- Chapitre 7 -
Le concours approchait très vite et mon histoire était à présent terminée. Assise en tailleur sur mon lit et le téléphone dans les mains, je reçus un message - très long - de ma prof. Voyant que c'étaient les informations concernant le concours, je m'empressais de le lire.
[Mme. Poésy
J'ai enfin eu toutes les informations concernant le concours. Vous me passerez votre histoire et moi, j'irai la donner au jury. Ils choisiront les douze meilleurs romans. Les douze premiers de chaque région iront à Paris pendant deux jours.
Entre temps, vous aurez écrit un deuxième roman encore mieux que vous m'aurez passé. Je l'apporterai à Paris et trois autres jurys choisiront les dix premiers. Ceux-là auront une médaille et un prix et leurs deux histoires seront publiées dans un vrai livre.
Je vous souhaite bonne chance. Commencez dès maintenant à écrire la deuxième histoire. Au revoir]
Cette nouvelle me fit plutôt plaisir. Je répondis aussitôt à ma prof :
[Moi
Merci pour toutes ces informations. Je ferais de mon mieux.]
M'installant à mon bureau, j'ouvris mon ordinateur portable et entamai la deuxième histoire.
Lorsque je relevai la tête, il faisait nuit noire. Épuisée, je me couchai dans mon lit sans regarder l'heure. Je m'éloignai vite de mon monde.
Je marchais. J'étais toute seule dans une grande ville abandonnée. Il faisait froid et sombre, et la lune n'était pas présente. Les réverbères étaient allumés et une légère odeur de pneu cramé flottait dans l'air, me faisant retrousser le nez à plusieurs reprise.
J'observais les environs lorsque j'entendis quelqu'un m'appeler. Une voix faible provenant d'une petite maison. Je m'approchai alors, ravie de constater que mes jambes m'obéissaient. Les secondes passèrent. J'entrai par l'ouverture sans faire le moindre bruit. Sans compter la lune, la seule source de lumière présente provenait d'une porte entrouverte au fond du couloir sombre dans lequel je me trouvais à présent.
─ Lou... !
La voix provenait de là-bas. Je m'avançai doucement dans le couloir et aussitôt, ma main fut posée sur la poignée de la porte. Mouvement vers le bas. Je sursautai.
Une petite fille attachée à une chaise me fixait de ses yeux clairs effrayés. Je la connaissais. J'en étais presque certaine, car les cheveux blond platine qui ornaient sa tête n'appartenaient qu'à une personne. Mon amie d'enfance, Lynn. Seulement, cette version d'elle ne devait pas avoir plus de six ans avec ses un mètre vingt. Elle me regarda, un sourire glacé aux lèvres.
─ Tu es enfin venue ! Si tu savais comme je t'ai attendu...
Je la regardai, perplexe, et répondis :
─ Qui es-tu ?
─ Aide-moi, me coupa-t-elle. Aide-moi, je t'en supplie... Je ne veux pas partir. Je ne veux pas te quitter !
─ Mais qui es-tu ! répétais-je en haussant la voix.
La ressemblance était frappante. C'était forcément elle. Je continuai :
─ Tu ressembles à une amie...
─ Oui, c'est moi. C'est moi, Lynn Dalley !
Je m'approchai, tendant la main vers elle.
─ Aide-moi ! me répéta-t-elle. Aide-moi, je t'en supplie ! Je ne veux pas t'abandonner... pas une seconde fois !
Il m'aurait fallu une seconde supplémentaire pour toucher sa main, si la terre ne s'était pas ouverte sous ses pieds.
─ HAAAA ! Je t'attends, je t'attends au concours !
Et je restai debout, spectatrice de mon propre rêve suspendue dans les airs, observant sous mes yeux terrifiés mon amie disparaître dans les profondeurs de la terre.
Je m'éveillai en sursaut, de la sueur perlant sur mon front. Mon corps tremblait de tout son long, bien que mes couvertures soient tirées jusqu'à mon menton. Ce rêve m'avait paru si réel que je sentais encore l'odeur de pneu cramé. De quoi me donner la chair de poule pendant de nombreuses années.
Une pensée me vint alors. Et si c'était vrai ? Et si elle allait vraiment m'attendre au concours ? Non, je dois juste espérer la revoir. Pourtant... quelque chose en moi me poussait à y croire.
La petite lumière de mon téléphone clignotant dans le noir me poussa à le prendre. Trois heures et demie. Un nouveau message y était affiché.
[Antoine
Salut princesse ! C'était juste pour savoir. As-tu fini d'écrire les deux histoires ? Et je te préviens aussi que mon prof nous en a également parlés et que je participe. Voilà voilà, salut !]
[Moi
J'ai fini la première et presque terminé la deuxième histoire. Et ne m'appelle pas princesse !!]
Je tombai d'un coup sur mon lit et me rendormis. La fatigue me gagnait souvent en ce moment.
***
Les yeux dans la glace de ma salle de bain, je réfléchissais à ma vie et à la journée qui allait suivre, ou j'allais devoir rendre mon écrit. J'étais terrifiée. J'avais peur que mon histoire ne plaise pas, peur que ma prof de Français ne l'accepte pas, et peur d'encore au moins un million de chose.
"Pas d'inquiétude, la journée se passera bien". Les mots que me balançait mon cerveau me répugnaient. Depuis quand j'avais autant appris à me mentir à moi-même ? Peut-être bien depuis la disparition de mon amie. Elle me manquait horriblement. Terrifiant. J'avais peur.
