Un an plus tard...

Point de vue Riku

<< Riku...? appelle Dabi doucement. >>

J'ouvre péniblement les yeux, mais mes forces ne sont toujours pas revenues. Je peux difficilement distinguer Dabi penché au dessus de moi en me tenant fermement la main entre les siennes pour la réchauffer, le visage déformé par l'angoisse.

<< Reste avec moi, d'accord ?? >>

- Dabi... Où est Tora...?

<< Il est là... Tu ne l'entends pas...? >>

Sa voix et ses mains tremblent...

Tora est venu au monde une semaine avant le terme. Depuis un an, Dabi était d'accord pour avoir un troisième enfant, alors on a essayé de nombreuses fois. Jusqu'à maintenant, je n'avais jamais eu de problème de fertilité et maintenant que je voulais un fils, c'était si compliqué de trouver le moment... Mais ce n'est plus aussi grave, Tora est né le 1er mars de cette année et entendre ses premiers cris suffisent à me faire sourire.

L'accouchement a eu peu de complications, mais s'est déclenché trop rapidement. Si vite que j'ai dû accoucher en urgence à la maison... Il arrive des grossesses imprévisibles, peu importe les efforts qu'on fait pour que tout se passe convenablement. Heureusement, plus de peur que de mal, Tora n'a rien...

Dabi porte son fils pour me le présenter. Contrairement à Touya, son petit frère est si petit et pâle... Je pose ma main encore faible sur lui, il me parait si fragile...

- Il est doux...

<< Mais puissant, affirme Dabi. Ca se ressent. >>

- Tu trouves...?

<< Je peux confirmer que cet enfant est tout aussi résistant que l'aîné, affirme Rosa en se nettoyant les mains. Il a beaucoup d'énergie, j'ai eu du mal à le tenir. >>

Si tout va bien, pourquoi je pleure quand mes yeux se posent sur Tora...? Je suis heureuse, mais l'angoisse d'une mère est toujours plus fort... Tora ne pleure pas comme un bébé humain, mais plutôt comme un chaton qui vient de naître. Ses pleurs sont aigus et ressemblent à des miaulements. Au moment où Dabi le pose sur ma poitrine, je ne peux m'empêcher de l'enlacer et embrasser sa petite tête blanche alors qu'il cherchait le lait à l'aveugle.

Je souris en le regardant téter le lait et patouner ma poitrine, il se comporte comme un vrai chaton...

- Il est magnifique...

<< Tu vois ? Il n'a rien. >>

Je blottis ma tête dans le cou de Dabi en soupirant. Durant toute cette grossesse, je n'ai pas cessé de m'inquiéter sur la santé de Tora, j'avais peur de faire une fausse couche...

C'est plutôt moi qui étais le plus proche de la mort...

Ma santé s'est encore plus détériorée et mes actions quotidiennes se sont écourtées. Dabi est devenu plus sévère quand il s'agissait de mes heures de repos et n'acceptait aucun arrangement. Quand il était l'heure de me reposer, je devais l'écouter sans protestation. Touya et Alix sont encore si jeunes, mais ils aident déjà leur père pour les tâches ménagères et veiller sur Tora. Moi, je ne m'occupais seulement de l'allaiter.

<< Tiens Maman. >>

- Merci mon ange...

Touya me donne un plateau avec une tasse de thé avant de réajuster mon oreiller. Je caresse sa joue en baissant les oreilles.

- Tu n'es pas obligé de faire ça, pas à ton âge.

<< Quand ma mère est malade, c'est la moindre des choses pour qu'elle sente bien. >>

- ... C'est ton père qui t'as dit ça ?

Il secoue la tête et sourit.

<< C'est moi qui le pense. Moi je veux que ma mère vive très longtemps. >>

Il s'assoit près de moi pour se blottir dans mes bras. J'embrasse le dessus de sa tête en remerciement pour ce qu'il fait pour moi, même si je n'approuve pas qu'il inverse les rôles à son âge. C'est à moi de m'occuper de mes enfants quand ils sont malades...

<< Papa s'inquiète tu sais. >>

- Oui...

<< Papa se lève souvent dans la nuit pour pleurer dans la cuisine. >>

Je sursaute.

- Quoi...?

<< Je suis descendu pour boire un verre d'eau et je l'ai vu cette nuit, il pleurait tout seul... Papa a très peur de te perdre Maman. >>

Et il encaisse tout seul... Cet idiot...

- Où est ton père maintenant...?

