Désir + Frustration

(4496 mots)

« Tu as entendu toi ? » Il fronça ses sourcils en se tourna vers son collègue. Ils étaient devant la machine à café dans le couloir. Harry attendait de récupérer son gobelet et apparemment, le collègue à côté de lui, un de ceux qui était le moins hypocrite, avait décidé de taper la conversation pour une raison ou pour une autre.

« Entendu quoi ? » Demanda-t-il en l'observant. C'était un homme un peu plus vieux que lui, un monsieur tout le monde. Il avait des lunettes, un crâne en voie de dégarnissement. Harry l'aimait bien parce qu'il ne pouvait jamais s'empêcher de papoter de ceci ou de cela, c'était toujours rigolo de traîner avec lui, il était comme une commère, connaissant toutes les rumeurs, tous les bruits qui couraient, tous les ragots les plus croustillants. Et c'était amusant. Surtout parce qu'il était aussi sa seule fenêtre sur la vie dans l'entreprise puisque personne ne l'avait à la bonne. À travers lui, il avait une idée générale de ce qu'il se passait dans la boîte.

« Ils sont en train de préparer un bureau, on pense qu'il va bientôt y avoir un nouveau dans la boîte. » Il haussa un sourcil. Bien sûr, ce qu'il se passait n'était pas nécessairement toujours intéressant.

« Tant mieux, on a de plus en plus de boulot et pas assez de gens pour s'en charger. » Il haussa une épaule en se penchant pour attraper son gobelet dans la machine et le monter à ses lèvres en observant son collègue. Il hocha la tête avec les lèvres pincées, semblant d'accord avec ce qu'il disait. Il repartit ensuite pour retrouver son bureau un peu plus loin. C'était sympa de travailler dans une si grosse boîte, à dire vrai c'était aussi très bien pour le portefeuille. Vivant tout seul, il pouvait dire que ce n'était pas trop difficile, certes il n'était pas non plus super riche, mais il n'avait quand même pas autant de soucis que les autres personnes de son âge. C'était pour ça qu'il pouvait si facilement se permettre de sortir souvent.

Et parlant de sortir. On était seulement mardi, pas le week-end. Ce n'était donc pas le moment de se distraire quand on avait une vie normale. Mais Harry en avait vraiment besoin. Son cerveau était en éveil, toujours à l'affût. Même se masturber sous la douche ne semblait pas faire passer son envie cette fois-ci. Depuis son samedi soir en compagnie du démon pervers qu'était Louis, il était toujours envieux. Le jeune homme l'avait comme comblé mais en même temps assoiffé encore plus. Le bon côté des choses, c'était qu'il pensait bien moins au sexe avec lui mais plus au sexe tout court, donc il y avait ça. Et c'était tout ce qu'il voulait. Ça lui était déjà arrivé d'avoir très envie de sexe au point de se sentir dépérir et d'avoir mal au ventre, cette fois la cause était non pas le fait que ça faisait longtemps mais juste un garçon un peu trop bon. Il avait fini par relativiser et réaliser. Mais maintenant il avait vraiment très envie, trop envie.

Alors quand il arriva chez lui, il prit la décision de se doucher, de se changer et de sortir. Il n'aurait qu'à se débrouiller pour arriver à l'heure au boulot et pas trop débraillé ou malade à cause d'une possible gueule de bois. Comment il choisit le bar ? Il ne sut pas vraiment, en fait il n'eut pas trop envie de se casser la tête alors il avait préféré jeter son dévolu sur le même que la dernière fois, celui qui n'était pas trop loin de chez lui. Il fermait tard et c'était un bon parti par conséquent, ça lui laissait parfaitement le temps de se trouver quelqu'un, peut-être même de le faire dans les toilettes, puis de rentrer chez lui après quelques verres. La soirée parfaite pour Harry, hors du commun, certes, mais pourtant tout ce qui pouvait prétendre à lui plaire et satisfaire ses envies. Il en fit même un sourire en entrant dans le petit pub bruyant et rempli de monde dans une semi-obscurité confortable.

