- Chapitre 13 -

PDV : Lou

J'ouvris les yeux. J'étais encore toute sonnée et je ne réalisais pas vraiment ce qui venait de se passer. J'avais l'impression qu'une fille m'avait racontée son histoire. Une fille qui comptait beaucoup pour moi. Une fille que je connaissais et que j'aimais beaucoup. Cette fille avait mal, mal au cœur. Un vide s'était installé en elle. Un vide énorme et douloureux. Beaucoup plus grand que le mien. Elle avait besoin d'une amie. Elle avait besoin de moi.

─ Tu te sens mieux ?

Une voix chaleureuse m'avait complètement réveillée. Une sonorité douce et calme, accompagnée d'un timbre ni trop vibrant, ni trop chaud. J'étais allongée par terre, la tête posée sur les genoux d'une demoiselle aux longs cheveux. Elle était belle avec ses traits fins et son teint quoique légèrement pâle, mais son regard ne correspondait pas à son visage. Il était beaucoup trop morne et éteint.

─ Le concours est fini ? lui murmurai-je entre deux respirations.

─ Oui.

Je quittais mes yeux scrutateurs de son visage pour les promener dans la pièce, surprise de n'y voir personne. Un haut plafond tout de noir, des murs espacés sur lesquelles couraient des câbles, je réalisais la grandeur des coulisses de ce bâtiment. Puis mon regard se reposa sur elle, et je repris :

─ Qui es-tu ?

─ Je m'appelle Lynn.

─ C'est un joli prénom.

─ Merci.

Elle continua, engageant pour de bon la conversation :

─ Et toi, tu t'appelles Lou ?

─ Oui, comment le sais-tu ? M'étonnai-je.

─ J'ai entendu quelqu'un t'appeler comme ça..

Je me réveillai alors d'un coup, ignorant sa réponse précédente.

─ Attends, tu dis t'appeler Lynn ?

Je me redressai pour la regarder de plus près. Ses yeux clairs et ses longs cheveux blond platine étaient les mêmes que dans mes souvenirs. Lynn... Je t'ai enfin retrouvée...

Je pris le mot dans ma poche arrière sans plus attendre et lui montrai.

"Ne t'en fais pas, je reviendrai, mais mon sourire aura changé. Je t'en fais la promesse. Lynn"

─ C'est toi qui as écrit ce mot ? demandai-je, les yeux écarquillés comme si ma mère m'avait annoncé qu'elle était enceinte.

Il y avait dans son regard une expression qui m'inquiétait. Mais je n'eus pas plus le temps de m'en inquiéter car elle me répondit.

─ Non, ce mot ne vient pas de moi. Désolée.

─ Que- Quoi ? Non, ce n'est pas possible !

Ne voulant pas m'avouer vaincue, je continuai l'interrogatoire.

─ Est ce que ton père est mort ?

Elle ouvrit les yeux un peu plus grands, surprise, avant de répondre :

─ Oui.

─ Dans un accident de voiture ? dis-je, un élan d'espoir s'ouvrant en moi.

─ Non, il est mort d'une crise cardiaque.

Ma bouche s'ouvrit, puis se referma, hésitant sur la dernière question. Je devais lui demander. Il le fallait. Et si elle répondait "non", alors je devais laisser tomber. Abandonner. Et rentrer. Ce concours n'aurait servi à rien. Tout ça n'aurait servi à rien.

Les yeux fermés et les doigts croisés, je murmurai alors.

─ Est-ce que ton nom de famille est Dalley ?

─ Oui.

Mes paupières se rouvrirent, et d'un revers de la main, je fis disparaître la trace d'une larme qui venait d'apparaître. Les yeux aussitôt embrumés d'eau salée, je pris Lynn dans mes bras afin qu'elle ne voit pas mes larmes.

─ Lynn, tu te souviens de ton amie d'enfance ?

─ Oui, j'en avais une, mais j'ai dû déménager et je ne l'ai jamais revu.

─ C'est moi, Lynn. C'est moi ton amie d'enfance.

─ Ce n'est pas possible.

J'écarquillai les yeux dans son dos.

─ Et pourquoi cela ?

Sa voix monta d'un coup.

─ Ce n'est pas possible ! Tu ne peux pas être elle ! Ce n'est pas possible !!

─ Mais puisque je te dis que c'est moi, LOU MAY !!

Je la serrai un peu plus, des petites larmes coulant toujours sous l'effet du choc, et elle continua d'une voix tremblante.

─ Je ne te crois pas ! Tu ne peux pas être elle !!

─ Tu vas arrêter de crier !

J'attendis deux secondes qu'elle se calme, puis, recommençai à parler.

