- On doit s'habiller de quelle couleur quand on rencontre la copine de son frère, qu'on a déjà rencontré mais qu'on a oublié ?

J'ai un peu crié pour qu'il puisse entendre de sa chambre, accolée à la mienne.

- On met du bleu, répond-t-il avec le plus grand sérieux.

Sa réponse me fait rire mais je choisis de l'écouter. J'attrape un haut bleu avec une fleur rose pâle sur le devant et un pantalon noir aux coutures du même rose pâle. J'ai constaté avec effarement que la totalité de mes vêtements comportait du rose. Pas toujours en grande quantité mais toujours une petite touche pour le rappeler. Toutes mes chaussures, mes vestes, mes bijoux sont également roses, rose clair ou rose foncé mélangé à d'autres couleurs comme du kaki ou du blanc. Voir autant de rose me donne la nausée mais je m'y accommode du mieux que je peux. Heureusement, j'ai trouvé des chaussettes blanches !

Une fois prête je le rejoins dans sa chambre, il est assis à son bureau et joue sur son ordinateur à ce qui semble être un jeu de basket. Il est aussi doué à l'écran que dans la réalité même si je ne l'ai encore jamais vu jouer en vrai. Je m'affale sur le lit en faisant le plus de bruit possible.

- Je n'arrive toujours pas à croire que tu ne m'aies pas dit que tu avais une copine ! Je suis sortie du coma il y a des mois !

Il ne répond pas tout de suite. Il marque un but, non, un panier, puis met son jeu sur pause. Il se retourne vers moi et hausse les épaules.

- Ça n'aurait pas changé grand-chose que je te le dise, Susana n'aurait pas pu venir te voir dans l'immédiat. Puis j'avais peur que ça te perturbe un peu de la voir sans la reconnaître.

- Je te vois et je ne te reconnais pas. Pour l'instant je trouve que je gère ça bien.

Une lueur triste traverse son visage avant d'être immédiatement remplacée par un sourire éclatant. Je regrette un peu d'avoir eu à évoquer mon amnésie alors je souris avec lui. Il reçoit un message sur son téléphone et le consulte.

- Elle est devant la maison ! annonce-t-il enthousiaste.

Je le regarde se lever avec impatience pour retrouver sa bien aimé. Au moment de franchir la porte de sa chambre, il fait demi-tour et m'attrape par les bras pour m'emmener avec lui. Je regarde chacune des émotions qui traversent son regard et j'essaie de les identifier une à une. Il a l'air nerveux de la voir, comme s'il s'agissait d'un premier rendez-vous. Pourtant ils sortent ensemble depuis plus de deux ans. Il court presque pour atteindre la porte d'entrée, il l'ouvre et mon regard se dirige instantanément vers la jeune fille qui nous fait face. Elle porte du bleu et son sourire est rayonnant. Toutefois nous restons plantés tous les trois devant la porte d'entrée à nous regarder comme des idiots. Andrew semble avoir perdu son entrain.

- Tu n'es pas censé inviter ta petite amie à rentrer ? Je ne sais pas, lui faire un bisou, dire bonjour, quelque chose dans ce genre-là ?

- Oh tu sais, Andrew n'a jamais était très poli avec les dames ! annonce-t-elle sur un air malicieux.

C'est à ce moment qu'Andrew se décide à agir, il proteste et se défend comme il peut mais nos regards lourds de reproches le contraignent à se taire. Il essaie de se rattraper en l'embrassant mais elle se dérobe et lui présente sa joue visiblement vexée. Néanmoins son regard m'indique qu'elle le taquine plus qu'autre chose.

Puis elle m'attrape par la main et m'entraine dans le salon où elle s'installe sur le canapé. Elle me fait signe de faire la même chose et cherche dans ses affaires deux feuilles qu'elle me tend. Sur la première il y a écrit Curriculum Vitae et sur l'autre Lettre de recommandation. Je l'interroge d'un regard.

- La première fois qu'on s'est rencontrée, c'était dans cette pièce et tu m'as fait passer un interrogatoire complet. Du coup aujourd'hui je me suis préparée, vas-y l'entretien peut commencer.

Je prends une seconde pour assimiler ce qu'elle vient de me dire. Je regarde tour à tour Andrew, qui s'est assis entre nous deux et Susana qui conserve le plus grand des sérieux et nous éclatons de rire. Un rire franc et généreux que seul des amis de longues dates peuvent obtenir. Au bout d'un certain temps, le calme revient, je parcours quelques lignes sans vraiment les lires.

- J'ai juste une question. Est-ce que tu l'aimes ?

Le regard des deux tourtereaux se croise immédiatement et leurs joues s'empourprent. Puis elle me regarde dans les yeux.

- Oui, je l'aime.

- Bien c'est super ! Je ne vois pas d'objection à votre union, vous voulez que je vous marie tout de suite ou pas ?

Ils me regardent les yeux écarquillés comme si j'avais prononcé une obscénité.

- Tu as dit la même chose la première fois...

Je décide de rendre l'atmosphère plus légère.

- Et alors je vous ai marié ?

- Non.

- Tant mieux parce qu'il y a quand même un truc qui me dérange. As-tu réellement demandé à ton ex de te faire une lettre de recommandation ?

- Non bien sûr que non, je ne suis pas folle voyons. Je voulais te prouver que j'étais une super belle-sœur, alors j'ai demandé à sa sœur.