ÉPISODE 6

Je retiens mon souffle. Me parler ? Mais me parler de quoi ?

- Viens par là, me dit-il en me désignant le canapé.

Je m'assis, légèrement stressée intérieurement.

- Bon je vais vous laisser hein, ajouta mon frère, en partant en direction de l'étage, tout en me regardant comme si j'allais mourir.

Papa se racle la gorge, puis croise ses jambes et dépose ses mains sur celles-ci.

- Bien, tu sais que je commence à en avoir plus que marre de ton comportement.

Je ne répondis pas et me contenta de le fixer sans rien dire.

Il soupira.

- Arrête ça.

Je ne détourna pas les yeux. Je suis censée arrêter quoi au juste ?

- Bordel, arrête de me regarder avec cette expression !

Il se mit à hurler et donna un violent coup de main sur la plante verte qui se trouvait sur la table basse, le vase se brisa alors en milles morceaux, laissant couler toute son eau autour de la plante jonchant à présent sur le sol.

Je regarda le désastre sans rien dire.

Il se rassit, respirant fortement comme si il faisait tout son possible pour se calmer. Je remarqua également que sur la table basse, une bouteille d'alcool vide traînait. Il est sûrement bourré, à nouveau.

- T'es vraiment comme ta mère.

Comme... maman ?

Je releva mes yeux vers lui. Une expression de douleur intense sur le visage. Comment il peut me dire ça, comme ça ? Énoncer maman est tabou !

■FLASHBACK■

- Dis maman, comment ça se fait que quand papa il crit, tu ne cris jamais toi ?

Je vois le vent balayer ses longs cheveux noir. J'aurai beaucoup aimé avoir les mêmes que maman, mes cheveux à moi sont juste d'un marron très foncé !

Elle tourne son visage vers moi m'observant de ses grands yeux bleus. Au moins j'ai hérité de son regard !

Je n'arrive jamais à savoir ce que maman pense, son visage est toujours sans expression. Ça la rend très mystérieuse.

- Ça s'apprend avec le temps ma chérie, c'est une manière d'auto-défense, quand les gens ne savent pas ce que tu ressens, ça les déstabilise.

Elle me caresse doucement les cheveux, dans un mouvement affectif.

- Mais, moi quand je suis triste, je pleure, quand je suis en colère, je crie et quand je suis heureuse, je rigole ! C'est compliqué hein !

Ma petite voix d'enfant aiguë retentit dans la prairie où nous nous sommes posées avec maman, soudainement elle me sourit.

- Tu en as bien de la chance.

■FIN■

Je sens de l'eau couler sur mes doigts. Je porte ma main droite sur ma joue qui est inondée. Je pleure..? Je ne m'en étais même pas rendue compte...

Mon père sert les dents après ses mots durs, mais ne s'excuse pas pour autant.

- Arrête de pleurer, ça ne changera rien.

Il souffle et reprend.

- Je vais être clair, j'en ai marre de toi. Tu vas aller vivre chez ta grand-mère comme avant, ce sera plus simple pour tout le monde.

Chez ma grand-mère....? Murielle... Non c'est pas vrai, je ne veux pas y retourner.

- Je ne retournerai pas là-bas ! Je me suis mise à crier, sans m'en rendre vraiment compte.

Je me met à trembler comme une feuille.

À la disparition de maman, il y a 5 ans, j'étais inconsolable et mon père, n'en pouvant plus, m'a emmenée chez Murielle, ma "mamie". J'ai vécu un véritable enfer en ces lieux. Rien que d'y penser j'ai envie de hurler, je me demande comment maman avait pu faire quand elle était jeune pour vivre là-bas. Il ne peut pas m'y envoyer, il n'a pas le droit !

- Je ne t'ai pas demandé ton avis, tu y vas et puis c'est tout.

Tous les souvenirs de quand j'étais là-bas me reviennent, les soirs où je pleurais la mort de maman et qu'elle m'emmenait... Autre part, pour ne pas entendre mes cris, je revois le parquet grinçant, les milliers de toiles d'araignées, les rateaux, les pelles. Et j'entend des sanglots. Mes sanglots de petite fille, appelant Maman, les yeux ne voyant que du noir.

Soudainement je me met à respirer bruyamment, la tête entre mes mains en repensant à tout ça, je pleure tellement fort que je n'entend plus les cris de mon père me disant d'arrêter.

J'entend des pas précipités dans les escaliers et des bras se poser contre mes épaules et me secouer. Mais je n'entend rien, je n'entend que ma respiration saccadée et mes sanglots qui ne s'arrêtent pas.

Je refais une crise d'angoisse.

Soudainement, alors que j'avais l'impression de m'étouffer et que je ne sentais plus l'air traverser mes poumons, je sentis deux bras m'enlacer.

Je releva les yeux de mes mains et je vis Léo, me serrer dans ses bras. Je pense que ce n'est encore jamais arrivé.

- Hé p'tite sœur, calme-toi. Respire doucement. Tout doucement.

Il me parle d'un ton calme et apaisé, comme si il avait fait ça toute sa vie.

Sans vraiment m'en rendre compte, je suis ses indications et ma respiration se fait plus régulière. Je respire normalement à nouveau.

Mon frère se relève après m'avoir calmée et vérifié que j'allais bien et fait maintenant face à mon père.