<< Dans le jardin, il s'occupe de tes fleurs préférées. >>

Je me lève d'un bond en enfilant ma robe de chambre et court vers le jardin. Dabi... Pourquoi tu t'infliges encore ça, sérieusement ?! Je suis ta femme, pourquoi tu ne me parles pas de ce que tu crains ?! Je déteste quand il fait ça !

- Dabi !

Je le retrouve près des orchidées qu'il avait toujours l'habitude de m'offrir et semblait les regarder avec mélancolie, avant de se retourner vers moi et me réceptionner de justesse au moment où je me suis jetée dans ses bras. On tombe finalement tous les deux dans les fleurs alors qu'il me protégeait l'arrière de la tête.

<< Ca va pas, tu veux te fracasser la tête ?! >>

Je plaque ses poignets dans la terre en retenant mes larmes.

- Arrête de tout supporter tout seul et parle moi bon sang !!

<< Huh ? >>

- Tu trouves ça normal d'apprendre par le biais de ton fils que tu ne vas pas bien ?! Pourquoi tu ne me parles pas Dabi ?? Explique moi ce qui t'inquiète !

C'est la première fois que ses yeux me fuient de cette manière, comme s'il culpabilisait...

<< ... J'arrête pas de me dire que si tu es comme ça, c'est de ma faute... >>

- Quoi...?

<< Je regrette pas les enfants, mais plus le temps passe plus j'ai l'impression de te perdre... dit-il, les dents serrées de frustration. >>

Ma gorge se noue en même temps que la sienne, alors qu'il cachait ses yeux sous sa main pour m'empêcher de le voir pleurer. Un filet de sang s'écoule comme une larme au coin de son oeil. Je m'en veux de le laisser me voir aussi faible... Ca l'affecte plus que ça ne le rend fort...

Quand on aime, on est plus vulnérable...

<< J'ai peur Riku... Autrefois, je t'aurais dis que j'avais l'habitude de me retrouver seul, mais aujourd'hui c'est différent c'est devenu ma plus grande peur... J'ai peur de me réveiller un matin... et me rendre compte que tu n'es plus là... >>

Il supporte ça depuis quand...? C'est vrai, on est pas si différents. On craint tous les deux d'être séparés l'un de l'autre, peu importe quelles circonstances, mais Dabi en souffre bien plus que moi visiblement. Je lui ai tout donné, de mon amour à un foyer. Pour lui, je suis celle qui fait le lien entre nos familles et je me suis battue pour le sauver... J'étais prête à vendre mon âme pour lui, en sachant qu'il vendrait la sienne pour moi. Dabi a combattu seul pendant des années, aujourd'hui je lui offre cette vie de répit où il peut enfin être celui qu'il souhaite. Il a fait tant de sacrifices pour moi, juste pour avoir une famille dans laquelle s'épanouir. C'est tout ce qu'il demandait...

Une famille unie où personne n'est exclu...

Maintenant je me rends compte à quel point il craint de se retrouver tout seul à nouveau, il est complètement perdu sans moi. Sans nous...

- Dabi... Tu ne seras jamais seul...

J'essuie sa larme de sang avant d'embrasser sa main et la serrer contre mon coeur, sans pour autant retenir mes sanglots.

- Tant qu'il y aura de l'amour... Tu ne me perdras jamais... Mais je t'interdis d'avoir de telles pensées aussi néfastes, ne les endure pas tout seul... Tora n'est pas responsable de mon état, c'est moi... J'ai négligé ma santé à cause du stress et à vouloir m'assurer que personne ne manque de rien, que tout le monde soit en bonne santé... Mais je n'ai pas pensé à toi et à ce que tu pouvais ressentir. Pardonne moi...

<< Je t'aime trop pour te perdre... >>

Même son baiser est aussi triste et rempli d'angoisse, malgré tout plein d'amour. Je me blottis dans ses bras en embrassant sa tempe et caresse sa tête qu'il réfugie dans mon cou. Dabi a beau être père et gagner en âge, il reste au fond de lui cet enfant qui a tout perdu du jour au lendemain et si effrayé de replonger dans ses tourments... Après tant d'années après la bataille, il a fourni des efforts pour moi, pour se stabiliser émotionnellement et changer de chemin, PERSONNE n'a le droit de le juger.

Personne...

À suivre...

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Qui peut le juger
Qui peut aimer
Jusqu'à oublier sa vie

Qui peut tout donner
Tout abandonner
Un destin de maudit

Qui peut le juger
Qui peut aimer
Jusqu'à oublier sa vie

Il vit dans un monde qui s'éteint le jour

Où on peut tuer par amour...

Cette chanson me fait penser à leur histoire...