~4~
L'abri qui nous avait été attribué était au dernier étage d'un des nombreux immeubles de ce coin. On nous avait donné un nombre précis de pièces d'or chacun ainsi qu'un calendrier commun sur lequel nous noterions à quels moments chacun irait acheter des provisions.
Nous nous retrouvâmes seuls. Tous étaient plus jeunes que moi; une p'tite de sûrement douze ans, un blondinet de quinze ans, et -le meilleur pour la fin- un mec de seize ans, aux cheveux bruns. Ce dernier était plutôt bien foutu. Normal, son unique moyen de transport étant son cheval.
Ils étaient tous un peu tendus, sauf moi. La p'tite se rongeait les ongles, à tel point que du liquide vital en coulait. Le blondinet la prenait dans ses bras, lui caressait les cheveux, la consolait. Moi, j'étais assise dans une chaise, position décontractée, tandis que l'autre -pardon- le brun était planté quelques mètres plus loin devant moi, et me fixait.
Droit dans les yeux.
Stop.
Son regard ardent me brûlait trop. Je ne devais pas le laisser pénétrer en mon esprit.
Aussi détournais-je les yeux.
Ce garçon était fort, très fort.
Je devais m'en méfier.
Je ne dormis pas de la nuit, je ne devais pas succomber... Cette faiblesse qu'est le sommeil... et puis, "le mal ne dors jamais".
Dans le noir, je me levais, dans la pièce, je marchais.
Je m'approchai du blondinet qui dormait à côté de la p'tiote. Toujours, il semblait la protéger, veiller sur elle, grâce à sa posture.
Je les observai un long moment, tout les deux, comme ça... la p'tite avait un sommeil agité, par moment elle se mettait à sangloter, à frissonner, et, instinctivement je suppose, l'autre la serrait plus fort contre lui.
Que de bienveillance... Je me détournai.
Toujours aussi discrète qu'une louve, je traversai la salle. Le silence planait. Le cavalier s'était assoupi en s'occupant de sa... de son cheval. Sa tête était posée sur... Le cou de celui-ci.
Je n'étais pas vraiment sûre de s'il dormait réellement. Aussi décidais - je de ne rien laisser passer.
Aucune émotion, aucun sentiment, aucun ressenti.
Être impassible...
J'attendis comme ça, des secondes, des minutes, des heures...
Puis las de les regarder, je pris ma décision.
On nous interdisait de sortir de l'immeuble pour des raisons de "sécurité".
Malgré tout, je pris mon sac-à-dos, me dirigeai vers la porte et me retrouvai dans le couloir des escaliers.
Je fermai la porte et descendis les marches. Il n'y avait personne que je croisai.
Une fois en bas, j'entendis des voix. Je me plaquai contre le mur et tendis l'oreille. Les voix continuaient, nul ne savait que je me trouvais là. Il faisait sombre dans cette nuit fraîche.
Soudain, les voix s'arrêtèrent.
Je me figeai.
S'ils m'avaient repérée, il était déjà trop tard pour moi.
Aussi décidais-je de jeter un œil à ce qui se passait de l'autre côté de l'angle du mur. Trois hommes se tenaient de part et d'autre de l'entrée de l'immeuble. Ils étaient vêtus de tenues de la couleur du mur, et portaient à leurs bras d'énormes armes que je ne réussis à identifier.
Le silence planait à nouveau, et je compris alors ce qui allait se passer.
Mais ce que je ne savais pas, c'était quand ça allait commencer, et surtout ce qui allait se produire ensuite. Je retins mon souffle un long moment.
Soudain, un cri retentit.
Un homme pénètre dans l'entrée, roule sur le sol et se relève.
En moins de deux, il dégaine et abat un des gardiens de l'entrée.
Il tire partout dans le mur et...
Je me sens attrapée dans le dos et attirée en arrière. Je bascule et tombe, dans le vide.
J'atterrie brutalement sur le sol et entends comme une porte se fermer. Toujours, les coups de feu retentissent.
Je ferme les yeux.
Je ferme les yeux mais ne parviens pas à oublier.
Je dois me concentrer.
J'écoute avec attention au delà de la fusillade.
J'ouvre à nouveau les yeux.
Il fait tout noir.
Des pas retentirent.
Je n'étais pas seule.
La personne qui m'avait poussée à atterrir ici devait sûrement m'y avoir rejoint.
Qu'allait-il m'arriver ensuite ?
J'en avais peur... peur de ce futur proche, peur de ce futur lointain... si j'en avais un.
Les pas étaient réguliers, presque hypnotisant.
Mes paupières s'alourdirent et... non.
Je ne devais pas sombrer.
Pas avant d'en savoir plus sur ou j'étais, pourquoi j'y étais, et si mon potentiel sauveur en était réellement un.
Mon rythme cardiaque s'apaisa jusqu'à revenir à la normale. Je me calmais et écoutais les pas.
Trop d'émotions durant la nuit.
Si je ne pouvais pas dormir, au moins me laissais-je bercer par l'apaisant son des pieds se posant sur le sol.
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