- T'es vraiment con, tu sais très bien ce qu'elle a vécu là-bas, c'est même pour ça qu'elle est revenu ! Hurla-t-il, et maintenant juste parce que monsieur ne supporte pas son visage sans expression comme celui que maman avait, tu vas l'emmener chez elle ?! Je te ferai dire que c'est de ta faute si elle est devenue comme ça ! Si tu avais une putain de patience elle serait toujours aussi souriante ! C'est Murielle qui l'a rendue inexpressive ! Comme elle l'avait fait avec maman... Sa voix se brisa à la fin de sa phrase, comme si il allait éclater en sanglots.

Je suis bouche-bée, c'est la première fois que mon frère prend ma défense, et surtout la première fois qu'il tient tête à mon père...

- J'ai toujours fais semblant de ne rien voir, continua-t-il, j'ai toujours fais l'aveugle et le sourd devant tout ça ! Mais maintenant je ne peux plus, je ne peux plus voir ma petite sœur comme ça, je ne veux pas la voir se détruire, pas comme maman. Alors non, elle n'ira pas là-bas. Pas tant que je serai là.

Un silence magistrale résonne dans la pièce, plus personne n'ose même respirer.

Mon père est sans voix devant l'audace de mon frère. Il ne sait pas quoi dire.

Avant que papa ne retrouve l'usage de la parole, Léo me prend par la main et m'emmène à l'étage.

Il monte les escaliers deux par deux très rapidement, et j'ai beaucoup de mal à le suivre.

Finalement nous arrivons devant la porte de sa chambre, il l'ouvre, m'entraîne à l'intérieur et ferme à clé avant d'avoir vérifié que mon père ne nous ait pas suivit.

Il m'assoit sur son lit et mes yeux se baladent dans la pièce. À part son lit, aucun meuble n'est présent dans la pièce. Ses cartons sont au fond à gauche de sa chambre, empilés les uns sur les autres. Le contenu du carton le plus haut s'est même retrouvé sur le sol. On peut y voir plein de petites voitures, je les reconnais, c'est celles avec lesquelles il jouait quand on était petits. Pourquoi ils les a prit avec ?

Il s'assoit à côté de moi sur mon lit et me regarde, l'air inquiet.

- Ça va ?

Je hoche la tête, toujours un peu surprise de son comportement. J'ai du mal à m'habituer à sa soudaine gentillesse. Ça ne lui ressemble tellement pas. Je ne sais même pas si il a déjà été comme ça avec moi, un jour. Attend, en fait maintenant que j'y pense ça me revient, quand nous étions petits il me protégeait toujours.

Soudainement je me souviens de son comportement de grand frère quand nous n'étions pas plus haut que trois pommes. Anthony Peirera m'embêtait toujours, étant enfant, j'étais du genre à pleurer très facilement et il s'en amusait. Un jour, je jouais dans le bac à sable à l'école maternelle et il m'avait volé ma voiture préférée.

Oui quand j'étais enfant, je ne jouais pas aux barbies ou à la poupée comme toutes les petites filles comme on pourrait le croire, mais aux petites voitures.

Je me rappelle que mon frère avait tenté de lui reprendre alors que je pleurais et il était revenu, le visage rempli de sable, levant fièrement ma voiture en direction du ciel. Je me souviens l'avoir aperçu comme mon héros et je pensais qu'en sa compagnie rien ne pouvait m'arriver.

C'est étrange, je viens de me souvenir de cela seulement maintenant. Avant je pensais qu'il avait toujours été borné et un mauvais frère. Mais ça m'est revenu comme une évidence à présent.

Mais attend... Je reporte mon attention vers les voitures du carton. Ce ne sont pas les jouets de mon frère... Mais les miens !

- Niya ? Dit mon frère en faisant des grands signes de main devant mon visage, je sursauta, j'ai été nostalgique pendant quelques secondes.

- Oui, oui ?

- J'ai cru que t'allais faire un malaise ! Dit-il en soupirant de soulagement. Tu pensais à quoi ?

Un petit sourire prit mes lèvres et je m'allongea sur son lit.

- Rien du tout.

- Dis moi tout de suite à quoi tu pensais, ou sinon je vais te faire avouer...

Je haussa les sourcils pour le provoquer.

- Comment tu comptes t'y prendre ?

Un sourire diabolique se déposa sur ses lèvres.

- Comme ça !

Il me sauta dessus puis se mit à me chatouiller les côtes et je me mit à rire en lui criant d'arrêter.

Mais il n'arrêta pas et continua pendant une bonne heure et nous finirent par tomber de fatigue tous les deux.

Avant de réellement m'endormir, j'observa Léo, assoupi sur le sol, dormant comme un bébé.

Je me retourna dans son lit côté mur et remonta sa couverture sur mon corps, en souriant.

J'ai l'impression d'avoir retrouvé mon grand frère...

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J'espère que vous avez aimé ce chapitre ! On en apprend un peu plus sur le passé de Niya, la raison de son inexpressivité et son enfance à elle et son frère.

J'espère également que vous n'avez pas pleuré parce que je me rend compte qu'il est un peu triste maintenant héhé !

Sinon que pensez-vous de tout ça ? Dites-moi tout ! J'essaye de sortir les chapitres tous les jours ou tous les deux jours alors abonnez-vous et ajoutez ce livre dans votre bibliothèque si vous voulez être les premiers au courant quand un épisode sort !

Bisous bisous !

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