Chapitre 25 :

Essoufflée, je sors de sport en sueur. Ai-je déjà dis que je haïssais la musculation ? Mes deux amis à mes côtés, nous nous disons au revoir, nous souhaitant une bonne après-midi.

Malgré sa présence à côté de ma moi cette matinée, je n'ai pas adressé une seule fois la parole à Jérémy. Tout comme lui. Déjà parce-que je ne savais pas quoi lui dire, puis je trouve mieux de lui parler en dehors des cours. Le théâtre cet après-midi sera mouvementé. Il y aura son regard noir, il y aura mon inquiétude et je sens que l'atmosphère pèsera sur nos doutes, nos colères. C'est alors assez vite que j'ai mangé, fait mes devoirs et que je me suis préparée pour aller au théâtre. Vêtue d'un simple jean, et d'un tee-shirt blanc, me voilà arrivée devant le bâtiment. Le prof m'accueille chaleureusement et vu mon avance, il me fait signe qu'une seule personne est arrivée. Je sais très bien qui est là. Je le sais, et c'est d'ailleurs la raison précise pour laquel je suis en avance. Jeremy prend des cours particuliers avec le prof, il vient donc une heure en avance ici.

M'avançant doucement dans la grande salle, j'observe Jeremy qui est assis dans un fauteuil. Il tourne la tête, s'attendant sûrement à voir un de ses camarades ordinaire. Nulle fut sa surprise en me voyant le fixer. Soudainement son regard se noircit en même temps de se lever

-En avance. Dit-il simplement en croisant les bras

-Bien vu. Dis-je en esquissant un léger sourire.

Je veux arranger les choses entre nous, une bonne fois pour toute. Mais par quoi commencer ? Comment dire, faire comprendre ?

-Tu... Veux quelque chose ? Demande-t-il en voyant que je le fixe

-Bah... Tu sais pour hier... Dis-je honteuse. Je voulais m'excuser, j'ai été bête de réagir ainsi.

Jeremy, surpris, hausse un sourcil et regarde ailleurs, ne me fixant pas complètement

-Je croyais que Madame ne voulait jamais s'excuser ?

Sidérée je le dévisage.

-Hein, et depuis quand ?

Je ne me souviens pas avoir dit ça.

-Ce n'est pas ce que tu as dit à Nat ? « Oh je ne vais pas m'excuser ! Blah, blah, blah... »

Je ne peux m'empêcher de sourire en entendant l'imitation de voix féminine.

-Non, pas tout à fait. J'ai dit que je ne pouvais pas m'excuser pour un truc que je pensais. Hors, ce que j'ai dit hier, bah ma réaction était excessive.

Jeremy rigole de bon cœur et reprend :

-Pour un sachet de sel ! Dit-il hilaré

-Pas tout à fait, à cause de ta gentillesse. Faut dire qu'on n'a pas trop l'habitude de te voir ainsi.

Mon voisin esquisse un sourire et croise les bras.

-Et du coup, quelle conclusion amène cette conversation la plus niaise que je n'ai jamais entendue ?

Surprise je réponds avec un sourire :

-Tu as cru que c'était une leçon qu'on faisait et qu'il y avait une conclusion ?

Mon interlocuteur lève un sourcil se rendant compte de sa phrase

-Bon, bah si tu préfères, qu'attends-tu de cette conversation ?

Je reprends soudainement un air sérieux.

-Et toi ?

Jeremy croise les bras, un léger sourire sur son visage.

- Ne faisons pas les enfants, je t'ai demandé en premier. Tu es venue me parler pour avoir cette conversation, alors dans quel but ?

Sans vraiment avoir le choix, je soupire un bon coup

-Je ne veux plus de cette guerre.

La porte grince, ce qui interrompt notre conversation. Les yeux rivés vers la porte, Mathilde fait son entrée en nous saluant.

-Vous parliez de quoi ? Demande-t-elle gentiment.

Si elle savait...

-De tout et de rien. Répond Jeremy aussitôt.

-Mais plus exactement... ? Tente-t-elle de continuer.

-Surtout de rien. Dis-je amusé.

-Rooh mais sur quel sujet ? S'impatiente-t-elle.

-La guerre. Déclare finalement Jeremy.

Les yeux de Mathilde deviennent plus ronds qu'ils l'étaient déjà. Surprise la jeune rousse déclare :

-Et la guerre est un sujet normal, comme quand on parle de tout et de rien ?

Jeremy éclate de rire ébouriffant les cheveux de sa camarade.