─ C'est il y a quelques semaines que j'ai commencé à faire des rêves étranges. À chaque fois, tu étais là. À chaque rêve, tu t'enfonçais de plus en plus dans les ténèbres. Bon sang, comment en es-tu arrivée là ? Ressaisis-toi ! Tu as le droit de vivre. Tu as le droit de sourire, de pleurer, d'être heureuse, tu en as le droit !

Je la serai un peu plus dans mes bras, et continua.

─ Oublie ton passé, et fais face au présent. Je te dis que c'est moi, et je ne te forcerai pas si tu ne veux pas me croire. Mais comprends que je suis là, devant toi, et que je t'attendrai toujours.

Le silence fut ma seule réponse. Lynn demeurait immobile, et mes larmes coulaient toujours. Ma vue était si brouillée que je ne voyais même pas les trois personnes qui arrivaient par derrière.

─ Lou !

Je me redressai et me tournai dans la direction d'où provenait la voix. Puis, les voyant enfin, je lançai :

─ Rina, Lola, Antoine !

─ Oh, s'écria Lynn, ce sont eux qui m'ont dit de rester avec toi.

Je me retournai vers elle pour lui expliquer.

─ Ce sont mes copains... Non, pardon.

Je repris ma phrase, corrigeant mon erreur :

─ Ce sont mes amis. Oui, c'est ça. Et toi aussi, tu es mon amie.

Sans prévenir, Lola se jeta sur moi.

─ Louuu ! Je t'aime tellemeeeent ! Moi aussi, tu es mon amiiie !!

─ Et s'il te plaît arrête de pleurer, même si la déclaration de Lola te fait de l'effet, continua Rina.

On se mit à rire. Je jetai ensuite un coup d'œil vers Lynn et vis dans ses yeux la même expression que celle de tout à l'heure. Elle commença :

─ Elle qui était aimée de tous, elle qui était si joyeuse, si douce. Elle qui était à l'écoute des autres, qui était si généreuse. Elle qui souriait, elle qui respirait la joie de vivre.

─ Que dis-tu ? la coupai-je.

Elle ne m'écouta pas et continua son monologue d'une voix pesante.

─ Cette fille-là était partie. Depuis.. Depuis quand déjà ? Ah oui, depuis ce jour-là. La même nuit où tout fut fini, ou bien que tout a commencé. Elle qui s'appelait Lynn Dalley.

─ Mais que dis-tu ? Tu es Lynn Dalley !

Ses yeux dans les miens, elle continua.

─ Celle qui s'appelait Lynn, celle qui était ton amie, elle est partie. Ce n'est plus moi, je ne suis plus Lynn Dalley.

Antoine coupa toute la conversation, comprenant ce qui se passait.

─ OH MON DIEU.

Puis plus sérieusement, ses esprits reprit, il s'approcha d'elle.

─ Tu commences à être casse-pied à raconter ces sottises ! Et d'ailleurs, je m'étonne de ne pas t'avoir reconnu tout à l'heure.

Il la prit par le bras et la leva facilement.

─ Tu es Lynn Dalley et je suis ton frère, Antoine Dalley.

Il la colla à lui, ses bras entourant son corps.

─ Notre père n'est pas mort d'une crise cardiaque, mais d'un accident de voiture. Tu étais avec lui et as survécu par miracle. Notre mère a menti à tout le monde en disant que tu étais morte et est en réalité partie avec toi. Elle t'a dit des tonnes de mensonges pour te protéger, mais elle ne réalisait pas que cela te faisait souffrir. Nous sommes tous là maintenant, et nous allons te ramener avec nous.

Une larme coula le long de la joue de Lynn. Elle se mit à pleurer. Antoine aussi avait les larmes aux yeux.

─ Tu vas rentrer avec nous, hein ? Tu ne souffriras plus jamais. Je te le promets.

─ Alors c'est bien toi ? murmurai-je en voyant la scène.

Mes lèvres se pincèrent et des larmes tombèrent de mes yeux sans que je ne puisse les arrêter. Toutes mes années de douleurs s'envolaient. Ce regret de ne pas avoir pu la sauver partit, lui aussi.

Antoine s'éloigna de sa sœur et c'est moi qui pris Lynn dans mes bras.

─ Lou, excuse-moi, je t'ai menti ! C'est bien moi, c'est bien moi ton amie d'enfance !

─ Je le sais bien. Malgré ce à quoi tu aurais pu ressembler, je t'aurais reconnue dans tous les cas.

Nous nous regardâmes et éclatâmes en sanglots. Entre deux pleurs, je lui fis faire une promesse.

─ Pro-Promets-moi de ne plus jamais disparaître !

─ Je te le promets !

Alors que nous étions en train de profiter de ce moment, Antoine prononça une phrase. Une phrase qui avait été dite lorsque j'étais dans les vapes. Une phrase à laquelle je ne m'attendais pas. Mais alors vraiment pas.

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