieds joints. De les faire disparaître pour qu'ils vivent des vies normales, qu'ils construisent quelque chose de solide au lieu de détruire à leurs risques et périls...

Douce folie appelée fatigue. Tu fais divaguer et rends sentimental même le guerrier le plus aguerri. Les enfants savaient-ils ce à quoi leur supérieur pensait lorsqu'il les regardait ? Qu'il pouvait s'imaginer tromper la mafia pour sauver ce qu'il leur restait de jeunesse ? Non. Il ne pouvait leur dire ou le leur montrer. Il était un cadre de la mafia portuaire, un homme âgé ayant passé sa vie à piétiner celle des autres pour le profit d'excentriques. Aurait-il voulu faire autre chose de sa vie ? Oui. Mais quoi ? Il l'avait su. Il se l'était imaginé. Il l'avait oublié. Mais ces enfants blottis inconsciemment l'un contre l'autre le savaient peut-être encore. Le temps fait oublier. Mais il n'est pas encore trop tard pour eux. Mais s'il osait, ces enfants le maudiraient. Ils n'avaient rien en dehors du milieu de la pègre. Ni contacts, ni biens, ils ne pourraient reprendre une vie normale. S'il devait sacrifier sa vie pour les libérer, ce serait sans doute vain. L'espoir semblait s'envoler. Il ne pouvait pas grand-chose pour eux. Et pourtant, qu'il aimerait n'être qu'un grand-père pour eux, et pas un chef les traînant dans les pires endroits des bas quartiers pour aller cacher des cadavres ou massacrer des foules. Hirotsu secoua la tête et se perdit dans la contemplation de la route qui se présentait devant lui, interminable.

Il cligna les yeux. La fatigue commençait à lui faire voir de drôles de choses. Il pouvait imaginer l'obscurité de la nuit ramper de plus en plus vite elle aussi, les poursuivre pour les emprisonner entre ses griffes, à la manière du manteau d'Akutagawa. Tachihara et Gin n'avaient pas rien à la mafia. Du moins, pas Gin. Elle avait son frère qui ne la laisserait jamais partir sans lui. Et qui ne quitterait pas ce monde.

La voiture avançait toujours sur la route. Un panneau blanc se détacha sur le paysage nocturne. Il indiquait Yokohama comme étant la prochaine sortie. Hirotsu aurait pu sursauter à la vue de cet écran apparaissant comme un fantôme et la sortant de ses pensées. Il reprit toutefois contenance. Il n'y avait plus de retour en arrière possible, une fois encore. Tant pis. Une boule se forma dans sa gorge. Il n'avait aucun droit sur eux, sur qui que ce soit dans la mafia. Mais bien qu'il ne le montre, il aimait ses collègues. Mais il n'avait aucun pouvoir à présent. Ils entraient dans Yokohama. C'était fini. Ils n'étaient plus que trois membres des lézards noirs rentrant de mission. Hirotsu déglutit involontairement avant de se figer. Etait-ce donc ça que ressentait Oda Sakunosuke de son vivant quand il rentrait de mission ? Pauvre homme. Comme il le comprenait à présent. Il se sentait empli d'un immense sentiment d'empathie. Le comble pour un mafieux. Le contact des jeunes l'avait ramolli. Mais il ne voulait s'en éloigner. Il souhaitait rester avec eux.

Soudain, un mouvement à l'arrière attira son attention. Tachihara avait gigoté, faisant tomber une couverture dans laquelle Hirotsu les avait enroulés en voyant qu'ils s'assoupissaient. Deux mains aux doigts entrecroisés apparurent. Et le plus âgé se sentit mélancolique à cette vue. Un amour naissant au milieu des ténèbres. Il faudrait qu'il demande conseil à Kouyou. Il avait peur pour les petits. Deux papillons de nuits essayant de voler côte à côte ne risquaient-ils pas de tomber ensemble sur l'ampoule brûlante ? Et les liens les reliant à cette lumière sinistre les empêchaient de partir.

Gin s'était encore plus pelotonnée contre son petit-ami. Elle ouvrit les yeux, papillonnant des paupières. S'apercevant de la présence de son supérieur, elle repoussa le jeune homme et réajusta son masque en s'écartant, rougissante et livide à la fois. Hirotsu aurait voulu lui sourire. Ou faire comme si de rien n'était. Il ne pu s'empêcher de la regarder d'un air triste, avant de s'entendre lui dire qu'ils arrivaient bientôt. Tachihara dormait encore. Et Gin, indécise, finit par balbutier un "Merci" presque inaudible avant de s'adosser à la fenêtre et d'attendre leur retour chez eux. Elle réajusta cependant la couverture sur son collègue et fut prise de l'envie de l'embrasser dans son sommeil. Mauvaise idée. Elle le savait. Alors elle attira sa main hors de portée du rétroviseur intérieur et la serra contre elle. Elle ne pouvait partir. Elle resterait avec eux. Avec ces personnes qu'elle avait appris à aimer. Elle n'était pas qu'un assassin. Elle devenait de plus en plus humaine à leur contact. Quelle ironie.