L'ambiance de ce genre d'endroit lui avait toujours plu. Il ne savait pas spécialement pourquoi, il y avait quelque chose de vraiment fort à être là au milieu des gens, dans ce bruit avec la musique. Tout le monde se parlait, tout le monde se draguait, il avait l'impression dans ces instants que le reste du monde était bien loin alors que pourtant il était simplement derrière une porte fermée, dans la rue. Mais ici il était ailleurs, dans son univers. Il faisait partie de cette folie passante, de ce brin de frisson, sa vie devenait plus piquante, plus intense. Ça lui plaisait, il pouvait être qui il voulait, tous ces gens pouvaient être qui il voulait, ici, entre ces murs, sur cette piste de danse, même alors que tout le monde allait devoir se lever le lendemain et partir travailler dans la vraie vie. Là, ici, maintenant, ils étaient tous qui ils avaient envie d'être, loin du reste de l'univers. Harry adorait ce genre de sentiment. Il ne pensait pas avoir la nécessité de fuir sa propre vie, elle était bien correcte, mais il aimait tout de même parfois avoir la tête ailleurs que sur ses épaules, sur cette terre. C'était peut-être pour ça qu'il aimait autant le sexe finalement. Il avait besoin de se libérer de lui-même et de son propre corps, de se sentir ailleurs. Ailleurs avec un inconnu dans un lit aux draps brûlants, ailleurs que dans une boite pleine de bruit. Ailleurs, au centre de l'univers de quelqu'un pendant simplement un instant. Ailleurs, dans une tempête de désir dans un regard.

Gris. Un regard gris. Pourquoi en pensant à un regard il pensait à la couleur grise d'un seul coup ? Mais pas n'importe quel gris, un gris étrangement bleuté. Pourquoi ? « Harry ? » Il se redressa pour porter attention au jeune homme à ses côtés. « Quelque chose ne va pas ? Tu n'as pas fini ta phrase. » Le garçon fit comme une moue, quelque chose qui laissait penser que ça ne l'intéressait pas vraiment ce qu'il avait, il voulait juste qu'il le regarde. C'était toujours un peu comme ça pour les coups d'un soir, on faisait connaissance uniquement sur une couche superficielle, la surface de l'eau, la coquille, la partie visible de l'iceberg. On ne s'intéressait pas au reste, au vrai, à ce qu'il y avait en-dessous. Personne ne voulait prendre le risque de s'attacher plus que de raison à n'importe qui quand on flirtait pour un soir.

« Ah oui ? Ah, je suis distrait par des broutilles, y'a du bruit autour de nous. » Expliqua-t-il en souriant. Une perche. C'était une perche ça. Quelqu'un lui avait déjà tendu la même. Son regard partit comme une flèche dans la pièce, attiré par le mouvement, par une silhouette irréelle. Sa vision se fixa avec brutalité sur le tabouret près du bar, celui à côté duquel il s'était assis auparavant. Et là, sur ce même tabouret... un garçon était assis. Il avait les cheveux un peu courts, et châtains. Cet inconnu dût sentir un regard irritant dans sa nuque, parce qu'il se tourna vers lui et que ce ne fut que pour que Harry constate avec une boule tombant au fond de son estomac que... non, ce n'était pas Louis. Ce reflex n'avait vraiment été qu'un tour joué par son cerveau ? On devait se foutre de lui, quelqu'un devait être en train de se foutre de sa gueule.

« Hey ? » Il se tourna à nouveau vers son partenaire et le mouvement vif le ramena au réel, à savoir le jeune homme en face de lui qui était presque vexé de ne pas avoir son entière attention.

« Oh, désolé. » Rigola-t-il. « Ça te tente qu'on aille ailleurs ? Là où il y aurait moins de bruit ? » Le garçon sembla soudain plus qu'heureux, un sourire qui ne cachait pas son plaisir creva le bord de ses joues et il hocha la tête en ricanant d'une petite voix, un rire qui se tentait séducteur. Harry lui fit un sourire courtois et charmeur avant de se lever en finissant la fin de son verre. « Je n'habite pas loin, ça te va ? » Demanda-t-il au jeune homme qui hocha de la tête en tirant un peu mieux sa veste sur ses épaules quand ils arrivèrent dans la rue. Ils marchèrent plutôt proche l'un de l'autre, il plaça même son bras autour de ses épaules, mais ils se tinrent en silence. Il pouvait facilement deviner que son compagnon de ce soir n'était pas un habitué des coups d'un soir, il puait la nervosité, et si vous aviez le nez bouché pas de soucis, il tremblait aussi lentement et essuyait fréquemment une main sur une cuisse.

