Le garçon au cheveux noir s'avance vers moi pendant que je suis incapable de bouger.
-Tu fais quoi ici ? Demande Jeremy un peu brusquement

-Je suis venu voir ma mère qui travaille ici, et toi ? Dis-je doucement

-Bah je suis venu voir ma mère qui travaille ici.

Toujours en se fixant nous lâchons en même temps avec les dents serrés "Poisse"

Si ça ce n'est pas de la malchance? Madame "Ferrari" regarde son fils interloqué et se tourne vers moi. Ma mère, sortant de la petite pièce arrive en regardant la scène.

-Bah qu'elle chance ! S'exclame ma mère en ayant entendu la conversation. Le monde est petit quand même! Elle se tourne vers sa patronne en souriant. Que dites-vous de venir manger avec votre fils demain soir ? Hein c'est une bonne idée Lou ? Mes yeux s'écarquillent en même temps que ceux de Jeremy qui visiblement trouve, comme moi, cette idée impensable

-J'suis pas là ! Déclare-t-il soudainement

-Moi non plus ! Dis-je avec automatisme. Les deux mères se jettent un regard presque complice et ma mère poursuit :

-Bon, on a qu'à dire ce soir nan ? La patronne acquiesce et nous restons sans voix. Plus d'échappatoire possible.

-Mon fiancé sera là également, cela ne vous dérange pas ? Demande la patronne. Je me retourne en me grattant la nuque nerveusement pendant que ma mère la rassure. En plus de devoir le supporter la semaine et même le mercredi après-midi, je dois en plus le voir manger chez moi.

Pour me sortir de cet engrenage infernal, je déclare avoir des devoirs à faire.

-Bah Jeremy, tu m'as dit que tu n'avais pas de devoir. Déclare la patronne à son fils. Celui-ci me jette un regard noir voulant clairement dire que j'aurais mieux fait de la fermer. Alors je prends un malin plaisir à regarder la scène en croisant les bras.

-Peu importe. Répond-t-il simplement. Juste ça ? Il ne va pas chercher à mentir pour sauver sa peau ? Non il lui dit clairement qu'il s'en fou. Son attitude m'étonnera toujours. Sans perdre de temps je m'éclipse jusqu'à mon appartement.

Quelques minutes plus tard, ma mère rentre dans l'appartement en poussant un soupir de soulagement. A peine rentré, elle va directement dans la cuisine

-Ils arrivent dans une heure, met la table, je prépare à manger. M'ordonne-t-elle de bonne humeur

Je soupire, cherchant quelconque excuse pour ne pas manger avec eux -ou plutôt avec lui-.

-Ah merde ! M'exclamais-je. J'ai oublié, mais j'ai promis à Nathalie de manger avec elle ce soir.

Ma mère hausse un sourcil.

-Ah oui ? Et où ça ?

-A Macdo. Dis-je au pif

-Bah tu lui diras une prochaine fois. J'ouvre grand les yeux, refusant cette réponse :

-Mais je ne peux pas !

-Ecoute ma chérie, je ne peux pas annuler au dernier moment. Je te rappelle quand même que c'est ma patronne ! Alors, profite d'avoir ton camarade de classe qui vient ce soir !

Je ne peux plus répliquer. Ma mère est des plus têtus et personne ne pourra la faire changer d'avis. Puis, c'est vrai que c'est sa patronne alors je ne peux pas faire n'importe quoi. Poisse rentre chez toi... J'obéie malgré moi à ma mère, et place cinq couverts.

Effectivement, à l'heure convenue, la sonnette retentit. Ma mère, visiblement stressé, jette un coup d'œil à la table pour s'assurer que tout est en place. Ma mère court -littéralement- vers la porte pour les ouvrir en même temps de replacer correctement ces vêtements. La porte s'ouvre pour laisser apercevoir la patronne avec un homme d'environ son âge. Au milieu, Jeremy, un parfait mélange de ces deux parents. Espérons que niveau caractère ils ne sont pas pareille. Le fiancé me fait la bise et nous nous asseyons. Je me mets à l'opposé de Jeremy, et malgré le regard interrogateur de ma mère elle ne fait pas de remarque sur cette attitude. Nous prenons l'apéro, en parlant de tout et de n'importe quoi. Ils ont l'air sympa -contrairement à leur fils. Au bout d'un moment ma mère se lève et rapporte le plat : blanquette de veau. Toujours dans la même humeur nous mangeons tranquillement. Une fois terminé, ma mère a le malheur de s'adresser à moi :

-En attendant le dessert, tu fais voir ta chambre à Jeremy ?