Perdant son regard dans la contemplation du siège du conducteur devant elle, elle fut prise d'une impulsion. La jeune fille tendit la main la posa sur le joue d'Hirotsu en contournant le siège. Et elle murmura tout bas :

"Pourrez-vous me prévenir quand je serais à deux doigts de me brûler ?"

"De quelle brûlure parles-tu ?" répondit le vieil homme. "Je ferais en sorte que vous ne vous brûlez pas. Ni toi, ni lui." ajouta-t-il en soufflant.

Oda s'était brûlé. Dazai aussi mais était parti avant d'être consumé entièrement. Chûya se brûlait malgré les précautions prises par Kouyou. Akutagawa avait comme lui décidé de sombrer davantage. Motojiro avait commencé à se brûler. Kouyou ne le montrait pas, mais se brûlait les ailes au contact du parrain. Elle tenait le coup grâce aux instants de fraîcheur que lui offrait la présence de Kyouka et Chûya. Kyôka, la petite dernière que l'Agence avait tirée de cet enfer. Leur dignité en avait pris un coup, mais une enfant était sauvée. Grâce à Dazai notamment. Cette nouvelle avait fait du bruit, et y penser lui faisait réaliser que bien qu'il l'ait connu depuis plus longtemps, il n'y était pas parvenu. Il ne pouvait sauver ni aider aucun de ses collègues. Non pas qu'il veuille trahir. Il respectait et appliquait les ordres du boss. Mais c'était le choix qu'il avait fait. Il avait décidé d'emprunter cette voie passé un moment. Ce choix, les jeunes n'avait pas encore pu le faire en pleine conscience des risques. Alors il était encore possible de les tirer de là. Dans ce cas, pourquoi un individu à l'intérieur n'y parvenait pas ? Cela ressemblait à une malédiction. Comme s'ils étaient tous liés par les mêmes chaînes qui les entraînaient vers le fond. Un prisonnier ne peut théoriquement pas en aider un autre à s'évader. Hirotsu se sentait prisonnier. Un prisonnier volontaire, qui avait fini par devenir un gardien de prison. Mais d'une prison qu'il ne pouvait quitter lui-même.

La route est finie. Tous arrivent enfin dans le quartier chic en bord de mer de Yokohama. Tachihara s'est réveillé. Il est deux heures du matin. Les rues sont presque vides. Hirotsu décide de sortir de la voiture en premier. Alors qu'il s'est éloigné de quelques mètres, il peut voir la jeune Akutagawa retirer son masque pour embrasser Tachihara qui passe ses bras autour de sa taille. Folle jeunesse. Et folle fatigue.

La nuit paraît finie. Chacun va rentrer chez soi pour dormir. En théorie. Et pourtant, Ryûrô Hirotsu est pris d'une envie. Celle de ne pas rentrer, celle de voir du monde. Leur arrivée n'est prévue qu'au matin, ils ont encore du temps. Il saisit son téléphone pour envoyer un message à une collègue devenue une amie. La réponse ne tarde pas, ce qui est étonnant compte tenu de l'heure. L'homme sourit. Elle a dû s'inquiéter du manque de nouvelles. Le chef des lézards noirs se tourne vers ses subordonnés qui avancent vers lui pour lui dire aurevoir, et s'adresse à eux :

"Ça vous dit d'aller voir Higuchi avant de rentrer ?"

Les jeunes haussent les sourcils et Tachihara écarquille un peu les yeux. Leur supérieur leur propose une activité. Voilà qui était assez rare pour être souligné. C'est étonnant et tentant. Il leur reste jusqu'à la fin de la nuit. Acquiesçant silencieusement, et un sourire invisible du fait de son masque sur le visage de Gin, tous trois se réinstallent dans la voiture. Cette fois-ci, Tachihara est passé sur le siège passager, Gin au centre à l'arrière, et les fenêtres ont été ouvertes. L'air frais nocturne s'engouffre. Le silence règne, mais l'atmosphère est chaleureuse. La fatigue d'Hirotsu s'est en partie envolée. Ils sont bien, dans la nuit silencieuse.

Et quand ils se garent vingt minutes plus tard au pied de l'immeuble dans lequel habite Higuchi, c'est apaisé malgré ses sombres réflexions que Hirotsu sort de la voiture et avance vers la porte qu'une Ichiyô souriante leur tient.

"Entrez vite, j'ai fait du thé !"

La blonde les regarde entrer, soulagée de voir qu'ils vont bien. Elle adresse un clin d'œil à Gin quand elle voit celle-ci attraper la main de son aimé, et tous montent. Tous ensemble autour de la table, la fatigue recommence à peser dans l'atmosphère. Mais ce n'est pas désagréable cette fois. Ils se sentent presque en famille. Malgré le fait qu'il en manque des membres. Ils sont entre amis. Tous maudits certes, tous liés pour le pire, mais ensemble. Et cela suffit pour que Hirotsu soit soulagé d'avoir tant conduit pour revenir au plus vite.

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Voilà pour le premier jour ! Mes textes sont assez courts mais j'estime qu'ils n'ont pas besoin de s'étendre. L'important est que les idées soient transmises. J'espère qu'il vous a plu, n'hésitez pas à commenter ! (ça aide à se motiver)

A demain !

Cycla'


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