Ça n'arrêta pourtant aucun d'eux deux. Harry n'eut aucun problème à l'embrasser quand il arriva dans son duplex, le serrant contre la porte et lui retirant lentement sa veste et son pull de laine rose. Et son partenaire se laissa faire. Il eut une drôle de sensation à l'idée d'aller se le taper sur le canapé, et il n'avait pourtant pas très envie de l'amener à sa chambre alors il fit tout son possible pour que l'autre accepte en silence et sans rechigner de le faire juste là, dans le vestibule. Ce qui fut assez aisé à lui faire accepter, il avait suffi de le placer le ventre à plat sur le buffet devant lui pour que le garçon se laisse faire avec plaisir. Ce qui était sûr, c'était qu'il n'était plus autant nerveux et qu'il n'était par conséquent sûrement pas vierge, ce qui était préférable. Voler la virginité de garçons qu'il ne reverrait jamais de la vie n'était pas un hobby.

Quand il se réveilla le lendemain avec son réveil matin, son regard tomba sur un lit vide et quelque part ça lui donna un immense soulagement. Il l'avait quand même en travers d'avoir fini par coucher presque toute la nuit avec ce type et de l'avoir du coup mis dans son lit, mais il avait bien plus important que ça en tête. Là, tout de suite, quelque chose de bien pire que le simple fait d'avoir laissé un garçon dans sa chambre pour la première fois depuis assez longtemps, puisqu'il avait toujours mis un point d'honneur à ne pas faire venir les personnes avec qui il couchait chez lui dans un sens large. Il y avait autre chose de bien plus important au fond de sa tête, au cœur de ses pensées, et il avait vraiment besoin d'en parler à quelqu'un alors il se dépêcha de sortir de son lit pour se préparer et partir.

En chemin vers sa voiture dans le parking de l'immeuble, il attrapa son téléphone pour envoyer un message à Zayn et lui dire qu'il devait vraiment lui parler. Il était en train de devenir fou il en était plus que convaincu à présent, quelque chose n'allait pas comme il se devrait et ça ne lui faisait pas spécialement plaisir. Pour son plus grand bonheur, il trouva Zayn à l'entrée du bâtiment où ils travaillaient, un grand immeuble logeant plusieurs petites entreprises, dont la leur. Son ami lui fit un sourire en levant son thermos vers lui pour lui souhaiter la bienvenue. « Alors que se passe-t-il cette fois ? » Demanda-t-il en se tournant pour entrer dans le hall et rejoindre l'ascenseur avec Harry sur ses talons.

« J'suis sorti cette nuit. » Commença-t-il. Son camarade hocha la tête en prenant une gorgée de son café. Harry savait que c'était un café très noir, entre nous il ne savait vraiment pas comment qui que ce soit pouvait aimer le café très noir comme ça, ça avait un mauvais goût, c'était amer, et même en ajoutant du sucre il n'avait jamais pu en boire. Mais il n'était pas l'heure d'un débat pour savoir si le café était vraiment bon ou si les gens se forçaient à en boire pour une raison quelconque. « J'ai passé une super nuit mec. » Il baissa d'un ton pour ne pas risquer qu'on les entende, même une fois dans l'ascenseur juste tous les deux. « Avec un autre gars, j'ai baisé toute la nuit, on a fait que ça. » Zayn lui rendit son regard et fronça ses sourcils.

« Pourquoi je sens qu'il y a un 'mais' à ton histoire ? » Une de ses arcades sourcilières se redressa et Harry mordit sa lèvre.

« Parce qu'il y en a un. » Soupira-t-il avec ennui en se tournant vers la porte. « C'était vraiment super, le mec était vraiment bien, on a vraiment baisé comme des bêtes et je me suis vraiment bien amusé... »

« Et c'est là que vient le mais. »

Il hocha la tête en fixant un point dans le vide. Il n'arrivait même pas à y croire. « Mais c'est encore pire qu'avant. » Souffla-t-il. C'était irréel, il avait eu une envie assoiffée de sex, et il avait passé presque cinq heures trente à assouvir cette envie, et il en sortait encore plus frustré qu'avant. « J'ai plusieurs fois pensé à cet autre mec et... putain Zayn c'est n'importe quoi mais je crois que le fait de coucher avec quelqu'un d'autre m'a juste.... Encore plus donné envie de recoucher avec l'autre. » Il le vit froncer des sourcils. Difficile de suivre avec ce manque incroyable de prénom dans ses récits. Mais son ami avait des oreilles habituées à la confusion générale de la voix trop lente et des récits trop compliqués de Harry, alors il ne lui fallut pas trop de temps pour comprendre ce qu'il voulait dire.

