Le corps toujours étalé sur le sol, les yeux perdus dans le bleu du ciel,
elle songeait.
Elle s'était réveillée depuis déjà un certain temps, sans aucun souvenir de son rêve ou de la veille.
Elle se souvenait seulement de la dernière chose qu'elle avait entendue.
Une voix disant: "Elle n'a pas eu d'enfance". Non... elle ne se souvenait même plus de la voix, uniquement des mots. Ceux - ci l'avaient marquée.
La voix s'entend, les mots s'écoutent, la voix se marque, les mots se gravent.
En effet, elle était de ceux ayant foi en le pouvoir des mots.

Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas eu l'occasion d'en entendre ayant son nom pour destinataire... Elle ne connaissait même plus son nom. Elle ne se connaissait plus elle - même. Elle s'était devenue étrangère. Que cela importait - il de toute manière ?
Il était l'heure. Elle allait oublier de réfléchir, allait trouver de quoi se nourrir, puis se remettre à marcher. Vers où ? Nul ne le sait. Marcher, tout droit, c'était le meilleur moyen de sortir de cette forêt. Tout droit, et lorsqu'une rivière s'imposait, tourner à droite. Une fois la rivière s'arrêtant, tourner à gauche et continuer tout droit.
Telle était devenue sa vie.
Répartie entre rêve, pensées, chasse, marche et loisirs.
"Loisirs"... pas exactement ceux auquels on peut penser, mais plutôt des loisirs comme la pêche, la course avec la louve, l'escalade dans les arbres. Tout ce que l'on peut faire, en silence. Parfois aussi s'installait - elle à l'ombre d'un pin et écoutait - elle le chant de la forêt, l'appel de la nature.

Ce jour - là se déroula sans grande différence. Cependant, la faune se faisait plus rare. Un signe, elle approchait de... quelque part.
Bientôt, elle quitterait la forêt, retrouverait la date, l'heure, peut-être même un quotidien normal.
Elle n'en avait pas tellement envie...elle ne saurait même plus quoi dire à quelqu'un qu'elle croiserait. Le paysage était plutôt agréable à ce moment-ci. La lumière du soleil couchant se reflétait sur le vert des arbres. Une magnifique palette de couleurs associée au délicat chant des oiseaux, au souffle du vent faisant frétiller les feuilles ainsi que l'herbe en cette douce soirée, admirait-elle depuis le perchoir qu'était l'une des branches d'un des géants de la forêt.