J'essaye de trouver une excuse pour refuser, mais aucune ne me vient. Le moindre faux pas que je pourrais commettre peut rendre ma mère sans emploi. Alors, doucement je me lève sans oser regarder Jeremy. Je me dirige doucement vers ma chambre, ignorant si Jeremy me suit ou non. Quand j'ouvre la porte, je me retourne pour laisser passer mon voisin de classe qui a mon plus grand malheur ma suivit. Sans gêne, il s'assoit sur mon lit en poussant un soupire

-Vraiment pas de chance. Se plaint Jeremy

-A qui le dis-tu... Dis-je en soupirant à mon tour

Je le vois regarder un peu partout autour de lui, regardant ma décoration pas terminé.

-Vasy critique, je vois que tu en as envie... Dis-je un léger sourire en coin

Jeremy plonge ces yeux dans les miens visiblement surpris de ma phrase.

-Pourquoi critiquerais-je ? Demande-t-il doucement

-On dirait que c'est ta passion. Critiquer, emmerder le monde...

Il reste un moment silencieux semblant partir dans ces pensées puis répond :

-Mouai, je crois que tu as raison. En même temps, c'est amusant d'emmerder le monde nan ?

J'hausse un sourcil ne comprenant pas bien son point de vue

-Non, avoir des ennemis ne m'intéresse pas.

-Alors pourquoi m'avoir comme ennemi ?

Je reste muette suite à sa question.

-Je ne t'ai jamais considéré comme. Répondais-je finalement en haussant les épaules. Après tout je ne suis même pas certaine d'avoir déjà considéré une personne comme mon ennemi

-Ce n'est pas ce que tu as dit à Nathalie. Je deviens ton ennemi numéro 1. Dit-il amuser

-C'était une façon de parler. Soufflais-je

-Pour toi, qu'est-ce que c'est un ennemi ?

Je prends quelques secondes à réfléchir et réponds :

-Quelqu'un qui nous fait du mal, à qui on souhaite tout le malheur du monde, qu'on ne peut pas voir, qu'on ne supporte pas... En gros voilà.

-Et donc, peux-tu me voir, peux-tu me supporter ? Demande-t-il avec un sourire insolent

-Non, mais je ne souhaite pas ton malheur. Juste je m'en fiche, on va dire que je ressens de l'indifférence mais en plus négatif à cause de tes emmerdes.

-Tu souhaite quand même que je ne réussisse pas dans mon métier. Dit-il d'un ton plus sec

-Je ne souhaite pas, juste je n'y crois pas. Ecoute, je vois bien que c'est un sujet sensible pour toi, alors pourquoi en parler ?

-Et puis-je savoir pourquoi tu n'y crois pas ? Demande-t-il en croisant les bras

-Qu'est-ce que ça changerait ? Je croyais que tu t'en foutais de mon avis.

Jeremy hausse un sourcil, ne semblant pas se rappeler d'avoir dit ça.

-Certes, mais on avance grâce à des critiques constructif. Donc ?

-Je pense que personne n'est prêt à rire pendant 1h30 de spectacle à de l'humour noir qui parle de noir, de juif ou même de maladie. Parler de sujet sensible, tabou ou même pouvant vexé certaines personnes, je ne vois pas le principe. Payer pour voir un humoriste qui insultera ta religion ou même ton physique n'est pas un kiff.  Tu attireras juste la haine en voulant faire sortir la tienne. Dis-je en haussant les épaules. Encore une fois, je m'attends à un changement d'attitude, à voir des éclairs dans ces yeux, qu'il me jette un regard noir... Mais rien. Il me regarde semblant réfléchir à ma critique. Finalement il ouvre la bouche pour répondre :

-Je ne veux pas faire de l'humour noir.

J'écarquille les yeux surprise. Ai-je réussi à lui faire changer d'avis ?

-Ah ouai ? Dis-je avec un sourire que je ne peux m'empêcher de cacher

-Non, je veux faire de l'humour engagé. Dénoncer en faisant rire, choqué pour faire réagir...

Je soupire en levant les yeux au ciel

-Les emmerdes seront les mêmes.

-Ah donc c'est ça qui te préoccupe dans mon humour ? Les emmerdes que je pourrais avoir ? Mais ne t'inquiète pas, il ne t'arrivera rien, et moi tu t'en fou n'est-ce pas ? ''Indifférence'' tu disais ?

J'allais répliquer quand ma mère nous appelle pour le dessert. Sans me laisser parler, Jeremy se lève d'un bond et se dirige vers la salle.

« 12/01 : Cher journal, j'ai dû manger le soir avec Jeremy. Horrible. J'ai dû parler avec lui de son métier... Intéressant.

Lou. »

XXX

Ils ont réussit à manger ensemble sans se tuer ! Miracle nan ?