« Sérieusement ? » L'ascenseur tinta et s'ouvrit et ils en sortirent en se regardant, Zayn avec un air profondément confus sur son visage habituellement détendu, un effet secondaire des trop nombreuses pensées de Harry.

« Je te jure... putain le mec... était sur moi dans mon lit, c'était n'importe quoi, il était en train de me chevaucher comme personne et dans ma tête je revoyais celui de la dernière fois et je crois que si j'ai autant pris mon pied c'est beaucoup lié à toutes les fois où j'ai pensé à lui. » Il passa ses mains dans ses cheveux en parlant à voix basse, il ne semblait même pas croire à ses propres mots avec ses yeux ouverts comme ça en grand, incrédule et presque apeuré. Ce récit ne tenait pas la route et pourtant c'était ce qu'il s'était passé. Exactement comme son regard avait cherché Louis dans la boite pendant qu'il était avec l'autre, son esprit lui avait offert le droit de fermer ses yeux et d'imaginer Louis à la place.

« Alors déjà... c'est vraiment triste pour ce mec. » Rigola son ami.

« Hier je me disais que coucher avec Louis m'avait donné envie d'encore plus de sexe, et maintenant que j'ai eu ce que je voulais.... Je crois que ce que je veux c'est plus de sexe avec lui. » Zayn leva ses sourcils en entendant le prénom, le notant sûrement quelque part dans un coin de sa tête mais ne faisant aucune remarque. Il poussa un petit soupir en tirant ensuite ses lèvres en une drôle de moue sur le côté de son visage, se posant une question au fond de lui ou bien réfléchissant.

« Tu dramatises je pense... Ça ne veut vraiment rien dire. Au pire quoi ? Ça veut dire que t'as vraiment grave pris ton pied avec Louis. » Il haussa une épaule. « C'est normal que t'en veuilles encore. C'est comme après avoir mangé un super fondant dans une grande pâtisserie, t'as plus trop envie de manger celui de l'épicerie du coin. » La comparaison lui plut, ça le fit même un peu sourire, mais ça faisait tout de même bizarre. Il ne voulait pas avoir de partenaire favori, il ne voulait pas d'attaches, et encore moins si c'était le petit frère de son putain de meilleur ami. Émile allait lui arracher les yeux s'il devait l'apprendre un jour, il en était plus que sûr. « Bon, au pire, couche encore une fois avec lui, juste pour voir ce que ça fait ! Peut-être que ce sera tout, qu'après ce sera fini ! » Rigola Zayn. « Que tu pourras revenir à ta vie normale en baisant n'importe qui sans penser à lui et au fait que tu t'es éclaté avec lui. » Il ferma ses yeux en mordant sa lèvre.

« Putain ne m'en parle pas je vais imploser sinon. » Soupira-t-il en secouant un peu sa tête, et son pote se fit un grand plaisir de se foutre de sa gueule bien comme il fallait en frappant son épaule de la paume de sa main. « Qu'est-ce que je fais si la seconde fois est encore mieux que la première et que j'ai juste encore plus envie de coucher avec lui encore après ? » Il tordit ses doigts en se tournant vers lui.

« Mec... tu te poses beaucoup trop de questions. Détends-toi, apprécie la vie non ? Tu t'es éclaté à fond au lit avec un mec dingue et t'es en train de te battre pour pas en faire un plan cul ? » Il rigola en finissant sa phrase, haussant ses sourcils et penchant sa tête sur le côté dans son amusement un tantinet dépité. « Si c'était moi, je serais déjà en train de m'agenouiller devant ce gars pour qu'il m'offre un peu plus. » Il laissa un souffle ressemblant à un rire se nicher entre eux. « Si tu ne le veux pas, dis-moi où tu l'as trouvé que je puisse faire un tour dans son lit moi aussi. » Il fit une grimace. C'était bizarre qu'il lui dise ça. Parce que c'était Louis, le frère d'Émile. Et c'était stupide de se faire une telle réflexion, c'était le frère d'Émile mais ça ne l'avait clairement pas empêché de le faire pleurer de plaisir sexuel sur son canapé. Il eut un autre flashback... ça faisait longtemps. « Nan mais franchement. » Il fit un signe de menton vers lui. « Tu t'en fais vraiment pour rien. T'inquiète, respire. » Lui assura-t-il.