Lorsqu'il est ici, ce n'est plus le même. Ce n'est plus le dépressif, blasé se foutant de la vie et critiquant tout le monde. Nan, lorsqu'il est ici il est gentil, marrant, à sa place... Il est lui-même. Est-ce lui le vrai Jeremy ? Un gars, avec un joli sourire, qui profite du théâtre pour faire passer ses colères, dénoncer... En vrai j'aurais pu m'en douter. Mais à vrai dire, j'étais plutôt partie sur l'idée que Jeremy était ce genre de mec pensant uniquement à lui.

Finalement les autres personnes arrivent et rapidement nous commençons les improvisations. Je me sens de plus en plus à l'aise ici. Les gens sont super sympas et inspirent la confiance. Ils donnent des critiques constructives sur l'impro, et rigolent avec plaisir aux tentatives de blagues que je lance. Terminant une impro, Louane et Elodie retournent à leur place. Le prof, se place face à nous et s'apprêtent à donner des consignes

-Bon, vous êtes bien gentils, je vous laisse choisir vos groupes et c'est toujours la même chose. Je vais donc moi-même choisir pour faire un mélange. Donc Elodie, tu te mettras avec Laurent. Yvana avec Mathilde, et Jeremy avec Louane.

Je tourne doucement mon regard vers celui de mon voisin. Décidément, je vais finir par vraiment avoir un doute sur ce qu'a dit Nathalie à propos du destin. Le prof prend une bannette* où il mélange des papiers pliés.

-Un thème est inscrit sur chaque papier. Explique-t-il. Vous piochez au hasard.

Tendant la bannette, une première personne pioche, suivit d'Yvana et enfin au moment où j'allais y mettre ma main, Jeremy me dépasse, en arrachant le papier. Lorsque confuse, je le regarde sans vraiment comprendre pourquoi, il m'explique en haussant les épaules

-Je suppose que tu t'es dit dans ta tête que c'était encore de la poisse de m'avoir avec toi, alors pardonne-moi mais vu la chance que tu as, je ne préfère pas prendre le risque de piocher le pire thème. Tu me gâches déjà mes heures de cours, je ne veux pas en plus que tu gâches le théâtre.

A la fin de sa phrase, je ne peux m'empêcher de sourire. C'est à ce moment que je comprends que Jeremy a une façon de dire ce genre de choses avec beaucoup d'humilité, pas une once de supériorité. Je comprends alors à ce moment, que ''ironie'' reflète bien les paroles de mon camarade. Il n'avait absolument pas lancé sa remarque pour blesser.

C'est drôle comme d'un coup ma vision de lui a changé. Ce personnage, hideux, sans cœur et sans humour, devient un garçon généreux, drôle et charmant. Je ne dis pas que j'accepte son humour noir, ses vannes douteuses sur la pédophilie ou même son admiration pour Hitler, mais je dois avouer qu'intérieurement je rigole à chaque fois. De notre guerre, est née une petite complicité particulière. L'impression que nous pouvons à présent nous insulter de tous les noms sans jamais que ça nous blesse. Même mes insultes ne sonnent plus méchantes lorsque je lui lance. Alors sans penser pouvoir le faire réellement, j'ai fait une impro avec lui, rentrant dans son humour et ce jeu de guerre que nous avons instauré sans nous concerter. Oui, maintenant nous avons compris que cette guerre n'était finalement qu'un jeu, un divertissement. Nous ne nous sommes jamais détestés, jamais haïs. Nous ne nous sommes jamais appréciés non plus, mais maintenant nous ressentons un certain plaisir à nous taquiner. Mieux qu'un ''je t'aime'', un ''je te hais''. Mieux que les surnoms débiles ''mon amour'', préférant ''connard''. C'est tout cela que j'ai réalisé lors de ce cours de théâtre. J'ai réalisé que je n'arrivais plus à faire semblant de le détester et d'être déçue d'être à ses côtés.

« 14/01 : Cher journal,

J'ai compris, je me suis rendu à l'évidence. Je veux que Jeremy soit un ami. Qu'importe ce qu'en pensera Marie, Nathalie ou n'importe. Je veux continuer ce jeu de guerre, ce jeu de fausse rivalité. Jeremy me fascine, et cela depuis le premier jour. Depuis qu'il m'a montré son air insolent et qu'il m'a fait comprendre qu'il ne voulait pas être ami avec quiconque, bah j'ai envie d'être ami avec lui.

Lou. »

***

Encore merci pour la correction de @2ndeBlast ! Gros love à elle ! ♥ N'hésitez pas à me donnez vos avis sur cette nouvelle évolution entre Jeremy et Louane ^^'

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