***
Arrivée devant le grand bâtiment qui me servait de lycée, je fus prise d'un haut-le-cœur en traversant la zone non-fumeur. Ce matin encore, personne n'était là pour les arrêter. Une journée normale, en somme.
J'entrai dans ma salle de Français, ou ma prof était toute seule en train de corriger des copies. Elle me vit et redressa ses lunettes.
─ Ah, Lou. Tu viens pour me rendre l'histoire ?
─ Oui, c'est ça madame.
Elle s'approcha tout en continuant à me parler.
─ Très bien. Le concours aura lieu le week-end prochain. Tu pourras venir ?
─ Oui, je peux. Mais il sera où ?
Elle mit sa main sur son front, avant de répondre.
─ Oh, c'est vrai, j'ai oublié de le dire. Et on a de la chance ! Cette année, la première partie du concours se passe dans notre ville. Et ils ont prévu de la faire dans la grande salle du lycée !
Mes yeux s'écarquillèrent.
─ Mais c'est génial !
─ N'est ce pas ?
─ Merci beaucoup madame.
Je lui passai mon roman et la remerciai une dernière fois. Puis, je me rendis à mon cours de maths.
***
Une semaine plus tard
Le week-end était arrivé et le concours était aujourd'hui. Rina, Lola et moi nous dirigeâmes vers la grande salle du lycée. Il y avait plusieurs rangées de chaises et une estrade avec les six jurys qui parlaient entre eux. Nous nous assîmes sur trois chaises et commençâmes à parler entre nous. Une boule se formait dans mon ventre. Le stress montait, et je n'étais pas la seule, visiblement, car Lola déclara.
─ Les filles, je stresse... Je stresse trop.
─ T'inquiète pas Lola, moi aussi, la rassurai-je.
Rina se tourna vers moi, le visage souriant.
─ J'espère que tu es arrivée dans les douze premiers.
─ Oh merci, je l'espère aussi ! m'exclamai-je.
Rina n'avait pas l'air de vouloir gagner, contrairement à Lola. Mais je n'eus pas le temps d'y réfléchir, car un des jurys se leva. Il avait des cheveux gris et une grande veste noire. Une fois son raclement de gorge effectué, il prit la parole.
─ Bonjour à toutes et à tous. Nous voici réunis aujourd'hui pour désigner les vainqueurs du grand concours de roman. Cette année, vous avez été plus nombreux à participer que les années précédentes, donc spécialement cette année, il y aura vingt-quatre vainqueurs au lieu de douze.
Il marqua une pause, vérifia que son public l'écoutait, puis continua.
─ Je vais maintenant vous appeler par ordre alphabétique. Vous vous mettrez debout pour que je vous voie. Je dirais à voix haute votre place dans le classement et vous pourrez alors vous rasseoir.
─ Les filles, vous serez appelées avant moi, chuchotai-je.
─ Je commence donc. Anders Kellie.
Elle se leva juste devant nous. C'était une fille assez timide, avec des nattes et des petites lunettes.
─ Je suis désolé mais votre histoire n'a aucun sens. Vous êtes arrivée 1 106 sur 1 207.
Elle se rassit. Je pus apercevoir ses mains. Elles tremblaient.
─ Austen Maëlle.
Elle se leva en renversant sa chaise. Elle ressemblait vraiment à une rebelle avec ses cheveux violets et ses habits punk.
─ Ce n'est même pas un texte, c'est un torchon ! s'égosilla le monsieur aux cheveux gris.
Quelques personnes rigolèrent.
─ Vous êtes arrivée 1 203ème.
Elle éclata de rire et se rassit, sûrement déçue de ne pas être arrivée dernière.
Le jury continua comme ça jusqu'à Lola.
─ Bell Lola.
Elle se leva. Je pris sa main tremblante dans la mienne pour la rassurer.
─ Votre histoire est très belle, surtout pour des lecteurs plus jeunes ; des collégiens ou des écoliers. À peine commencée, votre histoire nous envoie directement dans un monde rempli de bonbons et de nounours. Nous vous avons donc attribué la 22ème place.
Lola nous regarda, les larmes aux yeux. Elle m'avait caché son talent.
─ Je- je vais aller à Paris !
─ Un peu de silence je vous prie ! Maintenant, Bell Rina.
Elle se leva doucement et me regarda d'un œil rassuré. Je lui affirmai pourtant :
─ T'inquiète pas. Si Lola l'a fait, alors tu peux le faire.
─ Oh, mais ne t'inquiète pas, je ne veux pas gagner (elle me fit un clin d'œil), je te laisse ma place.
Je ne pus la remercier, car le jury continua à parler.
─ Je ne peux rien dire. C'est un roman tout simplement extraordinaire qui mérite la troisième place. Félicitations à vous.
Rina lâcha quelques larmes discrètes et se rassit.
─ Troisième... Troisième...
─ Bravo Rina ! Tu vois, je t'avais dit que tu pouvais le faire !
─ Merci Lou. Je n'en reviens pas... Troisième...
─ Haha, elle est complètement choquée, ajouta sa jumelle.
Rina essaya de se justifier.
─ C'est normal, je ne voulais pas ! Peut-être qu'à cause de moi, Lou arrivera 25ème...
─ Roh, mais non. Je suis fière de toi.
L'attente jusqu'à mon tour fut plus longue. Ma boule au ventre grandissait, encore et encore. Je détestais ce sentiment. L'attente. La peur. La panique. Je voulais qu'il dise mon nom. May Lou. May Lou. May Lou.
─ May Lou.
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