« Harry. » Ils se tournèrent vers une femme qui venait vers eux, une de leur collègue, elle souriait, de cet air poli que tout le monde avait en venant vers eux, sa jolie jupe mettant si bien en valeur ses mollets que c'était évident que cette jupe était une de ses préférées et qu'elle se sentait vraiment bien et confiante dedans. En son opinion, c'était vraiment séduisant quelqu'un de confiant et d'à l'aise dans sa peau. Il leva son visage pour lui dire qu'il tendait l'oreille et elle sourit un peu plus en arrivant. « La boss veut te voir, t'es de corvée babysitting. » Et il comprenait pourquoi elle souriait. C'était sa façon de se foutre de lui parce qu'il était le favori de la patronne et que du coup elle le sollicitait pour beaucoup de choses, dont la 'corvée babysitting' de toute évidence.

« Quoi ? » Demanda-t-il en fronçant ses sourcils en partant à sa rencontre. Elle s'arrêta au milieu du couloir quand elle le vit le rejoindre.

« Eh bien, je crois qu'elle t'expliquera mais y'a un nouveau dans la boite. » Il haussa les sourcils. Ah oui, c'était vrai, il se souvenait de ça. Il lança un regard à Zayn et lui fit un signe de main avant de simplement prendre sa route pour rejoindre le bureau de la patronne. Il serra ses lèvres. Elle devait probablement avoir besoin de lui pour faire faire le tour des locaux au petit nouveau, lui montrer comment fonctionnait l'imprimante, rien d'incroyable, quelqu'un l'avait déjà fait pour lui quand il était arrivé ici. Peut-être lui expliquer comment se connecter à son compte professionnel sur le réseau de l'entreprise et lui dire qui il devait voir s'il avait un problème avec quoi que ce soit d'informatique. En soit, rien de bien incroyable. Il arriva devant la porte, remonta un peu son sac sur son épaule et racla sa gorge pour se préparer. Puis il toqua, cognant le dos de ses phalanges sur la porte, deux fois. Dans le même mouvement, il fit ensuite tomber sa main vers la poignée et, au signal de sa boss derrière la porte, il appuya dessus pour ouvrir.

« Vous m'avez demandé ? » Il entra dans la pièce en observant la personne sur la chaise. Le garçon était dos à lui et il se figea de tout son être en le fixant, attendant qu'il se tourne et que ça fasse comme la veille même au bar, que ce ne soit pas lui. Il voulait juste que ce soit une blague, il voulait qu'on se foute de lui cette fois. Il voulait que pour une fois, les choses aillent comme il le voulait dans cette histoire. L'autre devait être aussi surpris que lui, parce qu'il ne semblait pas résolu à se tourner et semblait tout autant immobile sur son fauteuil.

« Oui. Je voulais que tu fasses faire à notre nouvelle recrue un petit tour des locaux. » Il ne leva pas les yeux vers elle. Il allait devoir se tourner. Il allait le voir. C'était obligé. « Harry... Voici Louis. » Et, en même temps que ces mots il se tourna vers lui et leur regard se croisèrent. Il sentit une chaleur d'embarras grimper de ses chevilles à sa tête, une sueur froide glissa dans son dos et il força un sourire qui fut accompagné par un rire maladroit et gêné. Il leva ses yeux vers sa patronne pour essayer de se remettre droit dans ses bottes et ignora le plus possible le regard intense posé sur son visage, mais il était en train de brûler sa peau.

« Je m'en charge. » Il lâcha la porte et retourna dans le couloir, passant une main sur son visage. Ce devait être un rêve... il allait se réveiller. C'était une blague, ce devait être une blague... ou un mirage. Une illusion. Une hallucination ! Et pourtant, non. Louis sortit de la pièce en saluant la femme et ferma la porte pour ensuite se tourner vers lui en un éclair. « Qu'est-ce que tu fais ici ! » Chuchota Harry.

« J'élève des licornes bien sûr ! » Répondit Louis sur le même ton. « Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? J'ai été embauché évidemment ! » Il roula de ses yeux avec sarcasme et Harry dût se retenir de faire n'importe quoi. Il portait un joli t-shirt qui tombait sur ses clavicules et c'était déjà en train de le rendre fou, surtout si on ajoutait à cela un super jean droit, remonté en ourlets sur ses chevilles, et qui était troué sur son genou ainsi que sur une petite partie de sa cuisse.

Il détourna son attention pour partir dans l'autre sens, tirant Louis derrière lui. « Je n'avais vraiment pas besoin de ça maintenant. » Souffla-t-il, pour lui-même, ou pour Louis qu'importe. Il massa une de ses tempes. Cette journée venait juste de commencer et il en avait déjà assez. Ils ne se dirent pas un mot sur le court chemin qui les mena au bureau de Louis, de toute façon il n'était pas sûr de savoir quoi lui dire, après ce qu'ils avaient partagé il avait l'impression que ce serait bien trop stupide de juste parler de la pluie et du beau temps. Alors il se contenta de tenir la porte du bureau ouverte pour le laisser entrer en premier, puis il ferma derrière lui pour leur donner un peu d'intimité, même s'il n'était pas sûr que ce soit ce qu'il voulait. « Le code de ta session pro est sur le petit papier posé à côté de ton clavier, tu as l'interdiction de changer de code. » Expliqua-t-il rapidement sans lever ses yeux vers lui, posant simplement son sac sur le sol. Il voulait se poser et s'asseoir, chaque seconde qu'il passait près de lui rendait son oxygène plus lourd et difficile à respirer. Il voulait partir, se planquer, le fuir. Ce n'était pas juste qu'il arrive à avoir tant de pouvoir sur lui, juste en étant là, et que lui ne ressente pas la moindre difficulté à être à ses côtés. C'était déloyal. « Le code change toutes les trois semaines, le nouveau te sera remis à chaque fois. Il y a une compagnie sous-traitante d'informatique ici, ils ont quelqu'un sur place avec nous tous les jours alors si tu as un problème, son bureau n'est pas loin de celui de la boss, tu le trouveras vite. » Il croisa ses bras en se coinçant contre la porte, toujours sans lever les yeux. Il ne savait pas s'il avait honte d'être presque à deux doigts d'imploser et de baiser Louis juste là sur ce bureau, mais il savait qu'il n'avait pas du tout envie de le regarder en tout cas. « La patronne a dû te faire un topo sur comment on fonctionne ici donc je ne vais rien ajouter d'autre, l'imprimante se trouve dans le petit espace salon/cuisine de l'entrée. » Il marqua une pause et enfonça sa langue dans sa joue. Il ne lèverait pas les yeux, il allait partir, maintenant, et il allait s'asseoir à son ordinateur et enfin respirer comme il le fallait. « Bien, j'y v- »

« Tu ne vas vraiment pas me regarder ? » Il se figea dans son mouvement, son corps restant immobile, sa main pendue dans le vide alors qu'elle prétendait vouloir saisir son sac posé par terre. Il serra son poing. Non. Il ne pouvait pas le regarder. « Je ne savais pas que tu bossais ici. » Dit Louis. Il avait l'air tellement décontracté. C'était inacceptable. Comment ce pouvait-être si facile pour lui ? « En fait, je ne savais même pas que tu avais fait des études pour finir dans une entreprise comme celle-ci. » Il l'entendit s'asseoir sur le fauteuil à roulettes et il finit son mouvement pour attraper son sac. Il serra ses lèvres et attrapa la poignée pour aussi vite appuyer dessus et tirer la porte.

« Bonne journée. » Il ferma derrière lui et passa une main dans ses cheveux en restant une seconde là, sur le cul, complètement retourné. Comment le simple fait d'être dans la même pièce que lui pouvait à ce point titiller sa libido ? Comment le simple fait de l'avoir là, debout devant lui, beau, pouvait aussi facilement le déconcerter et lui donner envie de le coucher à plat ventre sur une table. « J'ai besoin d'air. » Souffla-t-il pour lui-même en partant vers son propre bureau. Pour s'y enfermer et ne plus en sortir de la journée. Jamais.

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